Ce poème raconte quelques minutes de la vie d’un jeune métisse afro-européen qui a eu le malheur de croiser deux équipages de police alors qu’il est rentrait chez lui un soir. Ce poème est basé sur des faits réels, qui se sont passés le 10 mars 2021 à Toulouse.

Un jour, il arriva à mon frère, ce que je n’aurais pu imaginer
Ce qu’il me contât quelques instants après les faits
Secoua mon corps, mon cœur et mes pensées
C’était donc à cela que ressemblait, mon pays tant aimé

Consciente de l’existence du phénomène par les médias
Je pensais naïvement qu’il restât loin de moi
Mais cette fois, c’est mon sang qu’elles atteignèrent
Un des fléaux de notre siècle : les violences policières

Le dernier métro allait partir sans lui
Il courait pour ne pas se retrouver démuni
Mal lui en pris car leur cible il devint
Il s’en est malheureusement suffit de rien

« A ma hauteur, leur véhicule ils arrêtèrent
Par leur devoir de valeureux protecteurs de la cité, ils m’interrogèrent
S’enquérant de quelles affaires pressantes pouvaient bien m’inciter
A adopter à pareil heure un pas d’une telle rapidité

Répondant avec promptitude, de mon pieu désir je les informai :
Rejoindre à temps le dernier convoi vers ma demeure.
Le zèle de leur réaction effaça le peu de naïveté qu’il me restait
Et c’est ainsi que je commençai à avoir peur

Mes mots, ils n’en crurent rien
Avant même de m’écouter
Mon sort avait déjà été scellé.

D’un ton que seuls ceux qui pensent tout savoir prennent
Ils m’accusèrent de travailler pour un trafiquant
Étant certains de me reconnaître d’un contact précédant
J’eus beau démentir, en vain. Mon âme en peine.

Peut-être étais-je au cœur d’un roman kafkaïen ?
Menacé de recevoir un soufflet, je ne bronchais.
Soudainement dans mon pantalon je sentis une main
Avec consternation et dégoût je la repoussais.

Puis pendant que mes poches je vidais
C’est mes parties génitales qu’ils touchèrent
Mon intimité, violée. Une fois encore, je la repoussais.
C’est une palpation, me dirent-ils avec leurs grands airs

Calvaire.
Rues désertes.
Mais ne sont-ils censés être ceux qui me protègent ?

Contre le mur je suis plaqué
Contre le mur je suis palpé
Contre le mur je suis moqué
Contre le mur, je regarde mes pieds

Leur répertoire de moquerie épuisé
Ils décidèrent enfin de me libérer
Mes jambes à mon cou je prenais
Vite, vite, je voulais rentrer

Mais ce jour-là l’univers avait décidé
Qu’héro kafkaïen je resterai
Je ne pouvais en croire mes yeux :
Devant moi, un nouvel équipage soupçonneux

Ils s’arrêtent,
Je m’arrête,
J’explique,
Ils m’aggripent

Les mots me manquent pour parler
De ce qui s’est passé. Vide de sens.
Leur attitude pleine de malveillance
Me donne juste envie de gerber.

Ô qu’elle ne fut pas ma fureur
Quand mes premiers interlocuteurs
Qui m’avaient suivi en catimini
Leur annoncèrent que j’avais fui

Grand sourire illuminant leur minois
De ceux qui savent qu’ils tiennent leur proie
Continuant de jouer avec moi
Jusqu’à ce que l’ennui les côtoie

Ils finirent par avouer à leurs compères
Que leur propos, avec la vérité, n’allaient de paire
Ils l’avaient camouflé, d’humeur à s’amuser
Car n’était-ce pas hilarant, si je devais rentrer à pied ? »