Une conférence anti-BDS s’est tenue le 22 novembre 2019 dans la salle Blum, archi-bondée, du Centre communautaire israélite de Strasbourg, organisée par le CRIF, le Bnai Brit et d’autres associations juives.

Membre de la Communauté juive de Strasbourg et de l’Union juive française pour la paix, je m’y suis rendu, avec une autre personne, afin d’entendre l’argumentaire de cette soirée, destinée à appuyer la proposition de loi dite Maillard à l’Assemblée nationale, visant à assimiler l’antisionisme à l’antisémitisme.

Même pas encore entré dans les lieux annexes de la Synagogue de la Paix, au Parc des Contades à Strasbourg, j’ai déjà été mis dans l’ambiance. Un jeune homme du service de sécurité de la Synagogue est venu à ma rencontre, alors que je venais d’attacher mon vélo à un arceau Avenue de la Paix-Simone Weil. Il avait appris manifestement à me reconnaître de visu puisqu’il m’a hélé, poliment, par mon nom et m’a demandé 1, de ne pas filmer la conférence et 2, de me tenir calmement…

Nous sommes entrés un peu après 20 h et avons pris place dans l’avant-dernier rang au fond de la salle Blum emplie à ras bord. 

C’est le Bnai Brit qui était l’organisateur principal. Il s’agit, comme il a été expliqué, pour ceux ceux qui l’auraient ignoré, d’une franc-maçonnerie juive, née en 1843 à New-York.

Simon Benchimol a pris la parole le premier, membre de cette association mondiale, et de sa commission BDS. Un petit court-métrage de moins de deux minutes a présenté ces loges maçonniques juives, sur un fond musical puissant qui faisait penser curieusement à des vidéos complotistes.

Puis le BDS a été présenté, issu d’ONG palestiniennes. Ce mouvement serait en perte de vitesse, affirmation qui n’a cessé d’être démentie tout au long des interventions suivantes et des autres vidéos projetées.

Le BDS se proposait de retirer les produits israéliens des commerces. Il s’agit d’un mouvement mondial qui vise à délégitimer Israël. Insistance sur l’absence de statut juridique qui rend difficiles les poursuites en justice, sauf contre des individus. C’est la haine qui conduirait ce mouvement de Boycott, Divestment, Sanctions, cité toujours en langue anglaise.

Les conférenciers ont tous, mensongèrement, affirmé que le boycott était interdit en France…
Ils se sont étonnés, dans un exemple, qu’à Montpellier et d’autres villes, chaque semaine, des boycotteurs se rassemblent, surveillés par la police qui laisse faire. A aucun moment, cette contradiction entre une supposée interdiction et la passivité policière n’a semblé poser question. Il a même été affirmé que la police protègerait ces actions.

Un petit tour sur les origines du boycott, le mot et la chose. Charles Cunningham Boycott (1832-1897) aurait donné son nom à ce type d’actions vers 1880.

Le premier boycott aurait été celui des nazis en 1933, contre les commerces juifs.

Le conférencier était scandalisé par le rapprochement fait de plus en plus entre le boycott et la question de l’apartheid en Afrique du Sud. Israël n’est-elle pas la seule démocratie au Proche-Orient? Des ONG participent à ce BDS. Tous les boycotteurs, a-t-il été admis, ne sont pas racistes et antisémites mais la plupart. Curieusement ces organisations n’ont pas été citées. 

Pour le conférencier, ces sont les Arabes qui ont initié le mouvement, la Ligue arabe en 1948, puis à Damas en 1951, mais devant le peu de succès, ils ont interrompu. Renouveau en 2001 lors de la conférence des Droits de l’Homme, Durban 1, abondamment vilipendée.
Le leader du BDS c’est Omar Barghouti, dirigeant de l’OLP qui aurait déclaré que la Palestine devait être « une terre pure et musulmane ». Curieux quand on sait le nombre de chrétiens palestiniens engagés dans la résistance.

Ont été cités ensuite,Nelson Mandela, Richard Falk, le PCF, la CGT, le NPA, la France Insoumise, EELV et l’UJFP. Un sort particulier a été réservée à cette dernière, mais pas aussi développé que ce qu’on attendait. Puis les principaux méchants ont été nommés, Euro-Palestine et l’AFPS. Il y aurait même des intellectuels pro-BDS en Israël. Notre camarade Michel, fils de l’ex-rabbin Max Warschawski et strasbourgeois d’origine n’a bien entendu pas été nommé… Ken Loach et Corbin étaient aussi dans la liste. Il a glissé sur l’UJFP dont le sigle s’étalait sur l’écran, tout en soulignant son soutien au « terroriste » Georges Ibrahim Abdallah. L’UJFP rejette les institutions juives en France.

Le BDS s’est manifesté en 2001 par des autocollants, en 2002 par la demande d’un moratoire sur les relations scientifiques, culturelles, etc. La commission anti-BDS suit à la loupe les publications quotidiennes du BDS et agit. Création d’un blog en 2009, site internet en 2010, dont l’adresse bdsFrance.org
a été donnée avec conseil au public d’y aller voir et admiration non simulée « très bien documenté ». Evocation des interventions dans les surfaces commerciales, Carrefour, Leclerc, Darty, Sephora. J.G Greilsamer a eu l’honneur d’être aperçu deux fois dans les vidéos. Très ciblée aussi, Olivia Zemor.

De manière tout à fait mensongère, le BDS aurait comme alliés Soral, Dieudonné et Tariq Ramadan. Un développement conséquent a suivi sur Euro-Palestine et l’AFPS qui fourniraient la logistique de la campagne BDS. L’opacité des finances du mouvement a été avancée, l’argent entrant depuis des donateurs, des cotisations, des syndicats et des ONG qui scandaleusement useraient du financement public dans ce domaine. La fermeture de certains comptes en banque en Allemagne a été donnée en exemple à suivre.

Une vidéo percutante a été projetée, avec triple avertissement avant projection et après sur le caractère brutal des images, destiné, justifiaient-ils, à sensibiliser et faire réagir et agir les auditeurs une fois la conférence terminée. Il agissait d’un montage rapide de tous les visuels utilisés par la campagne BDS, affiches, tracts, flyers, vidéos, autocollants, etc.

Les conférenciers, dont le président du Bnai Brit, en plus de Simon Benchimol, du responsable du CRIF-Alsace, ont prétendu qu’existait une législation anti boycott en France. Ils faisaient référence à une loi qui interdit la discrimination des personnes, qui ne vaut pas pour les Etats ou les institutions. L’entrave à l’activité économique a aussi été mise en avant. L’appel au boycott a été déclaré illicite et constituant une infraction. Mais pas un seul exemple n’a été cité, ni la condamnation du maire communiste de Seclin, ni les boycotteurs de Mulhouse, ni notre camarade qui a gagné deux fois le procès fait à Metz pour l’appel à boycotter des produits pharmaceutiques. Et pour cause, les organisations sionistes l’ont perdu. La circulaire Alliot-Marie a été encensée celle qui demandait aux procureurs de poursuivre, et qui n’a été suivie d’aucun effet. 

La récente décision européenne sur les produits importés d’Israël non étiquetés lorsqu’ils proviennent des territoires occupés a été évoquée également de manière amère.

La réaction d’Israël a été jugée trop tardive, mais cet Etat s’est rattrapé depuis qui consacrerait 60 millions de dollars à la lutte anti BDS. Et interdit l’entrée du territoire à certains. Bref, le boycott est inefficace, antisémite et s’acoquine avec l’islamisme radical. Il a même été dit que le boycott finit par mener aux meurtres de juifs…

Nous sommes partis au début du « débat », lassés d’entendre tant de contre-vérités et convaincus de l’inutilité d’intervenir dans ce public convaincu d’avance. D’ailleurs, notre sortie, un membre de ce public s’est retourné pour dire: « On ne l’a pas boycotté celui-là? »

L’impression globale laissée est celle d’une grande faiblesse des positions des anti-BDS qui tablent sur l’adoption de la loi Maillard, dont il est déjà certain qu’elle ne passera pas.

Les sionistes, et Israël, sur cette question du boycott, ont d’ores et déjà perdu le combat. Et les récents déboires électoraux et judiciaires de Netanyahou et Gantz ajoutent à cette désorientation des partisans de l’Etat sioniste. Reste à continuer la lutte aux côtés du peuple palestinien pour le respect du droit international, le retour des réfugiés, et un Etat palestinien sur tout le territoire avec des droits égaux pour toutes les populations qui y vivent.

Strasbourg, le 22 novembre 2019

Shlomo ben Jacov

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