sur l’idéologie anti-islamophobe
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Ce texte entend répondre à ceux qui, parmi les communistes libertaires, sont engagés dans un combat contre « l’islamophobie » et, à ce titre, prétendent interdire toute critique de l’islam et promouvoir une théorie de la « race sociale », dans un climat pour le moins générateur de tensions, d’accusations de racisme, et même d’attaques caractérisées.
S’il date vraisemblablement du début du siècle dernier, c’est depuis peu que le terme « islamophobie » a fait une percée fulgurante comme appellation du racisme contre « les Arabes ». On passe ainsi du racisme anti-maghrébin à l’effroi ou l’horreur suscités par la religion des musulmans. Les immigrés et leurs descendants ne seraient plus rejetés pour des raisons « ethniques » mais pour leur appartenance supposée à une culture originelle identifiée à l’une de ses dimensions : la religion musulmane – qu’ils sont pourtant nombreux à ne pas pratiquer, et ceci même lorsqu’il leur arrive d’en conserver quelques traditions devenues coutumières.
Se joue là un tour de passe-passe qui assimile la « race » à la religion en tant que matrice culturelle. On est face à une « mystification conceptuelle (…), l’assignation de tout un pan d’individus, en fonction de leur origine ou de leur apparence physique, à la catégorie de « musulmans », permettant de faire taire toute critique de l’islam, parce que celle-ci ne rentrerait plus dans la critique des religions, mais directement dans le domaine du racisme »(1) . Si Claude Guillon voit du « mépris » dans cet « antiracisme des imbéciles » (2), nous y décelons surtout ce spectre qui hante la gauche : le tiers-mondisme, idéologie qui conduit à adopter de façon acritique le parti de « l’opprimé » contre celui de « l’oppresseur ». C’est ainsi que, pendant la guerre du Vietnam, dénoncer les Américains entraînait le soutien au Viet Minh et à la politique d’Ho Chi Minh, dont les comités Vietnam scandaient le nom et brandissaient le portrait à longueur de manif ; comme aujourd’hui, défendre les Kurdes peut impliquer de soutenir le PKK et de brandir le portrait d’Oçalan. Ce qu’il s’est passé pendant la guerre d’Algérie où ceux qui, voyant dans le « colonisé » l’exploité par excellence, ont soutenu inconditionnellement le FLN, s’est reproduit face à la révolution iranienne de 79 et chez les pro-Palestiniens. Le tiers-mondisme a ainsi abandonné petit à petit le prolétariat comme sujet révolutionnaire pour lui substituer le colonisé, puis l’immigré, puis les descendants d’immigrés… et enfin les croyants. Le tiers-mondisme originel avait promu le relativisme culturel, ses successeurs ont adopté le culturalisme, qui prétend expliquer les rapports sociaux par les différences culturelles. C’est dans les années 80, avec la grande manipulation de SOS Racisme, que ce glissement est devenu une doctrine qui donnera naissance à toutes les dérives actuelles, jusqu’à assigner une identité musulmane à tous les immigrés « arabes » et leurs descendants.
Devant le constat du glissement opéré au sein de toute une partie de la gauche vers l’idéologie culturaliste, il est intéressant de pointer que celle-ci est devenue, après 1968, l’angle d’attaque d’un courant d’extrême-droite : la Nouvelle droite. Son rejet de l’immigration ne repose plus sur un racisme biologique mais sur l’idée d’assignation identitaire, basée sur une vision figée des sociétés dans des traditions anciennes, et sur la nécessité, comme garantie de paix sociale, de conserver des cultures homogènes. Selon les élucubrations des néo-droitiers, pour qui les conflits sont ethno-culturels et pas de classes, les Maghrébins, par exemple, assignés à la culture musulmane, doivent en conséquence rester dans leur pays d’origine pour vivre leurs traditions entre eux ! Au passage, Alain de Benoist, chef de file de la Nouvelle droite, défend des luttes tiers-mondistes et anti-impérialistes, et nie le caractère raciste de sa « défense de l’identité européenne ». Cette évolution du discours raciste est à l’œuvre depuis quelques années au sein d’une autre formation d’extrême-droite, en quête de respectabilité, le Front national, qui reprend en partie la rhétorique de la Nouvelle droite : le problème ce n’est plus les « immigrés » mais les « musulmans ».
C’est ainsi que l’on en vient, de bords a priori radicalement opposés, à adopter un discours identitaire qui considère que tous ceux qui ont un lien d’origine ou familial avec l’un ou l’autre pays du Maghreb (ou d’autres pays « arabes ») doivent se considérer comme musulmans, sous l’appellation aberrante de « Français d’origine musulmane ». Alors que ce n’est pas en raison de la religion qu’ils pratiquent ou qu’on leur prête qu’ils sont discriminés mais parce que ce sont des travailleurs immigrés ou issus de familles ayant immigré. Ce n’est pas l’identité qui est en jeu mais l’appartenance de classe. Cette « origine musulmane », qui fait bondir les athées d’origine maghrébine, travestit un stigmate social en stigmate culturel. L’Etat et les media ne s’y trompent pas quand ils font du « musulman », forcément islamiste (et plus ou moins modéré ou radicalisé), la nouvelle caractérisation du membre de la classe dangereuse (3).
C’est sur ces bases que l’idéologie identitaire anti-islamophobe vient s’associer, notamment chez certains marxistes, à celle de la « race sociale », chimère universitaire d’importation récente, qui tente de plaquer ici le schéma racial et communautaire de la société américaine. Cette vision « racialiste » (4) qui prétend créer une nouvelle classe de « race » ne sert en réalité qu’à masquer, voire à nier, la réalité du rapport social capitaliste : l’exploitation des prolétaires, de tous les prolétaires, quels que soient leur origine, leur couleur de peau, leur religion et leurs us et coutumes personnels. La justification en serait que le racisme aurait été indispensable au développement capitaliste parce qu’il justifierait le colonialisme. En réalité, inférioriser l’opprimé a toujours été une stratégie de pouvoir qui s’applique à tous les opprimés quelle que soit leur supposée « race ». Maintenir dans leur condition les serfs, les paysans pauvres, les esclaves puis les ouvriers, passe notamment par les empêcher de s’exprimer et d’avoir accès à l’éducation, au prétexte qu’ils seraient trop bêtes et ignares pour cela, qu’ils appartiendraient à une catégorie inférieure. Rappelons que les Anglais ont durement colonisé et pillé les Irlandais et les Russes les Ukrainiens sans avoir besoin d’une telle justification. Et, dans leur ensemble, pillage et colonisation, tout comme l’exploitation proprement dite, n’ont pas besoin de quelconque excuse.
Et pourtant, le racisme existe bel et bien et le rejet du « musulman » pauvre et immigré est l’une de ses manifestations. Le discours du FN, du Bloc identitaire et de Pegida contre l’islam n’est que l’arbre qui cache la forêt : ce sont simplement des racistes qui veulent que les immigrés dégagent. L’argument culturel est sans doute plus respectable à leurs yeux que les vieilles lunes racistes basées sur des caractéristiques qui seraient innées (les Noirs sont comme ci, les Arabes comme ça…). Cette stratégie leur permet aussi de ratisser plus large, d’autant que ces mouvements exploitent à leurs fins racistes la montée réelle de l’islam radical. Si l’immigration est pour eux le fond du problème, ils se raccrochent à des arguments plus honorables tels que la défense de la laïcité ou le combat contre le sexisme. Mais, en réalité, que les immigrés (pauvres, bien sûr) soient ou non musulmans, ils sont toujours pour eux des indésirables.
Le racisme, comme la xénophobie, est un outil qu’utilisent les dominants contre les dominés. Ainsi, Fredy Perlman écrit : « les colons-envahisseurs d’Amérique du Nord avaient recours à un outil qui n’était pas, tel la guillotine, une nouvelle invention, mais qui était tout aussi mortel. Cet instrument sera plus tard nommé racisme et s’intègrera dans la pratique nationaliste (…). Les gens qui avaient abandonné leurs villages et leurs familles, qui étaient en train d’oublier leur langue et qui perdaient leur culture, qui étaient dépouillés de tout sauf de leur sociabilité, étaient manipulés afin de considérer la couleur de leur peau comme substitut à ce qu’ils avaient perdu » ; « le racisme avait été une arme parmi d’autres pour mobiliser les armées coloniales (….) et elle n’a pas supplanté les autres méthodes, elles les a plutôt complémentées » (5). Il s’agit de créer des catégories permettant de diviser pour prévenir ou écraser les rébellions et les luttes sociales. C’est ce qu’a fait, en Algérie, le gouvernement français en 1870, en octroyant par décret (la « loi Crémieux ») la nationalité française aux « indigènes israélites », les séparant arbitrairement des « indigènes musulmans ». L’appartenance « religieuse » a également été utilisée pour écraser les luttes sociales en ex-Yougoslavie avec la fabrication d’une « nationalité musulmane » inconnue, dressant les uns contre les autres des gens qui vivaient jusque-là tous ensemble.
Les divisions raciales deviennent, logiquement, particulièrement opérantes dans les périodes de crise où le revenu s’effondre et où l’emploi vient à manquer. C’est sur ce terrain que le FN parvient à conquérir les anciens bastions ouvriers de la gauche. Et, même à l’époque du plein-emploi, le pouvoir et ses media ont toujours plus ou moins entretenu la xénophobie, encourageant la stigmatisation successive de chacune des différentes vagues de travailleurs immigrés (les « Polaks », les « Macaronis », « les Portos », etc.). La grande différence était que, dans les unités de travail, la solidarité ouvrière prévalait sur les préjugés et que tout le monde travaillait et combattait au coude à coude. Mais c’était avant….
Quant au terme « islamophobie », le problème ne réside en réalité pas dans la notion elle-même mais dans l’usage qu’en font ceux qui la manipulent. On retrouve d’ailleurs les mêmes usages manipulatoires de la notion d’antisémitisme lorsque ce terme est donné pour un équivalent de l’antisionisme et achève sa course en « judéophobie », avec l’affirmation que la critique du sionisme ne peut qu’être une attitude raciste vis-à-vis des « juifs » et non une critique du caractère colonisateur de l’Etat confessionnel qu’est Israël.
L’islam politique vise, comme le dit Claude Guillon, à faire de « l’islamophobie une arme de guerre idéologique contre l’athéisme »(6) et, plus largement, un vecteur de propagande pour la religion musulmane. Les anti-islamophobes d’extrême gauche ont des positions pour le moins ambivalentes par rapport cet islam politique. Ils prétendent ainsi interdire toute critique de la religion musulmane donnée pour une pratique raciste, dans une posture moralisatrice révélatrice d’un manque d’analyse de l’évolution de l’islam politique dans le monde depuis la révolution iranienne de 1979. Quand ils n’en viennent pas à en nier l’existence même. Face au djihadisme, nos anti-islamophobes ne se laissent pas pour autant désarçonner. Après chaque attentat commis par les djihadistes en Europe (qui s’ajoute à la longue liste de leurs forfaits, notamment sur le continent africain et au Moyen-Orient), ils s’inquiètent surtout de la recrudescence d’« islamophobie » (et aussi, à juste titre, des politiques répressives) que cela risque d’entraîner et pointent comme seul responsable l’impérialisme occidental. Ainsi, selon eux, les attentats de Paris du 13 novembre 2015 ne seraient qu’une répercussion des guerres menées par l’Etat français en Irak, en Libye, au Mali… Les intérêts de ce dernier dans les enjeux géopolitiques au Moyen-Orient et en Afrique sont évidents, mais insuffisants pour expliquer l’émergence et la persistance de l’Etat islamique (7) ou de Boko Haram. Ces discours permettent tant bien que mal aux anti-islamophobes de passer sous silence les implications réelles de l’islam radical dans les attentats, ici et ailleurs dans le monde, et de nier la capacité d’initiative de leurs auteurs, jusqu’à dédouaner les frères Kouachi ou Coulibaly parce qu’ils sont prolétaires et « issus de l’immigration ». On retrouve ici l’idéologie victimaire qui assigne non seulement des individus et des groupes à des identités (les femmes, les « racisés », etc.), mais aussi à des statuts figés de victimes et d’opprimés dont il ne faudrait pas critiquer les choix et les pratiques, même les plus réactionnaires. De telles postures idéologiques amènent à occulter le caractère contre-révolutionnaire de l’islam radical qui, depuis plusieurs années, connaît en Europe occidentale (sans oublier bien sûr le Maghreb et le Moyen-Orient) une progression, même s’il reste minoritaire par rapport à l’ensemble de la population qui se dit musulmane. Alors qu’il était marginal, voire quasi inexistant, l’islam radical, dont la forme la plus courante aujourd’hui est le salafisme, s’est largement répandu.
Pour ces gentils anti-islamophobes, il s’agirait tout bonnement de considérer la religion musulmane avec la plus grande bienveillance parce que ce serait la « religion des opprimés ». Ils semblent oublier que la fonction même de toute religion est le contrôle social et, en l’occurrence, l’islam politique ne cesse d’affirmer partout sa vocation à contrôler au plus près la société qu’il entend régir. Ainsi, le salafisme occupe suffisamment le terrain dans certains quartiers urbains pauvres pour pouvoir exercer un contrôle social : pendant les émeutes de 2005, les salafistes ont d’ailleurs tenté de ramener l’ordre dans certaines banlieues. L’évolution de cette tendance s’inscrit dans un contexte de crise économique, marquée par le développement du chômage de masse, d’attaques sur les salaires mais aussi de recul des politiques sociales de l’Etat. Pour les pallier, les salafistes ont su mettre en place des réseaux d’entraide économique, ce qui leur permet d’avoir une emprise sur les populations.
Ne pas perdre de vue ce rôle des religions nous semble indispensable. « Une religion est en effet un ensemble de croyances métaphysiques qui portent en elles des règles de vie bien précises, basées sur la tradition et la morale, auxquelles l’individu doit se soumettre. Il s’agit d’un rapport social, une forme de mise au pas de chaque individu et des masses dans leur ensemble. Elle recouvre en outre un rôle de justification du pouvoir, de garant de la tradition et de l’ordre établi, plus généralement d’une certaine « pacification » sociale. Cela à travers une interprétation organiciste de la société, une exaltation des hiérarchies, le refus de l’autonomie individuelle. Souvent la religion est aussi un moyen de diriger la conflictualité sociale vers des cibles fictives, ou de la brider en faisant miroiter un paradis futur. Le paradis, ce triste mensonge qui garantit la paix pour les puissants, ici et maintenant. En donnant un espoir dans la transcendance, la religion étouffe la plupart des poussées révolutionnaires des exploités ici-bas et maintenant. Le beau passage de Bakounine, “Si Dieu existait réellement, il faudrait le faire disparaître” pointe précisément le fond du problème de la religion : l’idée de divinité est la base conceptuelle de l’autorité et sa contrepartie, la foi, celle de l’acceptation de la servitude »(8).
Si la foi et les interrogations métaphysiques sont affaires personnelles et si l’on peut se trouver au coude à coude dans une lutte avec quelqu’un qui se dit croyant sans que cela pose problème, nous voulons pouvoir affirmer haut et fort que nous sommes athées. Affirmer notre athéisme et critiquer toutes les religions est indissociable de nos positions politiques et nous entendons librement pratiquer tant le blasphème que la dénonciation, au minimum, des pratiques religieuses et/ou coutumières coercitives, mutilantes ou humiliantes, ainsi que du statut inférieur assigné aux femmes par toutes les religions monothéistes (pour les autres, on verra une autre fois).
Enfin, précisons que, pour nous, il n’existe que deux classes, celle du capital et celle du travail. Même si, au sein de la classe exploitée, certains sont plus exploités que d’autres en raison de leur sexe et de leur origine, ils ne constituent pas une classe, ils en sont des segments créés par le pouvoir et les exploiteurs. La pensée bourgeoise, quel que soit son supposé bord politique, trouve là un moyen de diviser le prolétariat, de stimuler la concurrence entre les travailleurs et d’endiguer ainsi les luttes sociales. Parce que toute division de la classe du travail ne fait qu’affaiblir sa capacité de lutte et que la segmenter pour mieux la diviser permet à la classe du capital, particulièrement en période de crise, de jouer sur la concurrence de tous contre tous. Ce n’est pas par l’anti-racisme qu’on combat le racisme mais par la lutte des classes. Si l’on en est au point où « Penser avec la race devient un impératif incontournable » et que « tout refus de ce vocabulaire et de ce qu’il charrie sera systématiquement considéré comme de la dénégation, voire du déni, et tombera sous le coup du dispositif accusatoire » (9), cela ferait des racistes de ceux qui, comme nous, n’adhèrent pas à cette vision. Et ça nous semble un peu fort de café !
Mai 2016
Flora Grim et Alexandra Pinot-Noir
(1) Cassandre, Nos « révolutionnaires » sont des gens pieux, sur le blog de Ravage Editons, https://ravageeditions.noblogs.org/
(2) Claude Guillon, Et Dieu créa l’islamophobie, sur son « blogue généraliste » Lignes de Force : https://lignesdeforce.wordpress.com/
(3) Louis Chevallier, grand historien bourgeois néanmoins passionnant, « Classes laborieuses, classes dangereuses », Perrin
(4) Terme emprunté aux auteurs de « Tiens ça glisse », sur le blog http://racialisateursgohome.noblogs.org, qui nomment « racialisation toute analyse contribuant à développer ou à diffuser une théorie de la race »
(5) Fredy Perlman , L’Appel Constant du nationalisme in Anthologie de textes courts, Ravage Editions (6) Claude Guillon, op. cit.
(7) Pour une analyse approfondie, voir P.J. Luizard, Le Piège Daech, La Découverte
(8) Cassandre, op. cit.
9 « Tiens ça glisse », cf note 4
Ces procès d’intention contre les anti-racistes, donc les anti-islamophobes, c’est le fonds de commerce des suprémacistes qui non seulement ne font rien contre le racisme, mais qui voudraient empêcher les autres de le faire.
Aucun argument nouveau n’est avancé et aucune réponse n’est faite aux antiracistes qui prétendent soutenir les racialisé-e-s sans leur demander au préalable de se justifier sur leurs idées politiques ou religieuses et de s’aligner sur leur idéologie laïque d’Etat.
C’est un monologue obsessionnel, où par exemple les positions libertaires contre l’islamophobie sont tout simplement niées, et ramenées à un soutien de la religion et traitées de « racialistes ». A partir du moment où aucun débat n’est possible et où les soi-disant discussions se résument à des procès dans le style de La Discordia, la seule chose à faire, c’est de présenter nos positions, quitte à se répéter, et laisser les obsédés de l’islam se fatiguer avec leurs phobies. Ce qui serait grave, c’est qu’on puisse penser qu’ils représentent la pensée libertaire. Heureusement, ce n’est pas le cas, les libertaires se sont exprimés clairement sur ce point :
« Depuis 10 ans et la première loi anti-voile, se propagent sur les plateaux télévisés et dans plusieurs organes de presse des propos qui heurtent les militant-e-s libertaires que nous sommes. Nous, libertaires contre l’islamophobie, sommes souvent aussi engagé-e-s sur le terrain des luttes antiracistes, des luttes des quartiers populaires, contre les crimes et violences policières, dans la solidarité avec la Palestine, ou encore dans le combat féministe radical…
En effet, les luttes concernant directement certaines populations, les «damnés de l’intérieur» selon l’expression du sociologue Mathieu Rigouste, sont trop souvent sous-estimées. La peur de l’islam, les discours sur les échecs de l’intégration, la mobilisation de la rhétorique islamophobe est devenue l’arme ultime permettant de justifier la politique xénophobe, répressive, inégalitaire ainsi que les discriminations ou encore les guerres impérialistes. A cette offensive, nous devons opposer une résistance totale et ne pas nous couper des premier-e-s visé-e-s.
C’est pourquoi des militant-e-s libertaires, détaché-e-s des préjugés qui parasitent les milieux de gauche et conscient-e-s de l’enjeu central que représente la lutte contre l’islamophobie, ont décidé à l’automne 2012, suite à la Une islamophobe de Charlie Hebdo et aux débats internes au sein de l’anarchosphère après le chahutage de Caroline Fourest à la Fête de l’Humanité, de rédiger un appel: « Libertaire et sans concession contre l’islamophobie » (1). C’est également dans cet esprit que nous avons décidé d’apparaître le 15 mars dernier au rassemblement initié par le Collectif Féministe Pour l’Égalité. Au-delà de l’impératif d’une opposition large à ces offensives racistes ciblant spécifiquement les musulman-e-s, la motivation de cette apparition était de porter clairement deux messages:
-Une parole politique libertaire forte contre l’islamophobie et pour la construction d’une riposte antiraciste large, afin d’unir toutes les victimes du racisme d’état (sans-papiers, immigré-e-s, français-e-s issue-s de la colonisation, roms, noir-e-s, arabes, musulman-e-s, asiatiques…) sans en laisser sur le bord de la route!
– Un refus de l’utilisation de nos arguments libertaires pour légitimer l’islamophobie, une façon de dire: Pas en notre nom!
Noyée dans un fatras d’arguments pseudo-laïques, pseudo-féministes, pseudo-progressistes avancés par des personnalités telles Michel Onfray ou l’équipe de Charlie Hebdo, émerge aussi parfois de leur discours l’auto-affirmation de leur sensibilité libertaire, en réalité l’usage d’un lexique libertaire se réclamant du combat antireligieux des anarchistes, de l’impertinence, la provocation, la liberté d’expression, etc. Quelle qu’en soit la forme, le rapprochement entre l’islamophobie de ces individus et nos convictions libertaires nous est intolérable. D’autant que cette tendance traverse également notre courant politique. » […]
https://quartierslibres.wordpress.com/2014/07/25/pas-dislamophobie-au-nom-des-idees-libertaires/
Libertaires contre l’islamophobie – Tract du 17 avril 2016
« Depuis le début des fortes mobilisations contre le projet de loi travail Valls-El Khomri, voilà que le voile réapparait subitement dans le débat médiatique et politique, (propos de Rossignol sur la mode islamique, propos de Valls proposant l’interdiction du voile à l’université). Une nouvelle fois, les sorties islamophobes des responsables politiques, systématiquement relayées par les grands médias, font offices d’écrans de fumée permettant d’occulter les questions réellement importantes (casse du code du travail et hypothèque de notre avenir, affaire Panama Papers, violences policières,…). Tous ces sujets deviennent inaudibles, le problème devient le méchant voile ! On constate donc que le racisme n’est pas une question indépendante qui n’aurait pas de rapport avec la mobilisation actuelle, au contraire, il nous concerne tous plus que jamais.
L’islamophobie s’est installée en France, comme instrument de pouvoir visant à stigmatiser les musulman-e-s, souvent à travers la figure de l’arabe et du noir issus des quartiers populaires. L’islamophobie est le racisme qui vise le rejet des personnes de confession musulmane ou perçues comme telles. Ce racisme joue sur la peur d’une fantasmée « islamisation de la France », et pour ces raisons, son expression peut aller de la xénophobie classique jusqu’à un rejet qui se cache, consciemment ou inconsciemment, derrière la défense de la laïcité et la critique de la religion. L’islamophobie s’est matérialisée en France, sur les plans juridique et institutionnel autour des affaires de voile (débat et de la loi de 2004 visant le foulard à l’école, 299 et lois visant le nikab, circulaire Châtel visant les mères voilées accompagnatrices de sortie scolaire).
Nous, militant-e-s libertaires, anticapitalistes, décoloniaux, internationalistes, luttons contre toutes formes de dominations d’Etat, contre le sexisme, pour une société autogérée, solidaire et égalitaire et considérons que la lutte radicale contre l’islamophobie d’Etat constitue dans la période actuelle un enjeu majeur :
– car il s’agit de la construction d’un racisme respectable, qui depuis 30 ans vise à remettre à la place d’ »invisible » et de « subalternes » celles et ceux qui parmi nous, français-e-s issu-e-s de la colonisation, immigré-e-s et plus généralement les habitant-e-s des quartiers populaires racisé-e-s, chaque fois qu’il nous vient l’idée de nous révolter, de réclamer l’égalité et la justice. Pour ces raisons nous combattons également les injonctions à l’intégration-assimilation qui accompagnent l’islamophobie et toute autre forme de racisme.
– car l’islamophobie justifie la xénophobie, la chasse aux sans-papiers et aux réfugié-e-s (avec l’argument selon lequel il faudrait stopper l’immigration qui « islamiserait la France »). Au nom de la lutte contre le terrorisme on justifie la répression, le recul des libertés (Etat d’urgence actuel) on justifie les violences policières et on justifie également les guerres impérialistes (depuis 15 ans: Afghanistan, Irak, Mali, Syrie, Libye etc.), dont les vrais motifs, nous le savons, sont économiques et stratégiques (pétrole, gaz, uranium). On justifie également le soutient à l’apartheid israélien (Israël perçu comme rempart du monde libre face aux « barbares musulman-e-s »), à l’instar de la pensée du projet sioniste.
– car l’islamophobie crée et justifie des discriminations (légales, comme les lois visant les femmes voilées, et illégales, comme le délit de faciès en direction des musulman-e-s) qui soumettent toujours davantage à la précarité les travailleurs et travailleuses des quartiers populaires, contraint-e-s au déclassement professionnel par peur du chômage, et ceci pour le plus grand plaisir du patronat.
– car l’islamophobie touche avant tout les femmes en termes de violences et d’agressions. Les lois anti-voile répriment et excluent des femmes, stigmatisent et infériorisent les femmes voilées en les présentant à la fois comme victimes et coupables.On leur refuse ainsi toute parole politique, l’islamophobie a donc une très forte dimension sexiste.
– car l’islamophobie favorise la montée de l’extrême droite et de tous les courants réactionnaires, tandis que le « deux poids deux mesures » entretenu par Valls entre islamophobie et antisémitisme favorise la montée de ce dernier notamment en suscitant une forme d’hostilité intercommunautaire, qui nourrie les courants réactionnaires et complotistes divers qui n’hésitent pas à exploiter ce vieux fond de commerce qu’est l’antisémitisme.
– enfin, car comme tous les racismes, l’islamophobie divise les travailleurs et travailleuses que l’on oppose à celle et ceux des classes populaires au profit du patronat (diviser les travailleurs et travailleuses en fonction de l’origine, la couleur ou la religion et unir le patron et le travailleur blanc ou la travailleuse blanche contre l’autre, l’immigré-e, les non blanc-he-s, musulman-e-s désigné-e-s comme bouc-émissaires). Elle divise aussi les immigré-e-s, les habitant-e-s des quartiers et même les musulman-e-s entre elles/eux, mais divise également et oppose les femmes entre elles. Or pour combattre toutes les dominations, pour réclamer la justice, il faut s’unir!
Nous, militant-e-s libertaires, constatons que l’ensemble de la classe politique est traversée par l’islamophobie (au nom d’une soi-disant laïcité), y compris dans le mouvement social, l’extrême gauche et le mouvement libertaire (au nom d’un athéisme fourvoyé), et pour ces raisons nous décidons de nous engager radicalement contre l’islamophobie, de favoriser et d’accompagner l’engagement des premier(ère)s concerné-e-s et visé-e-s par ce racisme, et nous unir quelque soit nos origines sociales, raciales ou de genre , croyant-e-s et non croyant-e-s, voilées et non voilées, afin de construire la solidarité populaire dont nous avons besoin en ces temps de régression sociale et de durcissement sécuritaire, mais également afin de porter haut et fort nos aspirations communes en vu de l’émergence d’une société solidaire, égalitaire et libertaire. »
http://www.bboykonsian.com/Libertaires-contre-l-islamophobie-Tract-du-17-avril-2016_a3452.html
Ce que les libertaires attendent, c’est une réponse à ces positions précises, et non des procès d’intention sur leurs rapports avec la religion ou le « racialisme » des antiracistes non-blancs.
Ainsi, l’anti-islamophobie serait une IDÉOLOGIE ? Pas un antiracisme, pas une position politique, pas une réaction à l’idéologie dominante, pas un combat nécessaire, non, juste une IDÉLOGIE dont on peut débattre tranquillement entre initié-e-s !
Ce n’est pas étonnant que d’anciens camarades soient devenus beaufs et racistes quand leur lutte se résume à l’équivalent d’un Café du Commerce pour libertaires retraités. La position des libertaires :
[…] « Il est bien évident que les libertaires responsables rejettent totalement les accusations et les insultes de ce pamphlet inacceptable. La hiérarchisation des victimes et de l’indignation n’est pas tolérable venant de personnes qui continuent à se dire libertaires. C’est qui ces militants qu’on ne voit jamais mais qui ont l’air de connaître mieux que nous nos positions devant certains crimes et pas d’autres, et qui les jugent à l’aune de leurs propres valeurs ? Et qui ne supportent pas qu’on combatte le racisme parce qu’ils ont décrété qu’il n’y avait qu’UN racisme, celui défini par la pensée dominante dont ils font maintenant partie !
Leur radicalité et leur purisme idéologique ne nous impressionnent plus depuis longtemps. Ils ne viennent pas dans nos manifs parce qu’ils ont peur de rencontrer des religieux, des femmes avec des foulards ou des nationalistes, mais ils n’ont pas peur d’aller dans des manifs où il y a Hollande, Valls, Sarkozy, Merkel, Porochenko, des flics, des juges, des militaires, des curés, des rabbins et même des imams présentables… Ils n’ont pas peur non plus de nous donner en exemple le capitaine Dreyfus et l’antisémite Bernard-Lazare. Comment veulent-ils qu’on les prenne au sérieux quand ils nous brandissent leurs slogans contre la religion, l’Etat, l’armée, la justice, le capitalisme ?
On a bien compris leurs positions, et ce n’était pas la peine de se lancer dans des explications aussi embrouillées pour en arriver à une conclusion très claire et qui résume parfaitement ce texte :
« nous revendiquons pleinement le droit au mouvement libertaire de ne pas être islamophile, NI DE CRAINDRE D’ÊTRE CATALOGUÉ COMME ISLAMOPHOBE »
Tout est dit, et, pour paraphraser P.V. : un chat est un chat, et un raciste est un raciste. Il serait temps que les libertaires qui n’ont pas peur « d’être catalogués comme islamophobes » acceptent de CONNAÎTRE nos positions, à défaut de les admettre :
– L’islamophobie est un racisme, au même titre que l’antisémitisme ou le sionisme, et nous savons très bien faire la différence entre blasphème et racisme, on ne nous aura pas avec ce genre d’hypocrisie.
– Nous ne sommes ni islamistes, ni musulmans, ni même croyants, mais nous n’imposons pas nos idées libertaires par la force, à la manière des colons imbus de leur supériorité occidentale. Nous lutterons toujours contre l’obscurantisme, religieux ou laïque, mais nous ne méprisons pas ceux qui n’ont pas eu la chance comme nous d’avoir accès à un milieu permissif.
– Nous sommes partie prenante de tous les combats contre la discrimination et l’asservissement des femmes, musulmanes et non musulmanes, mais nous ne prendrons pas prétexte de leur situation pour leur imposer notre mode de vie et nos coutumes, vestimentaires et autres, pour nous croire supérieurs et nous autoriser des attitudes sexistes et paternalistes ; et dans tous les cas nous refuserons toutes les lois discriminatoires. Ces bonnes âmes qui rêvent de déshabiller les femmes musulmanes nous rappellent trop les résistants de la dernière heure qui tondaient par patriotisme les femmes coupables de « collaboration horizontale » avec l’ennemi.
– Nous dénoncerons tous les crimes, et pas seulement ceux qui nous arrangent. Nous refuserons toute hiérarchisation des victimes, la mort atroce d’enfants dans des attentats terroristes n’est pas pire que la mort de milliers d’enfants sous les balles ou les bombes des Etats.
– Nous continuerons notre lutte contre le racisme, le fascisme, l’impérialisme, le colonialisme, le sionisme, sans attendre que les populations qui demandent notre aide aient adhéré à nos convictions politiques ; notre solidarité contre les nettoyages ethniques et les crimes contre l’humanité ne sera pas conditionnée à une caution idéologique des victimes. Il est aussi indécent de demander aux Palestiniens de se justifier par rapport à la religion et au nationalisme avant de leur apporter notre aide qui si on avait demandé la même chose aux juifs pendant la période nazie.
– Nous refusons la liberté d’expression à deux vitesses, les tabous, le droit au blasphème pour certains et pas pour les autres. Nous ne nous laisserons pas insulter ni accuser de faire le jeu des antisémites et des terroristes parce que nous ne rentrons pas dans l’union nationale.
– Nous ne laisserons pas des gens qui ne viennent jamais manifester avec nous nous dire comment nous devons le faire et relayer les mensonges des médias du pouvoir qui nous accusent d’antisémitisme, comme cela s’est vu pour les manifs de solidarité avec Gaza.
– Nous ne sommes pas Charlie, nous sommes nous-mêmes. Nous avons été aux côtés de Charlie Hebdo dans les années 70, quand nous avions les mêmes ennemis et que nous partagions les mêmes valeurs, mais ça s’est arrêté quand ils sont passés dans l’autre camp. Ça fait plus de quinze ans que nous dénonçons la dérive de Charlie, son racisme, son sionisme, son ralliement aux valeurs de la République et à l’économie de marché, son atlantisme et son anticommunisme primaire, son soutien des guerres impérialistes, son sexisme et sa fausse impertinence, ses provocations islamophobes pour faire augmenter les ventes. Que des libertaires en aient fait le symbole de la « liberté d’expression » tout comme le pouvoir démontre l’abîme qui nous sépare… Nous ne sommes pas des girouettes, et aucun attentat ne peut nous faire changer de camp, surtout pour accéder à une respectabilité et une reconnaissance dont nous ne voulons pas… »
Protestation devant les libertaires d’hier sur leur capitulation devant la pensée dominante et l’union sacrée
https://nantes.indymedia.org/articles/31214
Merci de nous avoir donné LA position-des-libertaires (c’est à dire deux clampins déjà dégagés d’AL ou presque) dont tu nous rabâche les mirettes, jour après jour…..
Vous avez vraiment du temps à perdre contre deux clampins ! Ils doivent être vachement redoutables pour avoir mobilisé une telle énergie de super-militants radicaux.
Etant donné que les conclusions sont données avant même le débat, vous pourriez vous économiser du temps et de l’argent. A moins bien sûr que votre vie se résume à des procès déguisés en « débats ».
Si c’est Guillon qui sert de référence, tout a déjà été dit ici, suffit de le rééditer pour pas répéter toujours les mêmes choses :
https://nantes.indymedia.org/articles/31956
ou
https://nantes.indymedia.org/articles/31979
C’est n’importe quoi d’avoir publié ce texte en l’annonçant de cette manière.
Pour le débat du 13 juin, il y aura 2 textes, et l’autre sera d’une tout autre teneur ! Pour ainsi dire, il y aura vraiment deux positions qui s’opposeront (et sûrement plus que ça, en réalité).
Ce serait sympa aux modérateurs-modératrices de foutre ce texte à la poubelle ou d’enlever l’intro-présentation qui annonce le débat au Rémouleur.
A suivre.
Pour tout doute sur la demande, un contact:
leremouleur at riseup
Merci.
Euh.. pourquoi c’est n’importe quoi ?
« Débat contradictoire au Rémouleur le 13 juin 2016 à 19h30 avec les auteures du texte. »
C’est pourtant vrai. Après si t’aimes pas le texte ni le fait qu’il fasse l’objet d’un débat contradictoire au Rémouleur, ben l’option t’as déjà été laissée d’écrire un texte aussi, et que tu annonces déjà. Alors quoi ?
Merci au Remouleur d’être intervenu, je me doutais vaguement d’un truc comme ça à la lecture de l’intro et surtout la certitude d’un énième import de conflit avec l’avalenche de commentaires, sauf que vraiment pas le temps de chercher plus loin.
Du coup comme on a pour principe de pas modifier les textes, je le refuse.
Pour infos aux personnes qui s’amusent à troller indymedia nantes on va prendre de moins en moins de gants et d’attention histoire de retirer un maximum de votre nouriture.