Je ne suis ni écrivaine, ni sociologue, ni philosophe ou personnage politique
_ je n’aurais pas la fausse prétention et illégimité que Élaine Audet, Martine Mercier, Richard Poulin, Claudine Legardinier, Saïde Bouamama et tant d’autres ont à parler des travailleuSEs du sexe, à les infantiliser, les nier, les enfermer dans une morale judéo-chrétienne puante
_ je ne me permettrais donc pas de parler à la place de ceux qui sont conserné-es et qui sont travailleuSEs du sexe, je joins juste ici quelques extraits du féminisme qu’illes incarnent et leurs revendications

Extraits du site http://www.lesputes.org/

Introduction
_ « Chair = péché !
_ Bande de cons, voilà pourquoi parfois j’aimerai tuer ! Alors au moins nous, les prostituées, nous prenons une sacrée revanche : de la chair et du foutre, des caresses en veux-tu en voilà, et on baigne dans le péché ! Nous ne jouissons pas ou presque pas ? Aucune importance. Les bourgeoises ne jouissent pas non plus… en plus, elles sont aigries, cocues, flétries, vouées au ménage, ternes, vieillies avant l’âge – et nous, nous sommes belles et scandaleuses, maquillées, ornées, nues, désirées et on nous paie !
_ Voilà pourquoi toutes ces vieilles rombières frustrées nous en veulent à mort… Et nous, on les emmerde ! (Dans le fond, elles sont jalouses de nous.)
_ 29 août 1980 – Réal Grisélidis, la passe imaginaire, Verticales. « 

Lettre ouverte à ceux qui veulent nous abolir

« Nous sommes fièrEs d’être des travailleuSEs du sexe. Nous sommes en colère contre tous ceux qui veulent nous abolir. Nous ne supportons pas le discours abolitionniste qui est à notre égard culpabilisant, victimisant, méprisant, et tout simplement stigmatisant.
Les abolitionnistes n’ont rien compris. Ils croient savoir ce qui est bon pour nous alors que le plus souvent ils n’ont jamais pratiqué notre métier et ne savent donc pas de quoi ils parlent. Ils se positionnent comme des omniscients qui peuvent parler à la place des premièrEs intérésséEs et dire de nous tout le mépris qu’ils pensent. C’est de la confiscation de la parole, c’est de l’oppression qu’il faut combattre. Par leur discours, les abolitionnistes nous réduisent à des corps, à des objets inconscients de ce qu’on nous ferait subir. En réalité, nous ne supportons pas que ces personnes prétendent nous aider à nous en sortir alors même que nous voulons y rester… sur le trottoir.
_ Nous ne vendons pas notre corps. Nous rendons des services sexuels payants, et cela ne nous empêche pas d’en rendre aussi des gratuits. Lors d’un service sexuel, qu’il soit payant ou gratuit, il ne s’agit pas de donner son corps mais de partager un plaisir, une affection, un sentiment avec quelqu’un. Il n’y a aucun rapport entre toute attaque à l’intégrité physique d’une personne parfaitement condamnable et le fait de faire l’amour pour de l’argent.
_ Les comparaisons avec les ventes d’organes sont ignobles.
_ Bien entendu nous nous servons de notre corps pour travailler, ce que font d’ailleurs tous les travailleurs même ceux qui prétendent ne se servir que de leur intellect. Même ceux là sont bien obligés de déplacer leur derrière pour se rendre sur leur lieu de travail. Pardonnez nous cette évidence mais ils se servent bien de leur main pour écrire ou de leur bouche pour parler afin de mener à bien leur travail. Nous nous servons nous aussi de nos corps pour travailler et en particulier de notre tête car la jouissance sexuelle n’est pas qu’un simple mécanisme physique.
_ Les abolitionnistes ne parviennent pas apparemment à distinguer le désir du consentement. Il faut croire qu’ils ne peuvent pas vivre leur sexualité sans que jamais ne rentre en jeu autre chose que le désir. Ils ne se demandent même pas en quoi ce désir peut être motivé par des enjeux complètement extérieurs à leur corps ou personnalité. Il nous semble au contraire que le désir sexuel se nourrit non pas seulement du simple corps ou personnalité des partenaires potentiels mais de tout un contexte de représentations fantasmées qui prennent aussi en partie compte des rapports de domination, du pouvoir, et de l’argent.
_ Se prostituer peut également pour certaines être une activité très excitante sexuellement, et source de plaisir.
Certains abolitionnistes prétendent que nous ne respectons pas notre corps. Nous prétendons le contraire. Lorsque les deux ou plusieurs parties tirent chacun profit de la relation sexuelle, il n’y a aucun perdant. La/le travailleuSE du sexe est même la/le plus sûrE d’en tirer profit puisque même si aucun plaisir n’est éprouvé (ce qui peut arriver lors de rapports non rémunérés également) elle/il en retirera au moins quelque chose à la fin. Le vrai respect dans cette affaire est le respect des conditions conclues entre les différentes parties dès le départ. La première exigence que doit être le consentement est obligatoirement présente puisqu’il s’agit d’un contrat explicite dès le premier instant de la rencontre, contrairement à d’autres formes de relations sexuelles où le consentement s’obtient à force de persuasions. Si on considère vraiment les prostituéEs comme des sujets libres et sachant ce qu’elles/ils font, il y a plus de chance qu’on les respecte par la suite. Nous considérer comme des victimes, nous réduire à des simples corps, objets de transactions confortent plutôt ceux qui veulent s’approprier nos corps, c’est conforter les violeurs dans l’image qu’ils ont des prostituéEs. Bien plus que les violeurs, les abolitionnistes sont parvenus à convaincre la quasi-totalité de la société de l’image qu’elle doit avoir des travailleuSEs du sexe. En effet, de nos jours, les jeunes femmes s’extraient volontiers dans le contexte sexiste ambiant des stigmates de putes ou soumises. Mais n’est ce pas les renforcer justement de vouloir à tout prix s’en extraire ? Et de laisser donc tout un chacun penser tout le mal qu’il souhaite de celles/ceux qui ne vivent pas leur sexualité dans le cadre normatif du « ni pute ni soumise ». Être pute ou être soumise ne signifie pas forcément être opprimée dans la relation qu’on entretient avec son partenaire d’autant plus quand cette relation est sexuelle. On peut jouer des rapports de domination via sa sexualité et en jouir. On peut démontrer ainsi que ces rôles ne sont que des rôles, qu’ils sont interchangeables et placer la sexualité hors du cadre purement génital. L’important est de pouvoir être conscient que le rôle qu’on exerce dans sa sexualité ou dans tout type de rapport n’est qu’un rôle que l’on joue et qu’on peut le refuser à tout instant. Il n’y a rien de figé dans la sexualité, rien de normal. On peut jouir de toutes les situations à partir du moment où chaque personne qui y participe le veuille bien. Mais pour que le consentement soit réel, il est préférable que les individus aient conscience du rôle qu’ils occupent dans la relation qu’ils entretiennent, et que ce rôle, non seulement elles/ils l’acceptent mais l’aient vraiment choisi. Une pute sait très bien quand elle exerce son métier si elle est contrainte ou pas de le faire, elle sait très bien si elle est victime ou non. Peut on en dire autant de la femme au foyer qui ne sait peut être pas très bien pourquoi elle est assignée à résidence, contrainte au travail domestique, considérée comme un moyen de reproduction, et enfin réclamée pour ses services sexuels ? Quel profit tire t elle de cette relation avec son mari, « unique client légal » en comparaison de la pute et de ses clients ? La source de revenus est unique : ce que son mari lui donne, le travail fourni beaucoup plus important puisqu’il ne s’agit pas que de services sexuels et que c’est 24Hsur24, et le contrat n’est pas renouvelable à moins d’un divorce. Il nous semble que la prostitution au contraire est un moyen d’échapper aux dominations d’un papa, d’un patron ou d’un mari. Malheureusement, certaines féministes au lieu de servir la cause de TOUTES les femmes, nous comprises, ont préféré passer alliance avec des intégristes catholiques afin de nous abolir. Nous préférons nous réclamer d’un féminisme qui ne restreint pas la libre disposition du corps et qui ne dicte pas ce que doit être nos sexualités.

La deuxième exigence de respect dans un rapport sexuel qu’il soit prostitutionnel ou pas est le refus de prises de risques d’une contamination. Le port du préservatif masculin ou féminin est le seul moyen de se protéger du sida et autres I.S.T. Les abolitionnistes ont la fâcheuse tendance de nous considérer prostituéEs comme des vecteurs de maladies vénériennes. Ils ont évidement tort. Ils oublient que nous, les prostituéEs avons été parmi les premièrEs à adopter des pratiques de prévention face à l’épidémie de sida dès le début des années 1980. Ils oublient que les prostituéEs font partie des rares personnes qui pratiquent des fellations protégées. Toutes les prostituées ne le font pas bien entendu, mais elles/ils sont certainement celles/ceux qui le font le plus. Ils ne s’imaginent pas non plus que les prostituéEs sont de véritables actRICEs de prévention car elles/ils apprennent à leurs clients ce qu’est le port du préservatif. Parmi les groupes menacés par le sida, les prostituéEs sont peut être de celles/ceux qui sont les plus responsables face à l’épidémie. Assumer le fait de se prostituer revient aussi à assumer sa prévention.
_ Vouloir abolir le métier, n’est évidement pas un moyen d’endiguer l’épidémie. Plus les prostituéEs ou leurs clients seront pénaliséES, répriméEs, plus il leur sera nécessaire d’échapper à cette répression et leur santé ne deviendra alors qu’une préoccupation secondaire voire n’en sera plus une du tout.
_ Il n’y a pas de problème de la prostitution, il y a les problèmes que rencontrent les prostituéEs. Ces problèmes sont engendrés ou confortés à cause des abolitionnistes. Il s’agit de la répression accrue à notre égard récemment due à la loi Sarkozy sur le racolage passif. Il s’agit de la non reconnaissance de notre travail et du refus de nous voir accorder des droits, les plus élémentaires, ce dont jouissent tous les travailleurs. « 

Qui sommes nous ?
_ Nous sommes des prostituéEs : femmes et transpédégouines.
Le groupe Les-Putes a pour but de rassembler les travailleuSEs du sexe au sein d’un groupe activiste qui vise à la reconnaissance de nos intérêts et à l’aboutissement de nos revendications.
Notre mouvement est ouvert à touTEs les putes, quels que soient notre origine, genre, orientation sexuelle, mode de travail, etc.

Nous récusons toutes les discriminations et formes de rejets.
_ Nous aimons notre métier, nous aimons nos clients : nous sommes fièrEs d’être des Safe Sex Queens.
_ Nous ne vendons pas nos corps mais proposons des services sexuels,
c’est notre métier et nous le faisons bien : nous sommes des professionnelLEs du sexe.
_ Que voulons nous ?
_ Nos revendications sont d’ordre politiques, sociales et sanitaires. _ Ainsi nous militons pour :
_ • L’abrogation de la loi Sarkozy,
_ • La légalisation de la prostitution en France,
_ • Des papiers pour touTEs (EtrangerEs et Trans’),
_ • La reconnaissance de nos droits sociaux, l’égalité des droits avec les autres travailleurs,
_ • La pénalisation de toutes les discriminations putophobes et l’intégration de la putophobie dans les sujets pris en considération par la HALDE,
_ • Un tarif minimum pour les passes,
_ • Le libre choix du statut et des conditions de travail : profession libérale, statut salarié, etc.
_ • La création d’une Journée Nationale en mémoire des putes persécutées, assassinées et déportées,
_ • Des actions ciblées de prévention des IST, du VIH/sida et des Hépatites.
Nous nous élevons également contre toutes les oppressions dont vous faisons l’objet. En particulier :
_ • les violences physiques et verbales: viols, passages à tabac, insultes, meurtres, séquestration, tortures…
_ • Le racisme, le sexisme, l’homophobie, la lesbophobie, la transphobie, et la putophobie,
_ • Le rejet, l’exclusion sociale,
_ • La non-reconnaissance de notre travail et de nos droits.
Nous demandons donc une régularisation à tous les niveaux et une reconnaissance de notre profession, des textes, lois et actions nous protégeant dans l’exercice de nos fonctions.

L’illégalité est la porte ouverte à tous les abus.