Dès le matin suivant, la presse toujours en mal de sensation, en faisait ses gros titres. Le midi même, un texte de revendication était publié d’abord sur Indymedia Grenoble, puis sur notre site. Le ministre de l’intérieur Gégé la collombe (des gardien.e.s de la « paix »), déjà bien en difficulté devant la grogne des pauvres policier.e.s ces derniers temps, ne pouvait que réagir et balance un tweet en soutien à ses sbires. L’AFP a d’ailleur publié sur Indymedia Grenoble un très bon résumé de cette histoire médiatique.

Le soir même, les personnes hébergeant le nom de domaine indymedia.org reçoivent une injonction du ministère de l’intérieur de supprimer cette contribution d’Indymedia Grenoble, suivie de près par une autre pour Indymedia Nantes.

Comme on pouvait s’y attendre, la fumeuse raison invoquée est « la provocation à des actes de terrorisme ou apologie de tels actes » (article 421-2-5 du code pénal). Les dispositions de la LCEN (voire en fin d’article) sont utilisées pour menacer de blocage et de dé-référencement (supression du site des moteurs de recherche) si la contribution n’était pas supprimée avant les 24h.

Le collectif de modération s’est donc retrouvé devant le choix difficile : laisser la contribution en ligne, et se faire couper de l’internet non torifié (autrement dit de 80% des visiteurices du site), ou céder à la pression et cacher la contribution.

Il n’y a pas de réponse simple dans ce cas de figure, et céder aux intimidations du ministère de l’intérieur ne nous enchante pas pour ce que cela signifie à l’avenir en terme de censure. D’un autre côté, cette contibution est en ligne depuis deux jours, et a pu être lue depuis par beaucoup de monde.

Elle a même depuis été recopié sur de nombreux sites. Nos courageux.ses camarades du Daubé ont même pris l’initiative de la recopié intégralement (à 13h36), même s’il semble qu’iels n’aient toujours pas compris qu' »anarcho-libertaire » est encore une de ces inventions sans queue ni tête de journaleux.

Décidement l’effet Streisand (aussi appelé flamby dans nos contrées) aura raison des tentatives de censure de contenu sur le Web. Même si cet article est maintenant aussi disponible sur des sites comme archive.org, nous appelons tous les collectifs désireux de nous soutenir à relayer cette revendication ainsi que cette histoire.

Mais risquer de voire le site coupé, c’est aussi invisibiliser encore un peu plus tous les autres gestes de soutien qui se sont produits ces derniers temps et qui ont été revendiqués ici, ainsi que toutes les autres communiqués d’actions qui remplissent notre colonne globale (et parfois locale) depuis des années. C’est aussi enlever un des outils qui permet au niveau local de s’organiser et de diffuser de l’information depuis les luttes et par les luttes, ainsi que toutes leurs archives que nous hébergeons.

A Indymedia Nantes, nous considérons que ces actes sont des actes de résistances et font partie des moyens que les personnes en lutte peuvent parfois utiliser contre les gouvernements et patrons qui continuent chaque jour d’intensifier l’exploitation et les dominations que nous subissons.

Il y a malheureusement bien peu d’endroit que le Web ou ces revendications peuvent être rendue publique, et c’est bien là l’une des volonté de cette menace : faire en sorte que ces actes de révolte soient invisibilisés (en plus de lécher les porteurs de bottes dans le sens du poil pour les calmer).

Devant l’intensification des tensions sociales que nous vivons, il n’est pas surprenant que le gouvernement essaye de censurer les expressions de résistance. La question de comment l’empêcher de policer ces expressions (et les autres) sur le Web nous semble être encore ouverte.

Ce n’est pas la première fois que nous sommes mis au devant de la scène pour les contributions que nous recevons. Nous y sommes même maintenant presque habitué.e.s depuis que nous sommes cité.e.s dans toutes les affaires qui agitent le monde judiciaire contre la fameuse « mouvance anarcho-autonome ». Cela dit nous aimerions rappeler à nos aimables contributeurices que cette position n’est pas toujours très confortable, et que même si nous prenons des précautions (et que espérons le vous le faites aussi), la façon dont les actes sont revendiqués peut parfois aider à éviter ce genre de mésaventures.

Comme le disent si bien les compagnons.nes d’Indymedia Grenoble : Ce qui nous touche aujourd’hui, c’est ce qui peut toucher tous les autres médias dans les temps à venir.

Détail des articles de la LCEN invoqués (courriel visible sur Indymedia Grenoble en entier):

– Article 6-1 de la loi N°2004-575 du 21 juin 2004 modifiée pour la confiance dans l’économie numérique, tel que modifié par l’article 12 de la loi N°2014-1353 du 13 novembre 2014 renforçant les dispositions relatives à la lutte contre le terrorisme
– Décret N°2015-125 du 5 février 2015 relatif au blocage des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique
– Décret N°2015-253 du 4 mars 2015 relatif au dé-référencement des sites provoquant à des actes de terrorisme ou en faisant l’apologie et des sites diffusant des images et représentations de mineurs à caractère pornographique