lu sur http://www.international-campaigns.org/ic/supports_militants/operation_greystoke.htm#Video

Dans la nuit du 31 mars au 1er avril 1985, un groupe d’une vingtaine de personnes libère 17 babouins « papio-papio » au CNRS de Gif-sur-Yvette. Les primates, captifs depuis de longues années, une calotte en résine vissée sur les os crâniens, servaient aux chercheurs de matériel d’étude pour l’épilepsie photosensible.

Le but de cette libération étant de dénoncer de manière spectaculaire la cruauté et l’inutilité de l’expérimentation animale, une cassette vidéo montrant le déroulement des opérations et un communiqué des revendications au nom du Groupe Greystoke furent remis à l’Agence France Presse et firent aussitôt la Une des médias.

Libérés sans aucune violence, les 17 babouins furent conduits dans la nuit au Refuge de l’Arche (à Château Gonthier) où ils furent soignés (extraction de la calotte en résine et des électrodes). Ils retrouvèrent très vite leur rituel de vie en groupe, évoluant en semi-liberté sur deux petites îles que le responsable du parc animalier fit construire spécialement pour eux.

Un an après, alors que le groupe multipliait les actions de sauvetage d’animaux captifs des pourvoyeurs et des laboratoires, une dénonciation anonyme provoque un vaste coup de filet des services de police et de gendarmerie dans toute la France et met en arrêt 7 des membres du mouvement.

Les papios-papios qui s’étaient refait une santé au Refuge de l’Arche sont de nouveau en danger et menacés de retrouver leurs cages, leurs électrodes et leurs tortionnaires.

Une campagne de soutien est immédiatement lancée et de nombreuses personnalités tant du show-biz que de la politique font bouclier entre les babouins et le CNRS. Après plusieurs mois de lutte, la nouvelle arrive enfin sous la forme d’un communiqué de presse annonçant que le CNRS renonce définitivement à son « matériel d’expérimentation ». Les singes sont donc officiellement autorisés à terminer leur existence sur leur île en toute quiétude.

Quant aux sept membres interpellés, ils furent mis sous contrôle judiciaire pendant un an et durent s’acquitter chacun de la somme de 1524 € en guise de caution en attendant le procès.

Malgré le soutien toujours actif de nombreuses personnalités, un premier jugement les condamnera à plusieurs mois de prison avec sursis et à verser les dommages et intérêts réclamés par le CNRS.

Un premier appel les renvoya une seconde fois au tribunal qui confirma la précédente décision et une dernière tentative destinée à réviser la condamnation à la baisse, orchestrée par Maître VERGES, n’eut pas plus de succès.

Le groupe devait s’acquitter de manière conjointe et solidaire de la somme de 55 000 € (360 000 FF).

Chacun d’entre eux refusa bien sûr de verser sa part, préférant courir le risque d’être incarcéré que de donner de son plein gré de l’argent cautionnant l’expérimentation animale.

Une proposition de verser la somme au profit de la recherche basée sur des méthodes substitutives fut faite au CNRS qui la rejeta, manifestant ainsi son refus de s’orienter vers d’autres formes de recherche.

Craignant qu’une demande d’incarcération des sept inculpés ne provoque une mobilisation massive contre l’expérimentation animale, le CNRS préféra utiliser des moyens moins spectaculaires, mais tout aussi efficaces quant au but recherché. Il mandata des huissiers qui utilisèrent alors l’arsenal coercitif mis à leur disposition (blocage des comptes bancaires, saisies sur salaires, vente des biens, etc.) à l’encontre des membres du groupe qui n’avaient pu s’évanouir dans la nature.

Pour ma part, fonctionnaire de l’Éducation Nationale, même après un déménagement, je ne pus échapper à la voracité de la machine judiciaire et un premier blocage de compte en 1993, m’obligea – contraint et forcé – à coopérer.

Dix ans plus tard, estimant que ma « bonne volonté » n’est pas à l’abri de tout soupçon, le CNRS aiguillonne de nouveau les huissiers dans ma direction.

Patrick SACCO – membre du Groupe GREYSTOKE

P.S. Si vous passez par Château Gonthier et si vous êtes réceptif au langage papio-papio, vous pourrez peut-être lire (vingt ans plus tard) dans le regard de certains rescapés, l’expression grinçante qu’ils prennent parfois au souvenir douloureux de leurs années de captivité au CNRS.
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