Libératrice, traumatique, vantée, discrète, inavouable… la sexualité a une place très importante dans nos vies, mais nous n’en mesurons pas forcément les implications sociales.

Il ne s’agit pas de se réunir pour jouer aux alcooliques anonymes du sexe, mais bien de discuter de ces implications pour nous mêmes et pour les autres, dans notre construction personnelle et dans notre rapport à la norme, au genre entendu comme construction sociale, aux rapports de domination que l’on recrée, parfois, inconsciemment, dans notre sexualité.

N’ayons pas peur des gros mots : dans une société patriarcale hétéro-normée, la sexualité est sacrifiée à la norme masculine. Pour la faire courte, c’est le modèle de celui qui bande dur pour pénétrer fort une femme dont l’excitation vient du plaisir d’exciter l’autre. Or cette norme masculine, réelle ou fantasmée, on la retrouve partout, elle est inscrite dans nos corps et on la connaît par coeur. C’est la compétition des mâles à celui qui en a la plus grosse, la démarche virile (vrrr…) d’un corps bodybuildé, l’insolence quotidienne de celui qui parle le plus fort mais qui ne se demande jamais ni ce que ressent l’autre, ni d’où vient son propre plaisir.

Et s’il fallait encore insister sur l’ampleur du chantier en matière de sexualité, les difficultés persistantes d’assumer publiquement son homosexualité, la question latente du consentement(très important,gros boulot), l’ignorance des mécanismes de la sexualité féminine, le règne du porno, le tabou du plaisir anal, l’absence de débat sur la contraception masculine(à mettre en avant pour une première discussion à mon avis,ça peut interroger et percuter,faire venir un peu de monde et amener le débat sur la domination masculine et le contrôle du corps de l’autre), le besoin criant d’éducation sexuelle réelle sont autant de pistes de réflexions (qui ne se limitent pas à cette liste d’ailleurs).

Sans rire. On se l’est tous mesurée, pas vrai ?
Pourquoi est-ce si compliqué de parler sérieusement de sexualité (et pas forcément que de sexe) entre mecs ?

Sûrement « du fait que c’est un des seuls sujets où l’on est obligé de s’impliquer personnellement et où l’on ne peut pas se cacher derrière des approches purement théoriques », comme proposait un fanzine d’ailleurs écrit par un homme dès les années 90, concernant la déconstruction des normes de genre et la difficulté des hommes face à ce sujet.

Nous n’inventons rien, de nombreux groupes de parole composés exclusivement d’hommes tentent depuis des décennies de penser les comportements masculins, en ayant pour point de départ qu’ils sont un outil de domination d’un genre sur l’autre. L’objectif est à la fois de regarder ces comportements avec franchise et humilité quand ils ne sont pas glorieux, à la fois de (ré)-apprendre à discuter entre mecs, s’écouter simplement, échanger sans reproduire de rapports de pouvoir.

Le but n’est pas de voler au secours des femmes dans leurs luttes féministes (nous nous en gardons bien en tant qu’hommes, elles n’ont pas besoin de notre aide ; satané paternalisme!), mais bien de questionner, au regard du sujet sensible qu’est la sexualité, comment la fabrique et l’entretien des normes de genre sont oppressives pour les femmes, autant que pour les hommes qui ne s’y retrouvent pas.

Nous ne nions pas que ce soit dur de parler de soi, de ses sensualités, de son intimité. Mais il nous semble essentiel de dépasser cette peur pour aborder en profondeur ces sujets.

Dans un premier temps, pour favoriser la prise de parole, nous proposons que les discussions soient « non-mixtes », c’est à dire qu’elles soient réservées aux hommes. Il ne s’agit pas de s’exclure à long terme de la mixité, mais bien faciliter à court terme la prise de parole de tous, dans le respect et la confiance de chacun. Un principe de confidentialité est évidemment de mise.

Pour conclure avec un autre extrait du même fanzine : « La sexualité est souvent compliquée, fait ressortir des tas de contradictions et de choses dérangeantes, des fantasmes parfois malsains ou peu éthiques, des blocages divers, et réussir à parler de tout ça c’est créer un espace de liberté avec les autres et avec soi-même ».

Alors, on se lance?

– Discussions, lectures… ateliers réservés aux hommes
– Un mardi sur deux à La Charrue (Chateaubriant), à partir de 20h
– Contact : 06 52 19 88 94 / charlesmainie@gmail.com