Gilets Jaunes, notre soutien ne sera pas sans conditions

Nous, femmes, racisé-es […], avons entendu vos appels à rejoindre les lieux de blocage instaurés depuis le 17 Novembre. Vous nous dites de venir pour le pouvoir d’achat, la baisse des taxes et la fin du gouvernement Macron. Vous nous dites de venir pour le ras-le-bol général. Mais vous ne nous dites pas de venir pour la fin du racisme, du sexisme, de l’homophobie, ni pour les droits égaux. “Commençons par baisser les taxes et virer Macron, nous dîtes-vous, et après le reste ça viendra”. Devons-nous comprendre qu’à l’instar des richesses nos droits vont “ruisseler” ?

Oui, vos revendications nous concernent aussi, car payées en moyenne 25% de moins que les hommes et accablées en plus par les tâches ménagères courantes, nous sommes également les plus touché-es par la précarité. Mais à quoi nous sert la baisse des taxes si reste la discrimination au faciès ? La discrimination à l’emploi, à la recherche de logement ? Les féminicides, les agressions sexuelles ? Si nous ne pouvons marcher dans la rue avec notre être aimé -e sans craindre une agression ? Si nous ne pouvons sortir le soir sans craindre le viol ?

Nous pensons également aux meurtres des personnes transgenre (encore 300 cette année), aux meurtres des travailleur/euses du sexe. La baisse du prix de l’essence va-t-elle les empêcher ? Et l’augmentation du pouvoir d’achat va-t-il mettre fin aux terrifiantes politiques d’accueil des exilé -es, que les guerres et pillages de la France jettent sur les routes et qui viennent errer dans nos villes ? Va-t-il mettre en place les structures pour les personnes non-valides, qui écartées du marché du travail, oubliées, négligées, ne peuvent même pas toucher de salaire ?

Déjà votre mouvement s’est entaché d’actes terribles, et votre traitement a été si léger qu’il a provoqué notre colère. “#notallgiletsjaunes, c’est la faute des médias, vous divisez, y’en a pas eu tant que ça…” qu’est-ce qui va ruisseler au final de votre mouvement, si ce n’est votre mépris inconscient de nos réalités ?

Nous sommes vos sœurs, vos mères, vos épouses, vos voisines, nous vivons ensemble et nous voulons vivre en bonne entente avec vous. Pourquoi nous dénigrez-vous ainsi ? Pourquoi nous tuer, nous rabaisser, nous humilier et enfin nous oublier ?

Une partie de vous nous hait, veut notre mort, veut notre humiliation, veut des droits pour elle seule, les étrangers/ères dehors et les femmes enfermées au foyer, et veut nous cantonner aux besognes dont personne ne veut, à être leur laquais. Votre colère d’avoir été rejeté -es hors de l’ascenseur social va-t-elle se faire à nos dépends ?

Gilets Jaunes, nous n’irons pas sur vos blocages, nous n’irons pas dans vos manifestations, nous n’irons pas marcher avec vous, tant que vous voudrez nous reléguer derrière.