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Edito

Les deux précédentes brochures ont été consacrées à l’université et à l’expertise. La première a été conçue durant la mobilisation contre la Loi relative aux universités, un moment où se sont exprimés les insatisfactions et les espoirs d’un certain nombre d’entre nous, la question du savoir et du travail, de leur finalité, de leur marchandisation. La seconde posait le problème de l’expertise en tant que limite du politique, et cherchait à comprendre de quels champs cette dernière tirait sa légitimité autoritaire.

Ces deux thèmes n’ont été qu’abordés. Nous sommes loin d’en avoir fini avec l’expertise, pas plus qu’avec l’université et les questions qui la traversent. À l’inverse de ces deux numéros donc, la présente brochure n’est pas portée par une thématique unique. L’expertise, la notion de frontière, celle de cosmopolitisme, la question de l’héritage de 68, se partagent la place.

Si un mouvement général se dégage de cet ensemble, c’est celui que motive le désir de construire un espace politique ; un espace collectif ouvert à l’autre sans pourtant chercher à aplanir les différences qui font les désaccords et les ruptures ; un espace où la peur ne prévaut pas à la rencontre, où l’incertain n’est pas le signe du dénuement croissant de nos vies au profit de l’économie, mais exprime la conviction qu’il est possible de faire quelque chose maintenant. Rien n’est gagné y compris du côté des vainqueurs. Dès lors, comment trouver les moyens de faire entendre une parole, un avis, une expérience, sans en passer par la moulinette des discours prêt à diffuser ? Comment construire un monde fort des idées qui nous paraissent justes, et parler de vérité sans avoir recours aux autorités telles que la science, la religion, ni verser dans le cynisme le plus relativiste? Identifier les discours auxquels nous avons tous à faire aujourd’hui, définir une position où l’action, les pratiques et leurs expressions soient cohérentes est le projet qui nous anime. Ainsi, les questions soulevées dans ce numéro ne trouveront pour le moment que des bouts de réponse. Car il s’agit en fait, pour commencer, de poser certains problèmes concrètement ; et de garder les solutions pour plus tard.