La projection a eu lieu dans la cour intérieure d’une maison d’habitation collective, le Kapilo, située au centre ville de Toulouse. Le collectif des habitant-e-s a porté avec nous cette initiative. Nous étions une quarantaine de personnes réunies depuis la fin d’après-midi pour débattre ensemble et témoigner de notre solidarité avec la lutte des parents des disparus mexicains.

Ce qui s’est passé ensuite : En plein milieu de la projection, peu avant 22 h, trois agents de la police municipale ont fait irruption dans les lieux invoquant un appel d’un riverain se plaignant de nuisances sonores. Par respect du voisinage nous avions déjà baissé le son au cours de la projection. Nous l’avons à nouveau baissé sur le moment. Après avoir signalé aux policiers que le volume avait été baissé, les habitants du lieu leur ont demandé de sortir, évoquant le caractère privé du lieu dans lequel ils s’étaient introduit. A ce moment-là, le ton des agents est monté, mettant en question le droit des personnes et plus particulièrement celui des habitants à occuper les lieux.

Désormais, il n’était plus question de nuisances sonores. Les agents municipaux se sont mis à exiger des habitants une preuve légale de leur droit à demeurer dans les lieux, cherchant également à intimider des personnes en particulier, en leur adressant des remarques provocatrices et menaçantes. Ils ont par ailleurs appelé des renforts.

Il a été finalement obtenu que la police sorte du bâtiment et qu’un document relatif à la situation légale de l’occupation des lieux soit présenté au porche d’entrée. Au moment de présenter le document, les agents ont tenté de l’arracher des mains de la personne qui le tenait. Dans ce moment d’incompréhensible tension, les renforts de la police municipale arrivés devant l’immeuble ont fait usage de gaz lacrymogène contre toutes les personnes présentes dans l’entrée, de manière frontale et massive, plongeant la cour intérieure ainsi que tout le voisinage dans un insoutenable nuage de gaz. Plusieurs personnes ont été attrapées et tirées vers l’extérieur de l’immeuble par les policiers. En l’espace de quelques secondes, la scène a débouché dehors sur l’interpellation par la force de notre camarade qui avait essayé avec d’autres de gérer cette situation absurde. Il a été violemment plaqué au sol, frappé et embarqué au commissariat.

Il nous a été impossible d’obtenir la moindre nouvelle de lui jusqu’à mardi matin. Les circonstances de sa garde-à-vue restent totalement obscures étant donné qu’aucune personne proche ni avocat n’a été contacté. Mardi matin il a été présenté au juge dans le cadre d’une comparution immédiate en présence d’un avocat commis d’office. Il a refusé de comparaître, souhaitant préparer sa défense.

Les chefs d’inculpation : outrage, rébellion et violence à personnes dépositaires de l’autorité publique.

A la surprise générale le juge a prononcé un mandat de dépôt à la maison d’arrêt de Seysses jusqu’à la date de son procès le 18 octobre, invoquant le risque qu’il “réitère” le délit reproché.

Notre camarade se trouve, à l’heure actuelle, en prison.

Le collectif El Cambuche, organisateur de la soirée, est un collectif de diffusion de documentaires engagés sur les luttes sociales et politiques d’Amérique latine. Nous proposons régulièrement des projections dans différents lieux, avec un public très divers. Nous étions réunis pour dénoncer les violences de l’État mexicain commis contre sa propre population et pour participer à un élan de solidarité avec les familles des disparus d’Ayotzinapa, partagée en cette période par de nombreuses organisations à travers le monde.

Nous exprimons notre totale indignation face à cette violation manifeste de notre droit à nous réunir dans un espace à caractère privé, là, où bon il nous semble, et dénonçons avec détermination l’intrusion de la police municipale dans notre soirée. Nous dénonçons l’emploi de gaz lacrymogène contre les personnes réunis dans les lieux, l’emploi totalement inapproprié de la force et le déchaînement de violence policière dont nous avons été la cible ce soir là à Toulouse.

Nous sommes très inquiets de la continuelle dégradation de l’état de nos droits fondamentaux qui se constate actuellement en France.

Nous exigeons la libération immédiate de notre camarade et l’abandon de toutes les charges qui pèsent sur lui.

Nous demandons également à toutes les personnes qui étaient présentes de se manifester le plus rapidement possible auprès de notre collectif pour témoigner dans le cadre de la défense judiciaire de notre camarade de ce qu’ils ont vu ce dimanche soir.

Le collectif El Cambuche