Voilà une semaine que des affrontements opposent des gentes déterminé-e-s aux forces casquées du gouvernement.

Depuis la prise de la Sorbonne et son évacuation, les unes des journaux figent le mouvement « anti-cpe » dans une phase « violente », oeuvre de « casseurs » (uniquement des hommes bien entendu…).

Depuis une semaine, je discute avec mes voisin-e-s du métro ou du RER, avec la plupart des employé-e-s assis-es derrière les caisses de supermarché, des conducteurs de transports en commun que j’utilise. J’ai toujours reçu du soutien envers la lutte que nous menons.

Certes j’ai dû souvent expliquer l’usage spectaculaire du mot « casseurs » par les médias, expliquer qu’il s’agit bien de manifestant-e-s (et nombreu-ses-x de surcroît), qu’il n’y a rien de gratuit dans ces actes, qu’ils montrent juste la détermination d’un mouvement qui ne souhaite pas connaître les mêmes échecs que les précédents, qui vise à tout prix à éviter les mêmes erreurs.

Que Villepin ne retire pas son texte, ni aujourd’hui, ni demain, ni dans une semaine, qu’il s’obstine, c’est ce que nous voulons tou-te-s : que la lutte perdure, que les discussions déjà amorcées se développent, s’amplifient… et que chacun prenne enfin position : pour ou contre le monde que l’on propose et que subissent les plus précaires, celleux qui n’en peuvent plus de leur boulot, de leur patron, de leur vie.

Car nous sentons partout, dans l’air et dans les mots, un soutien, des questionnements, une envie que ça explose.

Nous cherchons un lieu ( ou plusieurs) qui puisse devenir un point de ralliement, un lieu de convergence où tou-te-s les grévistes, du public comme du privé, les précaires, les activistes et les autres pourraient se rencontrer, partager leurs expériences, leurs souffrances, leurs espoirs et repartir avec l’envie de continuer, de pousser plus loin le combat que nous avons commencé.

Nous voulons la grève générale, que la machine s’arrête, que la routine soit cassée. Nous voyons déjà les sourires, la joie qui animent celleux qui en veulent à ce monde, celles qui sont déjà en lutte.

Nous nous reconnaissons dans la rue sans nous connaître. Nous ne sommes plus des anonymes.

Nous ne voulons pas de chefs, ni de porte-parole. Celleux qui existent, nous ne les reconnaissons pas. Que certain-e-s s’assoient à la table du gouvernement et illes seront désavoué-e-s. Nous n’avons rien à négocier et tout à prendre. Nous le savons maintenant plus que jamais.

Chirac a été élu contre Le Pen, sa majorité s’est installée grâce à l’abstention de l’électorat de gauche.

Les lois, les décrets, les ordonnances appliquées depuis sont illégitimes, comme les gouvernements qui se sont succédés.

Tout est passé : des politiques qui s’attaquaient aux plus faibles, aux plus dominé-e-s (sans-papiers, chômeur-se-s, rmistes…), des lois qui, pourtant, avaient réussi à former contre elles de véritables mouvements (retraites, réforme Fillon…), des mesures policières « d’exception » qui sont devenues la règle.

Nous avons vécu l’Etat d’urgence et la répression des émeutes d’Octobre-Novembre 2005. Passif-ve-s. Cela n’arrivera plus.

Nous voulons faire plus qu’un « coup d’arrêt ». Nous critiquons ce monde et les valeurs, les évidences qu’il porte en lui.Nous critiquons l’Ecole et la formation, le salariat, la croissance et le « plein emploi », le progrès et son cortège de destructions. Nous critiquons les rôles que la société voudraient nous faire jouer : nous ne serons pas des cyniques sans pitié, des « gagnants » prêts à écraser les autres, des consommateurs passifs ou des esclaves.

Nous ne combattons pas que la précarité, nous combattons l’exploitation et la soumission obligatoire. Nous savons qu’illes sont nombreu-ses-x celleux qui n’osent plus s’opposer. Et illes n’ont ni un CPE, ni un CNE, mais un CDI ou un contrat précaire.

Nous combattons pour une dignité bafouée, piétinée sur l’autel de la compétition capitaliste.

Voilà pourquoi les soutiens affluent, la colère mûrit et une grêve générale s’annonce (peut-être).

Nous savons qu’il n’y a pas d’alternative à gauche pour 2007, que les urnes ne nous amèneront que de nouvelles déceptions, que tout est à faire ici et maintenant de manière autonome, sans compter ni sur les syndicats, ni sur les partis.

Nous n’avons aucune confiance dans les médias et nous ferons tout pour mettre à nu les mensonges qu’ils répandent.

C’est par les prises de parole, les inscriptions sur les murs et dans le métro, le bouche-à-oreille et les médias alternatifs que nous rétablierons la vérité, que nous créerons des liens, des connivences.

Enfin, la lutte ne doit pas s’arrêter aujourd’hui pour une autre raison : les interpelé-e-s, les inculpé-e-s de ces derniers jours, de Novembre, de tous les mouvements sociaux de ces dernières années ont besoin de notre soutien total pour qu’une amnistie soit possible.

Nous ne lâcherons rien (ni personne) !

Solidarité entre tou-te-s les insurgé-e-s quelque soit leurs modes d’action ou d’intervention !

PS : ce « nous » est celui de tou-te-s celleux qui se reconnaîtront dans ce texte et de celleux qui me l’ont inpiré… Vous pouvez en faire ce que vous voulez : tract, appel ou autres…Je n’en suis pas le maître.

Une traduction de ce texte en italien a été faite, la voilà http://italy.indymedia.org/news/2006/03/1023990.php

Avec tous mes remerciements pour celui (ou celle) qui l’a faite.

Pour des images indépendantes du mouvement sur Paris, allez sur le site de télésorbonne www.telesorbonne.com/

texte publié pour la première fois dans la nuit du 17 au 18 mars http://paris.indymedia.org/article.php3?id_article=54238