Regardez-les ! Le grand cirque démocratique est arrivé. Les murs se couvrent d’affiches multicolores, les chapiteaux se dressent, les clowns ressortent leurs bouffonneries. Dommage que leurs artifices cachent un vieux numéro depuis longtemps éculé. Et dommage aussi que, quelque soit le clown, quelques soient ses grimaces, ils jouent tous le même sketch qui oscille entre pitrerie et pitoyable.

Écoutez-les ! Ils sont tout en promesse, tout en engagement. C’est à qui ira de sa surenchère. Vous avez toujours rêvé qu’on vous décroche la lune ? Dépêchez-vous, c’est le moment ou jamais. Vite, pour un cours instant, l’urne est une corne d’abondance où il faut puiser à pleines mains. Hâtez-vous, les poches de l’État sont grandes ouvertes ! Enfin presque. Vous faites partie des 80 % de Français qui ne sont défendus par aucun groupe de nuisance ? Oui ? Ah, perdu ! Mais, rassurez-vous, à défaut de piocher dans les poches, vous les remplirez ! Chacun est utile dans cette démocratie.

Entendez-les ! Beaux démagogues, beaux donneurs de leçons, quelque soit le choix qu’ils veulent vous imposer, ils vous menacent des mêmes foudres, vous promettent les mêmes lendemains qui chantent. Ils font monter la sauce démocratique au risque de transformer le référendum en un choix viscéral, qui est le propre de l’intégrisme. Étrange cacophonie que cette musique électorale. Dans ce tintamarre, le bulletin de vote a remplacé la raison. C’est vrai, qu’à leur décharge, parler de choix raisonnable quand on sait la future usine à gaz que sera cette future constitution…

Suivez-les ! Pour cause de référendum ils ont besoin de vous, alors ils vous prêtent toutes les qualités. Ils vous caressent dans le sens de l’urne, car imaginez que personne ne se déplace, que deviendraient-ils ? Ils vous envoient des « citoyens » longs comme le bras, vous trouvent – pour une fois – responsables et adultes. Flattent votre sens du devoir, font appel à votre raison. Vous parent de toutes les vertus, même les plus extravagantes comme celle de faire croire que le texte de la future constitution est compréhensible à tous.

Admirez-les ! Ce sont des artistes, la démocratie est toute leur vie. En fait, ce numéro n’a pas d’importance, ce n’est qu’un nuage de fumée et il y en aura tellement d’autres. Ce numéro-ci n’est que prélude au suivant. Ils jouent. Ce qu’ils veulent, c’est être au milieu de la piste. Seuls ! Qu’importe leurs orientations, qu’importe leurs engagements, grisés par la puissance ils ne voient rien d’autre qu’eux. Le pouvoir leur est tellement monté à la tête qu’ils ont un nombril à la place du cerveau.

Et les spectateurs dans ce cirque ? Bof ! Une chose est sûre, c’est que le mot « peuple », en tant qu’entité souveraine, n’apparaît pas une seule fois dans le texte de la sans doute fameuse future ex-constitution. 294 articles ça fait un peu court sans doute. C’est vrai qu’elle n’est faite ni par lui ni pour lui, alors à quoi bon ! En revanche le mot « peuple » en tant que troupeau, est cité quatre fois ! Est-ce un signe ?

Combien de temps faudra-il encore et combien de spectacles de ce genre pour comprendre que ce système est usé jusqu’à la corde, qu’il n’est que l’émanation de petits groupes qui se gobergent sur le dos de la majorité et qu’il ne bénéficie qu’à une minorité.

Combien de temps faut-il pour changer de système politique ? Beaucoup, encore beaucoup. Hélas ! Et qu’importe si démocratie et démagogie jonglent pour ne faire qu’un. Coûte que coûte, avec ou sans spectateur, il faut que le spectacle continue.

Toujours démocrate ? Oui, alors… salut l’autiste !