Un journal anarchiste (format A3, 4 pages) publié à Paris à l’occasion du « mouvement contre la loi travail ».

Pour tout contact, demande d’exemplaires, remarque et critique, contribution et témoignage, ou autre : toutpeutbasculer[à]riseup.net

 

                                                               ************

En avril ne te résigne pas d’un fil, en mai…

Beaucoup vont sur leur chemin et croient partout croiser ces regards qui, sans un mot, leur disent : les temps sont durs, et les lendemains nous tourmentent. Et du leur ils répondent : Nous vivons une époque difficile, et aucun phare à l’horizon ne nous donne l’assurance de temps meilleurs. La résignation a cela de confortable que, partagée par beaucoup elle exige peu. Mais cet abandon de soi à un système qui nous dépossède, cette mortification des désirs, des sens, des rêves, des passions, ce renoncement à toute possibilité de transformation de notre existence, n’a rien d’autre à nous offrir en échange que l’appartenance à cette communauté du capital, la communauté des vaincus.
Mais le compte n’y est pas.
Une seule personne qui se lève pour sa liberté suffit à prouver que la liberté n’est pas morte. Et la révolte est contagieuse. Elle étale au grand jour cette question : pourquoi acceptons-nous cet ordre des choses ?

Nous ne sommes pas descendus dans la rue pour lutter contre la « loi travail », parce que nous nous battons pour un autre monde et que cela ne nous fait pas sens de tenter d’améliorer celui-là car nous en rejetons jusqu’aux bases, étant contre le principe même de loi et de travail en tant qu’exploitation ou auto-exploitation.

Mais nous avons vu dans ce mouvement social naissant l’esquisse d’un dépassement de la remise en question de la « loi travail », nous avons vu des pratiques dépasser la question de la légitimité donnée par « l’opinion publique », dépasser le dialogue démocratique avec le pouvoir, forcément inoffensif contre lui, dépasser le modèle non-violent de la contestation citoyenne, qui ne vise qu’à faire pression sur les gouvernements, ou parfois en changer.

Par ce journal, nous voudrions contribuer à ces dépassements, nous adresser à (aux marges de) ce mouvement, y diffuser nos idées, notre vision de la lutte, et nos objectifs différents. Non pas pour convaincre forcément car nous ne pensons pas détenir la vérité -nous sommes convaincu-e-s aujourd’hui de celle qui construit notre vie comme un combat permanent, comme une tension vers la liberté- mais en espérant que ces idées fassent réfléchir, fassent peut-être écho dans l’esprit d’autres personnes, permettent des discussions fructueuses, des rencontres, ou en motivent certain-e-s à agir hors des sentiers battus.

Le cours de l’histoire n’a pas de sens, n’est ni logique ni prévisible. Et si la vie commence par un refus de ne plus subir le quotidien, chaque jour est l’occasion de passer de la résignation à la vie. Hypothèse ou illusion, qu’il suffise d’y croire, et de se jeter dans la bataille nous fait dire qu’à tout moment, tout peut basculer…

 

« […] Aucun pouvoir ne peut régner sans la servitude volontaire de ceux qui le subissent. Rien mieux que la révolte ne révèle que ce sont les exploités eux-mêmes qui font tourner la machine assassine de l’exploitation. L’interruption diffuse et sauvage de l’activité sociale chauffe d’un coup le poêle de l’idéologie et fait apparaître les rapports de force réel; l’Etat se montre ainsi pour ce qu’il est : l’organisation politique de la passivité. L’idéologie d’un côté et la fantaisie de l’autre dévoilent alors tout leur poids matériel. Les exploités ne font que découvrir une force qu’ils ont toujours eue, en finissant avec l’illusion que la société se reproduit toute seule – ou que quelque taupe creuse à leur place. Ils s’insurgent contre leur propre passé d’obéissance, contre l’habitude érigée en défense du vieux-monde. »

 

***

 

Point de vue sur le « mouvement contre la loi travail »

Manifestations sauvages, banques défoncées, barricades dans la rue, commissariats attaqués… ces dernières semaines, ni les énormes dispositifs policiers, avec leurs gaz, leurs matraques et leurs flashballs, ni les organisations politiques de gauche et les syndicats avec leurs services d’ordre, n’ont pu contrôler la rage et la joie de milliers de révolté-e-s. A Paris comme à Nantes, Rennes, Toulouse et dans bien d’autres villes en France, nous avons enfin goûté quelques instants de liberté. Dans cette époque sombre de guerres, de terreur, de misère économique, de nationalisme et de religion, dans cette époque où on nous voudrait tous en rang ou à genoux, le feu de la révolte ne peut que rallumer dans nos cœurs quelques espoirs de rupture radicale avec l’existant.
La « Loi Travail », énième mesure pour intensifier l’exploitation, énième attaque des patrons et du gouvernement contre les intérêts des travailleurs, est seulement la goutte qui a fait déborder le vase. Dans les discours comme dans les pratiques, la question de cette loi a été largement dépassée par tou-te-s celles et ceux qui refusent de négocier avec le pouvoir la longueur de leurs chaînes. L’éventuel retrait de ce projet de loi ne représentera aucune victoire s’il a comme effet la fin des hostilités, le retour à la normalité.
Parce que s’il y a quelque chose à combattre c’est justement cette « normalité » : la normalité d’un patron qui vit sur ton dos, qui s’enrichit de ta sueur, qui t’humilie ; la normalité d’un monde où la possibilité même d’exister est déterminée par la quantité d’argent qu’on a dans les poches, un monde où des millions d’êtres humains crèvent dans la misère la plus totale ou vivent dans l’esclavage ; la normalité du contrôle et de la discipline de nos vies à travers les écoles, les universités, les horaires, les prisons, les hôpitaux psychiatriques, la bureaucratie, les frontières, les caméras de surveillance… ; la normalité des schémas et des modèles de vie qu’ils nous imposent à travers le spectacle et la télé, la pub et la marchandise…
C’est cette normalité que nous voulons rendre impossible. Nous ne croyons pas au « grand soir » de la révolution, nous ne croyons pas qu’il faille attendre un jour l’humanité serait prête à vivre dans une société parfaite. Nous vivons ici et aujourd’hui et nous n’avons pas d’autre vie que celle que nous sommes en train de vivre. Il ne s’agit pas d’attendre que les conditions soient propices, proposer des programmes, attendre que la plupart des « travailleurs », des « étudiants » ou des « sans papiers » deviennent révolutionnaires. Rompre avec les schémas de cette normalité signifie aussi rompre avec les schémas de la politique, du consensus, de la gestion démocratique. S’efforcer de rendre compréhensibles nos idées et nos actes ne signifie pas se reléguer à l’impuissance, renoncer à agir, se concerter avec ceux qui veulent « mieux gérer » ce système structurellement fondé sur l’oppression et sur la domination. L’attaque du pouvoir ne sera jamais consensuelle, même pas parmi les exploités et les victimes du pouvoir. Mais c’est justement à partir de l’attaque du pouvoir, de ses idées, ses modèles, ses structures et ses personnes, que nous voulons « rencontrer les gens », peu importe si nous sommes étudiants ou travailleurs, chômeurs ou précaires, avec ou sans papiers. C’est à partir d’un terrain d’hostilité partagée contre la domination, contre toutes les dominations, que nous pourrons peut-être un jour construire quelque chose de différent de manière collective. Nous ne sommes pas une intelligentsia illuminée qui voudrait conscientiser les masses, nous sommes des individus qui subissons la même oppression et qui avons décidé de traduire notre rage en actes. Si nous diffusons nos idées ce n’est pas pour rechercher un consensus, pour gagner des pions, mais parce que nous espérons que les actes de révolte et d’insoumission se multiplient jusqu’à rendre impossible le fonctionnement normal de la société.
Malheureusement, même la révolte risque de se faire intégrer ou canaliser par le pouvoir. Ces dernières semaines, on s’est retrouvé-e-s très souvent dans la rue à affronter les flics. On est toujours là où ils nous attendent en force, on joue une partition qu’ils ont déjà écrite pour nous, sur un terrain qui ne nous est pas favorable. On suit des manifestations concertées par les syndicats et la préfecture, dans des quartiers bourgeois où la révolte risque d’être moins contagieuse. On accepte la présence de journalistes, photographes et cameramen de tout poil, puis on regarde les vidéos des émeutes sur internet et on s’en exalte. On finit par parler le même langage que le pouvoir, l’exaltation virile de l’affrontement et la spectacularisation de l’émeute.

Pourquoi ne pas essayer de dépasser de telles limites ? L’intelligence et l’imprévisibilité peuvent être nos meilleurs outils. Apparaître soudainement pour attaquer là où ils ne nous attendent pas puis disparaître rapidement ; bloquer, paralyser, saboter les veines de l’économie, les structures du contrôle, les lieux de travail. Sortir des schémas classiques de la contestation, ses lieux et ses espaces, voilà ce qui pourrait représenter un saut qualitatif dans nos luttes. L’euphorie du ci-nommé « mouvement social » est destinée à mourir si ce dernier n’arrive pas à sortir des rails de la politique. Mais les connaissances qu’on aura accumulées, les idées qu’on aura diffusées, les liens qu’on aura tissés, seront notre meilleur bagage pour poursuivre les hostilités. Pendant et au-delà du « mouvement social », nous n’arrêterons jamais de suivre nos passions destructrices, poursuivre nos rêves de liberté, semer le chaos de la révolte dans l’ordre de l’autorité.

 

Nous n’avons rien à défendre

Ni des loi supposées nous garantir, ni un quelconque travail supposé nous permettre de nous « réaliser ». Le travail n’est rien d’autre qu’exploitation, fatigue, ennui, humiliation. Toute loi n’est que l’expression de la domination de certaines couches sociales sur d’autres, qui constituent la majorité de la population. Nos fameux « droits » ne sont que le paravent du marchandage entre notre docilité et l’expropriation de nos vies.
Nous sommes nombreux à descendre dans les rue, ces jours-ci. Journalistes, syndicalistes et politiciens (même « alternatifs ») voudraient nous enrégimenter derrière le simple refus de la loi Travail. Mais, en fait, on s’en fout de cette énième reforme d’un code du Travail qui est là pour nous atteler au turbin. On crache sur l’esclavage à vie du CDI comme sur la galère quotidienne de la précarité. Ce qui remplit les rues ces jours-ci, c’est le ras-le-bol envers ce monde de plus en plus invivable. Ce qui apparaît là, c’est un refus du travail, la conscience peut-être encore imprécise mais bien présente que toute loi est une chaîne. Il y a ici et là quelques petites secousses dans la normalité de cette société : des frémissements dans lesquels nous pouvons voir un refus de la soumission et de l’impuissance quotidiennes, une mise en cause de la résignation généralisée.
Ce monde est invivable. D’un côté un État de plus en plus répressif – la carotte de l’État social étant en fin de course (pas pour toutes les catégories, bien sûr : le vieux précept de diviser pour mieux régner est toujours efficace), il ne reste que le bâton. De l’autre côté, des prétendues alternatives qui ne représentent que la volonté de faire gérer cette même société par des syndicats et des partis de gauche, qui n’ont même plus d’illusions à vendre. Ou bien de sinistres cauchemars qui donnent une couleur encore plus morbide à l’autorité : replis communautaires, retour du religieux et de l’oppression morale.
Dans ce panorama sombre, s’attacher à un coin de territoire ou à une situation sociale donnée, revient à jouer sur la défensive, à renoncer à l’audace des rêves. Mais ni une quelconque zone à défendre dans un monde englouti par des nuisances, ni une Justice qui est là pour sanctionner l’inégalité et la privation de liberté, ni quelques droits à se faire exploiter tout le long de la vie, ne pourraient jamais nous suffire.
Cette petite fissure dans la normalité que sont les mobilisations avec l’excuse de l’énième modification du code du Travail, nous voulons l’agrandir, pour qu’elle devienne une brèche, d’où atteindre la fin de l’exploitation. Faisons en sorte que le vase qui commence à déborder se casse. Ne nous contentons pas des promesses politiciennes, chassons les médiateurs sociaux (comme les syndicats), déchaînons notre rage contre cette société qui nous vole, jour après jour, nos vies. Attaquons-nous aux bases morales et sociales de l’autorité. Et aussi à ses structures matérielles : magasins, lieux de production, bâtiments publics, véhicules, moyens de transport de personnes, de marchandises et d’énergie… Attaquons-nous aux hommes et femmes qui l’incarnent : flics, patrons, juges, chefs de toute sorte, bureaucrates, vigiles, politiciens, matons… A nombreux, en petits groupes ou seuls, le jour comme la nuit, quand et où le pouvoir ne nous attend pas.
Un graffiti récent, souvent repris, dit : « le monde ou rien ». Mais nous n’avons rien à défendre dans ce monde qui ne nous appartient en rien, et auquel nous n’appartenons pas. Un monde qu’on veut détruire.
La fête ne nous attend pas que sur ses décombres, mais déjà dans la révolte, ici et maintenant. Il n’y a pas de retour en arrière.
Contre toute loi, contre le travail. Contre ce monde d’enfermement et d’exploitation.
Pour la liberté !

[Affiche trouvée sur les murs de Paris]

 

C’est l’amour à la plage…

Contre l’ennui, la monotonie, des brèches s’ouvrent.
Si nous sommes révoltéEs ça n’est pas contre cette loi mais contre toutes les lois, n’existant que pour nous cadenasser, nous infantiliser, nous priver. Elles seront toujours contre nous, il n’y aura pas de compromis possible entre l’appareil répressif et les amantEs de la liberté.

Si nous sommes révoltéEs, c’est contre le travail, qui nous dépossède, de notre temps, de nos savoirs, de nos réflexions. Nous abrutissant, rythmant nos vies à la cadence d’un chrono. Purs espaces de contrôle pour lesquels on devrait se mettre à genoux, se battre… Accepter une mise en concurrence, humiliation qui fait désormais office de symbole de réussite sociale.
Nous ne nous écraserons pas les unEs les autres.
Nous serons attentifs, soudéEs, réactives.
Nous nous tiendrons, offensives, face aux humiliations pour qu’aucunEs n’ai plus à baisser la tête.
Si nous souhaitons cela, si notre révolte DOIT faire exister cela, elle ne peut se confondre à des références viriles, para-militaires.
Nous ne saurions admettre de n’être que « 300 ». Soyons protéiformes, que ce que l’on fissure soit un espace pour toutes et tous.
Si nous voulons la guerre, c’est bien pour faire, ensuite, l’Amour à la plage !

Ahou… CHACHACHA !

[Tract distribué à Paris à la manifestation du 9 avril.]

 

Nous sommes contre le travail

Parce que nous sommes contre un système qui repose sur l’exploitation de tout et de tou-te-s.
Parce que les administrateurs de ce monde transforment l’ensemble du vivant en marchandises sur toute de la planète.
Parce que cette société n’a d’autres choix à nous proposer que la mise au travail, quelques miettes pour survivre ou l’enfermement pour les indésirables et les récalcitrant-e-s.
Parce que le travail c’est vendre son temps, ses énergies, son corps et son esprit à des patrons, à des chefs, à des machines.
Parce que le capitalisme et l’Etat prétendent avoir la main mise sur tous les aspects de notre vie et nous dépossèdent de plus en plus de toute autonomie et même de nos rêves de quelque chose de profondément autre.
Parce que ce système de production effrénée ne laisse pas d’en-dehors où chacun-e pourrait décider librement de ses activités.
Parce que Papa Etat ne garantit des droits qu’au prix de notre liberté ; c’est le même qui lâche ses chiens de garde dans la rue, crée et militarise les frontières et fait la guerre aux quatre coins du monde.
Parce que les restructurations (qu’ils appellent « crises ») signifient le durcissement de la misère, du cannibalisme social, des techniques et des technologies de contrôle.
Pour toutes ces raisons, et bien d’autres encore, nous sommes non seulement contre le travail mais surtout contre le monde qui en fait un pilier et un horizon indépassable.
Si nous ne voulons pas aménager la longueur de nos chaînes mais bel et bien les détruire, il n’y a ni négociation ni dialogue possible avec le pouvoir quel qu’il soit.
Il s’agit donc de mener cette lutte au-delà des limites qu’essaient de nous imposer tous ceux qui ont intérêt à ce qu’elle étouffe dans les cadres existants (dont font partie les politiciens et les co-gestionnaires de tous ordres).
Au lieu de toujours suivre des agendas posés par d’autres la question est d’étendre la révolte en décidant nous-mêmes de ce contre quoi nous voulons l’exprimer, en imaginant mille et une manières pour bouleverser ce monde, en nous associant et en nous auto-organisant sans chefs ni hiérarchie, en prenant l’initiative, individuellement et collectivement et par l’action directe. Ainsi il devient possible d’affronter les puissants qui prétendent nous dicter leur loi, pour en finir avec la guerre permanente qu’ils nous livrent à coups d’autorité, de fric et de flics.
Les grands événements citoyens et médiatiques sont conçus pour réduire la révolte à une simple indignation démocratique et pour la faire rentrer dans les rangs de la politique et de la représentation. A l’inverse, s’attaquer directement à ce qui permet à ce système de fonctionner et de nous faire fonctionner ouvre à des possibilités d’arracher l’espace indispensable pour développer d’autres rapports.
Les blocages et les sabotages ne sont pas de simples mots d’ordre, mais des pratiques bien réelles ouvrant des chemins pour sortir de la routine de l’exploitation et de la logique de consommation, y compris du spectacle de la contestation.
Car, tant que les métros transportent le bétail humain, tant que le courant électrique alimente les usines de mort et les laboratoires du contrôle, tant que l’argent continue à circuler, tant que les écrans continuent de diffuser la propagande, tant que les fibres et les antennes assurent notre dépendance, tant que les artères de la ville impriment leur rythme à nos corps et nos esprits, tant que …
… alors brisons le train-train quotidien !

[Tract distribué à Paris lors de la manifestation du 5 avril.]


Du centre à la périphérie

L’attaque avant tout. Comme discriminant, comme mot de passe, comme projet concret. Dans les faits. Même dans de petits faits. Pas dans les bavardages. Même si ce sont des bavardages habituels sur les grands systèmes. Si nous devons nous rencontrer, qu’on se rencontre à partir de cela. Dans les faits, contre les grands projets, les grands temples de la mort, les structures visibles de loin et qui attirent l’attention de tout le monde, même de ceux qui font tout ce qui est possible pour faire semblant de ne pas comprendre. Sur cela, nous sommes tout à fait d’accord. Mais pas seulement sur ça.
Tous les jours, dans nos parcours balisés, contraints par le capital et ses intérêts, nous rencontrons des cibles peu visibles. Ce ne sont pas les grandes cathédrales qui reflètent leur signification sur l’écran géant des moyens d’information de masse, mais ce sont les petits terminaux d’un monstrueux projet de contrôle et de répression, de production et d’enrichissement pour les patrons du monde. Ces petites cibles passent souvent presque inaperçues. Parfois nous les utilisons aussi, sans s’en apercevoir. Mais à partir du petit ruisseau, mince et inoffensif, se construit, à force d’affluents, le grand fleuve sale et tourbillonnant. Si nous ne pouvons pas bâtir un barrage sur le fleuve, parce que nos forces ne sont pas suffisantes, qu’on réduise au moins l’afflux d’eau, en coupant une partie de ces petits apports. Cela, nous pouvons le faire. Aucun contrôle répressif, si dense qu’il soit, ne pourra jamais s’assurer de chaque élément de l’ensemble du projet productif. La dispersion dans le territoire est l’une des conditions de la production capitaliste.
Voilà, elle peut devenir le point de départ d’une stratégie d’attaque. Une stratégie facile, qui n’exclut pourtant pas d’autres interventions plus consistantes et, considérées en elles-mêmes, plus significatives.
Mais n’oublions pas que la signification des petites attaques est donnée par leur nombre et cela est possible parce qu’il ne s’agit pas d’actions très complexes, au contraire, la plupart du temps, ce sont des faits décidément élémentaires. Nous pensons que c’est le moment d’aller du centre vers la périphérie.

Paru initialement dans ProvocAzione, n°3, mars 1987


Fait-on des révolutions sans casser des oeufs ?

En 1924, dans les premières lignes d’un pamphlet comme on n’en lit plus aujourd’hui, un jeune rebelle constatait « qu’il y a, dans le langage, des mots et des expressions que nous devons supprimer, car ils désignent des concepts qui forment le contenu désastreux et corrupteur du système capitaliste ». Il parlait du travail : le plus grand affront et la plus grande humiliation que l’humanité ait commis contre elle-même. Conscient qu’on ne supprime pas un mot sans supprimer ce qu’il désigne matériellement, et que supprimer un mot est impuissant si les rapports sociaux ne sont pas subvertis, il concluait par cette sulfureuse déclaration riche de promesses : « Le travail détruit la vie. […] Si nous sentons en nous-mêmes cet élan créateur, il s’exprimera par la destruction de ce système lâche et criminel. Et si, par la force des choses, nous devons travailler pour ne pas mourir de faim, il faut que par ce travail, nous contribuions à l’effondrement du capitalisme. […] Nous voulons créer comme des hommes libres, pas travailler comme des esclaves ; pour cela nous allons détruire le système de l’esclavage. Le capitalisme existe par le travail des travailleurs, voilà pourquoi nous ne voulons pas être des travailleurs et pourquoi nous allons saboter le travail ». Sa proposition était claire, sans équivoque : la destruction par le sabotage.

Et sa proposition est toujours valable : chaque rouage du système capitaliste peut être saboté. Mais cette proposition, aujourd’hui, quand elle est exprimée ou mise en actes, génère des réactions qui nous poussent à ce constat : il y a dans le langage des mots et des expressions que nous devons préciser, car ils servent des discours qui maintiennent une confusion entre ceux qui défendent et ceux qui veulent détruire le système capitaliste. Nous parlons du mot violence.
L’auteur de ce vieux pamphlet aurait-il pu imaginer qu’aujourd’hui, après des décennies de propagande et de pacification, ce même mot servirait à désigner l’exercice d’une domination et les actes qui visent à s’en libérer ? Que dans une époque qui croule sous l’insignifiance, en se focalisant uniquement sur les moyens, des moyens jugés violents, on en viendrait à ne plus s’interroger sur les intentions et les buts qui motivent et que poursuivent les auteurs de ces gestes et de ces pratiques ? Qu’on mettrait dans un même panier, par exemple, le matraquage de manifestants par la police et l’attaque d’un commissariat, l’enfermement et l’expulsion de personnes dotées des mauvais papiers et la tentative de ces personnes de franchir par la force une frontière ; et qui plus est que les honnêtes gens excusent ou relativisent les premiers et condamnent les seconds ? Qu’un rapport au monde et à nous-mêmes gravement inféodé aux lois de l’économie et au respect de la sacro-sainte propriété amènerait à cataloguer comme violent le pillage d’un commerce et à nier la violence incommensurable et quasi-universelle qu’est la nécessité de payer une marchandise, de passer à la caisse pour satisfaire ses besoins ? Puisque nous aussi aujourd’hui nous voulons détruire cette société ennemie de la vie, nous devons nous poser quelques questions, et nous pencher sur ce mot pour aborder les problèmes qu’il pose : la violence.

Si nous prenons des exemples récents comme la destruction d’agences bancaires, immobilières, d’assurances, de lycées, de mobiliers urbains, ou l’assaut de commissariats, de mairies ou de permanences de partis politiques, nous constatons que pour beaucoup ces actions n’ont pas besoin d’explications a posteriori, qu’elles se comprennent comme une réponse à la répression, à l’exploitation, à une certaine forme vécue d’oppression. Ce qui en gêne certains, à les entendre, c’est l’usage de la violence. On entend : « les anarchistes se battent contre cette société qui repose sur l’imposition de règles grâce à la force brutale, qu’elle soit légale ou illégale, contre l’accumulation de richesses, fruit de l’exploitation, où une minorité de possédants et de dirigeants imposent leur volonté à tous. Comment diable peuvent-ils accepter d’utiliser la violence, alors qu’ils la combattent sous toutes ses formes dans ses expressions sociales et économiques ? » Peut-être suffit-il de dire que nous n’avons jamais vu de gouvernement (ainsi que ceux qui aspirent à en être) s’auto-dissoudre, quant à ceux qui profitent du capitalisme – aussi loin que notre mémoire porte – nous n’avons pas entendu qu’ils aient jamais mis volontairement la clé sous la porte puis envoyé ce système aux poubelles de l’histoire. Mais la question est d’importance, et nous aurions tort de ne pas apporter quelques détails.

Le gouvernement fait la loi, et pour imposer cette loi, quand les institutions démocratiques, leur prétendue légitimité ou le mythe de l’intérêt général ne suffisent plus, quand la lutte ou un refus (même partiel) prend le pas sur l’adhésion du plus grand nombre au statu quo ou l’apathie, il a besoin d’une force matérielle pour canaliser les contestations et réprimer ceux qui l’affrontent. Cette force est la police et l’institution judiciaire, qui dans les buts poursuivis marchent ensemble. Si le gouvernement ne disposait pas de cette force – en deux mots une matraque et un code pénal – pour imposer sa loi, et si les classes exploitantes ne disposaient pas d’un gouvernement pour imposer des lois qui leur profitent, alors n’obéiraient à ces lois que ceux qui le veulent. Ce ne serait donc plus des lois mais de simples propositions que chacun serait libre d’accepter et de repousser. La loi est par nature une règle que l’autorité étatique impose par des moyens coercitifs, la menace et la répression. La lutte contre le gouvernement et les classes exploitantes, la lutte contre l’existence même de la loi se résout donc dans une lutte physique, matérielle. Dans cette lutte, face à la violence légale du capital nous n’avons pas d’autre choix que de répondre par la violence de la révolte, et par là même de faire éclater l’incompatibilité entre la liberté à laquelle nous aspirons et l’autorité de l’Etat. La violence, aussi douloureuse qu’elle soit, est un moyen indispensable pour mettre fin à la perpétuelle et plus insidieuse violence qui maintient dans l’esclavage la grande masse des êtres qui peuplent cette planète.

Si nous pouvions choisir entre la violence et « la paix », sans doute choisirions nous la seconde. Mais pour qui veut bouleverser l’ordre du monde le choix ne se pose pas en ces termes. Car comme le disait jadis un anarchiste « […] pour que deux êtres vivent en paix il faut que tous les deux veuillent la paix ; […] si un des deux s’obstine à vouloir obliger par la force l’autre à travailler pour lui et à le servir, l’autre s’il veut conserver sa dignité d’homme et ne pas être réduit au plus cruel esclavage, malgré tout son amour pour la paix et la bonne entente, sera bien obligé à résister à la force par des moyens adéquats ».

Ainsi, si tout gouvernement, toute institution, tout groupe, toute personne qui exerce le pouvoir a tout intérêt à condamner et à ce que soit endiguée préventivement – par l’éducation notamment – chez chacun sa propension à la violence, à l’usage de la force, ce n’est assurément pas pour des considérations morales, mais bien parce que la violence de la rébellion porte atteinte aux rapports de domination et qu’elle rompt les chaînes de l’obéissance (à la loi, à la légitimité, aux patrons, aux petits chefs…). La violence, sous les multiples formes qu’elle peut prendre, est un des moyens que nous avons à notre disposition. Un moyen que nous ne fétichisons pas, et que comme tous les moyens nous évaluons en fonction des buts à atteindre, de nos finalités, de notre éthique et de notre sensibilité.
Nombreux sont ceux qui ces derniers jours ont pris les rues au cours de ces «manif’ sauvages», à les avoir arpentées de jour et de nuit au cri de « Paris, debout, soulève toi ». Celui qui veut être honnête avec lui-même, celui qui veut se tenir aussi près que possible de ce qu’il a dit, peut-il bannir la violence des gestes et des pratiques, et donc la destruction, sans réduire le soulèvement à quelque chose d’impuissant et inoffensif, sous prétexte que ce n’est pas « constructif » ? Destruction et création ne peuvent-ils donc pas aller de pair ? Pourquoi auraient-ils peur des ruines, désormais, ceux qui portent un monde nouveau dans leurs cœurs ? Parce qu’ils ne souhaitent qu’un ravalement de façade de celui-ci, que nous voulons détruire ? Il serait bon de rompre l’hypocrisie du « tous ensemble tous ensemble », et commencer par cette interrogation : se soulever, oui, mais pour aller où ? Si l’on doit se questionner sur les moyens pour arriver à nos fins, et donc sur la violence, ce doit être à l’intérieur de cette question plus vaste : « Que voulons-nous ? ».

 

***

 

« Contrairement à ce que raconte le vieil adage, la violence en soi ne perpétue pas la violence. Ce n’est que lorsqu’elle est institutionnalisée qu’elle se perpétue en tant que système. Contre cette violence institutionnalisée, il faut opposer une violence individuelle, passionnelle, ludique – la violence de l’individu qui se réapproprie sa vie. Les cibles de cette violence sont avant tout les institutions du système, ses symboles et ses marchandises, mais peuvent aussi être des individus, lorsqu’ils agissent en tant que représentants de ces institutions, lorsqu’ils représentent une menace immédiate à notre capacité à nous réapproprier notre vie.
Pour éviter de se perpétuer, la violence insurrectionnelle doit éviter de s’institutionnaliser – par la formation de milices ou de groupes paramilitaires, par exemple, qui ne sont que des institutions de violence dont l’ambition est de se substituer à celles déjà existantes contre qui elles sont en lutte (ce qui est l’essence même de la politique). D’autres groupes armés se donnent comme mission l’autodéfense ; si on comprend ce terme dans le sens de la simple préservation de soi, cet objectif est toujours mieux servi par le conformisme ou la réforme des institutions par les moyens qu’offrent le système et non la confrontation armée avec lui. […]
Le vandalisme, les émeutes et les soulèvements spontanés sont loin d’être les seuls moyens dont l’individu dispose pour se réapproprier sa vie. Je suis toutefois convaincue qu’on ne peut pas en faire l’économie, puisque décider de passer de la survie à la vie nous mène directement à l’affrontement avec les institutions de pouvoir. Cette violence reste la plus saine, la plus jouissive, la plus savoureuse d’entre toutes si elle est vécue comme un jeu, comme une fête. Elle apporte la satisfaction blasphématrice de souiller et d’enrayer, du moins pour un temps, du moins dans un certain espace, la mécanique de l’oppression.
La violence libératrice est utilisée tactiquement et intelligemment, jamais systématiquement et rationnellement. Elle ne vise pas à se perpétuer: elle est individuelle, même lorsqu’elle est exercée en groupe, elle est provisoire, passionnée, créatrice dans sa destruction. Elle abat les murs et ne laisse rien derrière qui permettrait de les reconstruire. »

Thèses subjectives sur la violence

 

***

Que faire de nos nuits debout? De la politique ou se révolter ?

Samedi 9 avril, suite à une après-midi d’émeutes place de la Nation, une belle soirée commence à partir de la place de la République, lieu de concentration de milliers de personnes grâce à l’initiative « Nuit Debout ». D’abord on se dirige vers Stalingrad, où des migrants qui y avaient trouvé refuge avaient été expulsés par les flics quelques jours auparavant. On enlève et on défonce les grilles posées par la marie pour empêcher l’installation des migrants. On retourne place de la République en manif sauvage et un flic en civil est éloigné et poursuivi par les manifestants. Une fois place de la République, on repart en manif sauvage pour rendre visite à Valls, qui habite dans le 11ème. Une énorme foule de gens reprend la rue au cri de « Paris debout, soulève-toi ». Des vitrines de banques sont pétées, le commissariat du 11ème est caillassé, les voitures de flics garées en face du comico prennent cher. Gaz lacrymogènes et grenades de désencerclement d’un côté, barricades en feu, projectiles et pétards de l’autre. Les flics bloquent une partie des manifestants rue de la Roquette mais dès qu’ils ouvrent la voie on se resserre et on se dirige de nouveau vers la place de la République. Toutes les banques sont systématiquement attaquées et leurs vitrines détruites. Une fois place de la République, encore des barricades et une Autolib’ est cramée au milieu de la rue. Rage et joie se mélangent, les actes de révolte sont applaudis par une bonne partie de la foule. La Nuit Debout semble ouvrir quelque possibilité de rupture avec le triste quotidien de soumission aux règles de l’Etat et de l’Economie. Pourtant, ses organisateurs tirent la gueule et, d’après la préfecture, à 2h50, un responsable de Nuit Debout demande le concours de la force publique «en raison de la difficulté de son service d’ordre à assurer la sécurité» sur la place (info sortie par l’agence de presse AFP). Au moins une personne est arrêtée à ce moment-là par les porcs en uniformes.
Si on ne peut que se réjouir face aux débordements qui partent de la place de la république, on ne peut pas pour autant être acritique face aux collabos des flics et soutenir l’initiative citoyenniste de « Nuit Debout ». Comme les Indignados et Podemos en Espagne et le Movimento 5 Stelle en Italie, ce nouveau mouvement politique prétend instaurer la « démocratie directe ». Il se présente comme un mouvement de contestation sans leaders, hors des partis et des syndicats. Bien sur, les politiciens et les journalistes qui ont lancé cette initiative n’affichent pas les noms des organisations, des partis et des syndicats dans lesquels ils militent. Une bonne stratégie pour construire une force politique innovatrice, qui peut gagner la sympathie du citoyen moyen avec l’illusion de la participation. Et effectivement, au bout d’une semaine, des milliers de personnes s’entassaient déjà sur la place, pour échanger leurs bonnes intentions et faire la fête dans une ambiance fête de l’Huma…
Beaucoup se disent : Comme on est beaux tous ensemble, comme on est forts quand on est si nombreux !
Du point de vue d’un parti politique, d’un gouvernement, d’un Etat ou d’une nation, bien évidemment, l’unité est importante ! Etre ensemble, se réunir, arriver à un consensus – nous dit-on – est difficile mais nécessaire, c’est la base même de la démocratie. La discussion est bienvenue quand elle ne remet pas en question la structure même, la critique est bienvenue quand elle s’exprime de manière à rendre plus fort et plus uni l’ensemble. Tout pouvoir a besoin de se renouveler périodiquement pour ne pas tomber face aux ruptures qui se produisent à l’intérieur de la société : coopter ses opposants, canaliser, récupérer et intégrer le mécontentement de la population. L’union fait la force, c’est vrai, mais c’est la force de masses unies derrière leurs chefs et leurs drapeaux, c’est l’union de la meute derrière son berger.
Mais non – nous disent-ils – ici nous n’avons pas de chefs et nous n’avons pas de drapeaux. Nous sommes une assemblée horizontale, nous sommes un réseau, nous sommes plusieurs réseaux connectés… Effectivement, les individus ici ne sont pas annihilés et triturés par la machine de l’Etat mais par l’Assemblée sacrée, et l’Esprit du Consensus. On parle deux minutes chacun – et on vote même pour aller pisser (debout ?). C’est la majorité qui décide. C’est la démocratie directe et en effet on réécrit même la Constitution. Tant le contenu que les méthodes de l’initiative Nuit Debout vont ouvertement dans le sens de la construction d’une nouvelle force politique réformiste, capable de formuler des revendications face au pouvoir, d’instaurer un dialogue avec lui et, peut-être, un jour, prendre sa place.
Alors la vieille question se repose, mieux gérer ce système ou le détruire ? Se constituer en un ensemble/groupe pour que nos délégués négocient avec le pouvoir la longueur de nos chaînes ou se déchaîner, transformer notre rage et notre urgence de liberté en une passion destructrice et créatrice ? La politique ou la révolte ?
Et d’ailleurs qu’est-ce que voudrait dire « mieux gérer » ce système ? Comment ce système politique, social et économique pourrait-il continuer à fonctionner sans exploiter des millions d’êtres humains réduits à l’état de matière première ? Comment cette économie, ses machines, ses transports, ses technologies, comment tout ça pourrait continuer à exister sans piller et contaminer d’énormes portions de terre, provoquant des guerres et dévastant un peu partout ? Comment les puissants, les riches, les patrons défendraient leurs belles maisons, leurs propriétés, leurs affaires, leurs vies même sans des armées, des flics, des prisons et des frontières ?
Aucune alternative n’est envisageable à l’intérieur de ce système. Rien ne peut être construit tant que la machine de l’économie et de l’Etat continue de fonctionner. Nous ne voulons pas créer des oasis à l’intérieur du désert, un entre-soi de supposée horizontalité, ni présenter une belle liste de revendications au pouvoir, s’asseoir à discuter avec nos ennemis, leur faire des propositions. Nous voulons détruire cette société. Nous n’aspirons pas à l’unité et au consensus du mouvement social, ce qui permettra sa récupération par le prochain chacal gauchiste. Nous sommes partisans de la révolte diffuse, de l’autonomie d’action des individus et des groupes, sans aucune centralisation.
Imaginez-vous donc si, au lieu de discuter place de la République pour écrire la nouvelle Constitution, ces milliers de personnes – en groupes plus ou moins petits – s’organisaient partout pour saboter l’économie, bloquer ses artères, attaquer les patrons, dépouiller les commerces et partager le butin, occuper des bâtiments, des immeubles, foulant aux pieds la propriété privée, transformer les lieux du pouvoir et du commerce en foyers d’insurrection… imaginez-vous l’effet de contagion qu’un tel processus pourrait avoir parmi les exploité-e-s, les marginalisé-e-s, les insoumis-es.
Mais n’est-ce pas justement ça que craignent les syndicalistes et les politiciens de gauche ? Doit-on s’étonner quand ils condamnent, se dissocient et consignent à la répression tou-te-s celles et ceux qui, de manière autonome, agissent en attaquant directement les structures et les personnes responsables de l’oppression ?
Alors non, ne nous laissons pas piéger par ces nouvelles formes de politique, par cette ci-nommée « démocratie directe » pensée et créée pour canaliser le mécontentement diffus vers la politique. Ne cherchons pas la masse, soyons des individus libres et incontrôlables, cherchons des complices, pas des électeurs, des chefs ou des pions. Rendons dangereuses nos nuits debout.