Les bus du ghetto; résistons ensemble janvier 2012, n° 104
Category: Global
Themes: FrontexPrisons / Centres de rétentionRépressionRésistons ensemble
RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 104 / janvier 2012
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http://resistons.lautre.net/spip.php?article491
Les bus du ghetto
Octobre 2011, Djamal, jeune habitant de la Cité du Luth, à Gennevilliers (92) meurt à la prison de Nanterre. Il s’est soi-disant pendu avec son « kit anti-suicide ». Coïncidence ou riposte, peu de temps après deux inconnus ont tenté d’incendier un bus de la ligne 235 au Luth, son chauffeur aurait même été arrosé d’essence. Pendant 3 mois aucun bus 235 ne passe plus par la cité, aujourd’hui encore le service n’est que partiel… les habitants se seraient tiré une balle dans le pied ? Le très officiel site du Comité d’entreprise de la RATP nous éclaire sur une réponse possible : « les cités dites sensibles sont moins bien desservies à cause d’une forme de ghettoïsation : avant le prolongement de la ligne 13 jusqu’à Asnières-Gennevilliers Les Courtilles, la ligne 235 était assurée par des bus articulés. Ce n’est plus le cas et les “clients” de la RATP doivent se tasser dans le bus standard. Ça n’excuse pas l’acte de violence, mais avec l’abandon progressif des zones dites sensibles par les services publics, cela contribue à ce climat. » (http://www.ce.ratp.fr/Mon-Travail/L-actu-eco-sociale/Le…etier).
Depuis que Jospin a dénoncé le soi-disant « angélisme » de la gôche, elle ne cesse, ensemble avec la droite, de justifier la politique ultra-répressive réservée aux quartiers populaires par la nécessité de lutter contre les « bandes », les dealers… Les actes de violence commis dans les quartiers : bus, écoles, gymnases… brûlés sont qualifiés d’actes « barbares » et de surcroît incompréhensibles, puisque les habitants détruisent le peu d’équipements collectifs dont ils disposent. Il s’agit, pour l’État et ses serviteurs, de nous enfoncer dans la tête l’idée selon laquelle ces populations, en leur très grande majorité des arabes et des noirs, seraient étrangers, comme l’a récemment déclaré Guéant, à « l’art de vivre français, comme les civilités, la politesse, la gentillesse ».
Déjà, lors des révoltes de 2005, gôche et droite s’efforçaient de nier le caractère politique des actions des jeunes émeutiers. Pourtant, ne doit-on se poser la question : s’attaquer à tout ce qui est lié à l’État, des bus aux écoles, n’exprime-t-il pas davantage qu’une colère aveugle ? Ces violences ne constituent-elles pas autant de coups portés aux miettes « démocratiques » qui servent à faire avaler la relégation sociale, raciale, politique ?
Bien sûr, les émeutes, encore locales ou isolées, comme en 2005 ou en 2007, ne sont pas de la politique au sens où notre société le comprend et l’accepte : le droit de mettre un bout de papier dans une urne ( droit qui n’existe d’ailleurs pas pour tous).
Pour le moment elles cherchent, parfois aveuglement, leurs cibles. Mais comme la nuée, elles portent l’espoir de l’orage qui annonce un nouveau monde.
Forteresse Europe et lutte des Sans papiers
Grèce, le 1er décembre, à la frontière greco-turque une voiture a été prise en chasse par la police grecque et une patrouille frontex : sous la pression policière la voiture des migrants s’est crashée, deux sont blessés, un troisième homme a été tué.
Vincennes, le 5 décembre dans la nuit, une vingtaine de retenus du CRA ont empêché l’expulsion de deux de leurs camarades. En représailles : gav, pressions policières… et pour les 2 algériens qui devaient être expulsés : 3 mois de prison avec sursis et 3 ans d’interdiction du territoire avec « exécution provisoire ».
Bastia, 22 décembre, ils ont mis le feu à la taule. L’incendie s’est déclenché dans le local de rétention situé au deuxième étage du commissariat de Bastia. Un sans papier a été inculpé.
Turin, 24 décembre, profitant d’un effectif réduit, une soixantaine de retenus se sont fait la belle ! Le soir du 31, dispositif renforcé, la pression policière conduit à des affrontements, gazage, matraquage… profitant de la confusion 6 retenus ont pu s’enfuir.
> [ R I P O S T E dans les quartiers populaires ]
Clermont Ferrand, une marche pour Wissam
Mis au sol par un chien policier, menotté puis aspergé de gaz lacrymogène : Wissam El-Yamni est violemment interpellé dans un quartier populaire de Clermont-Ferrand la nuit du réveillon du jour de l’an. Il fait un malaise et tombe dans le coma sous les brutalités policières. Wissam est également victime d’une fracture des côtes, d’une fracture du rocher orbitaire et de lésions au cou. Son pronostic vital est engagé. La famille a porté plainte et une information judiciaire a été ouverte. Mais d’autres habitants du quartier ne veulent pas se contenter de la voie juridique. En signe de protestation, depuis lors, le quartier connait plusieurs nuits d’affrontements avec les flics (jusqu’à 420 policiers et deux hélicoptères déployés durant le weekend). Enfin, 600 personnes ont participé le 5 janvier a une marche pour soutenir Wissam. Le lundi 9 janvier nous apprenons le décès de Wissam : on n’oubliera pas ! À suivre…
Grigny, cité de la Grande Borne
Le Samedi 24 décembre au soir des flics de la BAC patrouillant dans la cité de la Grande Borne à Grigny (Essonne) ont été la cible de 3 tirs de cartouche de plomb. Les individus se sont enfuis avant que le quartier ne soit investi par les bleus.
> [ L A P R I S O N T U E ]
108 personnes sont décédées en prison en 2011, suicides, morts suspectes… apportées à la connaissance de l’Observatoire des suicides et des morts suspectes, à lire sur prison.eu.org.
> [ C H R O N I Q U E D E L ’ A R B I T R A I R E ]
Vu de Grand-Bretagne – Émeutes ou guerre de classes ?
La classe dominante anglaise est connue pour sa passion de la chasse et des sports sanglants. Le 21 décembre la police a arrêté 62 personnes après avoir dépensé des millions de livres sterling en recherches d’informations depuis les « émeutes » de l’été dernier. Vidéo-surveillance, espionnage sur Facebook, dénonciations des habitants, tout était bon.
La commission d’enquête sur les « émeutes » préconise que des flash-ball et des canons à eau puissent être utilisés contre les « émeutiers », mais aussi « dans certains cas » des balles réelles. Ces mesures ont été anticipées par le dirigeant du Labour party Ed Milliband qui avait déclaré que le « comportement scandaleux » des « émeutiers » nécessitait la « réponse policière la plus forte possible ».
Pour les groupes de « gauche » les émeutes n’ont servi à rien, les jeunes doivent plutôt attendre que les lourds bataillons syndicaux de la classe ouvrière se mettent en mouvement. Comme en France, en 2005, personne parmi eux n’a voulu prendre parti pour les jeunes qui ont agi.
Roland Veuillet ne lâche pas…
Sanctionné pour son activité syndicale lors de grève de 2003, il a été déplacé de Nîmes à Lyon par le ministère de l’Éducation Nationale. Depuis, Il proteste, notamment… en courant. En cette fin (…)2011 il a engagé une course à pied de 600 km. roland-veuillet.eu.org
Handicap et prison : l’État condamné !
Bureaux d’encadrement, locaux de soins psychologiques, lieux de spectacle ou de culte, bibliothèque : tous ces lieux étaient inaccessibles aux handicapés en fauteuil de la prison de Fresnes. Sept d’entre eux ont porté plainte et réussi l’exploit de faire condamner l’État à leurs verser des dommages et intérêts allant de 1000 à 5000 €. Mais le combat ne s’arrête pas là, car sans astreinte, ce dernier n’est toujours pas tenu de mettre ses prisons aux normes. D’après l’Observatoire International des Prisons, les établissements neufs sont tout aussi peu adaptés.
On n’est pas du gibier
Après l’épisode de Vitrolle dans la région de Marseille : la fusillade à la kalashnikov et la mort d’un agent de la BAC, après la pression des syndicats policiers, la décision du gouvernement ne s’est pas faite attendre. Sarkozy l’avait annoncé, Guéant le confirme : la BAC recevra 150 fusils à pompes et 600 boucliers balistiques souples. Dans les années 80 l’idée d’équiper les forces de l’ordre avec cette arme de gros calibre avait été débattue, puis abandonnée, « Il n’est pas humain d’autoriser l’usage contre les personnes de munitions interdites pour la chasse au gros gibier et susceptibles de causer des blessures particulièrement affreuses. » Aujourd’hui, l’État en équipe sa police, et pas n’importe laquelle. Comme pour le Taser, le Flash-Ball c’est la BAC qui teste… les quartiers en ligne de mire.
Les policiers menteurs de Bobigny
Le mensonge de classe est une réalité de nos jours, en tous cas la justice l’a démontré en rendant le jugement sur les 7 policiers menteurs de Bobigny. Du sursis pour tous… mais cela n’est pas une surprise face aux rouleaux compresseurs du ministère de la peur qui ne voit que dans l’inhumanité une façon de fonctionner. Septembre 2010, à Aulnay-sous-bois, un policier était blessé à la jambe percuté par une autre voiture de police lors d’une course poursuite. Les policiers décidèrent d’accuser le conducteur poursuivi d’avoir délibérément foncé sur eux, il encourait la perpétuité pour tentative d’homicide. Combien de victimes de ce système, actuellement en prison à cause des mensonge de la police ? Cette affaire révèle un système organisé dans lequel la police est juste là pour coudre la mâchoire de chaque personne se levant face à ses agissements.
Les policiers du monde entier bossent la main dans la main
En janvier 2011, Michèle Alliot Marie proposait en pleine séance de l’assemblée nationale d’envoyer des flics français en Tunisie pour aider les flics tunisiens à mater les révolutionnaires. En janvier 2012, ce sont les flics français qui vont pouvoir bénéficier du « savoir faire » de collègues venus de l’étranger : 24 policiers roumains ont débarqué en France ce mois de décembre. En uniforme mais pas armés, leur rôle sera donc d’aider les flics français à faire du contrôle au faciès mieux ciblé (en gros, ne pas confondre les « faux touristes » rroms avec les « vrais » touristes roumains), des interpellations et des interrogatoires plus rentables (car, d’après un policier, les gamins ne sont « guère impressionnés par le policier français et ses pratiques républicaines »).
Pas d’alternative pour les « mineurs délinquants »
Le Parlement vient d’adopter l’instauration de l’encadrement militaire des mineurs qui ont commis des délits. Le Sénat, disposant d’une majorité à « gôche » l’avait d’abord rejeté ; il faut dire qu’il y avait de quoi s’énerver : l’idée de cette mesure a été piquée à Ségolène Royal (qui l’avait déjà proposé en 2007 alors qu’elle était candidate à la présidence). Toujours est-il que la loi a été adoptée, applicable dès février. Pour certains mineurs condamnés de plus de 16 ans, « l’alternative » sera simple : l’enfermement sous la forme traditionnelle en maison d’arrêt ou alors l’enfermement sous la forme d’« un service citoyen d’une durée de 6 à 12 mois au sein d’un établissement public d’insertion de la Défense (Epide) » (dont on ne sait pas encore en quoi il consiste exactement).
Dernières nouvelles :
Les temps continuent à être cléments pour des flics tueurs. On vient d’apprendre que le parquet a requis un non-lieu pour les responsables de la mort d’Ali Ziri, mort entre les mains des flics d’Argenteuil et pour le gendarme qui a abattu un jeune gitan à Thésée (Loire-et-Cher) en juillet 2010.
> [ A G I R ]
Écrire
Depuis le 7/12/11 Mumia Abu-Jamal, après 30 ans, n’est plus menacé de peine de mort, victoire énorme mais partielle : Mumia doit sortir, comme tou-te-s les autres. Il est désormais enfermé à la prison de « moyenne sécurité » de Frackville, avec un stylo, 8 feuilles de papier et 8 enveloppes, une heure par jour de « promenade » et une visite par semaine. Nous pouvons lui écrire:
Mumia Abu-Jamal / #AM 8335 / SCI Mahanoy / 301 Morea Road / Frackville, PA 17932 / U.S.A.
Nous pensons aussi à Léonard Peltier, indien sioux militant de l’American Indian Mouvement, enfermé depuis 1977 sous le coup d’une double perpète, accusé d’avoir tué deux agents du FBI dans une fusillade lors de l’occupation d’une réserve indienne.
Vérité, justice pour Hakim Ajimi
À Grasse le 9 mai 2008, après une prise de bec dans sa banque pour un problème de virement Abdelhakim Ajimi, 22 ans, rentre chez lui. Mais le directeur de la banque ayant averti la police il est interpellé sur le chemin. Au sol, menotté, Hakim est sous la pression de trois agents, l’un d’eux pratique une prise dite « clé d’étranglement ». Son visage devient violet, les témoins interpellent les policiers, mais rien n’y fait. Hakim est transporté au commissariat, à l’arrivée, sa mort est constatée.
Depuis la mobilisation n’a cessé de réclamer toute la lumière sur cette affaire. Après un « non-lieu » en mai 2010, s’ouvre du 16 au 20 janvier 2012, au tribunal correctionnel de Grasse, le procès de sept membres des forces de l’ordre, dont deux policiers de la BAC poursuivis pour « homicide involontaire », soyons y nombreux !
Une affiche en vue de la mobilisation à télécharger sur le site de RE : http://resistons.lautre.net/spip.php?article480
Délibéré du procès en appel des accusés
de l’incendie du centre de rétention de Vincennes.
Le 13 janvier à 13h30, Cour d’appel de Paris, pôle 2 chambre 9. Palais de Justice de Paris, M° Cité. Venez nombreux, solidarité !
Tous ensemble pour exiger justice et vérité pour Ali Ziri,
ce retraité mort « plié » par des policiers d’Argenteuil. RV le samedi 14 janvier à 14h au cinéma Jean-Gabin, Parc de la mairie d’Argenteuil, 12-14 Bd. Léon-Feix. Gare : Argenteuil, Info :
www.atmf.org/Tous-ensemble-pour-exiger-justice
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