23 ans que Ben Ali dirigeait le pays, 23 ans que sa famille et celle de sa femme détenaient d’une main de fer les rênes du pouvoir et se partageaient le pouvoir économique. Certains ont pu se laisser abuser par l’image de carte postale qu’offre la Tunisie mais derrière ses plages, ses souks, ses club meds et ses raids dans le désert, c’était bien une dictature que nous avions de l’autre côté de la Méditerranée.

L’Etat tunisien censurait tout. Aucun journal critiquant le parti au pouvoir n’était autorisé à paraître dans les kiosques. Les opposants au régime qui s’organisaient au sein de nombreuses organisations clandestines risquaient l’arrestation, la torture à chaque instant.

Mais malgré cette chape de plomb qui s’exerçait sur les militants du mouvement social, la colère s’est exprimé au grand jour ces dernières semaines. L’évènement qui a mis le feu aux poudres, c’est le suicide par immolation de Mohamed Bouazizi, un jeune chômeur diplômé, après que la police lui ait interdit de vendre des fruits et légumes au marché pour tout simplement faire vivre sa famille.

Cette mort est la suite d’une longue série d’autre suicides qui ont eu lieu dans l’année. Elle révèle le désespoir d’une jeunesse qui, même si elle possède un diplôme, ne se voit aucun avenir dans le pays. C’est ainsi que beaucoup risquent leur vie pour atteindre l’Europe notamment l’île italienne toute proche de Lampedusa.

Depuis le 17 décembre, suite à ce suicide, un mouvement de protestation a démarré à Sidi Bouzid dans le centre-ouest du pays et la seule réponse du pouvoir a été comme à l’accoutumée : la répression. Plusieurs dizaines de Tunisiens ont été assassinés par les forces de l’ordre. Mais le mouvement a pu s’étendre à travers tout le pays, dans les villes de Sfax, Kairouan, Sousse, Gabès, Menzel Bouzaine, Redeyef, Tala, Meknassy, Bizerte et même la capitale Tunis.

La fuite du dictateur Ben Ali est une première victoire des travailleurs et de la jeunesse de Tunisie. Mais n’oublions pas, que comme tous les dictateurs, Ben Ali n’était pas un individu isolé. Son maintien au pouvoir n’a été rendu possible qu’avec le soutien de dirigeants occidentaux, à commencer par ceux de la France, de gauche comme de droite, de Mitterrand à Chirac, puis Sarkozy.

C’est au dictateur tunisien que Sarkozy a fait l’honneur de son premier voyage officiel en 2008, pour le féliciter de « l’espace des libertés (qui) progresse… ». Il y a quelques jours encore, Alliot-Marie, ministre des Affaires étrangères, proposait sans honte à Ben Ali l’apport du « savoir faire » des forces de police françaises !

La Tunisie n’est pas un paradis pour les seuls touristes. Le « socialiste » Strauss-Kahn a salué la Tunisie de Ben Ali comme une économie des plus saines de la planète, précisément parce que le dictateur avait su imposer une exploitation forcenée de la population, en supprimant toutes les libertés d’expression et d’organisation politique et syndicale. Cet ancien « protectorat » de la France est resté une manne pour une multitude d’entreprises françaises, avec une main d’oeuvre à bas prix, exploitée sur place, en particulier dans le textile ou dans les centres d’appels.

Désormais, un gouvernement d’union nationale a été mis en place. Cependant,la population reste mobilisée car en effet, des membres du RCD, l’ancien parti au pouvoir, ont conservé leurs postes. Les véritables opposants politiques exigent la légalisation de tous les partis, la libération des prisonniers politiques et le tenue d’élections libres en vue d’établir une assemblée constituante.

Samedi 22 janvier, des milliers de militants et citoyens ordinaires convergeaient vers les locaux du 1er ministre pour demander la démission du gouvernement de transition. Ils sont également soutenus par les enseignants qui seront en grève jusqu’à la satisfaction de cette revendication.

Si une victoire démocratique semble à portée de main, nous tenons à souligner que le chemin reste encore long à parcourir pour que le peuple tunisien puisse vaincre le chômage et vivre dignement. Le colonialisme est toujours en embuscade et les accords de libre échange entre le Maghreb et l’Europe enferment les peuples arabes et berbères dans la dépendance et le sous développement.

Le soulèvement Tunisien se propage dans le monde arabe et fait trembler les Boutelfika et Moubarak de tout poil. En Jordanie, des milliers de personnes sont descendus dans les rues contre la montée des prix, le chômage et la pauvreté. Sous la pression d’une révolte populaire, le gouvernement a été obligé de diminuer le prix des produits de première nécessité et du carburant. En Algérie, la jeunesse s’est affrontée à la police durant plusieurs jours.

De Tunis à Paris, en passant par Casablanca, c’est une juste répartition des richesses qu’il faut exiger, par les luttes sociales.

NON AU COLONIALISME !
NON AU RACISME !
VIVE LA REVOLUTION TUNISIENNE !
POUR UN MAGHREB UNI !