Suite à l’annonce de l’imposition du port du masque obligatoire dans toutes les rues de Paris et de la petite couronne (Seine-Saint-Denis, Hauts-de-Seine et Val-de-Marne) dès 8 heures du matin vendredi 28 août (avec dérogation pour les enfants de moins de 11 ans, les cyclistes et les joggeurs), l’adjointe en charge de la santé à la mairie de Paris Anne Souyris a expliqué sur Cnews vendredi matin qu’il ne sera pas possible de retirer son masque dans la rue pour fumer une cigarette, pour manger un sandwich ou encore boire une canette. Il resterait néanmoins possible de « faire un pique-nique dans un parc, à partir du moment où on est assis et qu’on mange son pique-nique, à condition de remettre immédiatement, dès qu’on se relève, son masque ». Un point sur lequel la préfecture de Paris est ensuite revenue en précisant que cela resterait possible, bien que pas précisé dans son arrêté, à condition qu’il n’y ait pas d’abus, et que de toute façon cela sera laissé à l’appréciation de ses larbins en uniforme qui sauront « interpréter les règles » et « dresser les verbalisations avec discernement » (comme en matière d’attestations de sortie pendant le confinement, hum)…

De façon générale, s’il existe certes toujours un écart entre la loi et son application, notamment lié aux résistances et aux rapports de force qu’elle rencontre, il n’en demeure pas moins que chaque nouveau pouvoir de nuisance donné aux brutes en uniforme, quelle qu’en soit la raison, ne peut que conduire à plus d’arbitraire, d’humiliations, de tabassages et d’incarcération d’un côté, et à de nouvelles pressions policières contre les galériens, les indociles et celles et ceux qui entendent attaquer ce monde sans attendre. Mais également à un renforcement des dispositifs de surveillance et de contrôles technologiques sur nos vies (verbalisation par caméras, drones, détecteurs de chaleur corporelle, bracelets électroniques), ou à son extension régulière à une myriade de sous-flics délégués (en blouse blanche ou pas, du vigile à La Poste au gardien de parc ou d’Ehpad).

Concernant le Tour de France cycliste qui a commencé le 27 août à Nice avec la présentation des équipes, l’Etat a décidé d’imposer le port du masque aux habitants des villes et villages traversés sur l’ensemble de son parcours, comme un test d’obéissance à grande échelle totalement indépendant de la situation sanitaire. Dans la Drôme par exemple, le port du masque sera obligatoire sur l’ensemble du territoire communal à Orcières tout le 1er septembre, et à Gap de mardi 1er  septembre à 17 heures jusqu’au lendemain à la même heure. Cela est également valable au bord des routes et jusqu’à la montagne, où les 27 cols seront filtrés par les autorités, interdisant d’y monter autrement qu’à pied et en vélo, et avec obligation de masques et jauges policières.

Cette histoire est un autre bon exemple de comment cette obligation n’est pas essentiellement liée à un impératif de santé –comme tout ce qui vient de l’État–, mais d’ordre public et de fric, puisque le Tour de France traversera énormément de lieux ruraux et de montagnes où les taux liés au virus (d’incidence, de positivité, de réanimations, etc) sont extrêmement bas. L’autre exemple est que pour l’instant aucun couvre-feu des commerces n’a été décrété à 23h en région parisienne contrairement à Marseille, bien que le taux d’incidence dans cette métropole y ait là aussi largement explosé la barre des 50/100 000. En échange, il a été négocié entre la préfecture de la capitale, la mairie et le Groupement national des indépendants hôtellerie, restauration et traiteurs (GNI) Paris Île-de-France, la création d’un fichage des clients avec la création d’un « cahier de rappel » (comme en Allemagne ou en Belgique) afin de mettre leur identité et coordonnées à disposition des autorités sanitaires pendant un mois pour les aider à remonter le fil des cas contacts en cas de contamination. Puisque l’application télématique Stop Covid est pour l’instant un échec, bienvenue au retour du fichage manuel sur de petits papiers tenus à jour par des commerçants. A noter que certains supermarchés de la capitale se permettent déjà de demander systématiquement le papier d’identité des clients à la caisse au prétexte du suivi de l’épidémie. En complément dans les bars et restaurants, toujours afin d’éviter des contraintes horaires préfectorales dans la capitale, risquent de se multiplier des prises de température à leur entrée (température personnelle qui était jusqu’à il y a une année à peine considérée comme une donnée privée ou de santé, mais passons).

Avec la mise en zone rouge de 19 départements supplémentaires le 27 août donnant de nouveaux pouvoirs aux préfets pour augmenter la pression flicosanitaire, il est clair que l’on s’achemine vers une multiplication de reconfinements locaux (dits « territoriaux »), allant de tel ou tel Ehpad, Esat, école, quartiers, ville ou département. Pour rappel, le dressage basique à l’obéissance du port du masque n’est pas anodin, puisque si l’amende pour non-respect de son port est de 135 euros, en cas de récidive dans les 15 jours elle peut grimper à 1 500 euros, et même 3 750 euros et six mois de prison si un individu est pris à trois reprises en un mois.

Enfin, concernant le caractère obligatoire d’un futur vaccin, une question qui déchaîne tous les fantasmes des complotistes, si le ministre de la santé Olivier Véran a logiquement précisé lors de la conférence de presse du 27 août en mode points réguliers comme lors du grand confinement, qu’il irait d’abord en priorité aux « personnes vulnérables », il s’est à l’inverse refusé… de démentir son possible caractère obligatoire! Alors qu’il eut été plus simple de défendre une large mise à disposition pour les personnes volontaires, il n’a ainsi pas écarté de l’imposer selon la situation sanitaire du moment. Dont acte.

[synthèse de la presse des 27 et 28 août 2020]