Quelques petits rappels

Rappelons que sur le terrain, en 1994, les conseillers généraux de Meuse et Haute-Marne mettaient le doigt dans l’engrenage de l’enfouissement des déchets nucléaires dans leur sous-sol. Comme d’habitude, les élus locaux furent achetés par les nucléocrates qui progressivement vont tenter de s’implanter dans la population en jouant la non-information et la désinformation, en pratiquant le chantage au développement économique, en cachant l’enjeu majeur de l’enfouissement définitif des pires déchets nucléaires devant permettre la poursuite d’un programme électronucléaire. Le 19 août 1999, Mme Voynet ministre verte de la Gauche plurielle au Pouvoir signait le décret autorisant le laboratoire de Bure contre, paraît-il, un moratoire sur l’EPR de Flamanville. On a vu ce que cela avait donné…

La construction de ce laboratoire a débuté en 2000 dans le cadre de la loi Bataille de 1991 relative aux recherches sur la gestion des déchets radioactifs de haute activité. L’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) conduit les expériences dans le laboratoire et soutien la faisabilité d’un stockage géologique à une profondeur entre 300 et 500 mètres sous terre. La stratégie de lutte des opposant-e-s est alors classique : Informer les populations, faire signer massivement une pétition demandant un référendum et tenter de convaincre des élus. En 2005, 45 000 électeurs Haut-Marnais et Meusiens demandent la tenue d’un référendum. Les élus des 2 départements s’assoient dessus…. Des recours juridiques sont de nombreuses fois déposés… Ils sont tous rejetés ! Il y a bien eu un « débat public national » en 2005 sur la gestion des déchets nucléaires qui mettait en avant la préférence pour l’étude du maintien de ceux-ci en surface… Mais la loi qui a suivi en 2006 n’a retenu que l’enfouissement à Bure.

La décision de boycott d’un nouveau débat public

En 2013, cela fait déjà 20 ans que les populations de ces 2 départements sont colonisés par l’Andra. Le processus est long mais au lieu de baisser les bras, les opposant-e-s se radicalisent. Un nouveau débat public est annoncé du 15 mai au 31 juillet et du 1er septembre au 15 octobre 2013. Il est organisé par la Commission Nationale du Débat Public (CNDP) qui en confie l’animation à l’Andra… L’Andra est dorénavant porteur du projet Cigéo : Centre industriel de stockage des déchets radioactifs en couche géologique profonde. Il s’agit d’une quinzaine de réunions publiques dont la première est prévue le 23 mai à Bure. Les suivantes doivent se dérouler dans des villes proches de Bure puis doivent se tenir dans des lieux déjà colonisés par les nucléocrates. A cela s’ajoute l’ouverture d’un site Internet de « débat participatif ». Bien évidemment, la CNDP n’a pas à se prononcer « sur le fond des projets qui leur sont soumis » même si l’Andra annonce que « rien n’est décidé » puisque « la décision finale sera prise en 2018 » par le Parlement ! Il n’y a que les imbéciles, les malhonnêtes qui prennent pour argent comptant ce discours de l’Andra. Les opposant-e-s décident donc de le boycotter activement au grand dam des Verts et autres opposants voulant rester dans la légalité (républicaine…).

Un boycott actif et efficace

Le jeudi 23 mai, à Bure, a lieu l’inauguration du débat public. Ambiance spéciale dans ce petit village de 90 habitants qui voient arrivés pas moins de 130 flics (dont 10 fourgons de gendarmes mobiles sans compter les gendarmes locaux et les flics en civils du renseignement intérieur…). La salle des fêtes à 1 000 000 d’euros radioactifs est trop petite ; en effet plus de 200 opposant-e-s sont aussi présents. A l’intérieur le Président de la CNDP lance la réunion, aussitôt des voix s’élèvent, et surprise, c’est le PCF local qui démarre les hostilités. Un quart d’heure plus tard, la séance est interrompue. Les officiels sont obligés de quitter les lieux sous la protection des flics. Le Président du CNDP s’enfuit par un petit chemin de terre !

Dans un communiqué, la CNDP annonce qu’elle diffère les deux prochains rendez-vous de Saint-Dizier et Joinville. Elle souhaite organiser une table ronde avec tous les acteurs des 2 départements concernés par le projet Cigéo. Pourtant invités à cette table, les opposant-e-s à ce projet continue de boycotter et s’organisent en ouvrant un site (cigeout.com), en lançant une pétition en ligne et en mobilisant contre la prochaine réunion publique à Bar-le-Duc prévue le 13 juin. N’étant pas prêt la CNDP va finalement reporter ce débat au 17 juin.

Les enjeux

La CNDP menace les opposant-e-s car les 13 réunions restantes doivent avoir lieu. « Ce débat, c’est une trêve, un moment sacré en démocratie », « nous prendrons les moyens nécessaires pour que les personnes qui ont l’intention de la perturber ne puissent pas le faire… ». Pour y parvenir, hormis la force, la Commission propose que l’ordre de parole des réunions donne la priorité à l’expression du public et qu’à la tribune interviennent des experts contradictoires et pas uniquement le porteur du projet, l’Andra. Bien évidemment, la Commission rappelle que « la décision politique finale n’est pas acquise. Y aura-t-il un Cigéo ou pas ? La question reste ouverte ». En y regardant de plus près, l’enjeu de ce débat public va bien au-delà du Cigéo. La CNDP l’avoue : « s’il n’avait pas lieu, on irait vers des blocages institutionnels très graves sachant que les débats qui nous attendent par la suite porteront sur les OGM ou le gaz de schiste ». Qu’on se le dise !!!

« Dégage ! » Le 17 juin, 400 personnes sont présentes dans le hall des brasseries de Bar-le-Duc sans compter un service de sécurité important et bien visible. L’Andra n’est plus à la tribune mais au premier rang. Des interventions d’experts indépendants ou d’opposants sont prévues. D’emblée, la CNDP laisse la parole aux comités d’opposants qui s’en donnent à cœur joie. Des représentants des élus opposés à l’enfouissement remettent 60 000 pétitions au Président de la CNDP. Puis, Patricia Andriot, conseillère régionale d’Europe Ecologie les Verts, monte à la tribune. Les trois quarts de la salle se lèvent ! Equipés de sifflets, hurlant au « référendum » ou lançant le désormais célèbre « dégage », ses propos sont inaudibles. Enfin, arrive un certain Gérard Longuet (sénateur UMP de la Meuse, ex-Ordre Nouveau) ; la salle se déchaîne et il repart sous les huées, poursuivi sur le parking.

La 2ème réunion publique se termine ainsi. Elle aura duré moins de trois quart d’heure !

Le lendemain, par communiqué, la CNDP décide de reporter la réunion qui devait se tenir le jeudi 20 juin à Nancy. Leur débat se poursuivra sous des formes nouvelles : réunions de proximité (de type « Tupperware » ?), débat « interactif » sur Internet… Quant aux associations d’opposant-e-s, elles se rendront à Nancy, le 20 juin, organiser un contre-débat dans la rue. Nous venons d’apprendre que la CNDP vient d’annuler aussi les débats à Cherbourg, Ligny en Barrois (Meuse) et Chaumont (Haute Marne) !

Néanmoins, à ce jour, pour ses prochains « débats publics », la CNDP nous donne rendez-vous le 5 septembre à Saint Laurent des eaux (Loir et Cher), le 10 septembre au Bugey (Ain), le 19 septembre à Marcoule (Gard), le 23 septembre à Paris ; le 3 octobre à Commercy (Meuse) et pour la conclusion le 10 octobre à Echenay (Meuse)… Mais rien n’est moins sûr… L’été et le début de l’automne seront chauds ! Contact : burestop.free.fr

Denis – Reims le 25/06/13

Encart 

L’Enterrement de celles et ceux qui mourront demain C’est le titre d’une brochure de 32 pages, éditée en mai 2013 par « All Nucleocrats Are Bastards ! ». C’est une contribution à la lutte contre le projet d’enfouissement de déchets radioactifs à Bure. Pour vous mettre « l’eau à la bouche », voici des entraits de sa conclusion : « Si le débat d’aujourd’hui sur l’implantation de Cigéo, le dépotoir géologique de l’Andra, n’est qu’une mascarade, le projet est lui bien réel et en bonne marche. Le début des travaux de forage est prévu pour 2018. Les premiers déchets doivent arriver en 2025. La machine est lancée : il est plus que temps pour nous de nous organiser pour stopper les massacre »… « Si l’industrie électronucléaire à tant besoin de commencer à enterrer ses déchets rapidement, c’est pour pouvoir continuer d’en produire »… « Pas de nucléaire sans police ni sans experts. Donc plus de révolution possible dans une société nucléaire ? Le nucléaire signerait-il le triomphe de l’autoritarisme ? Entre scientisme et défaitisme reste la lutte. Car si les possibilités révolutionnaires semblent bien, aujourd’hui plus sombres qu’elles n’ont pu l’être par le passé, l’impossibilité de vivre dans ce monde qui s’apprête à anticiper l’enterrement d’une partie de l’humanité – pas encore née – ne peut nous laisser dormir en paix ». Introuvable sur Internet par choix de ses auteurs, la photocopie de cette brochure et sa diffusion sont, elles, bienvenues. Pour se la procurer : allnucleacratsarebastards@riseup.net ; vous pouvez aussi écrire à : OCL/EGREGORE, B.P. 81213, Reims cedex.