Ce matin du mardi 11 avril, au lendemain du « remplacement » du CPE par des mesures qui n’ont pas grand chose à voir avec, en ce lendemain de prétendue « victoire », il n’y avait pas foule pour la manif, à la gare.

Au début, on était à peine 1 000. Y’avait un peu de tout, des étudiant-e-s, des lycéen-ne-s, des syndicalistes (pas mal de Sud et de Cgt, quelques Unef et Cnt, …), des anarchistes, des non-classé-e-s ou des inclassables, de tout mais en petit nombre, quoi. Le parcours était assez singulier, puisque nous sommes allé-e-s jusque devant le tribunal (où une partie des manifestant-e-s se sont symboliquement mis les mains sur la tête, mimant des situations d’arrestation). De retour sur le cours Berriat, le cortège a bien grossi, atteignant jusqu’à 3 000 personnes, maximum. Le nombre était bien sûr décevant (et visiblement c’était la même chose dans les autres villes), mais une certaine énergie se faisait sentir malgré tout (et malgré les trois voitures sono, un peu les unes sur les autres avec si peu de monde…).
La Cgt entonne des « CPE, CNE, même combat… », tandis que quelques manifestant-e-s ironisent des « Retour, retour, retour du CPE, avant on s’amusait mieux ».

En tête de cortège, une banderole annonce que « la lutte continue », sur une autre est écrit « tous ensemble », mais force est de constater que le nombre n’est plus là. Toutefois, il ne s’agit pas d’une manif plan-plan habituelle puisque des actions sont menées entre le cours Berriat et la rue Lesdiguières, avant d’arriver devant la préfecture, place de Verdun.

Sur le cours Berriat, une trentaine de personnes vident une agence d’interim de son mobilier (chaises, présentoirs, petites tables, etc.), comme pour montrer qu’on ne veut pas de leurs boulots de merde, de leur exploitation salariale (avec ou sans CPE). Plus loin, sur la rue Lesdiguières, une agence immobilière subit le même sort: c’est plutôt amusant d’expulser ceux qui habituellement nous font expulser pour loyers impayés ou squat (rappelons ici que nous n’avons expulser de l’agence que du matériel, ne touchant pas les employé-e-s, pas même le directeur ou le vigile agressif).

Arrivé-e-s devant la préf’, des flics arrivent en renfort, « au cas où »…
Quelques personnes font des interventions au micro, appelant à continuer la lutte.

Vers 13h, plus d’une centaine de personnes se retrouvent vers l’avenue Alsace-Lorraine et forcent l’entrée du siège du Dauphiné Libéré. Quelques graffitis sont écrits (contre la corruption des médias, entre autres). Mais dans un mouvement de panique assez inexplicable (l’arrivée de quelques flics semble en être la cause, mais nous étions très nombreux), tout le monde ressort et part en direction des locaux de la radio d’Etat France Bleu Isère.

Là, alors que les locaux ne sont censés rouvrir qu’à 14h (il est environ 13h30), une employée ouvre la porte d’entrée: tout le monde en profite pour entrer ! L’occupation sauvage démarre, nous sommes 150, puis facilement 200 (les nouvelles vont vite). Le rez-de-chaussée est plein à craquer, les dernières personnes qui arrivent restent sur le trottoir, ce qui est loin d’être inutile parce que ça montre que quelque chose se passe, et surtout, on a des tas de tracts à differ aux passant-e-s (notamment « Pousser le monde qui s’écroule… », texte téléchargeable sur http://infokiosques.net/IMG/pdf/pousser_tract.pdf), merci les photocopieuses de France Bleu Isère !

Nos tentatives de prendre l’antenne échouent assez rapidement, apparemment l’antenne a basculé et est émise depuis Paris depuis notre arrivée.

Les négociations commencent alors pour réussir à passer en direct à la radio.
Un flic en civil se fait jeter dehors par des occupant-e-s.
Les locaux de France Bleu Isère commencent à être décorés de toute part (affichage, rouleaux de scotch étendus entre des poteaux, graffitis divers: mort aux medias bourgeois, médias collabos, rance bleu = radio ump ou rance bleu = radio gouvernement). Un enregistrement pirate est improvisé par des manifestant-e-s (prochainement en ligne sur Indymedia-Grenoble ?).

Visiblement, les chefs de la radio (bah oui y’a des chefs ici) ne demandent pas d’intervention policière, ce qui n’est pas pour nous déplaire, évidemment.

Un groupe de personnes rédige un texte assez synthétique pour qu’il soit lu au journal de 17h. Le but est d’expliquer l’action, pourquoi nous sommes toujours en lutte, et pourquoi nous sommes en colère contre les médias (pas facile d’expliquer tout ça en quelques mots mais ça s’est fait).

Le texte est finalement enregistré puis diffusé au journal de 17h, une heure et demi après la fin de l’occupation. Le texte lu dure un peu plus d’1min30, il est téléchargeable sur http://grenoble.ww7.be/2006-04-11_Grenoble/2006-04-11_Communique.mp3

La présentation qu’en font les journalistes de France Bleu Isère lors du journal de 17h est téléchargeable sur http://grenoble.ww7.be/2006-04-11_Grenoble/2006-04-11_FranceBleuIsere_17h.mp3

Pendant l’occupation de France Bleu Isère, une ANPE non loin de là est « déménagée », à la manière des actions du matin. Quelques graffitis sont inscrits (Le chômage baisse ou les radiations augmentent ?, Chômage heureux, etc.).

Suite à l’occupation de la radio, quelques dizaines de manifestant-e-s se dirigent vers M6, sans réussir à en occuper les locaux mais en y écrivant sur la vitrine à la peinture blanche, en énorme, « Mort aux médias bourgeois« . Une interpellation a été effectuée par la police suite à cette action (des nouvelles ?). A priori la seule de la journée… qui finalement a été bien chargée en activités ! Le centre-ville était plein de flics, qui tournaient ici et là, en uniformes de CRS ou en civil.

Le monde qui a voulu faire naître le CPE n’a pas changé. Le CPE a été remplacé (allez disons-le, retiré), mais tout le reste est encore bien en place. Hormis la fatigue (et l’illusion de victoire), rien ne peut nous mener à cesser de lutter. Les connexions créées lors de ce mouvement depuis début février doivent se solidifier, le plaisir que nous avons (eu) à agir et réfléchir ensemble ne doit pas disparaître. Ne nous laissons pas piéger par la résignation !