Avec son décor des années 50, le Café des Sports était central dans la vie du Lion d’Angers, commune de 4700 habitant.e.s à 25 kilomètres au nord d’Angers. Souvent désigné « Chez Katia », du prénom de sa patronne, le bar ferme lors de son départ en retraite fin 2023. Au printemps 2024 l’écho d’une reprise des lieux par l’extrême droite devient insistant. Il faut attendre juin pour découvrir que les murs sont loués notamment par des membres de l’alvarium devenu Red, milice connue à Angers pour ses provocations et un nombre affligeant de méfaits, d’intimidations, d’agressions principalement racistes et lgbt+phobes. Comme de coutume cette tentative d’installation s’avère émaillée de manigances et de dissimulation.

La rengaine des mensonges et des impostures
La polémique démarre mi-juin. Un collage sur la façade de l’ancien bar est réalisé. Un collectif d’habitant.e.s crève l’abcès et diffuse un tract dans les boîtes à lettres et sur le marché. Par voie de presse, on apprend qu’un bail a été signé mi-mai. On sait peu de choses. Le discret intermédiaire est un juriste qui représente une association qui projette « une brasserie avec restauration traditionnelle ». Toujours selon la presse c’est pourtant Jean-Eudes Gannat chef de la petite milice fasciste angevine, traiteur, obscur entrepreneur en conseil et grand pourvoyeur de paniques morales et de cagnottes brumeuses, qui durant l’hiver a manœuvré sans succès pour obtenir le local. Interrogé sur ses liens avec Jean-Eudes Gannat, le juriste affirme au journaliste : « Je n’ai aucun lien avec lui, je le connais de nom en tant que personnalité locale publique […] Cette histoire émane de ragots. Les personnes ayant diffusé ce tract n’assument aucunement leur calomnie, sans prendre contact et chercher un minimum de vérité dans cette affaire […] On a été très clair avec M. Osifre (le propriétaire), aucune activité politique n’émanera de ce lieu. ». Mais qui est ce pauvre juriste calomnié et son association apolitique ?

L’étrange cas de Louis Guimon…
Louis Guimon, qui dans la vie militante utilise le pseudonyme de Louis Guesclin, est originaire de Rochecorbon (37). Fils de bonne famille, scout d’Europe, il étudie à l’Université Catholique de l’Ouest (Uco) et à l’Institut Catholique d’Etudes Supérieures (Ices), fabrique des élites réacs bien connue. Enfin, à la Sorbonne il décroche un diplôme de juriste. Aujourd’hui il est collaborateur de mandataire judiciaire à Angers dans (ô surprise!) le cabinet qui a mené la liquidation judiciaire du Bazar, l’actuelle base arrière des fascistes à Angers. Le moule éducatif et familial bourgeois et réactionnaire dans lequel était plongé Louis Guimon tend à faire penser qu’il comportait déjà en creux la probabilité de développement d’une idéologie élitiste et raciste.

… Et de M. Louis Guesclin
Rien d’étonnant donc à ce qu’on le retrouve souvent avec des membres de l’ex-alvarium, parfois en train de s’entraîner voire se livrer à des actes violents. Il existe des clichés d’entraînements à la boxe avec le Red et il était en première ligne lors de la défense de leur local fasciste, pris sur le vif jetant une chaise sur des manifestant.e.s. Le point commun à ces deux exemples ? À chaque fois sur la photo il est aux côtés d’une personne que soi-disant il ne connaît que de nom : Jean-Eudes Gannat.

30 janvier 2021
30 janvier 2021

Quand ce petit fasciste s’exprime publiquement, il le fait pourtant au nom du Mouvement Chouan, dernière baudruche politique du même Jean-Eudes Gannat et sur Riposte Laïque évidemment. On le découvre terrorisé par la projection de son propre imaginaire raciste. Grand-remplacé par un « système » sans véritable contour. Il est en guerre. Le gouvernement en place, la gauche, la police, la justice, les médias, se seraient mis d’accord pour laisser opérer ce qu’il présente comme un nettoyage de grande envergure des blanc.he.s de ce pays dans le but de les remplacer. Une seule solution pour lui et son mouvement : pousser de toutes leurs forces jusqu’à opérer la division qu’iels désirent entre population blanche et non-blanche et vider la France de cette dernière.

Un discours décliniste et violent
Un discours décliniste et violent

Une seule conclusion, Louis Guimon exprime un racisme assumé considérant chaque non-blanc.he comme un.e envahisseur/euse, appelant à la sédition, à la violence et au repli communautaire. Employant des moyens violents main dans la main avec ses camarades nationalistes bien connu.e.s comme Jean-Eudes Gannat. Ces deux là se connaissent bien et Louis Guimon est son valet. Il est un militant nationaliste actif de l’alvarium, du Red et du Mouvement Chouan et pas le nigaud idéaliste tel qu’il se présente à la presse. En tous cas certainement pas idéaliste.

Louis Guimon et Jean-Eudes Gannat « ne se connaissent pas » depuis au moins le 3 avril 2018 où le Red première version était allé intimider une AG étudiante en fac de droit.
Louis Guimon et Jean-Eudes Gannat « ne se connaissent pas » depuis au moins le 3 avril 2018 où le Red première version était allé intimider une AG étudiante en fac de droit.

La Brasserie Gorin, un établissement pas ouvert, déjà mal famé
Attardons-nous sur la Brasserie Gorin qui prendrait place dans le local du Lion d’Angers. L’association a pour objet de « promouvoir, valoriser et faciliter l’accès au patrimoine brassicole français ». À la manœuvre deux « Cons Pères » comme ils aiment à se nommer en 2019, lorsqu’ils décident de partager leurs « anecdotes fermentées » sur les réseaux : Louis Guimon et Gaston Martin-Lauzer. À cette époque, le second fréquente lui aussi les bancs de l’Uco. Pour suivre leurs aventures, ces deux-là peuvent compter sur leur réseau amical, qui se trouve être aussi le réseau fasciste local. Dans leurs abonné.e.s Instagram figurent entre autres : Baudouin Le Nalio, Gersende Barrera, Théodore Riant, Martin Réveillard, Hugues Soreau, Adrien Rivière, Thibaut Cochin et bien sûr Jean-Eudes Gannat. Tou.te.s passé.es par l’alvarium alors que Louis Guimon, pas à un mensonge près, disait à la presse « je mets ma parole en jeu que nous n’avons aucun lien avec l’ex-Alvarium, nous en sommes détachés complètement ». Connus pour leur brutalité et leur ancrage politique, Marc de Cacqueray Valménier et François-Mamès Cosseron de Villenoisy font eux aussi partie de la liste des abonné.e.s d’un compte récemment nettoyé suite à nos publications sur les réseaux sociaux. Hilaire Bouyé, vice-président de Génération Z, l’une des amitiés pro-zemmour de Louis Guimon y va aussi de ses messages de félicitations. Fin 2021, le bureau de l’association est déposé et fait de Christophe Léger son secrétaire (Le bureau compte quatre membres : Louis Guimon, Christophe Martin-Lauzer, Christophe Léger et Thomas Wangon). Une information loin d’être anodine car il est lui aussi un militant du Mouvement Chouan, le joujou asthénique déjà évoqué. Une fois de plus, lorsque l’on gratte le vernis d’innocence, on s’aperçoit comme pour tous leurs projets, que la Brasserie Gorin est une émanation de l’extrême droite portée et soutenue par le microcosme militant.

Capture du compte Instagram de la Brasserie Gorin avant grand nettoyage.
Capture du compte Instagram de la Brasserie Gorin avant grand nettoyage.

Pourquoi une installation néo-fasciste au Lion d’Angers ? On verra plus loin que la région du Lion d’Angers dispose de solides réflexes antifascistes, mais les alentours sont aussi irrigués par de conséquents réseaux nationalistes. Quelques-un.e.s des militant.e.s de l’alvarium/Red y sont désormais établi.e.s. Cet hiver Théodore Riant et Côme Jullien de Pommerol ont traîné sur les blocages des agriculteurs sur le rond-point du Lion d’Angers. Non loin, est aussi installé Benoît Couëtoux du Tertre, membre important de l’Institut Iliade , espace de réflexion qui veut prolonger la pensée du très raciste et antisémite Dominique Venner, défenseur du concept fumeux de choc des civilisations. À vingt kilomètres au nord-ouest, il y a l’établissement scolaire Notre-Dame d’Orveau, matrice de toute une génération de jeunes fascistes. Sont passé.e.s par ses bancs : Marie-Ménehould Gannat (qui milite à Auctorum), Hugues Soreau (impliqué dans des violences en attente de jugement) ou les frères Cochin. Du côté enseignant on peut aussi citer Didier/Pierre-Louis Simons, porte-parole par intérim de l’alvarium et cadre du mouvement national-catholique Academia Christiana. Enfin, lorsqu’il était directeur, Yann De Cacqueray-Valménier avait permis à Academia Christiana de tenir son université d’été dans ses murs. C’est aussi au Lion d’Angers que sont installés les locaux de SOS Calvaires (dont des membres ont été vus s’activer dans l’ancien Café des Sports) qui sous l’image avenante d’une association de défense du patrimoine religieux se rêve en avant-garde croisée mue par un esprit de reconquête. Lors de la dernière campagne présidentielle l’association avait ouvertement roulé pour Zemmour. Il faut aussi souligner que l’équipe dirigeante est constituée d’entrepreneurs locaux bien installés. Ainsi avant de disposer de ses propres locaux les croix étaient stockées chez l’entreprise Xilo. Enfin, quand on parle d’entrepreneur, difficile d’évacuer la figure tutélaire d’Olivier Ramé. Quand il était propriétaire du château du Loncheray, à La Jaille-Yvon à quelques kilomètres au nord du Lion d’Angers, eu lieu en 2018 une spectaculaire perquisition avec une mise en examen pour fraude fiscale aggravée et blanchiment. Alors à la tête d’une myriade de société, surtout immobilières, cet homme condamné à plusieurs reprises pour escroquerie, fraude fiscale et exercice illégal de la profession d’expert-comptable, avait mis à disposition le château pour accueillir le camp d’été des pétainistes du Renouveau Français.

Une forte opposition antifasciste Si cette nouvelle supercherie a pu être révélée, c’est grâce à la vigilance d’habitant.e.s qui ont décidé de rugir collectivement face au danger de l’extrême droite sitôt qu’iels ont eu connaissance du projet. Contrairement aux élu.e.s prompt.e.s à regarder ailleurs, les habitant.e.s ont pris le problème en mains, évitant ainsi qu’il ne soit mis sous le tapis. Iels se sont rassemblé.e.s à deux reprises avec pas moins de 250 personnes sur la place du bourg pour s’organiser et débattre. Les habitant.e.s sont déterminé.e.s à continuer ces rendez-vous tant qu’il le faudra pour mettre le projet des fascistes au rebut. Notre appui leur est assuré.

On le voit des intérêts très réactionnaires convergent et font du Lion d’Angers et ses environs un territoire potentiellement prometteur pour leur agenda d’extrême droite, que ce soit les vélléités de création d’une énième école hors-contrat ou pour revenir à notre affaire, investir un ancien café pour renforcer et imposer une implantation locale alors qu’Angers leur est de plus en plus hostile. Un nouveau lieu est a minima un point d’appui à l’organisation d’évènements. Ainsi l’Institut Iliade annonce sur son site la tenue d’une formation jeune au Lion d’Angers fin novembre. Que cet évènement se tienne ou non dans l’ancien café du bourg la vigilance est de mise pour une riposte à la hauteur de l’enjeu.

Le Raaf

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source : https://raaf.noblogs.org/post/2024/08/18/le-lion-dangers-ne-sassocie-pas-avec-le-cafard/