Le mythe des « premiers concernés » : quelques notes critiques sur la politique du pir et du strass
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Catégorie : Global
Thèmes : Immigration/sans-papierEs/frontieresRacismeRépressionResistances
Notons tout d’abord, concernant le terme « islamophobie », que dans notre pratique avec des « ouvriers indigènes » ou auprès de sans-papiers, nous n’entendons que très rarement ce mot. Au contraire, nous entendons bien plus souvent des ouvriers se plaindre du racisme d’un chef, d’un patron ou de collègues, du racisme de l’administration lors de la demande ou du renouvellement d’un titre de séjour, ou même du racisme ambiant dans la société, que de « l’islamophobie ». De plus, il convient de préciser que le PIR ne saurait en aucun cas se présenter comme une organisation représentative des « indigènes ». La grande majorité des « indigènes » ne connaît même pas l’existence du PIR, très peu se définissent même sous ce terme « d’indigènes », et il y a bien plus de travailleurs maghrébins, noirs ou originaires des DOM-TOM, organisés à la CGT qu’au PIR. Mais cela n’empêche pas le PIR de chercher à se présenter comme la seule organisation représentative des « indigènes », accusant celles et ceux qui le critiquent ou ne partagent pas sa politique, lorsqu’il s’agit de personnes noires ou maghrébines, de « trahison », terme utilisé par exemple contre Sophia Aram dans un texte du PIR.
Le STRASS utilise la même rhétorique. Ce serait la seule organisation légitime à parler de prostitution. Et quiconque ne partage pas sa politique est taxé de « putophobe » et n’aurait pas le droit à la parole. Là aussi, il convient de signaler que le STRASS ne saurait en aucun cas être considéré comme représentatif des personnes prostituées, et que pour chacun des textes où des membres du STRASS expliquent que la prostitution serait « un libre choix » et « un travail comme un autre », on trouve une dizaine, au moins, de témoignages de rescapées du système prostitutionnel qui décrivent l’horreur de l’oppression vécue.
Mais si ni le PIR ni le STRASS ne sont représentatifs des personnes dont ils se proclament portes-paroles, nous devons aussi remettre en cause cette sacralité, venue de la philosophie post-moderne, de la « parole des premiers concernés ». Ce mode de pensée s’oppose à l’universalisme. Karl Marx par exemple aimait faire sienne cette citation de Térence selon laquelle « rien de ce qui est humain ne m’est étranger ». Toute la pensée philosophique et politique progressiste part de ce constat. C’est parce que rien de ce qui est humain ne leur était étranger, que des Blancs ont milité pour l’abolition de l’esclavage des Noirs. C’est parce que rien de ce qui est humain ne leur était étrangers que Marx et Engels, qui n’étaient pas prolétaires, ont donné toute leur énergie à la lutte pour l’émancipation de la classe ouvrière. C’est parce que rien de ce qui était humain ne lui était étranger, qu’un Juif communiste de New York a écrit les paroles de Strange Fruits décrivant mieux que quiconque l’atrocité des lynchages dans le Sud des Etats-Unis. C’est parce que rien de ce qui est humain ne doit nous être étrangers, que nous luttons pour l’émancipation de l’humanité toute entière.
Pour la pensée post-moderne, il n’existe plus d’universalisme du genre humain, plus que des « premiers concernés » par une forme spécifique d’oppression et dont on aurait pas le droit de parler, juste soutenir les organisations qui s’en veulent être les représentants. C’est le degré zéro de la politique. S’il existe aujourd’hui un courant d’extrême-gauche en France, c’est parce que des militantes et militants courageux ont fait vivre ce courant dans la classe ouvrière, et ce contre un PCF quasiment hégémonique dans les entreprises dans les années 1950 à 1970. C’était à l’époque « le » Parti, et il était, de fait, bien plus représentatif que ne le sont le PIR ou le STRASS aujourd’hui. Les militants d’extrême-gauche étaient violemment agressés aux portes des entreprises, dénoncés au patronat, insultés dans les tracts et journaux du Parti, etc. Or, avec la théorie des « premiers concernés », qui d’ailleurs était en filigrane dans ce que disaient les staliniens, il n’aurait pas fallu combattre leur influence dans les entreprises ! Avec cette théorie toujours, Karl Marx n’aurait pas dû écrire sur l’exploitation capitaliste et encore moins sur la Commune de Paris, ou Trotsky aurait dû s’interdire d’écrire la moindre ligne sur la montée du nazisme en Allemagne ou sur la révolution chinoise. Notons enfin que lors de la première guerre mondiale, le chef de la social-démocratie allemande favorable à la boucherie puis responsable de la répression de la révolution, Friedrich Ebert, en tant qu’ancien ouvrier bourrelier, aurait pu être considéré comme « plus premier concerné », que Rosa Luxembourg et Karl Liebknecht, d’origine petite-bourgeoise, et pourtant défenseurs acharnés de l’internationalisme prolétarien, de la révolution socialiste et des intérêts du prolétariat mondial.
Et il n’existe pas de parole unique des « premiers concernés ». Même lorsque le PCF était quasiment hégémonique sur la classe ouvrière, il y avait, certes minoritaires, des groupes d’ouvriers qui contestaient sa politique. Aujourd’hui, dans la plupart des grèves, on peut voir des tendances plus ou moins radicales et d’autres plus conciliatrices, voir même des syndicats qui militent contre la grève. Le mouvement pour les droits civiques aux Etats-Unis étaient constitués de différentes tendances, de Martin Luther King aux Blacks Panthers, qui défendaient des politiques différentes et même des intérêts de classes différents. Et aujourd’hui, comme dit en introduction, on trouve des « indigènes » qui contestent la politique du PIR ou des prostituées qui vomissent celle du STRASS.
Il est certain qu’une lutte ne peut aboutir que s’il y a mobilisation des « premiers concernés ». Impossible d’espérer obtenir une augmentation de salaires ou l’annulation d’un plan de licenciement sans mobilisation à l’intérieur de l’usine. Si les militants blancs abolitionnistes ont joué un rôle dans l’abolition de l’esclavage, l’élément fondamental a été les révoltes d’esclaves et en particulier pour la France la révolution haïtienne. C’est le mouvement de libération des femmes qui a permis l’obtention d’une égalité en droits (certes uniquement formelle) dans la plupart des pays occidentaux, etc. Et on pourrait multiplier les exemples. Mais il faut ajouter que la lutte pour la dignité et les droits de tous les êtres humains signifie également pendre en compte celles et ceux qui ne peuvent pas lutter comme les enfants ou les handicapés mentaux. La lutte pour l’abolition de la peine de mort, elle aussi, n’a été ni portée ni même déclenchée par les « premiers concernés ». Et les luttes victorieuses contre l’expulsion de sans-papiers ont souvent été possibles parce que se sont mobilisés non seulement des sans-papiers, mais aussi des collègues, des proches, des voisins… c’est là d’ailleurs qu’est la force d’un réseau comme RESF. Mais ce dernier exemple, à contrario de la politique du PIR, pose la question de qui sont les « premiers concernés » ? Dans le cas d’une expulsion d’un élève sans-papiers, est-ce ses professeurs, ses copains et ses copines qui sont les premiers concernés ou une responsable de l’Institut du Monde Arabe qui se veut « porte-parole des indigènes » ?
Bien entendu aussi, à moins d’être une secte, on ne peut faire de la politique sans prendre en compte les revendications, les débats et l’état d’esprit des « premiers concernés ». Si on veut s’implanter dans une boîte, il faut être à l’écoute des travailleuses et des travailleurs. S’il est question d’y lancer une grève, il faut prendre en compte l’état d’esprit des travailleurs. Bien sûr aussi, si on y intervient comme militant extérieur, il est hors de question de voter pour ou contre la grève. Par contre, rien ne doit interdire de donner des conseils ou de dire ce que l’on pense. L’auto-organisation des travailleurs, la construction, par les ouvriers, de structures de contre-pouvoir à la dictature patronale, l’apprentissage de la démocratie ouvrière dans les luttes en vue du pouvoir ouvrier de demain, signifie aussi la solidarité, le partage d’expériences, etc. et donc la possibilité de critiquer certains aspects d’une grève ou d’un mouvement de lutte.
Tout le discours qui tend à reprendre, de façon a-critique, la position de tel ou tel représentant autoproclamé des « premiers concernés », annule finalement toute possibilité de réflexion politique. Au bout de cette logique, il n’y a plus d’universalisme, tant en ce qui concerne les droits humains qu’en ce qui concerne la lutte des classes. C’est d’ailleurs clairement ce qui ressort de bien des textes du PIR. Proclamer comme le dit le PIR que le marxisme est une invention occidentale est à la fois vrai et absurde. Vrai et absurde parce que, tout comme la domestication des plantes implique la sédentarisation des êtres humains, le marxisme, en tant que théorie scientifique de l’émancipation du prolétariat, nécessite l’existence du prolétariat. Le mode de production capitaliste, et donc le prolétariat, s’étant d’abord instauré en Europe Occidentale, il ne pouvait qu’y naître. La généralisation du mode de production capitaliste et le développement exponentiel du prolétariat aux quatre coins de la planète, n’ont à aucun moment infirmé, mais confirmé la validité du marxisme. Des usines ultra-modernes d’Allemagne, du Japon ou des Etats-Unis aux mines d’Afrique du Sud, en passant par les ateliers textiles du Bangladesh ou du Cambodge, il n’y a pas un endroit sur cette planète qui ne voit se dérouler la lutte entre le prolétariat et la bourgeoisie. Absurde enfin, parce que si les théories socialistes dont le marxisme sont nées avec l’exploitation capitaliste, la révolte contre l’oppression, elle, date des premières sociétés de classe. Des grèves lors de la construction des pyramides à la révolte de Spartacus, en passant par la guerre des paysans, l’aspiration à une société libérée de l’oppression est une aspiration millénaire et universelle.
Face au racisme, le PIR mais aussi d’autres groupes communautaristes voire racialistes (dont certains comme le Mouvement des Damnés de l’Impérialisme ou la LDJ sont ouvertement passés à l’extrême-droite) se lancent dans une répugnante hiérarchisation des racismes et des atrocités. Or, non seulement le racisme est un poison pour toute la société, mais toute attaque raciste contre une communauté donnée doit être vue comme une menace et un avertissement pour les autres minorités.
Dès lors qu’au nom du nationalisme on commence à trier les « vrais nationaux » des « étrangers », nul ne sait jusqu’où ira cette logique mortifère. Ainsi, le Ku Klux Klan, constitué d’abord pour assurer la suprématie blanche contre les Noirs, s’en est aussi pris, dans les années 1930, aux Juifs et aux catholiques. Parmi les victimes de la barbarie raciste du IIIème Reich, il y avait les Juifs, les Rroms et Sintis mais aussi les Slaves. Victimes de l’antisémitisme aussi les femmes déportées à Ravensbrück parce que « leurs amants avaient des cheveux trop noirs » ou victimes du racisme les handicapés allemands gazés. Aujourd’hui, lorsque des néo-nazis s’attaquent à une synagogue, chaque Arabe devrait sentir qu’il est visé, de même que lorsque des Identitaires vomissent leur haine des Arabes, c’est aussi chaque Juif, chaque Rrom, chaque Noir qui est menacé. C’est à juste titre que Frantz Fanon écrivait « C’est mon professeur de philosophie, d’origine antillaise, qui me le rappelait un jour : « Quand vous entendez dire du mal des Juifs, dressez l’oreille, on parle de vous. » Et je pensais qu’il avait raison universellement, entendant par là que j’étais responsable, dans mon corps et dans mon âme, du sort réservé à mon frère. Depuis lors, j’ai compris qu’il voulait tout simplement dire : un antisémite est forcément négrophobe. » Et cette citation pourrait être modifiée en changeant « Juif » et « Noir » par « Arabe », « Rrom », « Arménien », ou toute autres victimes de racisme et en serait tout aussi juste. Que des débats traversent l’extrême-droite française actuelle pour savoir si, comme Soral, il convient de s’allier avec des islamistes contre les Juifs ou comme Les Identitaires, il faut chercher à s’unir à la LDJ contre les Arabes, ne change rien ; il ne s’agit pour eux que de questions tactiques, leurs objectifs fondamentaux restent les mêmes, celui d’une France « racialement pure », d’où seraient exclus tous ceux qui ne sont pas des « vrais nationaux », qu’il s’agisse des Arabes, des Noirs, des Juifs, des Rroms, etc.
Lors d’une lutte contre les licenciements, il serait suicidaire pour des ouvriers de tenter de convaincre que les licenciements dans leur usine serait pire que ceux dans telle autre, ou de revendiquer par exemple la fermeture de PSA Mulhouse pour sauver l’usine PSA Aulnay. Au contraire, il s’agit à chaque fois de montrer qu’il s’agit d’une lutte de toute la classe ouvrière, qu’ouvriers de PSA, de Goodyear, d’ArcelorMittal et d’ailleurs ont un combat commun à mener. Il en est exactement de même face au racisme.
Le STRASS va encore plus loin. Si ce « syndicat » dénonce dans ses bons jours la traite des êtres humains et la prostitution forcée, c’est pour juste après affirmer qu’il faut également défendre la liberté de se prostituer. Admettons qu’il existe une infime minorité de personnes qui se prostitue sans être forcée par un proxénète, la misère ou l’accoutumance à une drogue, notons que même chez les gauchistes pro-Stras bien peu proposerait la prostitution comme avenir professionnel à leurs filles ou même simplement comme job d’été, quant bien ils proclameraient que « la prostitution est un travail comme un autre ». Affirmer que parce qu’une infime minorité revendique un « statut de travailleuse du sexe », il faudrait les suivre, tient d’une logique libérale et non socialiste. Bien des chômeurs sont près à bosser pour moins que le SMIC et certains d’ailleurs le font : faut-il alors réclamer l’abolition des grilles salariales conventionnelles, du SMIC ou de la durée hebdomadaire du temps de travail ? Lorsqu’une grève est décidée avec piquets et blocage des entrées, faut-il laisser entrer les non-grévistes au nom de la « liberté individuelle » ? Faut-il généraliser le travail du dimanche au nom de quelques employées, soigneusement triées sur le volet par le patronat, qui revendiquent cette « liberté » devant les caméras ?
Pour mettre les choses au clair, l’abolition de la prostitution n’a jamais signifié la répression contre les prostituées. Le Nid, une des principales organisations abolitionnistes, a aussi été une des premières à dénoncer la loi Sarkozy sur le racolage passif. De la même façon, si la répression contre ceux qui font la manche ou qui fouillent dans les poubelles est une ignominie, notre idéal n’est certainement pas une société où l’on serait « libre » de mendier ou de faire les poubelles, mais bien d’une société où personne ne serait contraint, par la misère, à mendier ou à se nourrir dans les poubelles ! De même, nous voulons une société où personne ne soit contraint à se prostituer et sommes donc abolitionnistes. Banaliser, au nom de la « liberté individuelle » d’une infime minorité, la prostitution comme le fait le STRASS, c’est banaliser une forme particulière de violences contre les femmes et c’est justifier la marchandisation du corps humains, plus exactement la marchandisation de celui des femmes pauvres. Comme bien des organisations petites-bourgeoises qui veulent les avantages du libre marché mais sans les inconvénients, le STRASS est peut-être sincère lorsqu’il revendique la « libre prostitution sans proxénétisme ». Mais comment imaginer que les lois de l’économie capitaliste pourraient ne pas s’appliquer à un secteur particulier, surtout un secteur aussi lucratif que « l’industrie du sexe » ? Si la prostitution est un travail comme un autre, alors le proxénète est un patron comme un autre, à la différence que, même dans les pays où la législation la plus libérale est appliquée concernant la prostitution, rares sont les femmes qui « choisissent » ce « métier ». Aux Pays-Bas, en Belgique ou en Allemagne, la libéralisation de la prostitution n’a pas abolit la traite des êtres humains, bien au contraire.
Les positions du PIR ou du STRASS inspirées du post-modernisme dépassent largement ces deux groupes et on retrouve trop souvent à l’extrême-gauche des positions similaires qui au nom de « la parole des premiers concernés » ou « la liberté individuelle d’une infime minorité » en finissent par justifier les pires oppressions. On trouvait déjà certains aspects de cette politique dans le tiers-mondisme ou la gauche anti-impérialiste selon laquelle il ne faudrait, au nom du « soutien aux peuples opprimés » ne critiquer ni le FLN vietnamien, ni le Hamas ou le Hezbollah. Porte-parole autoproclamé des « indigènes », le PIR va jusqu’à affirmer que la lutte contre l’homophobie ne concerne pas les habitants des quartiers populaires ou s’oppose, dans une logique typiquement racialiste, aux couples mixtes. Nous devons combattre ces influences réactionnaires au sein de l’extrême-gauche et affirmer au contraire, non seulement notre internationalisme, mais aussi notre universalisme. Nous sommes des êtres humains et par ce simple fait « rien de ce qui est humain ne nous est étranger ».
http://www.communisme-ouvrier.info/?Le-mythe-des-premiers-concernes
On connaissait l’islamophobie, qui a fait des ravages dans l’ultragauche coloniale, mais certains sont plus atteints que d’autres et ont développé une phobie qui va au-delà, contre tout ce qui dérange le politiquement correct suprémaciste. C’est ainsi qu’on voit se développer une houriaphobie, une strassophobie, une féministophobie, bref, une pathologie grave qui fait que des trolls ne peuvent pas s’empêcher d’y consacrer leur vie et parallèlement de polluer tous les espaces de débats.
On croyait ne pas avoir besoin de se répéter indéfiniment :
« Avec les idées d’Houria Bouteldja, certains d’entre nous ont des divergences et de francs désaccords, d’autres non. Mais depuis la publication à la Fabrique de son livre, Les Blancs, les Juifs et nous, vers une politique de l’amour révolutionnaire, elle est traitée dans plusieurs médias d’antisémite, d’homophobe, de communautariste anti blancs, et même suspectée de trouver des circonstances atténuantes à Omar Mateen, le tueur d’Orlando. Comme tout texte, son livre appelle le débat, la critique robuste mais ne mérite aucunement cette campagne de lynchage.
Ce qu’elle montre, c’est qu’en France aujourd’hui il n’est pas anodin d’être une militante politique autonome et arabo-musulmane de surcroît, qui exprime avec force des opinions qui ne vont pas dans le sens général de la marche. Surtout dans une maison d’édition dont les livres ne se coulent pas, eux non plus, dans le consensus ambiant. Dans un climat politique aussi délétère qu’inquiétant, le livre d’Houria Bouteldja est pourtant une invitation à penser la conjoncture. Il n’a rien à faire dans le camp de l’horreur.
Enfin, cette campagne diffamatoire ouvre aujourd’hui la voie à une offensive émanant des plus hautes sphères de l’État qui vise à interdire le Parti des Indigènes de la république, l’organisation dont Houria Bouteldja est membre fondatrice : l’autoritarisme étatique frappe à tout va, ne le laissons pas faire brèche.
Rony Brauman, médecin, essayiste, Maxime Benatouil, animateur du réseau Transform, Sonia Dayan-Herzbrun, sociologue, Alain Gresh, journaliste, Didier Lestrade, fondateur d’Act-up et de Têtu, Michèle Sibony (bureau de l’UJFP – Union Juive Française pour la Paix), Maboula Soumahoro historienne, Isabelle Stengers, philosophe, Françoise Vergès, politologue
[…]
http://communism-decolonial.forumactif.org/t384p75-avec-et-contre-houria-bouteldja-et-le-pir-race-classe-et-genre-et-autres-questions-communistes-et-decoloniales-conversations
Houria Bouteldja réagit à une tribune violente de Fabrice Pliskin parue dans les pages web du Nouvel Obs, le 13 juin dernier, intitulée : « L’homophobie est-elle une résistance farouche à l’impérialisme occidental ? » .
Le Nouvel Obs a publié une version courte* de la réponse d’Houria Bouteldja sous le titre : « Fusillade d’Orlando et homophobie : réponse à Fabrice Pliskin ». La version longue est sur le site du PIR.
Monsieur,
Je n’ai aucun mal à imaginer votre jubilation au moment où l’idée de commettre votre article[1] a germé dans votre esprit. C’était sûrement le soir même de la fusillade d’Orlando, entre la poire et le dessert ? Je ne vous connais pas, mais je devine votre mine réjouie comme si je vous avais en face de moi. Tout d’un coup, vous vous êtes souvenu de la colère qui s’est emparée de vous à la lecture des textes que vous me reprochez aujourd’hui. Vous vous êtes souvenu de l’indignation qui vous a saisi. Ou peut-être de la haine qui vous a submergé lorsque vous m’avez vue, dans quelque émission de télé, croiser le fer avec certains intellectuels de votre sérail ? Ah, la gueule satisfaite du type qui croit s’être offert la tête de l’arrogante péronnelle.
Laissez-moi d’abord vous dire combien je me sens flattée d’être à ce point honorée par l’éditocratie française. Pas moins de sept articles en seulement quelques jours ![2] Vous m’avez longtemps snobée. Vous avez prolongé cette feinte indifférence à la sortie de mon livre[3], vous avez tenté d’organiser le silence mais nos succès vous troublent et vous obligent à changer de stratégie. L’heure est au lynchage. Et s’il faut, pour nous livrer à la vindicte populaire, user de l’infamie, vous le ferez avec la lâcheté qui caractérise ceux qui savent ne prendre aucun risque.
Je serais donc selon vous l’inspiratrice de la fusillade d’Orlando. « Comment Mme Dupont, vous ne savez pas que l’esprit qui arme les tueurs écrit depuis Barbès ? »
Si c’était le cas, Monsieur, je n’aurais aucun mal à le reconnaître car voyez-vous, je ne vous crains pas. Jusqu’ici, j’ai assumé toutes les ruptures auxquelles mon combat m’a contrainte. Et j’accepte d’en payer le prix.
Mais votre accusation n’est pas seulement lâche et abjecte, elle est fausse. Ne vous méprenez pas. Je ne crains pas d’être salie. Toutes mes ruptures m’ont salie aux yeux des vôtres et de vos dépendances[4]. Seulement, je voudrais être sûre d’être bien comprise. Elle est fausse parce que je ne suis pas de votre monde, pas plus que de celui du tueur. Aussi, ne puis-je pas être lue à travers votre grammaire, pas plus qu’à travers votre humanisme. Le monde qui produit ces monstres, je le vomis tandis que vous vous y vautrez. Il est à vous et je vous le laisse volontiers.
Dans le chapitre « vous les Blancs » de mon livre, je vous fais cette déclaration que je vous invite à lire comme une profession de foi :
« Je ne suis pas vous et me refuse à le devenir. La seule chose que je veux vraiment, c’est vous échapper autant que je peux. » […]
http://indigenes-republique.fr/fusillade-dorlando-homophobie-et-monopole-blanc-du-coeur-reponse-a-un-plumitif-parisien/
AU-DELÀ DE L’AMOUR OU DE LA HAINE : LA LUTTE POLITIQUE
Le 28 janvier, Cécile Lhuillier, ex présidente d’Act up Paris et militante au Collecitf 8 Mars pour toutes, publiait dans Têtu une tribune « je ne suis bien évidemment pas Charlie… ». Suite au partage de cette tribune par Morgane Merteuil sur son mur Facebook, Camille Emmanuelle, journaliste et compagne de Luz, a publié sur Brain une tribune – qui a depuis été reprise dans plusieurs médias – où elle fait part de sa déception quant au fait qu’une militante du STRASS – dont elle se veut un soutien – partage cette posture. Brain n’ayant à ce jour pas donné suite à la proposition de Morgane Merteuil de publier une réponse à Camille Emmanuelle, nous la publions ici.
Chère Camille Emmanuelle,
Tout d’abord, et si cela peut t’encourager à lire ce qui va suivre, sache que je ne te hais pas. Je ne hais pas non plus ton compagnon, Luz, pour qui ton amour t’a poussée à vouloir rétablir quelques faits au sujet de Charlie Hebdo, via une tribune dans laquelle tu m’accuses, ainsi que ma camarade Cécile Lhuillier, d’une certain nombre de choses dans lesquelles nous ne nous reconnaissons pas. En réalité, et malgré ce que tu suggères, les sentiments inter-personnels m’intéressent peu, dans le cadre politique. Autrement dit, la question n’est pas de savoir si je hais Gérard Biard, rédac chef de Charlie Hebdo et porte-parole de Zero Macho. Elle n’est pas de savoir si j’aime Luz, qui s’intéresse aux luttes des putes. Enfin, elle n’est pas non plus de savoir si Charlie Hebdo a dépassé ou non un certain pourcentage de publications qui permettraient d’attester de son caractère anti-raciste ou féministe. Le fait est que Charlie Hebdo, que ce soit par une, dix ou cent unes et autres caricatures, a notamment participé à un racisme, à une islamophobie, à un sexisme, qui ne sont pas le fait d’individus qu’il s’agirait d’aimer ou de haïr, mais de rapports sociaux qu’il s’agit de renforcer ou de combattre. La question n’est donc pas, comme tu sembles le suggérer d’autre part, de se positionner « contre la masse » pour prouver qu’on ne serait « pas des moutons », mais de se positionner par rapport à cette lutte.
C’est d’ailleurs bien cette question du positionnement que posait Cécile Lhuillier dans sa tribune, s’étonnant quelque peu d’un soutien si prompt de la part de la « communauté LGBT » au mot d’ordre d’unité nationale quand celle-ci se montre bien plus réticente à soutenir d’autres luttes ; du peu de « not in my name », tant lorsque le FN utilise la lutte contre l’homophobie à des fins islamophobes, que lorsque l’on demande aux musulmans d’user de ce slogan pour se désolidariser d’assassins.
Aujourd’hui, tu te positionnes, toi-même, en soutien à Charlie Hebdo, à tes amis, à ton compagnon. Dans une tentative de nous rallier à ce mouvement de soutien, tu nous expliques que Charlie Hebdo était, contrairement à ce qu’on en dit, féministe, anti-raciste, etc. Hélas, ai-je envie de dire, la question « Charlie Hebdo est-il raciste et féministe ? » n’est plus à l’ordre du jour, si ce n’est au passé, dans une démarche de meilleure compréhension du contexte qui nous a mené à la situation d’aujourd’hui. Car la situation, aujourd’hui, n’est, hélas, plus la même qu’avant ce 7 janvier : pour reprendre des mots écrits ailleurs, « c’est une nouvelle étape de la contre-révolution coloniale » qui s’amorce aujourd’hui. C’est que le contexte qui nous a menés là, loin de se réduire en effet à l’islamophobie de Charlie Hebdo, résulte d’une islamophobie intrinsèque à un État français dont l’ « unité » s’est notamment façonnée, et se façonne aujourd’hui encore, au moyen de politiques impérialistes et colonialistes. Ce sont les représentants de ce même État, qui produit tout autant le racisme que le patriarcat, qui appelaient récemment à venir en masse dans les rues, aux côtés de leurs homologues d’Israël, de la Hongrie, etc. mais aussi de tes amis de Charlie Hebdo, afin de défendre cette unité nationale.
Dans le même temps, ceux qui, depuis des années, dénoncent l’autre face de cette unité qu’est l’islamophobie, ont été accusés d’être complices des frères Kouachi et d’Amedy Coulibali ; ceux qui, parce que musulmans ou assimilés tels, enfants de huit ans inclus, subissent quotidiennement les conséquences de l’islamophobie, ont été en l’espace de deux semaines la cible d’autant d’actes qu’ils et elles l’avaient été sur toute l’année 2014.
La question aujourd’hui n’est donc, pas plus qu’hier, de déterminer s’il s’agira d’aimer ou de haïr tel ou tel militant, journaliste, caricaturiste, ni de disserter sur la définition du second degré et de l’humour de manière abstraite, et encore moins de déterminer s’il y avait quand même des choses bonnes à prendre dans Charlie Hebdo, mais bien de prendre position, d’où que l’on soit, contre la réponse nationaliste, sécuritaire et islamophobe qui consiste, sous le mot d’ordre « Je suis Charlie », à ré-injecter de l’autorité dans la société française, à remettre à l’ordre du jour la grande tradition française de la délation et à faire de l’émotion un mode de gouvernance, paralysant toute analyse politique des causes sociales et géopolitiques des événements, et rendant suspect tout positionnement contraire à celui souhaité par l’Union Sacrée.
Morgane Merteuil
http://strass-syndicat.org/au-dela-de-lamour-ou-de-la-haine-la-lutte-politique/
Pour la défense de la laïcité, de la liberté d’expression et de l’égalité de traitement ! Non à l’islamophobie ! Non à l’exclusion des mères, portant un foulard, de l’école !
LES FAITS
Le rapport 2012 de la Commission nationale consultative des droits de l’Homme (CNCDH) confirme l’inquiétante montée des sentiments et des actes antimusulmans en France. Les femmes en sont les principales victimes. Selon le rapport 2012 du Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF), elles subissent 94 % des agressions islamophobes recensées.
Dans le même temps, les discriminations déjà en place se maintiennent. Le collectif Mamans toutes égales (MTE) continue ainsi de recenser et de défendre les nombreuses mères portant un foulard exclues illégalement de l’accompagnement des sorties scolaires et de toutes les activités parascolaires sous les yeux de leurs enfants. Une stigmatisation générant humiliation et souffrance, pour les mères et les enfants.
Le cas de Sirine, exclue par le conseil de discipline de son collège pour port de bandeau et de jupe trop longue, est édifiant.
DERRIÈRE LE MOT « LAÏCITÉ », LE RACISME
Lorsque des ministres exigent l’application de la laïcité alors que la Cour de cassation a reconnu la discrimination religieuse dont avait fait l’objet une salariée de la crèche Baby Loup (licenciée parce qu’elle portait le foulard), c’est l’islamophobie qui parle.
La particularité de l’islamophobie est de ne pas être reconnue pour ce qu’elle est : du racisme. Des mesures, qui ne visent en réalité que les musulman-e-s, sont masquées derrière une prétendue défense de la laïcité.
LA LAÏCITÉ C’EST L’ÉGALITÉ
La laïcité n’est pas une atteinte aux libertés religieuses. Au contraire, elle en est la garantie. Elle n’est pas l’athéisme obligatoire ou l’obligation d’invisibilité religieuse dans les lieux publics.
La loi de 1905 est claire : elle garantit la liberté de conscience et donc de croyance et d’expression (religieuse ou non, en public et en privé), en séparant l’État de l’organisation et du financement des cultes.
Le principe de laïcité définit que la France n’a pas de religion d’État et que les services publics ne peuvent être rattachés à une quelconque autorité religieuse. Cela ne concerne pas les activités personnelles ou professionnelles de chacune et chacun !
VOUS AVEZ DIT « CHANGEMENT » ?
Aujourd’hui, après une interminable série d’attaques politiques et législatives, encourageant la multiplication des agressions islamophobes, François Hollande et son gouvernement ne changent rien. Au contraire, ils multiplient les annonces :
– proposition de loi, enregistrée à l’Assemblée nationale le 16 janvier 2013, visant à étendre le principe de « neutralité religieuse » notamment aux assistantes maternelles, y compris à leur domicile, et aux structures d’accueil de la petite enfance,
– mise en place d’un observatoire de la laïcité, composé de partisans d’une laïcité d’exclusion,
– annonce d’une nouvelle loi d’exclusion, qu’ils appellent la « laïcité » au travail.
HALTE AUX DISCRIMINATIONS : ÉGALITÉ POUR TOUTES ET TOUS !
Concrètement, c’est le droit de participer à la vie publique, de travailler, de s’impliquer dans la scolarité de leurs enfants des femmes portant un foulard qui est bafoué. Ces mesures contribuent aussi à cautionner les agressions qu’elles vivent au quotidien et les excluent totalement de l’espace public.
De plus, alors que les discriminations sont déjà très nombreuses, il semble que l’exclusion des musulmanes et musulmans du monde du travail fasse partie de l’agenda gouvernemental : nous nous y opposerons !
C’est pourquoi nous exigeons :
– l’abrogation de la circulaire Châtel en ce qu’elle recommande l’exclusion des mères portant un foulard de l’accompagnement des sorties scolaires ;
– l’abandon des deux projets de lois d’exclusion annoncés.
Stop aux discours, aux actes, aux lois racistes et d’exclusion !
MOBILISONS-NOUS !
1ers signataires :
– Salaam Sciences Po
– Collectif féministe ROSA
– ARDLFM (Association pour la Reconnaissance des Droits et Libertés à la Femme Musulmane)
– CFPE (Collectif Féministes Pour l’Egalité)
– PSM (Participation et Spiritualité Musulmanes)
– PIR (Parti des Indigènes de la République)
– MRAP Paris 19ème/20ème
– CCIPPP (Campagne civile internationale pour la protection du peuple palestinien)
– Collectif 8 mars pour Toutes
– Collectif Les mots sont importants
– AFD France (Alliance for Freedom and Dignity)
– AEP (Les amis de l’école publique)
– MCQM (Mouvement citoyen des quartiers de Montreuil)
– NPA (Nouveau parti anticapitaliste)
– CRI (Coordination contre le racisme et l’islamophobie)
– CEDETIM/IPAM (Centre d’études et d’initiatives de solidarité internationale)
– UJFP (Union juive française pour la paix)
– HM2F (Homosexuels musulmans de France)
– CGT Sony DADC France
– Les Tumultueuses
– Alternative Libertaire
– CCIF (Collectif contre l’islamophobie en France)
– MPF (Musulmans progressistes de France)
– G.A.R.C.E.S (Groupe d’Action et de Réflexion Contre l’Environnement Sexiste)
– CMF (Collectif des musulmans de France)
– FTCR (Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives)
– Parti EGALITE (Belgique)
– ATMF (Association des travailleurs maghrébins de France)
– Les Alternatifs
– Militants et sympathisants du Front de Gauche contre l’islamophobie
– Commission Islam&Laïcité
Les récents arrêtés anti-musulmanes dans le sud de la France nous rappellent les arrêtés anti-putes que nous subissons déjà. Comment ne pas voir les similarités quand la police arrête des femmes dont la tenue ne correspondrait pas aux « bonnes mœurs » ? Quand la police acquière le droit de jauger le « bon milieu » de couverture corporelle à respecter pour les femmes, à savoir ni trop nues ni trop couvertes? Quand l’administration s’octroie le droit de décider de nos tenues vestimentaires?
Les femmes devraient avoir le droit d’être visibles telles qu’elles l’entendent dans l’espace public sans avoir à cacher leur identité qu’elle soit religieuse, sexuelle, politique, transgenre ou autre.
Pourtant, régulièrement, la police désigne la tenue des travailleuses du sexe comme preuve de prostitution. Dans la commune de la Madeleine, dans le nord de la France, un arrêté municipal interdisait le port de « tenues indécentes » pour faire arrêter les travailleuses du sexe. Ces arrêtés ne concernent évidemment que les femmes, et de surcroît travailleuses du sexe. Tout comme les arrêtés anti-burkini ne visent que les femmes, et de surcroît musulmanes.
Le patriarcat à la sauce républicaine « ni pute, ni soumise » continue de faire peser ces interdits sur le corps des femmes, en particulier lorsqu’elles sont minoritaires. Nous sommes toujours trop coincées ou trop salopes ; et jamais comme il faudrait. Nous sommes toujours plus pénalisées au prétexte de nous sauver de dominations masculines que nous « subirions » à cause de la religion ou de la prostitution.
Le STRASS dénonce ce délit de faciès sexiste et ce racisme ambiant, puisque ce sont avant tout des femmes migrantes, travailleuses du sexe, ou musulmanes qui sont visées.
Stop à la gestion de nos corps par l’Etat. Stop au racisme, au sexisme, à l’islamophobie et à la putophobie !
http://strass-syndicat.org/a-poil-ou-en-burkini-nos-corps-nous-appartiennent/
40 copiés / collés sans aucun rapport et le non respect d’une pensée divergente.
beau bilan
(ré)appropriation d’une lutte ou d’une cause de façon autoritaire ou trompeuse, justification ou représentation faussée = est ce que cela peut être critiqué ?
« Nous revendiquons un antiracisme politique. » Le réseau Reprenons l’initiative contre les politiques de racialisation organise son deuxième forum à la Bourse du travail de Saint-Denis, samedi 8 octobre 2016, 9h30-18h. Il est encore temps ; mais il est grand temps…
Nous revendiquons un antiracisme politique : pour nous, le problème, ce ne sont pas seulement les personnes, les partis ou les idéologies ouvertement racistes ; c’est aussi et surtout un racisme structurel qu’alimentent les politiques de racialisation conduites, sous les gouvernements successifs, par l’État, et reconduites par des collectivités locales – qu’elles visent les Roms ou les musulmans, les enfants de l’immigration ou les populations noires, etc.
Aujourd’hui, l’état d’urgence permanent, sous prétexte de lutte contre le terrorisme, ne fait qu’aggraver la situation des quartiers populaires. Dans le même temps, les réformes néolibérales et les mesures d’austérité ne cessent de creuser les inégalités économiques. La répression policière qui frappait déjà quotidiennement les minorités raciales touche désormais régulièrement les mobilisations sociales qui se dressent contre une politique imposée à marche forcée.
La question des droits se pose donc plus que jamais dans une société de moins en moins démocratique. Or il devient de plus en plus difficile de faire entendre notre propre discours dans l’espace public – et nous savons déjà que la campagne présidentielle contribuera aussi à étouffer nos voix. Tout se passe comme si, pour la plupart, les instances politiques, au mieux, ignoraient cette réalité, et au pire, s’employaient à l’empirer.
Ce constat est largement partagé. Mais nous ne voulons pas nous contenter de dénoncer la dérive politique qui s’accélère sans cesse : nous voulons reprendre l’initiative. C’est pourquoi notre réseau organise un deuxième Forum national contre les politiques de racialisation, qui aura lieu à la Bourse du Travail de Saint-Denis le samedi 8 octobre toute la journée. Largement ouvert aux personnes et aux associations qui ne se résignent pas à la France telle qu’elle va aujourd’hui, il a pour but de partager nos outils d’analyse et de lutte.
Cela passe par des discussions qui permettront de mieux connaître nos convergences, mais aussi nos divergences. Par exemple, renversant le primat de la classe, doit-on accepter qu’il y aurait une question principale, en l’occurrence le racisme, et d’autres secondaires, ou bien au contraire faut-il revendiquer de mener de front tous les combats, en dépit de l’aveuglement aux questions raciales encore répandu dans les mouvements sociaux, et malgré le risque d’instrumentalisation raciste des revendications féministes et homosexuelles ?
Au-delà d’un état des lieux, nous débattrons des sujets qui nous importent, qui nous unissent et nous divisent tout à la fois. Après une présentation du Forum et de son contexte, à 9h30, par le groupe d’animation de Reprenons l’initiative, quatre tables rondes se succéderont.
1. Nous militons dans ce pays. Mais l’actualité du terrorisme et de l’état d’urgence nous oblige à élargir la perspective : comment penser ensemble, sans pour autant les confondre, le contexte national et la situation internationale – depuis les politiques européennes d’immigration jusqu’aux conflits militaires ?
10h-11h30 : Table ronde animée par Saïd Bouamama (FUIQP), avec Ludivine Bantigny (Ni guerres ni état de guerre), Houria Bouteldja (PIR), Alain Gresh (Contre-Attaque(s)).
2. Un racisme, des racismes ? Comment articuler les différents racismes, qu’il s’agisse de négrophobie, d’islamophobie, d’antitsiganisme, mais aussi d’antisémitisme et de racisme anti-asiatique ? Et à l’inverse comment distinguer ces logiques sans les opposer ?
11h30-13h : Table ronde animée par Esther Benbassa (sénatrice EELV du Val-de-Marne / professeure d’histoire des religions, Sorbonne), avec Sonia Fayman (UJFP), Franco Lollia (BAN), Sacha Lin-Jung (AJCF), Saimir Mile (Voix des Rroms).
3. La racialisation de l’antiracisme : on voit se dessiner aujourd’hui un clivage entre des associations qui se veulent universalistes, et qui sont surtout blanches, et des associations qui revendiquent de représenter les racisé-e-s, au risque d’être taxées de communautarisme. Comment travailler ensemble pour ne pas faire le jeu du racisme ?
14h30-16h : Table ronde animée par Éric Fassin (Université Paris-8), avec Youcef Brakni (collectif contre l’expulsion des Nubiens de Bagnolet), Anina Ciuciu (Mouvement du 16 mai), Michel Tubiana (LDH).
4. Mouvements sociaux et quartiers populaires : on a beaucoup parlé, autour de Nuit Debout, d’une coupure entre la mobilisation contre la loi Travail et les minorités raciales. Comment faire converger des luttes qui sont certes bien distinctes, mais qui pour autant ne sont pas sans rapport ?
16h-17h30 : Table ronde animée par Alima Boumediene-Thiery (Femmes plurielles), avec Souad Frikech (AMF Saint-Denis), M’hamed Kaki (Oranges de Nanterre), Almamy Kanouté (Émergence), Hassiba et Lamia (ALCIR).
La séance de conclusion (17h30-18h) donnera la parole à Hawa Traoré, sœur d’Adama Traoré (Justice et vérité pour Adama) et Guillaume Vadot (Université Paris-1) pour parler des violences policières, ainsi qu’à Nacira Guénif-Souïlamas (Université Paris-8), pour échanger sur les suites à donner à notre action.
Cette journée de discussion vise en effet à préparer l’avenir – l’année des élections présidentielles, mais aussi les suivantes, qui s’annoncent tout aussi difficiles. Il est important de nous parler pour éviter certains malentendus, mais aussi pour prendre acte de certains désaccords ; c’est la condition d’alliances sur des combats partagés. Il faut aussi nous faire entendre au-delà de nos cercles militants. C’est pourquoi la journée s’achèvera sur une discussion des formes d’action : pour reprendre l’initiative, il sera nécessaire d’imposer nos questions et notre vocabulaire. Nous continuerons d’y travailler ensemble après le 8 octobre.
« les phobies ça se soigne ».
Il y a donc des pensées saines et des pensées malsaines. Et la politique est une psychiatrie. OK.
En effet,le racisme, le sexisme, l’islamophobie et la putophobie sont des PENSÉES MALSAINES ! Merci de donner l’occasion de le dire à la personne toujours bien intentionnée qui a pondu ce texte de provocation.
Camp d’été décolonial : qui a peur de la non-mixité et de l’antiracisme politique ?
Depuis quelques semaines, la polémique enfle autour du projet de camp d’été décolonial porté par Sihame Assbague et Fania Noël. En cause, la non-mixité politique de l’événement, choisie et revendiquée par les militantes. Après avoir essuyé de nombreuses critiques et attaques diffamatoires, et pour répondre aux nombreuses interrogations des premiers concernés, elles se sont lancées dans la rédaction d’un dialogue fictif avec elles-mêmes.
http://contre-attaques.org/magazine/article/camp-d-ete
Yo ! Donc un bon coup de karcher avec du désinfectant, c’est la « solution » politique intégrale.
Sauf qu’à ce jeu là il est recommandé d’être le plus fort. Sans quoi la gonflette se termine mal.
(et nota, on peut être pour toutes les non-mixités politiques et ne – justement ! – pas souscrire à l’idée qu’il y a une Vérité, une Santé, un Destin uniques et convergents ; bref que le monde est et reste problématique).
Qu’en est-il du » non respect d’une pensée divergente » et de la « tolérance à la critique » quand les victimes en sont les indigènes ? Les racisé-e-s ont-ils/elles encore droit de répondre ?
Attaques et censure contre le PIR : nous ne céderons pas !
Forte répression sur le Parti des Indigènes de la République et autres mouvements de l’antiracisme radical, comme sur BDS.
Après les organisations islamiques et le mouvement pro-palestinien, c’est au tour du Parti des Indigènes de la République d’être dans le viseur de la censure numérique. Nous faisons actuellement face à une campagne de signalements ciblés qui a mené à la suspension des comptes Facebook de nombreux militants, dont notre porte-parole Houria Bouteldja, et à celui de notre page officielle. À cela s’ajoute, pour d’obscures raisons politiques à demi-avouées, la clôture du compte bancaire de notre organisation.
Ces méthodes de censure sans visage s’inscrivent dans le cadre d’une propagande de dénigrement grandissante, fiévreusement entretenue par les plus hautes sphères du pouvoir politique et médiatique, qui touche toutes les expressions de la puissance indigène, qu’elle soit islamique, anticolonialiste ou antiraciste. Et c’est au nom de la prévention contre le « terrorisme » que cette lutte contre la puissance indigène cherche à se légitimer officiellement. Pour Valls, « l’islamo-gauchisme » est le « terreau » de la « radicalisation ». Pénétrés par ce même logiciel, Gilles Clavreul et ses associés de l’UEJF et de SOS Racisme se sont résolus à lutter contre « la haine » sur internet, ciblant par-là l’antisionisme et l’antiracisme politique. La probabilité est forte pour que la suspension de nos profils sur les réseaux sociaux soit liée à la campagne dans laquelle ils se sont engagés.
Ce nouveau coup porté sur notre organisation est l’aboutissement d’un long processus de radicalisation de l’État qui a touché tous les indigènes, bien avant l’actuel gouvernement, et qui s’en prend désormais aussi à une partie du mouvement social blanc. En ce qui concerne le PIR, cette radicalisation apparaît comme relativement bénigne quand on la compare aux centaines et milliers de personnes perquisitionnées et assignées à résidence, aux Noirs et aux Arabes assassinés par la police dans les banlieues, aux associations dissoutes et aux musulmans emprisonnés au nom de la « lutte contre Daech ». L’état d’urgence fait peser depuis des mois une violence inouïe sur des milliers de musulmans, et s’orchestre comme une gigantesque répression institutionnelle : perquisitions dans les quartiers et dans des ONG islamiques dont le succès inquiète, fermetures de mosquées, exclusion de jeunes filles musulmanes des établissements scolaires pour des vêtements « trop longs »… La parole islamophobe, négrophobe et rromophobe en a profité pour se décomplexer et passer à l’offensive. Les actes islamophobes ont suivi. À un autre niveau, la propagande de dénigrement et de censure touche tous les espaces et toutes les personnalités considérées comme trop indépendantes du pouvoir français et de ses menées actuelles. La campagne de diabolisation contre les imams et les humanitaires réputés « salafistes » (tels que Idriss Sihamedi) et les intellectuels musulmans (comme Tariq Ramadan) s’est durcie, accompagnant les attaques à l’égard de nombreuses organisations et personnalités de l’antiracisme politique telles que la Brigade Anti Négrophobie, Urgence notre Police assassine, Sihame Assbague et le camp décolonial, et bien évidemment Houria Bouteldja et le PIR.
Ces lâches entraves démasquent néanmoins une réalité : celle d’un aveu de faiblesse d’un pouvoir qui pratique la politique de la fuite en avant. Pointé du doigt internationalement à cause de sa politique islamophobe, désavoué par l’actuel mouvement d’ampleur contre la Loi travail, le gouvernement socialiste voit sa médiocrité mise à nu. Les images des violences policières s’abattant sur un public majoritairement blanc se multiplient et alertent l’opinion publique sur les méthodes d’un État qui n’a plus d’autre recours. Rappelé à l’ordre par Amnesty International pour ses politiques racistes, le gouvernement en vient à publier des démentis aux accents comiques sur les pages internet de la diplomatie française pour tenter de convaincre une opinion internationale qui sait déjà à quoi s’en tenir. Dans ce contexte et face aux récents événements, l’organisation politique de la puissance indigène sous toutes ses formes ne cesse de prendre de l’ampleur.
« Nous nous sommes mis debout et nous avançons maintenant (…) nous ne pensons pas qu’il existe quelque part une force capable de nous en empêcher », écrivait Frantz Fanon. À l’heure où le pouvoir blanc multiplie les signes de peur et de faiblesse, aucune force ne nous empêchera d’exister politiquement.
http://www.ujfp.org/spip.php?article4984
La ségrégation, c’est-à-dire la séparation imposée, l’accès réservé à certaines places ou certains espaces sociaux, est une des principales formes que prend la domination – que ce soit la domination des riches sur les pauvres, celle des hommes sur les femmes ou celle des blancs sur les non-blancs. Mais ce n’est pas la seule : de nombreux mécanismes de domination perdurent au sein même des espaces sociaux mixtes, malgré la mixité, voire parfois grâce à elle. C’est ce que montre Christine Delphy dans le texte qui suit : la mixité n’est pas en elle-même un bien qu’il faudrait opposer sans discernement à une non-mixité forcément « enfermante » et « étouffante » ; la non-mixité n’est en fait oppressante que lorsqu’elle est subie, au même titre que peut être oppressante une mixité ou une proximité subie. Et si la mixité choisie (ou plus exactement : la possibilité de choisir – ou pas – la mixité) constitue un objectif pour les dominé-e-s, le chemin qui y mène passe nécessairement par des moments de non-mixité choisie.
Voir le texte :
http://lmsi.net/La-non-mixite-une-necessite