Dans Le Peuple Breton de juillet-août 2004 (revue de l’UDB, Union Démocratique Bretonne), organisation qui compte depuis les élections de 2004 des élus au Conseil Régional de Bretagne), on trouve une ardente défense du drapeau dit “gwenn-ha-du”, et tout à la fois une évocation des résistances qu’il a provoquées. La revue de l’UDB évoque : « les années de cendres, dans l’après-guerre des années 50 (…) Et plus tard quand le gwenn-ha-du n’était pas toujours le bienvenu, dans les manifestations pour le Joint français, ou d’autres encore. » (1)

L’origine du “drapeau breton” dit “gwenn-ha-du” (noir et blanc) mérite donc examen.

Après la Libération, il est effectivement interdit comme symbole de la collaboration avec l’occupant nazi. Avant 1939, on le trouve qualifié de « drapeau fasciste » (2), à l’occasion d’une intervention polémique d’un futur collaborateur des nazis, le barde Jaffrenou dit Taldir. Il faut savoir qu’en violation de sa condamnation à la Libération, Jaffrenou a été publiquement honoré en 2004 pour avoir créé, à partir d’un hymne gallois, l’ “hymne national breton”, appelé “Bro Goz” et « proclamé Chant national » (3) par les maurrassiens de l’Union Régionaliste Bretonne, à leur congrès de 1904.

Le drapeau national “breton”, complément de cet hymne, fut créé par Breiz Atao (Bretagne toujours), l’organisation qui doit être considérée comme la matrice de l’actuel “mouvement breton”. Au moment de la création de ce drapeau en 1923, nous verrons que les militants de Breiz Atao se rapprochent du réseau pangermaniste dont ils adoptent l’idéologie nordiste, ce qui permet de comprendre qu’ils adoptent la croix gammée en cette même année 1923. Après une éclipse, ils remettent la croix gammée dans leur journal Breiz Atao, le 29 janvier 1933, la veille de la prise du pouvoir de Hitler (préparée depuis début janvier) ; et ils se qualifient de « nationaux-socialistes » (4) avant 1939. « Ce drapeau, né de la plume de Morvan Marchal, premier directeur de Breiz Atao, a été présenté par un tour de passe-passe, à un public ignorant tout de la Bretagne, comme le drapeau breton traditionnel. » (5)

C’est ce que déclare en 1975 Olivier Mordrelle, dit “Olier Mordrel”, un des principaux organisateurs de Breiz Atao, l’organisation qu’a fondé Morvan Marchal, et pour laquelle ce dernier a créé le drapeau “gwenn-ha-du”.

Sommes-nous en face d’un drapeau “démocratique”, “anti-impérialiste”, de la bannière d’un “peuple opprimé”, ayant droit à “une réparation historique” ? Ou sommes-nous en face du drapeau de Breiz Atao, créé par un groupe raciste en fonction d’un projet nationaliste ?

Si le “gwenn-ha-du” est bien un « drapeau fasciste », comment ne pas en conclure que le « public ignorant tout de la Bretagne » chez qui il a été répandu a été cyniquement abusé. Pourquoi ?

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1) Le Peuple Breton, juillet-août 2004, p. 32, « Kenavo Louis Moreau », Pierre Morvan 2) War Du ar Pal, n° 3, Printemps / Eté 1939, p. 214 3) Dalc’homp Soñj, n° 1, « L’origine de l’hymne breton » par Taldir-Jaffrenou 4) La Bretagne Fédérale, « A Saint-Aubin-du-Cormier, sur la tombe volontairement ignorée », 1935, n°21, p. 2 5) « La Voie Bretonne », Olier Mordrel, p. 14)

[http://membres.lycos.fr/leguenne/etudes/gwenn_ha_du/]