Certes on ne peut pas contester que ce fut là un des effets de cette mobilisation, de fait le CPE ne put être appliqué.

Ce qui est plus étonnant, c’est que ces mêmes partis et syndicats ont pour leur part été complètement étrangers aux mobilisations du CPE. Rien de nouveaux dans cette tentative assez ridicule de récupérer le nom de la dernière lutte importante qui eu lieu en France. Après tout, compter sur l’amnésie collective fait partie du jeux de la démocratie, et à ce jeux les éléphants des grands partis sont passés maîtres. A chaque élections, ils comptent bien que les votants aient oublié les différentes crasses dont ils sont responsables lorsqu’eux même étaient au pouvoir.

La plupart des participant-e-s à cette mobilisation doivent bien rire (jaune, couleur de ces syndicats et partis) en entendant ces déclarations.

Pour expliquer pourquoi, il est nécessaire de revenir rapidement sur quelques différents points qui ont fait que le CPE se démarquaient des mobilisations étudiantes précédentes, et qui expliquent sans doute les raisons de son succès.

Le premier point important, et qui justement rend ces déclarations risibles, c’est que aucun parti ou syndicat n’a été présent pendant le CPE. Tout au plus SUD étudiant, mais ce n’est guère tout ce que l’on pouvait voire en dans les facultés occupées. On peut même dire que l’un des préalable à ce mouvement, et qui fut un acquis pour ceux qui suivirent (anti-LRU principalement), fut d’écarter totalement l’UNEF, courroie bien connue du PS dans les facs. A tel point que pendant la LRU l’UNEF se faisait carrément siffler par l’AG pendant leur prise de parole. Ainsi débarrassé des bureaucraties syndicales habituellement là pour le cadrer, le mouvement anti-CPE put donner libre court à sa créativité.

L’autre point, c’est que cette lutte s’est rapidement posée des questions d’ordre stratégiques, à savoir quelles étaient les moyens à leur disposition pour faire plier le gouvernement. Poser la question de cette façon écartait d’emblée la stratégie de la négociation. La réponse fut trouvée assez rapidement, à savoir qu’il fallait viser l’économie pour que le gouvernement prenne le mouvement au sérieux. Le moyen trouvé pour ce faire fut de bloquer les flux de circulation de marchandise (dont celui des travailleurs, puisque pour le patronnat, il s’agit bien d’une marchandise). Ainsi pendant plusieurs semaines les personnes participant-e-s à la lutte se levèrent de bon matin pour aller bloquer ponts et routes, profitant de la sympathie de la population. Voila bien une méthode qui diffère de ces mobilisations déprimantes auxquelles les syndicats et partis nous convoquent de temps en temps, soit disant pour peser sur des négociations auxquels seules les élites sont conviées, et dont nous devons apprendre le résultat plus tard, peu importe qu’il nous déplaise.

Enfin un point important s’il en est, c’est que le mouvement anti-CPE, bien que constitué par des AGs dans les facs comme c’est le cas traditionnelement, avait un autre lieu de concentration : les facultés occupées, qui servaient de lieu de rencontres, de vie et d’organisation. Ces occupations s’étaient même complètement autonomisées des AGs étudiantes, comprenant les limites que pouvaient avoir la prétention de faire de la démocratie à 1000 personnes à main levée. Ce fut là une avancée certaine, et tout au moins même si cela créa des tensions, cela permit de faire en sorte de laisser de la marge à la créativité de chacun-e, et que chaque groupe puisse agir selon les méthodes qu’il souhaitait. Le livre « les mouvements ont faits pour mourrir » résume bien les tenants et aboutissants de cette organisation [2].

N’oublions pas quelques passages de la lutte anti-CPE qui montre cette récupération est malhonnète, particulièrement une des grosses manifestation à Paris ou le syndicat CGT collabora étroitement avec la police pour arrêter les étudiants anti-CPE.

Bien évidemment, pendant le CPE les manifestations furent présentes et importantes. Mais les participant-e-s au mouvement avaient aussi bien compris qu’elles ne suffisaient pas (en témoigne les manifestations contre la première réforme des retraites, ou des millions de personnes avaient manifesté sans résultat), et ce mouvement avaient donc directement envisagé d’autres possiblités d’actions. Des lieux pour se réunir, se rencontrer, vivre la lutte et s’organiser, et aussi le blocage de l’économie comme moyen de pression sur un gouvernement à la solde de ses amis les patrons et financiers.

Bref, se réclamer du CPE et tenter de le récupérer dans le cadre de partis comme le PS ou de mobilisation comme celle des retraites est juste complètement malhonnète et ridicule, tant les formes, les méthodes et les participants des deux mouvements ne sont pas comparable. En tout cas ce n’est pas aux partis qui assument de temps en temps le pouvoir, ni à ces syndicats qui signent les accords pour maintenir leur place de se réclamer du CPE. Et nous leur ferons savoir.

[1] http://www.latribune.fr/actualites/economie/france/2010….html

[ ] http://tahin-party.org/jardin.html