Mise à jour 11/01 15h : Bernard Poignant, maire PS de Quimper, dément sur son blog et dans une lettre à J.-F. Debiol avoir par­ti­cipé à la ren­contre de Paray-le-monial. Les réac­tions d’autres par­ti­ci­pants (ou non-par­ti­ci­pants) sont à lire dans l’arti­cle de l’huma­nité.

Mise à jour 10/01 23h45 : l’authen­ti­cité du docu­ment se voit confir­mée par le témoi­gnage de Christian Vanneste qui décrit dans une chro­ni­que sur son blog sa par­ti­ci­pa­tion à la ren­contre de Paray-le-monial. (info via @maieulr).


« RENCONTRE des « TÊTES DE RESEAUX » repré­sen­tant L’ENGAGEMENT CHRETIEN en POLITIQUE et L’ENGAGEMENT SOCIETAL CHRETIEN », c’est ainsi que Jean-François Debiol (ex-UMP de Rilleux) a inti­tulé la réu­nion qu’il orga­ni­sait du 2 au 4 novem­bre 2012 à Paray-le-Monial. Pendant ces 4 jours, les dif­fé­ren­tes com­po­san­tes de l’oppo­si­tion au mariage pour tous se sont relayées à la tri­bune, pour pré­sen­ter leurs mou­ve­ments, leurs modes d’action, et bien sûr envi­sa­ger les stra­té­gies com­mu­nes pos­si­bles entre eux. La plu­part des orga­ni­sa­teurs des mani­fes­ta­tions de décem­bre der­nier étaient pré­sents, et on peut logi­que­ment en déduire que les gran­des lignes de cette mobi­li­sa­tion se sont alors déci­dées. L’exis­tence de cette réu­nion n’avait pas voca­tion à être rendue publi­que, aucune annonce ne fut faite et les par­ti­ci­pants furent stric­te­ment triés sur le volet.

Or le pro­gramme de cette réu­nion a été récem­ment dif­fusé sur inter­net, accom­pa­gné d’une liste des par­ti­ci­pants confir­més. On y apprend que des ténors de l’UMP auraient cotoyé, en connais­sance de cause [1], les chefs de l’extrême-droite et des mou­ve­ments catho­li­ques inté­gris­tes, du Front National à Civitas.

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Programme et participants – Paray-le-monial 2012

Que s’est-il discuté à cette réunion ?

Dès le pre­mier jour de cette ren­contre, le ton est donné sous l’inti­tulé « D’où venons-nous ? De qui, de quoi sommes-nous les héri­tiers ? ». Les inter­ven­tions sur les « raci­nes chré­tien­nes de l’Europe » ou sur la « voca­tion chré­tienne de la France », thé­ma­ti­ques chères aux tenants du choc des civi­li­sa­tions comme aux catho­li­ques inté­gris­tes, se sont donc enchaî­nées. Tout ce beau monde s’est ensuite retrouvé pour une messe, mais le pro­gramme ne dit pas si elle était dite en latin…

Le len­de­main, 3 novem­bre, c’est au tour des mou­ve­ments d’extrême-droite de se pré­sen­ter. On notera la pré­sen­ta­tion de Civitas, assu­rée par Jean-Claude Philipot, membre du conseil d’admi­nis­tra­tion et numéro 2 de l’orga­ni­sa­tion, et la com­mu­ni­ca­tion sur « l’enga­ge­ment roya­liste ».
Le pro­gramme du troi­sième jour est éclairant sur les stra­té­gies poli­ti­ques des par­ti­ci­pants. Après une pré­sen­ta­tion du projet de loi suit une dis­cus­sion inti­tu­lée « Comment pou­vons-nous les com­bat­tre (débat / brain stor­ming) ? ». On connaît de fait le résul­tat de cette dis­cus­sion. Suit un échange sur le thème « Et plus tard, aurons-nous envie de faire des choses ensem­ble (débat) ? », avant une messe anti­ci­pée. Le pro­gramme de cette jour­née laisse enten­dre en pre­mier lieu que les dif­fé­rents acteurs de cette ren­contre se sont bels et bien retrou­vés pour orga­ni­ser la contes­ta­tion qui a suivi. En second lieu, elle nous laisse à voir que des mem­bres de l’UMP ont par­ti­cipé à une ren­contre où il savaient qu’allaient être évoquées, débat­tues, les moda­li­tés d’une alliance pra­ti­que, pou­vant aller au-delà de la ques­tion du mariage pour tous, entre leurs mou­ve­ments et les com­po­san­tes de la droite extrême. On est bien loin des dis­cours tenus dans la presse par les repré­sen­tants de l’UMP.

Des personnalités de l’UMP qui auraient été présentes…

Certains noms sau­tent aux yeux lors­que l’on par­court la liste des par­ti­ci­pants ayant confirmé leur pré­sence. En pre­mier lieu, celui de Laurent Wauquiez, actuel député-maire UMP du Puy-en-Velay, ancien porte-parole du gou­ver­ne­ment de Nicolas Sarkozy. Son oppo­si­tion au mariage pour les cou­ples homo­sexuels est bien connue [2], et il avait déjà montré une cer­taine proxi­mité avec le Front National, ou tout du moins son pro­gramme idéo­lo­gi­que, puisqu’il évoquait un « devoir de com­pré­hen­sion » vis-à-vis de l’électorat fron­tiste” lors de la pré­si­den­tielle [3].

La très-catho­li­que Christine Boutin, quant à elle, appa­raît sur la liste des absents ou repré­sen­tés. Il n’est pas besoin de pré­sen­ter les ten­dan­ces homo­pho­bes de cette der­nière, ni de rap­pe­ler ses bien connues pos­tu­res, bible tendue, dans l’enceinte de l’Assemblée lors du débat sur le PACS. Mais, à l’instar du pré­cé­dent, elle s’était tou­jours défen­due, même dans cette mobi­li­sa­tion, de toute proxi­mité avec les catho­li­ques inté­gris­tes ou l’extrême-droite.

Outre ces deux per­son­na­li­tés de pre­mier plan, auraient également été pré­sents Elisabeth Monfort, Députée Européenne UMP-Alliance pour un Nouveau Féminisme Européen (sic), Jean-Marc Nesme, acc­cueillant en sa qua­lité de député-maire UMP de Paray-le-Monial, Philippe Degestas, sous-prefet (!) de la région Centre, Bernard Poignant, maire PS de Quimper et proche de Hollande [4], ancienne figure natio­nale de son parti, ou encore Patrick Laudet, ins­pec­teur d’Académie. Autant de par­ti­ci­pants qui n’ont guère d’inté­rêt à ce que leur pré­sence au coté du FN ou de Civitas soit dévoi­lée au public. On mettra de côté Christian Vanneste, ex-député de Tourcoing, ex-UMP et membre du Rassemblement Pour la France, ses fras­ques homo­pho­bes et ses nom­breux déra­pa­ges étant bien connus.

Lyon n’était pas en reste pour appor­ter son obole à ce triste céna­cle et la pré­sence de Denis Broliquier, maire DLC du 2e arron­dis­se­ment de Lyon, ainsi qu’Albéric de Lavernée, conseiller géné­ral UMP, étaient de cette partie de cam­pa­gne à relents homo­pho­bes.

Même Frigide Barjot avait confirmé. L’idole du mou­ve­ment contre le mariage pour tous nie toute pré­somp­tion d’homo­pho­bie. En privé pour mener sa cam­pa­gne, il semble qu’elle s’aco­quine avec des per­son­na­li­tés qui n’ont plus rien à prou­ver dans ce domaine-là.

… aux côtés du gratin de l’extrême-droite

Au côté de ces ténors de l’UMP (et du PS) on trouve des repré­sen­tants d’à peu près toutes les ten­dan­ces réac­tion­nai­res. Petit tour des amis de Wauquiez et Boutin :

Bruno Gollnisch (Front natio­nal, ex-n°2 du parti, membre du bureau poli­ti­que et député euro­péen)

Cette figure du Front natio­nal n’est plus à pré­sen­ter, ses sor­ties racis­tes lui avaient valu une sus­pen­sion de son poste de pro­fes­seur à Lyon III et plu­sieurs pas­sa­ges devant les tri­bu­naux. Sur la ques­tion de l’homo­sexua­lité on pourra se conten­ter de la cita­tion sui­vante :

« Plus de dis­tinc­tion entre les peu­ples, entre les nations, entre les cultu­res, entre les civi­li­sa­tions. Plus de dis­tinc­tion entre l’étranger et le natio­nal. Plus de dis­tinc­tion entre les sexes, les com­por­te­ments. Plus de dis­tinc­tion entre la famille stable, ordon­née à l’accueil de la vie, à sa trans­mis­sion, à l’éducation des enfants, et les unions plus ou moins contin­gen­tes, à deux, à trois, à plu­sieurs, par devant, par der­rière, etc. » Bruno Gollnisch, allo­cu­tion au Conseil Régional Rhône-Alpes du 8 octo­bre 2012.

Jacques Bompard (Maire d’Orange et député du Vaucluse)

Autre figure de l’extrême-droite fran­çaise, Bompard, fon­da­teur du Front natio­nal puis membre du Mouvement pour la France de Philippe de Villiers, s’est asso­cié au Bloc iden­ti­taire et a lancé la Ligue du Sud, pen­dant fran­çais de la très natio­na­liste « ligue du nord » ita­lienne, étiquette sous laquelle il vient de rem­por­ter les légis­la­ti­ves. Slogan de la Ligue du sud : « Identité, effi­ca­cité, sécu­rité ».

Bernard Anthony (AGRIF/Reconquête) : député euro­péen Front natio­nal de 1984 à 1999, a démis­sionné du bureau poli­ti­que de ce parti en 2003.

Une petite cita­tion du per­son­nage, extrait de son blog perso :

« Nous défi­le­rons sans haine ni mépris pour les per­son­nes d’affec­ti­vité homo­sexuelle non osten­ta­toire et conqué­rante mais sans com­plai­sance pour les exhi­bi­tion­nis­tes des « gay-pride » en mal de lai­deurs obs­cè­nes sophis­ti­quées car, avec toute la culture juive et chré­tienne, nous savons que Sodome et Gomorrhe ne sont pas des modè­les de société dura­bles. »

Son mou­ve­ment, l’AGRIF, s’est fait connai­tre par ses procès en série contre ce qu’il consi­dère comme de la « chris­tia­no­pho­bie ». Dernier procès en date, une atta­que contre le rap­peur Saïdou du groupe Z.E.P (Zone d’Expression Populaire) et le socio­lo­gue et mili­tant Saïd Bouamama [5].

Jean-Claude Philipot (Civitas – membre du conseil d’admi­nis­tra­tion et n°2 de l’orga­ni­sa­tion)

Le per­son­nage est un habi­tué des médias depuis que son mou­ve­ment a com­mencé à faire parler de lui en s’atta­quant à des pièces de théâ­tre jugées blas­phé­ma­toi­res. C’est la mani­fes­ta­tion de ce mou­ve­ment contre le mariage pour tous qui, à Paris, a ras­sem­blé la plu­part des mili­tants de l’extrême-droite radi­cale, qui s’y sont illus­trés en agres­sant les mili­tan­tes de FEMEN. Jusque-là les autres mou­ve­ments oppo­sés au mariage cher­chaient à faire croire qu’ils n’avaient aucun lien avec Civitas, c’est pour­tant en com­pa­gnie de Philipot qu’ils auraient par­ti­cipé à cette ren­contre au sommet.

Le dimanche 13 janvier, une manifestation brune, brune, brune contre le mariage pour tous

Les orga­ni­sa­teurs de la Manif pour tous et l’UMP nient dans les médias toute rela­tion avec les oppo­sants les plus inté­gris­tes ou l’extrême droite et par­lent même d’infil­tra­tion. Mais en fait de mani­fes­ta­tion « Bleu blanc rose », « limi­tée au projet Taubira », la mobi­li­sa­tion contre le Mariage pour tous s’ins­crit dans une ten­ta­tive de fédé­rer à nou­veau toute la droite, sur une base clai­re­ment réac­tion­naire : une mani­fes­ta­tion bien brune.