Un peu partout dans le monde, des citoyens des villes ont décidé de devancer les nécessaires politiques publiques d’interdiction des véhicules tout terrains en ville. Ces véhicules sont vulnérables en plusieurs points malgré leur aspect massif et leur dangerosité une fois en marche : la peinture métallisée ne résiste guère à la griffure d’une clé par exemple, leurs pneus se dégonflent aussi sûrement que l’égo de leurs conducteurs une fois sorti de leur carapace de métal sous l’action d’un canif. Même s’il s’agit d’une atteinte au bien d’autrui, d’un acte de destruction de la propriété privée, nous pouvons, comme dans le texte bruxellois ci-dessous, facilement argumenter de sa nécessité :

Les flagadas, escadrilles anti4x4 en Belgique, entrent en action dans la rue et sur le net

Dans la nuit du 14 au 15 octobre, de joyeuses escadrilles de Flagadas, peuplade génétiquement non-modifiée et assoifée d’air pur, ont mené leur première opération-test contre ces monstres indésirables de nos cités que sont les 4×4 et autres SUV (Sport Utily Vehicules). Ces actions ont été effectuées à Bruxelles dans les alentours de l’Altitude Cent à Forest. Les deux pneus d’une douzaine de ces véhicules ont été dégonflés. D’autres ont été décorés d’un autocollant. Des tracts expliquant notre démarche ont été apposés sur les pares-brises.

Face aux différents articles de presse, parfois mal inspirés, nous concernant, nous tenons à faire une mise au point. Nous sommes bien conscients des désagréments provoqués par nos actions pour les propriétaires de ces véhicules. Néanmoins, nous estimons que les dangers représentés par ces derniers sont infiniment plus grands.

Depuis quelques années, à coups d’avantages fiscaux et de publicités mensongères où la nature est prostituée pour vendre un véhicule qui la détruit, les 4×4 prolifèrent de manière inquiétante dans toutes les grandes villes européennes. En 2004 en Europe, leurs ventes ont progressé de 15% en moyenne contre 4% pour les voitures normales. En Belgique, près de 36.000 4×4 ont été immatriculés en 2004 contre 11.000 en 1997 et ils représentent aujourd’hui près de 10% du parc automobile.

Initialement conçus pour la campagne, ils n’ont rien à faire dans nos rues où, comme toutes les études le montrent, du fait de leur poids (jusqu’à 2,5 tonnes), de la rigidité de leur structure et de leur hauteur, ils représentent un danger gravissime en termes de sécurité routière.

Selon diverses études, en cas de collision entre un 4×4 et une automobile normale, les occupants de cette dernière ont 50% de plus de probabilité de mourir qu’avec un véhicule classique. Pour les piétons, les chocs ont lieu au niveau de la poitrine ou de la tête, ce qui entraîne des lésions plus graves qu’avec un autre véhicule. Ainsi, en Australie, les 4×4 représentent moins de 30% du parc de véhicules mais ils sont responsables de 75% des accidents mortels avec des enfants piétons.

Ils représentent y compris un danger pour leurs propres propriétaires au vu des nombreux cas d’accidents où ils ont tendance à perdre le contrôle de leurs véhicules dans des virages pris trop rapidement et à effectuer plusieurs tonneaux. Aux Etats-Unis, 60% des accidents mortels pour les conducteurs de 4×4 sont dus à des tonneaux, alors que cette moyenne est de 22% pour les voitures classiques.

Plus de 90% de ces véhicules n’ont « d’utilitaire » que le nom et ne quittent jamais le bitume urbain. Il s’agit surtout d’une voiture de prestige social et d’un symbole d’une société de sur-consommation individualiste et égoïste. Ils symbolisent jusqu’à l’absurde un modèle de société où l’on veut nous imposer la lutte de tous contre tous, la « loi de la jungle », y compris sur nos routes.

A l’heure où le réchauffement climatique et l’épuisement des ressources naturelles deviennent une réalité tangible, la prolifération de ce genre de véhicules est contradictoire avec les bien maigres mesures publiques destinées à protéger l’environnement, à réduire notre empreinte écologique et à limiter ou à varier la consommation énergétique. Les 4×4 consomment en moyenne bien plus de carburant (surtout en ville où les arrêts sont fréquents) et émettent une quantité moyenne plus importante de gaz CO2 (230 grammes de CO2/km contre 146 g/km pour les berlines) responsable de l’effet de serre. Ils contribuent ainsi de manière notable à la pollution atmosphérique dont les conséquences sont lourdes en terme de santé publique (augmentation des émissions de particules nocives et donc des risques de cancers).

Nous ne laisserons pas sans réagir une petite minorité isolée, bien souvent composée de nantis inconscients, mettre impunément en péril notre sécurité, nos vies et la survie de la planète. Nous agissons donc en état de légitime défense. Puisque les propriétaires de 4×4 ne manquent pas d’air en nous imposant leurs monstres urbains, nous avons décidé de les rendre un peu moins arrogants en dégonflant leurs pneus.

Irresponsable et « farfelu » ? Ce qui est irresponsable et farfelu, c’est de croire que le monde peut continuer ainsi sa course folle à l’abîme et à la catastrophe écologique irréversible en ne prenant que des demi-mesures, toujours trop faibles et toujours trop tardives. Nous ne voulons pas êtres jugés par les générations futures comme ceux et celles qui n’ont rien fait alors qu’il était encore temps d’agir.

Face à la coupable inertie des pouvoirs publics, trop enclines à subir les pressions des lobbies des constructeurs automobiles et des multinationales pétrolières, nous avons décidé de prendre nos responsabilités et de passer à l’action. Et nous ne sommes pas seuls : à Paris, Lyon, Bordeaux, Lille, Londres, Buenos Aires, Sydney et ailleurs dans le monde, le dégonflage mondial est en marche. En Belgique, nous appelons tous nos ami/es et sympathisant/es à démultiplier nos actions dans toutes les villes du pays.

Nous ne sommes pas une « avant-garde éclairée » et nous ne sommes certainement pas parfaits. Notre but est avant tout de provoquer un réel débat de société sur ces véhicules et plus largement sur le mode de vie et de consommation actuellement dominant, socialement et écologiquement destructeur. Nous voulons que chacune et chacun – en premier lieu les propriétaires de 4×4 – prennent conscience de leurs actes et de leur rôle dans la collectivité humaine. Nous les appelons à abandonner ce type de véhicule et à adopter un mode de vie plus responsable et plus respectueux des autres et de la nature.

Le jour où ce débat et des mesures effectives et concrètes seront prises, notre type d’action n’aura plus de raison d’être.

Les Flagadas
annicktamere@gmail.com

« Le sergent Flagada
_ Qui était là
_ Sonna l’alerte à la trompette
_ Ils ont tous rappliqué
_ À pied, à ch’val, en pédalo
_ En trottinette

Sergent Flagada
_ Pour avoir fait ça
_ A reçu de ses gars
_ Une médaille en chocolat »

Le Grand Jojo

http://flagadas.blogg.org/