Ce matin partira de caracollo, département d’Oruro, une marche de milliers de paysans et d’indigènes qui dans une semaine arrivera au Congrès, dans la ville de La Paz. Dans celle-ci négocie la « Commission de Concertation », formée par 15 législateurs des quatre partis majoritaires : Pouvoir Démocratique Social (Podemos), Mouvement Nationaliste Révolutionnaire (MNR), Unité Nationale (UN) – tous opposants au gouvernement – et le Mouvement Au Socialisme (MAS) de Evo Morales. La nouvelle Constitution a été approuvée l’année dernière à Oruro par 164 des 255 congressistes élus par vote populaire. Le mois passé, le gouvernement national et les préfets de l’opposant Conseil National Démocratique (Conalde), partisans de l’autonomie de leurs départements et opposés au projet de nouvelle Constitution ne sont pas parvenus à un accord. Maintenant c’est le tour des parlementaires. Le président Evo Morales espère que finalement une loi convoque à un référendum pour ratifier ou rejeter la nouvelle Constitution. Les organisations sociales considèrent pour leur part que l’opposition ne recherche aucun accord mais seulement de mettre des bâtons dans les roues au gouvernement.

Morales inaugurera aujourd’hui la marche, dont la destination est la place Murillo. Là, ils demanderont au Congrès de permettre à la population de se prononcer sur le texte qui promet de « refonder la Bolivie ». C’était tout du moins la consigne de la nouvelle Constitution votée en décembre. La marche est organisée par la Centrale Ouvrière Bolivienne (COB) et la Coordination Nationale pour le Changement (Conalcam) qui réunit 60 organisations sociales proches de Morales. Cependant, la COB, en août, s’était mobilisée contre le gouvernement pour que soit approuvé le projet de loi de pensions présenté par l’organisation. Les manifestations ont fait deux morts dans des affrontements avec la police dans un barrage de route à Oruro. Les responsables n’ont toujours pas été trouvés.

On estime qu’au moins 10 mille manifestants partiront ce matin. À mesure qu’ils s’approchent de La Paz, quelques milliers de plus les rejoindront. Hier, les congressistes de l’opposition ont envoyé une lettre au Conalcam et à la COB pour qu’ils participent au dialogue d’aujourd’hui. Les manifestants ont évalué que c’était une stratégie pour retirer un sens à leur mobilisation. « Nous avons déjà tout préparé, le chemin tracé, les marmites. Maintenant avec une lettre, ils nous disent de nous rendre au dialogue. Nous allons envoyer une commission dimanche », a dit à Pagina/12 Elías Quelca Mamani, Jiliri Apu Mallku (maximum dirigeant) du Conseil de Ayllus et Markas du Qollasuyo (Conamaq), qui aura 2 mille représentant dans la marche de 300 kilomètres.

Les congressistes ne se limiteront pas à lire le nouveau texte constitutionnel. Cependant, Quelca Mamani a soutenu : « nous avons déjà dit que l’on ne peut pas toucher à la nouvelle Constitution. Elle doit aller à un référendum comme elle est sortie d’Oruro. L’opposition fait tout pour gagner du temps tandis qu’elle pense à la manière d’arrêter ce processus. Nous n’acceptons pas cela ». Au début, la marche qui commence aujourd’hui avait l’objectif d’encercler le Congrès jusqu’à ce qu’en sorte la convocation au référendum. Ensuite, les organisateurs ont décidé de la changer en veille pour que les politiques des partis de droite ne les accusent d’être « antidémocratiques ».

Podemos, qui contrôle le Sénat, a mis 16 « mais » au nouveau texte, seulement « quelques problèmes structuraux », selon un document de ce groupe. Parmi les questionnements de la Constitution « masiste », ils énumèrent « la formation de manière ségrégationiste des pouvoirs » (pour les élections selon les usages et coutumes de chaque nation indigène pour divers organismes de gouvernement), la « réélection présidentielle » (qui – selon Podemos – peut laisser Morales pour encore 10 ans à la présidence), la « disparition de la République de la Bolivie » (en référence à la proposition de l’État Plurinational Communautaire), la « propriété privée en risque », les « ressources naturelles et leur mauvaise administration », « les autonomies ‘rognées’  » et la « discrimination linguistique » (parce que seraient des des langues officielles le castillan et celles des 36 peuples indigènes).

Dans l’orient du pays, la campagne pour le NON à la nouvelle Constitution a déjà commencée, avec les affiches « non à la Constitution vénézuélienne », colorés de rouge pour imiter le sang. « Ils proposent le non à quelque chose qu’ils ne connaissent pas encore en détail », a dit hier le vice-président, Alvaro García Linera.

Il a expliqué que les parlementaires ne modifieront que les articles où sont détectées des contradictions. Mais – a-t-il précisé – « il faut préciser quelles sont ces contradictions, dans quels points et comment ces corrections sont faites sans mettre en cause la structure générale du corps de la nouvelle Constitution ».

Sebastián Ochoa, Pagina/12, 13 octobre 2008.

http://www.pagina12.com.ar/diario/elmundo/4-113243-2008….html

Traduit par http://amerikenlutte.free.fr