La façon de comprendre un squat, a été, est et doit rester un outil puissant dans les mains des compagnons(gnes). Cet outil évolue dans l’espace-temps, et donc nous pensons qu’il est nécessaire d’en présenter une paire de “points” historiques. Le squat, comme infrastructure stable, fait sa première apparition en Grèce, mais aussi dans de nombreux autres pays d’Europe et au-delà au cours des années 70.

En Europe en général et en Grèce en particulier, une série d’occupations qui ont eu lieu tout au long des années ont été bien plus que des lieux utilisés pour le logement ou pour accueillir des formes de divertissement alternatif. Ils étaient, au contraire, des cellules politiques vivantes et respirantes prenant parfois des caractéristiques agressives.

A Barcelone, nous trouvons le squat “Can Masdeu” dans lequel les occupants ont fait face durant une année à une dure répression. Seuls, onze occupants ont résisté contre 100 flics à qui l’on avait ordonné d’expulser les squatteurs, qui refusaient de livrer le squat sans combattre. L’un des mouvements les plus vigoureux fut également celui de Copenhague. Durant mars 82, et alors que le mouvement squatter grandissait de plus en plus, l’affrontement avec les autorités a grandi proportionnellement.

Cette même année a eu lieu le premier affrontement violent entre police et squatters. Cet acte a été le début de la fin de la résistance pacifique contre l’expulsion. De plus en plus de squats de Copenhague allaient suivre. Au cours de Juin 1986, le conseil municipal a décidé d’expulser le squat « Ryesgate 58 »  et les occupants commencèrent à préparer leurs défenses. Ce qui arriva ensuite fut la plus grande confrontation entre squatters et forces de police qui avait eu lieu. Environ 200 compagnons(gnes) se sont rassemblé(e)s devant le squat et firent des barricades. Sur une grande banderole, ils ont écrit: «Nous préférons mourir debout que vivre à genoux. » Cinquante flics reçurent une pluie de pierres et de boules de pétanque tirés par des catapultes. La bataille a duré 9 jours sans que la police ne puisse vaincre la résistance des squatters, jusqu’à ce que finalement, une opération de grande envergure fût organisée avec quelque 1500 flics et des bulldozers pour détruire le bâtiment. L’un des symboles les plus importants du mouvement des squatters fût également “Ungdomshuset”. Ses occupants résistèrent vaillamment contre les forces de l’Etat qui tentaient de déloger les squatters. Ils déclarèrent: «Nous n’avons pas d’autre choix! Il faut défendre ce que nous avons créé au cours des 24 dernières années! Ungdomshuset perdurera –  Qu’ils expulsent la mairie !», et ils se battraient jusqu’à la fin pour transformer ces mots en réalité.

1981 serait l’année d’ouverture pour les squats en Grèce. Quelques jours après que le parti PASOK est arrivé au pouvoir, s’est ouvert le premier squat en Grèce, à Exarchia, plus précisément dans la rue Valtetsiou. Le squat Valtetsiou fit face à la répression quelques mois plus tard avec l’expulsion opéré par la police, alors que les squatters étaient frappé(e)s et detenu(e)s. Il s’en est suivi d’autres ouvertures de squats, tous faisant face au même sort. Le 15 Avril 1988, un groupe de personnes décide d’occuper le bâtiment abandonné dans les rues Drosopoulou et Leleas Karagianni, une propriété de l’Université d’Athènes et du ministère de l’Éducation. A partir de ce jour et pendant 27 ans, le squat connu comme Lelas Karagianni  continue de faire partie du monde des occupations. En 1989, sur la place Victoria, une ancienne école à l’intersection des rues Heyden et Acharnon est convertie en squat et prend le nom de “Villa Amalias”, ce sera la deuxième occupation la plus longue en Grèce. Finalement il est expulsé après 23 ans d’existence le 20 Décembre 2012, environ au même moment que le squat ‘Skaramaga “(Janvier 2013). Malheureusement, notre réponse à ces expulsions ne fût pas aussi vigoureuse que dans les squats « Ryesgate 58 » et « Ungdomshuset » dans lesquels les occupants résistèrent à l’oppression et combattirent pour protéger ce qu’ils considéraient comme faisant partie de leur vie.

En ce qui nous concerne, l’occupation est un point de référence parce que c’est là que nous façonnons nos objectifs d’offensive et que nous organisons notre résistance contre toute forme d’autorité. Les attaques contre les squats sont une pratique inter-temporelle, à la fois de l’Etat et de divers groupes fascistes.

Dernièrement ce type d’attaques ont été fréquentes et de diverses formes. Le rôle clé dans ces attaques appartient à l’Etat et ses institutions, qui, sous le prétexte de l’utilisation de la propriété publique sont constamment en train  de menacer d’expulsion, comme cela est arrivé dans le cas du “Squat 111” ou “Squat Orphelinat” ou même en rendant réelles les menaces comme dans le cas du «squat Centaure» qui fût littéralement démoli. Nous devons également garder à l’esprit les cas de “Acta et Verba” à Giannena et « Dougrou »  ?à Larisa (lors de la première tentative d’occupation) qui ont tous deux été expulsés. Cependant, ces derniers temps les attaques qui ont eu lieu contre les squats proviennent principalement de groupes fascistes opérant pour l’Etat. L’explosif posé dans le “Squat Kouvelou”, l’invasion de “Elaia”, les attaques incendières sur “Agros”, les doubles attaques incendière sur les « Squat Zaimi », « Squat Terra Incognita » et « squat Vancouver », l’attaque du “squat Analipsi” et du “squat Strouga” et même les attaques sur le centre social autogérré “K * VOX”. Ces attaques peuvent avoir été un échec total et absolu, prouvant encore une fois la stupidité de cette racaille fasciste, cet échec ne nous calmera pas mais au contraire nous donnera l’opportunité d’attaquer ceux là mêmes qui nous ont attaqués. Avec les exemples récents s’est développé l’oppression étatique contre les squats et également contre les infrastructures de solidarité autogérés.

    Le 19 Avril tôt dans la matinée, la police a envahi à Chios le « Soli-Café », infrastructure de solidarité avec les migrants, arrêtant également les migrants et celleux qui expriment leur solidarité. En outre, 3 jours plus tard, ils y ont aussi mis le feu.

    Le 20 Avril au “Camp sans frontières” à Mytilène, fût mise en œuvre une expulsion. 384 migrants furent detenu(e)s et condui(te)s au centre de détention Moria, tandis que 19 individu(e)s qui exprimaient leur solidarité furent detenu(e)s au poste de police local pour une paire d’heures avant d’être finalement liberé(e)s.

    Le 21 Avril ils envahirent et expulsèrent le squat « Persiadou 8 ». Trois personnes furent arrêtées pour des infractions mineures pour « dommages, perturbation de la paix intérieure et installation illégale de l’électricité ».

    Le 22 Avril au matin, la police a expulsé le squat « Coin Tortuga » à Thessalonique.

Entant qu’activistes anarchistes de Rethymno, nous avons décidé il y a sept mois d’occuper un bâtiment privé dans la vieille ville de Réthymno. Notre objectif est de répandre la lutte anarchiste polymorphe (de la façon dont nous la définissons dans notre contribution au Décembre Noir). Après avoir participé à l’appel de la coordination des actions pour le Décembre Noir, et après s’être rendu compte du résultat de nos actions, nous reconnaissons leur influence positive et donc nous voulons les maintenir et les développer au fil du temps.

Nous proposons que notre prochaine étape soit un appel à l’importance du mouvement des squatters. En tant qu’anarchistes nous considérons les squats comme des tirs directs à la structure socio-économique de la propriété et de ses produits.

Nous, comme Déconstruction Continue, bien que nous ne soyons pas un squat, soutenons, faisons avancer et défendons tous les aspects de la lutte anarchiste. Nous comprenons donc les occupations comme un outil important de la lutte anarchiste, comme des lieux dans lesquels les compagnons(gnes) peuvent se rencontrer ou parler entre elleux et comme des espaces libres qui produisent de la théorie et de l’action, une autre étape vers la libération totale. La bibliothèque anarchiste Teflon participe également à l’appel, bibliothèque où depuis le 29/10/2015 les compagnons(gnes) occupent l’ancienne cuisine du sous-sol de Géographie et lentement mais surement sont en train d’y construire une bibliothèque qui aspire à être le début d’un rejet généralisé de l’existant et de la destruction de l’état pourri.

Dans une tentative d’être plus spécifiques, il est à noter que les raisons et la façon dont nous devenons dangereux(ses) se définissent par nos propres désirs et pratiques, et non par un raisonnement systémique. Dans le cadre de la poursuite de la lutte anarchiste multiforme nous choisissons et nous espérons que nos squats soient des barricades qui propagent et aiguisent tout conflit contre le système. Nous pouvons y arriver si nos squats sont des foyers de lutte et de diffusions des idées radicales, des lieux qui produisent la théorie insurrectionnelle et des lieux de rencontre, de réunion et de connexion, ainsi, en développant des compagnonnages la théorie peut se convertir en action. Les squats sont pour nous des points focaux de liberté occupant le temps et l’espace à l’intérieur même de la structure sociale pourri. Nous voulons que se soient des outils pour le développement ultérieur de la lutte, par tous les moyens disponibles, sans se couper des caractéristiques violentes qui peuvent être présentes dans la conception d’un squat ou dans le mouvement anarchiste en général. En ce qui concerne les affirmations au sujet des «points focaux d’illégalité” nous voulons signaler à celleux qui sont encore enfermé(e)s dans la dichotomie systémique de légalité, que nous sommes et demeurerons défenseurs de l’illégalité. Nous sommes contre tou(te)s celleux qui tentent de présenter les squats comme de simples lieux inoffensifs de rencontre et de divertissement alternatif.

Le monde corrompu et imaginaire de la culture dominante est dédiée à la promotion des relations éphémères, une répétition sans fin d’information erratique à travers les médias et le divertissement plastique grâce à des modèles de conduite que très peu peuvent atteindre mais qui pourtant sont présentés comme une nécessité absolue. D’autre part, nous nous engageons à favoriser la contre-information, la contre-culture et les expressions autogestionnées de création et d’art. Grâce à ce cadre, nous nous organisons pour exprimer et satisfaire à nos besoins, avec des exemples basiques tel que les stations radio auto-organisées, les collectifs typographiques, les bibliothèques autogérés, les concerts sous la logique de “Fais-le Toi-Même” et de nombreux projets similaires qui ont lieu à l’intérieur des squats. De cette façon, nous nous considérons consciemment comme les moutons noirs de leur civilisation commercialisée et corrompue.

Pour toutes ces raisons et possibilités évoqués, et puisque nos squats existent comme terrains solides à l’intérieur même de la structure sociale,  nous attendons la répression qui sera menée contre nous de pied ferme. Un rôle crucial dans cette répression sera joué par l’Etat et ses mécanismes. Il ne pourrait pas en être autrement puisque nous nous battons pour sa disparition.

L’objectif des procédures répressives de l’Etat est d’éloigner les squats de leur sens véritable, ainsi que de la lutte anarchiste opérante en leur sein, en ciblant constamment les compagnons(gnes) qui en font partie. Dans le même temps, les groupes fascistes dirigés par les mafias et les voyous organisés des présidents des sociétés anonymes de football, assument la tâche de nous attaquer en marge des mécanismes institutionnels normaux. Ce type d’attaque, qu’il soit méticuleusement organisé ou aléatoire, ne doit en aucun cas rester sans réponse.

Il est évident que la plupart de ces groupes sont des fascistes orthodoxes ou autonomes qui, en parfaite collaboration avec les forces gouvernementales, assument la tâche de nous attaquer en marge de la «loi». Il s’agit d’une réaction normale de la part de cette racaille fasciste puisque nous nous positionnons contre tout ce qu’ils représentent.

Dernièrement ces attaques sont devenues plus fréquentes. La plupart d’entre elles furent des échecs total et absolu, cependant, nous ne pouvons pas nous calmer ou le prendre à la légère. Au contraire, nous devons nous organiser et défendre nos structures encore mieux afin de pouvoir préparer nos “réponses”.

Les imbéciles des médias sont  un catalyseur de ce mécanisme bien organisé. Une de leurs tactiques les plus courantes consiste à désinformer, ce qui a pour résultat le signalement des compagnons(gnes) ou des infrastructures, en plus de séparer la lutte anarchiste de sa signification. Les récepteurs passifs de cette propagande sont les civils domestiqués qui, à cause de leur indifférence d’à peu près tout, légitiment et très souvent même applaudissent de telles attaques contre les migrants, les squats, les anarchistes et quiconque voudrait mettre en danger leur paix et leur uniformité. A tous ceux-là nous devons répondre par une constante guerre ouverte; rien ne restera sans réponse.

Nous considérons que la question de l’occupation de squats est très vivante et qu’en faire le tour pourrait prendre beaucoup plus d’un mois. Toutefois, ce délai peut être bénéfique à la densité et au niveau des actions directes, et donc nous proposons la coordination de l’action anarchiste multiforme sous cette thématique tout au long du mois de mai.

Notre choix de lancer cet appel à ce moment particulier a été déclenché par la dynamique du Décembre Noir, qui a revu le sens de l’organisation en mettant en place un réseau informel de coordination et de contraste contre le formalisme et la «pureté» idéologique. Cette coordination a grandi et a dépassé les frontières grecques et a également dépassé les obsessions idéologiques puisque des individu(e)s ou des groupes avec des différences idéologiques ont répondu à l’appel du Décembre Noir. Cette diversité fût l’amplificateur de la dynamique expérimentale.

Une autre raison pour laquelle nous avons décidé de lancer cet appel maintenant est la recrudescence de la répression contre les squats et les compagnons(gnes) évoluant en leur sein. De telles tentatives, réussies ou non, ne doivent pas nous laisser indifférent(e)s ou inactifs(ves). Aspirant à créer les événements plutôt que de subir leurs directives, nous pensons que l’action agressive et immédiate contre l’État doit remplacer notre position défensive. Ces attaques doivent également être dirigées contre les groupes fascistes et contre tout type de mafia ou tout groupement qui se positionne contre nous.

Dans la période de temps choisie, nous pouvons élever le rôle des squats dans le mouvement anarchiste à travers des activités, des débats, des distributions de tracts, des manifestations et de tout instrument à notre disposition que nous fonctionnions comme individus, squats ou groupes. Dans le même temps, ce sera l’occasion pour nous même d’entamer un dialogue sur les caractéristiques des squats en les redéfinissant de façon agressives et en aiguisant nos propositions, ainsi qu’en diffusant nos coordinations et réseaux. Notre objectif fixé est de ne jamais laisser tomber un squat sans le combat, fait de résistance collective et d’attaques, mais aussi fait du dépassement de la logique ancrée dans les squats qui ne visent qu’à la longévité de leur existence. Nous espérons que cet appel permettra d’élever le niveau de nos défenses et sera le point de départ d’un certain nombre de débats et d’actions directes, coordonnées ou non, et qu’à partir de maintenant elles soient des caractéristiques permanentes de notre tactique. Nous espérons que cet appel soit soutenu et amplifié par chaque squat, groupe ou individu qui choisiront d’agir par rapport à ce sujet sans ménagement, ayant déjà participé au Décembre Noir ou décidant de participer à l’Articulation Insurrectionnelle de Théorie et de Pratique.

Positionnons clairement les squats une fois de plus en public comme des lieux dans lesquels nous “vivons” et “respirons” en les défendant en tant que tel, par tous les moyens possibles.

Squat Papamixelaki, partie prenante de l’Articulation Insurrectionnelle de Théorie et Pratique.

Déconstruction Continue, partie prenante de l’Articulation Insurrectionnelle de Théorie et Pratique.

Bibliothèque Anarchiste Teflon, partie prenante de l’Articulation Insurrectionnelle de Théorie et Pratique.

Radiofragmata, station radio auto-organisé.