Par où pourrit le poisson ?; résistons ensemble décembre 2011
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Places: NantesPoitiers
RESISTONS ENSEMBLE / bulletin numéro 103 / décembre 2011
Pour télécharger ce bulletin mis en page au format pdf :
http://resistons.lautre.net/spip.php?article489
Par où pourrit le poisson ?
Ce mois-ci, personne n’a pu passer à côté de l’info : la police a des pratiques racistes. Les médias ont largement couvert trois initiatives qui les dénoncent : la démonstration scientifique d’Eric Fassin dans son livre sur la BAC ; l’apparition d’un site contre le contrôle au faciès (se réclamant d’une étude faite en 2009 par des chercheurs français financés par une ONG anglosaxonne ayant établi qu’il y avait 6 à 7,8 plus de possibilité d’être contrôlé lorsqu’on est noir ou arabe) ; les conclusions du dernier rapport d’Amnesty épinglant 4 cas concernant des arabes ou des noirs morts lors de leur interpellation par des policiers que la justice a choisi de laisser impunis.
Alors pourquoi n’entend-on aucune réaction du côté des politiques ? Pas l’ombre d’un candidat à la présidence qui entendrait faire le ménage dans la police ? Pourquoi ne pas chercher à punir et exclure du « corps sain » de la police d’État ces quelques « brebis galeuses » ? En voilà pourtant une campagne rêvée pour des républicains !
C’est que la tâche est insurmontable pour des hommes d’État qui participent eux même du problème. Le racisme anti-noir et anti-arabe qui transpire des pratiques policières quotidiennes, le racisme qu’incarnent ces barbouzes presque jamais inquiétées par la justice, c’est celui de l’État Français. Ce racisme d’État il s’est on ne peut plus clairement exprimé ce mois-ci. On l’a entendu dans les propos de Sarkozy parlant aux maires : « le droit de voter et le droit d’être élu dans nos territoires doit demeurer un droit attaché à la nationalité française », oubliant volontairement que les étrangers européens votent déjà aux élections locales, et Gérard Leymonie maire UMP de Mauriac (Cantal) de renchérir : « pour bien comprendre les problèmes politiques d’une commune ou d’un canton, il faut être français et bien français ». Comprenez par là un retraité anglais établi en Dordogne depuis 5 ans est « français et bien français » alors qu’un immigré sénégalais travaillant en France depuis 30 ans ne le sera jamais. À Montfermeil, Guéant a trouvé le mot juste : la naturalisation doit « viser l’assimilation. Ce mot, n’en n’ayons pas peur, il est inscrit dans notre loi, le Code civil depuis 1945 ». Et, sur ce sujet, la gauche n’a rien à envier à la droite. Son silence sur ces saillies nauséabondes en dit déjà long mais elle s’est aussi exprimée par la voix de François Rebsamen maire de Dijon seul habilité à parler au nom du candidat socialiste sur les questions de sécurité : le sujet de la délinquance des mineurs peut être « l’occasion de tendre la main à la droite » après une éventuelle arrivée au pouvoir car « l’unité républicaine est menacée par une frange de la jeunesse délinquante ».
Nous ne sommes pas dupes : le poisson pourrit par la tête.
Un peu de lumière sur nos morts
Ali Ziri, Mohamed Boukrourou, Lamine Dieng, Abou Bakari Tandia, Abdelhakim Ajimi… cinq morts parmi des dizaines et des dizaines étranglés, asphyxiés, taserisés par des « forces de l’ordre ». Le dernier rapport d’Amnesty International : « France “Notre vie en suspens” ; Les familles des personnes mortes aux mains de la police attendent que justice soit faite » projette la lumière sur ces cinq victimes (même si de notre côté nous ne croyons pas, contrairement à Amnesty, à l’existence de « bavures », rapport téléchargeable sur : http://www.amnesty.fr/sites/default/files/EUR210032011_…1.pdf)
Des mots simples et mesurés des familles, des collectifs de soutiens, des avocats, pour décrire l’horreur, les souffrances, l’injustice. Leur meurtriers en uniforme sont toujours en service, leurs mains ensanglantées assurent toujours le « maintien de l’« ordre » de cet État raciste. Si la mémoire de nos morts est encore parmi nous c’est parce que des collectifs de soutiens, de solidarité agissent avec les familles, les amis face aux mensonges, aux calomnies, à l’oubli, à la justice complice.
Dernières nouvelles :
Ali Ziri : une marche à la sous-préfecture d’Argenteuil a eu lieu le mardi 29/11 pour protester contre un éventuel non-lieu pour les policiers qui l’ont assassiné. Suite à la mobilisation et son écho, la justice a repoussé pour début janvier sa décision. Un nouveau témoin s’est présenté, présent au commissariat, le lieu du crime.
Abdelhakim Ajimi : grâce à la mobilisation du collectif, les 7 policiers étrangleurs passeront en procès entre le 16 et 20 janvier au TGI de Grasse (06). Il faut être présents massivement, car comme d’habitude, le risque est que ça se termine avec du sursis pour les meurtriers et encore…
Umut : Le policier suisse qui l’a tué sur une autoroute, le 20 avril 2010, a été blanchi par le tribunal de Fribourg (Suisse). Son frère jumeau a décidé de le poursuive devant le Tribunal fédéral.
Mahamadou Marega : ce 3/12, on était une centaine à marcher à Colombes (92), de la cité où il a été tué par la police jusqu’au commissariat de Colombes, pour affirmer qu’on veut la vérité sur le massacre dont il a fait l’objet. Le rapport de l’IGS (la « police des polices ») révèle qu’il y a eu 16 tirs de taser pendant l’interpellation, sans parler des lacrymo, des coups de tonfa. La vidéo, enregistrée par la caméra intégrée à l’un des pistolets électrique, « le montrait au sol, hurlant avec en bruit de fond les crépitements caractéristiques de l’usage d’un taser. » écrit ce rapport. Alors qu’est ce qu’il faut de plus pour inculper les flics meurtriers ? Il est vrai que Mahamadou était immigré et pauvre. Cela ne se pardonne pas.
(Pour davantage d’info sur ces affaires le site :http ://resistons.lautre.net/)
> [ L A P R I S O N T U E ]
90ème suicide ou mort suspecte connu(e) en détention en 2011.
Le 4 décembre 2011 un homme de 61 ans est décédé à la maison d’arrêt de Lons-le-Saunier, suicide par pendaison. Nous exigeons, les familles et proches exigent la vérité de la part de l’administration pénitentiaire et des autorités judiciaires afin que toute la lumière soit faite sur ces nouveaux décès.
Extrait du communiqué de l’Observatoire des suicides et des morts suspectes, à lire sur prison.eu.org. Un suicide ou mort suspecte tous les trois jours en prison, 10 fois plus qu’en milieu libre.
> [ C H R O N I Q U E D E L ’ A R B I T R A I R E ]
Des flics pris en flagrant délit de vol
La vidéo : deux flics en civil, arme à la ceinture, munis de brassards police en train de piquer de l’argent et des portables dans une boutique de téléphones à Paris. C’était en décembre 2009. Mis en examen pour « vol en réunion », ils viennent de bénéficier d’un non-lieu pour « charges insuffisantes ». Ça vous pose problème ? Mais vous vous croyez où ?
À voir : http://www.dailymotion.com/video/xbew9q_deux-flics-film…_news
Que vaut la vie d’un étranger ?
« La prise en compte des besoins de la famille se fait dans des conditions humaines auxquelles tout fonctionnaire de police est très attaché. […] nos véhicules sont équipés de lait maternisé, de couches-culottes… » Voilà comment s’expliquait la directrice départementale de la police après l’arrestation, le 17 août à Clermont-Ferrand, de la famille Bezjacu, Rrom originaire du Kosovo, avec trois enfants et une mère alors enceinte de 5 mois, et leur transfert dans la foulée au Centre de Rétention de Lille, après un voyage de 10 heures. Trop plein de cynisme face à une décision de libération prononcée par un juge des libertés et de la détention, qui soulignait le traitement inhumain et dégradant infligé à la famille. Les conséquences des basses œuvres policières seront finalement plus cruelles que les déclarations : de retour à Clermont-Ferrand madame Bezjacu était hospitalisée en urgence pour un décollement du placenta. Le bébé ne survivra pas au traumatisme. Un médecin déclarait a la presse que « sur un plan de logique médicale, c’est une évidence que ce décollement du placenta est la conséquence directe de ce trimbalement à Lille et du choc de l’arrestation. »
1 an ferme pour 2 euros de bonbons
La justice n’a pas attendu la loi sur la récidive de 2007 (voir RE n°54) pour distribuer à grandes poignées ses peines de prison ferme. Il suffit de traîner dans les tribunaux, d’assister aux comparutions immédiates, pour s’en apercevoir. Mais on peut le constater, le système des peines plancher facilite grandement la logique punitive. Ainsi, le 16 juin 2010 dans une supérette à Périgueux, un homme de 39 ans a été pris la main dans le sac… de bonbons. Total du larcin 2 euros, plus le classique « outrage et rébellion ». Le 9 novembre dernier par le jeu des peines automatiques, il est condamné à 1 an de prison ferme. Tout un programme…
No more brother or sister in jail !
La justice renonce à l’exécution de Mumia Abu-Jamal. La peine de mort est commuée en prison a vie, conséquence de la décision du procureur de Philadelphie, le 7 décembre, de renoncer à saisir la justice de Pennsylvanie pour un nouveau procès.
Cela fait 30 ans que Mumia résiste, emprisonné, dans le couloir de la mort, accusé d’avoir tué un flic dans la nuit du 9/12/1981 dans le Sud de Philadelphie, sur le lieu d’une fusillade où, taxi driver, il venait de déposer un client et dans laquelle il prit une balle. Ancien Black Panthers puis journaliste indépendant proche de la communauté révolutionnaire MOVE, Mumia dérangeait terriblement, portant une émancipation à la fois sociale et antiraciste. Son procès n’a été qu’expertises balistiques inexistantes, balles non identifiables, absence de relevé d’empreintes, zone des faits non sécurisée, témoins subornés, menacés, écartés ou intimidés, rapports de police contradictoires, jury sous pression à large majorité blanche, etc. En 1995 et 1998 son exécution a été évitée grâce à la mobilisation internationale. On ne compte plus les rebondissements et va-et-vient entre les différentes Cours se renvoyant la balle puante du racisme d’État. En 1989 il déclare devant un jury : « La police a tenté de m’exécuter dans la rue. Ce procès est la conséquence de leur échec ». Liberté pour Mumia ! We want freedom !
Infos sur mumiabujamal.com
À bas les prisons !
Le 15/11 au matin, quatre appartements et trois squats sont perquisitionnés par les gendarmes à Toulouse. Ordinateurs, téléphones, affiches, livres, papiers personnels, vêtements, etc. sont listés, filmés, embarqués. Une quinzaine de personnes sont arrêtées, dont 6 font 32h de garde-à-vue. Au bout, 4 d’entre elles sont placées en détention provisoire, une autre sous contrôle judiciaire, une autre sous le statut de « témoin assisté » à disposition du juge d’instruction. Pourquoi ? Une enquête a été ouverte sur l’action du 5/07 dernier où les locaux de la Protection Judiciaire de la Jeunesse de Labège ont été envahis, tagués et arrosés d’excréments, alors que les jeunes enfermés à l’Etablissement Pénitentiaire pour Mineurs de Lavaur (où comme dans tous les EPM les éducs de la PJJ travaillent main dans la main avec l’administration pénitentiaire) étaient violemment réprimés pour s’être révoltés. Plusieurs chefs d’inculpation sont retenus contre les 4 mis en examen. À suivre.
Tours, demandeurs d’asile sans hébergement…
et personnes solidaires occupent successivement 4 bâtiments publics dont l’hôpital. Tous les établissement publics sont depuis quadrillés par les flics dès 18h00 quand le 115 ne répond plus. La faculté des Tanneurs est alors investie : réveil à 6H00 par les flics et les chiens : « je te réveille avec le pied parce que je touche pas à la merde », puis dans la soirée, contrôle d’identité massif, isolement et interpellation des demandeurs d’asile, relâchés peu après. La préfecture interdit maintenant à deux d’entre eux de demander l’asile en France. Préfets, flicaille, un éclat de rire vous tuera tous.
Indignés et répression
La répression policière ne se tarit pas en direction du mouvement des indignés qui se manifeste dans plusieurs ville en France. Ainsi à Nantes le 30 novembre, deux voitures de la police nationale s’arrêtent près du camp des indignés afin de procéder à un contrôle d’identité. L’arrestation de deux personnes s’est accompagnée d’actes de violence et du gazage de nombreuses personnes dont des enfants. À la Défense le harcèlement policier est permanent. Le 27 novembre à plus de 3 heures du matin les CRS chargent avec violence, détruisant le camp, distribuant les coups. Un indigné a eu le bras cassé.
> [ R I P O S T E dans les quartiers populaires ]
Haro sur les caméras de surveillance
À Marseille, la municipalité a un programme chargé. 42 caméras de surveillance doivent être mises en service pour la fin décembre, une partie d’un dispositif de 340 unités réparties dans le centre-ville avec une finalisation du processus, via le centre de supervision urbain, prévue pour octobre 2012. Mais le casting géant n’est pas au goût de tout le monde. Fin novembre 5 mâts destinés à supporter les futures indiscrètes ont été descellés et jetés à terre.
> [ A G I R ]
Forum National Anti-répression de Poitiers (26 et 27 novembre 2011)
Différents collectifs anti-répression venus de Poitiers, Bordeaux, Tours, Blois, Montpellier et Paris ont décidé de faire de consacrer les journées du 10 au 17 décembre 2011 à la solidarité envers les camarades de Toulouse, de Nice, des indignés de la Défense, plus généralement en soutien aux militants réprimés. Il s’agit aussi de dénoncer l’enfermement des mineurs comme solution aux problèmes rencontrés par une jeunesse de plus en plus stigmatisée par un pouvoir autoritaire, le recours quasi systématique à la prison, à la violence physique et/ou aux amendes exorbitantes pour les militant-e-s qui luttent contre le système carcéral et la société policière.
Le 17 mars 2012 a été retenu comme journée nationale contre la répression et les violences policières.
http://www.antirep86.fr/2011/12/04/second-appel-de-poit…iers/
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