BRING THE ZAD HOME

Jour chaud dans la métropole Nantaise, là où ne fleurissent que les auréoles de sueur sous les aisselles, là où l’ombre est à vendre à la terrasse des cafés.
Aujourd’hui au tribunal, un procès, comme tous les jours, rien d’original, si ce n’est les RG qui scrutent la salle pleine… ici comparaissent quatre personnes, suspectés d’avoir participé à la manif du 22 février, celle qui avait « transformée la ville en champ de bataille »,celle qui avait « déferlée telle une horde de vandales ». En gros d’avoir participé à cette manif qui pendant une journée a détrônée le charme désuet de cette ville où rien ne devait se passer et a tenue la rue en lui laissant ses traces.
  Au compte goutte longtemps après, des gens se  font arrêter et doive    nt répondre de tout ce qui s’est passé. Seule, la juge fait semblant de croire à une enquête liée aux faits, les dossiers sont essentiellement ficelés par des agents du renseignement. Ce qui leur donnent une assurance aussi irrationnelle, qu’elle repose juste sur la certitude qu’ils ont d’avoir affaire à des gens dangereux [pour définition de cette catégorie asociale en extension se référer au dictionnaire interne des agents du renseignement ou la définition de gens dangereux s’étend sur 737 pages.] Bref, le verdict tombe ,9 mois de prison avec sursis pour l’un, sans autre preuves que des photos agencées de manière à altérer le jugement, pour les autres des peines de sursis aussi. Dehors on est en nombre. Dans la même après midi, vont comparaitre encore 4 autres personnes, accusées « d’association de Malfaiteurs »,  (c’est a dire d’avoir pris part activement au rassemblement de soutien devant le tribunal), l’une d’elle sera même mise en détention préventive jusqu’à leur procès, le 18 juillet,
Il y a une banderole « Tous les jours le 22 fevrier », un bar et des petits gâteaux, c’est à « ce rassemblement  armé » que les  4 personnes arrêtées 2 jours avant, vont devoir se défendre   d’avoir appeler, devant le même tribunal le 18 juillet… Le soleil tape encore quand on quitte le parvis du tribunal et sa rangée de CRS,on se sépare …

    ET PUIS PLUS TARD….
Nuit chaude dans la métropole Nantaise, les écrans télévisés annonce le match Uruguay-Angleterre, la ville est pleine de supporters indistincts, qui crient autant pour le spectacle que pour une action en particulier.
 Et, à deux pas de la place Graslin, un ancien collège est traversé de lumières fugaces. Un peu tard pour les cours du soir, ça n’en est d’ailleurs pas .Il y a un, puis deux, puis trois équipages de bac ahuris qui s’approchent et s’éloignent, indécis. « Il n’y a aucun cambrioleur au monde qui ferait tant de bordel ,chef, à l’intérieur il y a facile 60 personnes. »
60 personnes qui n’ont plus vu d’école de si prés depuis Mathusalem, ou au moins depuis l’année du CPE. Voir et sentir sous son meilleur jour le territoire libéré qu’est un collège sans profs ni pions, voir comment y’a de la place pour faire un concert du tonnerre et regarder encore toutes les horreur de l’éducation scolaire, ses pupitres usés par le front des dormeurs, les photos cochonnes oubliées dans le vestiaire de la salle des profs (c’était pourtant un collège catholique, Notre Dame Du bon Conseil il s’apelle…)
 Sous les vestiges de l’institution, l’espace est immense, y’a autant de possibilités de se le réapproprier que de bras pour les saisir. L’idée première, c’est faire un concert, une petite sauterie, faire trembler les murs, hurler  les DBs,  que d’un bout à l’autre de Nantes personne ne puisse dire que la ville est sous contrôle, que tout est calme. C’est aussi l’affirmation semblable à ce qui se sait depuis longtemps que la ZAD est partout. Comme le liseron, elle élargie les brèches du présent, rend tangibles les failles du pouvoir, pour qu’on s’y installe, durablement.
            Ce vieux collège, plein de poussière de craie, on a commencé a y prendre nos aises, le carrelage de la salle de bio aussi confortable qu’un matelas en plume d’oie. Et au matin pas d’alerte, pas de flic aux alentours. Alors  les gens prêt à se rassembler dehors ,au cas ou, prennent un peu de largeur. Dans tous les sens les équipes se dispersent, chercher du matos, à manger, faire des banderoles, tout cleaner. Les tables et les chaises font d’honnêtes barricades, des potes sortent, investissent notre cour de recréation. Passée la matinée on est un peu moins aux aguets….
           Mauvais calcul, à 14H00, tout se bouscule, à droite à gauche les cars de flics déboulent, cisaillent le cadenas du portail et chargent dans la cour,les gens escaladent le mur pour se réfugier aux étages, les flics saisissent la dernière à grimper et la tirent à eux,on apprendra plus tard que ces sales maquereaux débiles lui ont mis un couteau dans la poche pour la charger d’un port d’armes.
 Dans le squatt, l’humeur change, on est encerclé, on peut le voir des étages, et les histoires d’expulsion qui  circulent à Nantes laissent présager un sale moment à passer. les flics ont pas l’air de savoir le nombre qu’on est. Si bien qu’à la première tentative de rentrer, nos barricades et le bruit qu’on fait en gueulant les découragent visiblement. Et puis ils ont vraiment pas l’air nombreux, aujourd’hui c’est un jour particulier, match France-Suisse, ça demande un peu d’effectifs, demain la fête de la musique, ils n’ont peut être pas assez de bidasses pour tous les fronts qui s’ouvrent inopinément. Si on tient jusqu’à 22 heures, ils lâcheront l’affaire…
Ils tentent de défoncer une fenêtre et là, voyant qu’elle est défendue, nous gazent. Alors l’humeur change encore,à moitié suffocant, à l’intérieur on panique, maintenant on serait presque mûrs pour sortir, pour laisser tomber le concert mais c’est là qu’on voit qu’ils ont condamnés la porte donnant sur la rue et qu’on ne pourra plus sortir que suivant leurs conditions ou attendre la bonne occasion.
Des deux cotés de la rue affluent des amis venus soutenir le squatt, tous les voisins sont pendus aux fenêtres, y’a même des journalistes, toujours prêts à s’émouvoir.  La pression se resserre sur la police, à qui la seule pensée que ce squatt est lié a la ZAD suffit à donner des frissons, et les gens se massent de plus en plus, bloquant bientôt la circulation du boulevard voisin.
 Le reste de la journée sera tiraillée, comment sortir /pouvoir rester. Jusqu’à ce que vers 18h30, après plusieurs heures de siège, après que les flics, acculés entre cette situation débordante et les ordres de leurs supérieurs tentent de négocier notre sortie,  et qu’on eu tournées et retournées toutes les possibilités ; On décide de faire les gens de bonne volonté , de sortir par la porte de derrière et de rentrer dans leur souricière. Ils veulent toutes nos tronches en photos et qu’on leur déclare un nom, nous promettent aucune arrestation et la libération de la personne arrêtée. En attendant que nos barricades cèdent, chacun a le temps de penser à sa lointaine famille, à ces étranges patronymes que nos ancêtres nous ont légués, et qu’il faudra savoir épeler sans bafouiller…
Alors, ils disquent une porte, dégagent la barricade qui la protégeait et on sort deux par deux.

Il est évident que certaines personnes se sont plus exposées que d ‘autres et qu’au fil des semaines a venir, il peut y avoir des suites à cette affaire. Alors, il faut rester vigilants, d’autant plus que des suites  il y’en aura de notre coté, la maison de la ZAD a tenue une journée, elle est vouée à renaître. Le fait que cette tentative ait durée aussi peu de temps n’est en rien une défaite, déjà parce qu’elle décale le conflit au coeur de la ville, parce qu’elle prouve que la situation est toujours brûlante, qu’à travers nos rencontres, la « zone de non droit » que constitue la ZAD n’attend que de s’étendre, et cela malgré les arrestations.

Et la prochaine fois  faudra qu’on tienne pour pas devoir décommander Magic System !!