« On n’est jamais mieux servi que par moi-même », ce pourrait être la devise du président du conseil général de la Vendée. Non content de truster les colonnes des quotidiens locaux, plus par ses idées que par sa trombine d’ailleurs, Philippe de Villiers a construit un véritable empire médiatique à la gloire de son Département. Par les ondes d’abord, avec Alouette FM. Par l’écrit ensuite, avec le Journal de la Vendée. Par la télé locale, aujourd’hui. La manipulation est grossière. Elle vise simplement à discréditer le travail des journalistes et induire que la vraie information se trouve dans ces supports de communication…

« Désenclaver les cerveaux est encore plus important que de désenclaver le territoire [1]. » La formule est à double tranchant. Elle émane du président du Département. Vingt ans que Vendée rime avec Villiers. Vingt ans que cet homme façonne la région selon ses convictions. Pour cela, ce dernier a su allier intelligence et patience. Il a surtout su profiter d’un inattendu petit coup de pouce du destin. Ironie de l’histoire, cela se passe à l’orée du printemps 1981, quand le candidat Mitterrand conquiert l’Elysée. Sorti frais émoulu de l’ENA trois ans plus tôt, le jeune sous-préfet de Vendôme (Loir-et-Cher) se met en disponibilité de l’Etat, « pour ne pas avoir à servir un gouvernement de gauche ». Et revient sur ses terres vendéennes qu’il n’a jamais vraiment quittées. « Le 10 mai 1981, explique-t-il à ses amis du Puy du Fou, nous sommes entrés en religion. La politique est morte. Le combat est désormais spirituel. Il nous faut entrer en résistance. Résister, ce n’est pas se défendre, c’est agresser. Trois pistes d’action : l’espace éducatif, l’espace associatif et l’espace communicatif avec les radios libres [2]. » Décryptage de cette conquête médiatique qui s’étend désormais à la presse écrite et à la télévision.

Acte I : la radio. Faire de la Vendée un véritable no man’s la nd du service public.

Cette même année 1981, le Vendéen profite donc du vent de liberté qui souffle sur la bande FM pour créer, le 27 novembre, Alouette, jeune radio herbretaise. Un an plus tard, il en abandonne les responsabilités pour confier le bébé à son frère Bertrand. Car, principale caractéristique de l’homme fort de la Vendée, il a toujours su s’entourer et gérer ses affaires en famille, qu’elle soit génétique ou idéologique.

[…] Quelques années plus tard….

Avant sa démission du gouvernement Chirac, en juin 1987, le futur président du conseil général de la Vendée aura tout de même réussi à mettre un coup d’arrêt au plan de développement des locales de Radio-France. Et de faire de la Vendée un véritable no man’s land du service public. « A cette période, poursuit un ancien journaliste, la carte d’implantation des locales de Radio-France opérait un contournement systématique de ce département. Elle passait par Nantes, Tours, jusqu’à Châteauroux pour reprendre à Bordeaux. Sans jamais passer par la case La Roche-sur-Yon. » Une mise à l’écart qui durera dix-neuf ans. Avant l’implantation de France Bleu Loire Océan dans la ville centre, en janvier 2005.

Ainsi, depuis sa création, la radio qui passe « toujours plus de hits » aura été préservée de la concurrence et revendique, aujourd’hui, plus de 100 000 auditeurs quotidiens qui captent ses longues plages musicales par le biais de 23 fréquences disséminées entre les territoires de la Vendée, de la Charente, de la Charente-Maritime, des Deux-Sèvres, de la Loire-Atlantique, du Maine-et-Loire, de la Mayenne et de la Vienne. « Alouette, c’est un peu l’Olympique lyonnais de la radio depuis 2001 », se vante un responsable de la station, dans un article de Vendée-Matin, paru le 29 septembre 2006. Pas trop difficile quand on joue sans adversaire depuis vingt ans…

Acte II : la presse écrite. La communication instituée en information généraliste.
Avec les Hauts-de-Seine, la Vendée est le département français qui engloutit le plus d’argent public dans sa communication. Notamment dans le Journal de la Vendée, un mensuel devenu bimensuel, qui fascine par sa maquette à la fois dynamique et aérée. Cet organe institutionnel se substitue de plus en plus à la presse régionale. « Pour cela, Villiers est un homme d’une habilité remarquable, souligne un fin observateur du monde médiatique vendéen. Il insiste sur des sujets porteurs. Il sait surfer sur les dossiers du moment (culture, environnement, économie, sports etc.). »

Surtout, il a réussi à faire passer ce journal pour un média généraliste ou, tout du moins, en ancrer l’idée dans la tête des Vendéens. […]

Acte III : la télévision. Premier cafouillage du clan villièriste ?

Pour une institution qui ne laisse jamais rien au hasard et bétonne tous ses dossiers, le cas de TV Vendée reste un mystère. Annoncé à grands renforts d’articles dithyrambiques dans les colonnes du Journal de la Vendée, le projet reste pour le moins invisible. C’est bien simple, quand on tape « TV Vendée » sur un moteur de recherche, on tombe directement sur le site web du conseil général.

[…]

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[1] Citation (page 211) extraite du livre d’Eric Branca et Arnaud Folch Le mystère Villiers, paru aux éditions du Rocher.

[2] Citation (page 70), ibid.