Faire passer l’âge de départ à la retraite de 60 à 62 ans, c’est dire : “Vous allez devoir travailler plus longtemps pour toucher une retraite convenable”. Cette injonction au travail est un foutage de gueule. Une grande partie de ceux qui arrivent à l’âge de la retraite est déjà sortie de l’emploi. Par épuisement, ras-le-bol, licenciement ou maladie. Dans un contexte de chômage structurel et de précarisation de l’emploi, la figure du travailleur garanti qui cotise à taux plein est devenue marginale. Précaires permanents, RMIstes de longue date, CDIstes à temps partiel, RSAstes fraîchement arrivés, sans-papiers, intérimaires depuis toujours, étudiants longue durée, jeunes disqualifiés, nous sommes déjà très nombreux à être exclus du système de retraites actuel. Nous, nous ne cotiserons jamais assez.

Loin de vouloir sauver quoique ce soit, cette réforme réduit toujours plus la possibilité d’une retraite à taux plein, voire d’une retraite tout court. Elle poursuit la destruction progressive du système par répartition et son remplacement par des logiques de privatisation. Il ne reste à chacun qu’à investir comme un bon petit capitaliste dans l’immobilier, des fonds de pensions ou des assurances privées.

La “pédagogie” gouvernementale appliquée au « problème » des retraites est la même que celle appliquée au « problème » du chômage : nous serions tous individuellement responsables du déficit comptable, responsables de ne pas savoir nous adapter aux exigences du marché, de ne pas être prêt à nous vendre à n’importe quel prix, de ne pas nous comporter comme d’habiles petits auto-entrepreneurs de nous-mêmes, de ne pas participer à notre propre exploitation. Nous serions tous responsable de la dette de l’Entreprise-France, et cette logique culpabilisante justifie de soumettre au chantage tout argent redistribué socialement.

Refuser la réforme des retraites, c’est commencer par dire : “Non, nous ne devons rien !”, “Pas question d’endosser le sauvetage de l’économie et d’un capitalisme en crise !”. C’est dire : “ On ne veut pas travailler plus.”

Aujourd’hui, on parle de grève générale comme seul moyen de bloquer cette réforme des retraites, mais le débat se limite le plus souvent à la question des préavis syndicaux. De son côté, le gouvernement travaille à invisibiliser la grève : le service minimum la rend toujours plus inefficace. Et pour les précaires ? Quelle grève quand on travaille en intérim, quand le patron menace de ne pas renouveler notre CDD, quand on ne travaille jamais plus de six mois dans une même boite, quand on bosse au black, quand on ne pointe qu’à Pôle Emploi ?

Que nous ayons un espace de travail ou pas, nous pouvons nous organiser de manière transversale au-delà des corporations ou des statuts. Il faut que s’inventent des nouvelles formes de grève. Bloquer un Pôle emploi avec des sans papiers, occuper un lycée avec des retraités et une maison de retraite avec des collégiens, débrayer une assurance privée avec des vacataires du public, faire un piquet avec des coursiers, investir un centre d’impôt avec des non-solvables, réquisitionner les marchandises d’un Monoprix avec des vendeurs à la sauvette, bloquer une autoroute avec des agents RATP, investir des boite des coaching avec des dockers, faire une AG dans une école de commerce avec des agents de Pole Emploi en CDD, …

PRÉCAIRES, CHÔMEURS :

EN GRÈVE JUSQU’À LA RETRAITE !