FAITES TOURNER – FAITES TOURNER – FAITES TOURNER –

No Pasaran n°40
Mai 2005
2 euros
http://nopasaran.samizdat.net

Il faudrait mourir un moment

Présentation :
Dossier : Education ou barbarie.
L’enfer du décor, ou ce dont les médias des capitalistes ne vous parleront pas… Ce n°40 laisse la part belle aux luttes et alternatives, dans un contexte certes d’émiettement mais aussi de vent printanier où le mouvement des lycéens a bousculé la donne.

Des nouvelles du 9ème collectif de sans-papiers, de leur luttes et grève de la faim, soutenues par peu de collectifs dans la continuité…
Nouvelles des mobilisations antifa, qui retrouvent une nouvelle vigueur comme à St Dié contre la venue de Gollnish. Retour sur l’EuroMayDay à Paris, Londres, Milan et prochaines mobilisations des précaires.

Un dossier « Education ou barbarie » permet à des lycéens de Toulouse, Nantes et Paris de parler de leur lutte. Il revient également sur la question de l’autoritarisme au sein de l’Education nationale,
l’inutilité de la majeure partie des savoirs dans la société capitaliste, mais aussi sur les alternatives en matière d’éducation au travers d’une analyse libertaire et d’une présentation du collège
« La 7ème île » de Brest, où les élèves se prennent en charge eux-mêmes et où les finalités de l’éducation sont discutées… ce qui devrait être la moindre des choses, partout.

D’autres articles viennent compléter le numéro, dont l’interview d’un artiste lillois qui nous raconte son parcours, et l’inévitable texte sur la Constituchion, contrition.

Enfin, nous parlons de deux initiatives de rencontres, d’échange et d’autogestion auxquelles a participé le réseau No Pasaran, toutes deux des succès : les 20 ans du scalp à Toulouse et la Place des Résistances à Gruellau. L’occasion pour des centaines de participants
de débattre et de se rencontrer, de découvrir des spectacles qu’on verra pas ou peu ailleurs, mais aussi de gérer collectivement les initiatives, loin du prêt à consommer / prêt à penser…

SOMMAIRE NP 40 :

Edito : Désobéir, s’insoumettre, résister

ACTUS :
– Paris, des papiers pour tous : des nouvelles par les scalpeur-se-s du groupe de soutien
– C’est le revenu qu’il faut garantir, pas l’exploitation : retour sur l’EuroMayDay, mobilisations contre le projet de convention Unedics.
– Succès de Place des Résistances, village autogéré de Gruellau
– Constitution : Oui-oui fait des bêtises

REFLEXION :
Le RMA ou la fin de l’Etat social : une entreprise qui paye le taf’ d’un SMICard pour 150 euros, qui dit mieux ?

Dossier : EDUCATION OU BARBARIE :
– Intro
– Education et liberté, un couple impossible ?
– Balzac ne sert à rien : « Illusions perdues » peut à la limite caller la table de la cuisine ;
– Refuser l’inspection, contre la hiérarchie : cultiver son jardin ça donne la patate, OK…
– A l’école de la différence : présentation d’une école brestoise où les élèves sont acteurs de leur éducation ;
– Lycéen-ne-s, ne pas abdiquer : les lycéens ne veulent plus s’arrêter ;
– L’éducation libertaire : un retour sur le passé, pour un présent composé.

ANTIFASCISME :
– Elssas Korps : vers la dissolution : vérification faite, le fascisme se dissout très bien dans la « démocratie » ;
– Premier mai rasé de frais pour le FN : sauf pour les gars de la Marine ;
– Mobilisations antifa : un bon skin est un raide skin ;
– La démocratie, pantin du fascisme : texte écrit par deux antifas allemands, Farid et Julia, immigrés en Argentine.
– Les 20 ans du scalp : les cheveux dans le vent, Toulouse pose l’accent

INTERNATIONAL :
Mexique : communiqué du CIPO-RFM : répression contre les communautés
indigènes autonomes dans la région d’Oaxaca.

Ramine la ramène : une planche sur la grève étudiante au Mirail.

Prochain numéro : en ébulition

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Appel au soutien de toute la presse alternative, sociale et libertaire

L’enjeu d’une information sociale critique et offensive se fait particulièrement sentir aujourd’hui. En effet les médias dominants, commerciaux et soumis aux intérêts de leur possesseurs (Bouygues, Dassault, Lagardère…l’Etat) ne s’embarrassent même plus d’un voile d’objectivité mais apparaissent tels qu’ils sont : des instruments de propagandes au service de l’Etat et ou des intérêts financiers. Cette
logorrhée, autrefois attribuée au gauchisme le plus caricatural, est aujourd’hui un fait admis par la majorité de la population, celle que nous croisons chaque jour, celle avec qui on respire, celle dont le
personnel politique a souvent peur, à juste titre.

Tellement peur que les médias dominants sont sollicités pour la campagne pour le « Oui », jusqu’à la caricature la plus ridicule, jusqu’à mentir effrontément sur la question de la démocratie, des
services publics, du soi-disant bouclier contre
l' »ultra-libéralisme ».
Les autres événements majeurs récents, d’après ces mêmes médias: la mort du Pape, la mort de Rainier et la réélection de Blair – unanimement saluée par toutes les télévisions, radios et presses commerciales.

Face à cela une presse militante a eu la nécessité de se développer.
Elle est riche, composite mais aussi très éclatée. Généralement les différents titres s’ignorent ou travaillent peu entre eux. Mais elle existe. Elle parle des luttes, celles à qui nous devons tous, depuis
plus d’un siècle, nos droits, nos libertés, arrachées au capitalisme et à l’Etat. Elle fait œuvre de mémoire : elle parle depuis longtemps des massacres de Sétif, que les médias des capitalistes viennent
juste de découvrir 60 ans après. Elle n’encense pas que Clémenceau, qui a ordonné l’exécution de centaines d’ouvriers en révolte au début du XXe siècle.
A travers cette presse, s’expriment des ouvriers, des prisonniers, des sans-papiers, des chômeurs ou un cadre de banque qui refuse l’absurdité de son travail et du système – alors que dans la presse des capitalistes seuls les « cadres supérieurs » de l’Etat ou des entreprises s’expriment. Elle a un autre regard sur la culture et parle des 99% d’artistes qui n’ont pas voix au chapitre, des 99% de manifestations culturelles, même si elles réunissent plus de monde
que les officielles, n’auront pas d’autres porte-voix puisqu’elles n’ont pas de sponsors et ne dégagent pas de profits.
Elle parle des alternatives au quotidien : écologie, d’autres manières de vivre en dehors du productivisme et de la guerre salariale de chacun contre tous.

En France elle a des centaines de noms souvent évocateurs : l’Envolée, CQFD, l’Interluttant, le Combat syndicaliste, le Monde libertaire, Alternative libertaire, Offensive, Courant alternatif,
Silence, La Décroissance, No Pasaran et tant d’autres… Sans oublier tous les
canards locaux.

Même si elle a son lectorat, cette presse est peu diffusée, peu soutenue. Aujourd’hui, avec des sites Internet comme Samizdat ou Indymedia, ou quelques mailing-lists, elle est pourtant l’unique lien, entre des personnes en luttes dans une situation précise et le reste de la population. Si une usine est en grève, si les intermittents rouvrent les hostilités, si les sans papiers défendent leur vie et leur liberté, si les chômeurs s’énervent, vous n’en saurez rien ou presque. Ou l’information sera uniquement diffusée
d’un point de vue misérabiliste, pendant 15 secondes à la télé. Vous ne saurez pas quel est le parcours de ces personnes, ce qu’elles vivent actuellement, pourquoi elles luttent. Si chacun le savait, beaucoup soutiendrait : l’enjeu de l’opacité
médiatique est là. Si les dirigeants n’avaient pas peur, si les médias n’avaient pas le trouillomètre à zéro, ils n’hésiteraient pas à rendre tout transparent. Si les mouvements sociaux et
anticapitalistes étaient totalement inoffensif et inopérant, vous le sauriez.

Certains titres de presse sont aujourd’hui attaqués en justice, ou leur diffusion fortement limitée par des moyens coercitifs :
L’Envolée (par les prisonniers, pour les prisonniers), le Combat Syndicaliste (CNT) et CQFD. Continuons à soutenir ces titres, en les diffusant.

La presse militante a besoin de diffuseurs et de soutien financier :
trouver des espaces de diffusions (bar, lieux associatifs…) et s’abonner, faire abonner vos proches ou collègues est un premier pas.
Mais la plupart des titres, dont ceux cités plus haut, laissent s’exprimer qui le souhaite sur les sujets qui vous concernent – précarité, refus du sécuritaire et de la « fascisation », féminisme, écologie, nouvelles formes de coexistences. Il ne s’agit pas seulement de soutenir mais aussi de participer pour prendre ces
médias en main, car vous n’aurez pas d’autres moyens d’expression à votre disposition.

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Nouvelles du mensuel

No Pasaran aura une parution bimestrielle jusqu’à la rentrée de septembre. Depuis les débuts nous publions 10 numéros par an et cette fois-ci nous avons voulu espacer la sortie pour les mois de mai à août. Le prochain numéro sortira la 3ème semaine de juin…
Depuis quelques mois, la diffusion et le nombre des abonnements sont en hausse, relativement modeste mais constante. Nous remercions celles et ceux qui nous soutiennent et participent.
Si vous le souhaitez vous pouvez réagir aux textes publiés et proposez le vôtre en l’envoyant à npmensuel@yahoo.fr ou No Pasaran,21, ter rue Voltaire, 75011 Paris.
Enfin, notre site vous laisse la
possibilité de réagir, de compléter, préciser des articles :
http://nopasaran.samizdat.net

Quelques lecteurs et lectrices s’étonnent du style de la plupart des articles, souvent très directs. Au-delà de certains articles d’analyses, c’est un choix assumé par le réseau de ne pas laisser la place seulement à des spécialistes mais de permettre à chacun de
s’exprimer ; le mensuel ne s’adresse pas non plus aux seuls milieux militants mais à l’ensemble de la population.
Nous remercions enfin celles et ceux des « milieux militants » qui nous ont donné pour disparu il y a deux ans, la tristesse dans l’âme…sans doute… Il faudra un jour se pencher sur les répétitions de
certaines erreurs d’analyse.

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Participer, lire, diffuser et s’abonner :
Vous pouvez envoyer vos propositions ou finalisations d’articles à :
npmensuel@yahoo.fr

Vous pouvez lire les archives du mensuel, ainsi que des textes non
publiés, sur notre nouveau site : http//:nopasaran.samizdat.net

Diffusé partout où ça pousse : manifs, marchés, criées, tables de
presse, lieux associatifs, librairies militantes, mano à mano… et
abonnements.

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vous souhaitez (ou non) que votre adresse soit communiquée au groupe
du Réseau No Pasaran le plus proche de votre domicile.

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Nouvelle parution des éditions No Pasaran

COMME UN INDIEN MÉTROPOLITAIN
Une histoire du SCALP (1984-1992)

Entre 1984 et 1992 s’est écrite une page de l’engagement antifasciste radical.
Huit ans d’une activité intense où le mouvement antifasciste radical a été l’artisan d¹une résistance active aux menées de terrain de l’extrême droite.
Huit ans d¹une jeunesse qui, au son saturé des guitares et des boîtes à rythmes, s’est essayée à l’auto-organisation et l’autogestion.
Huit ans pendant lesquelles on a pu mesurer l’évolution d¹une gauche gestionnaire et libérale.
Huit ans où l’immigration et la sécurité, les deux mamelles du FN, viennent allaiter l’ensemble du corps politique.
S’approprier notre histoire et la faire vivre à travers nos réflexions et nos luttes est indispensable car il n’y a pas de présent ni d’avenir sans mémoire.

256 pages, plus de 200 documents et témoignages. 12 euros
Éditions No Pasaran – 21ter, rue Voltaire 75011 Paris
À commander à No Pasaran – chèque à l’ordre de REFLEX

Table des matières
PREMIÈRE PARTIE : UNE HISTOIRE DES SCALP
1984-1986 : sortons de notre réserve !
1986-1987 : la jeunesse emmerde le Front national
1988-1989 : vivre libre ou mourir
1989-1992 : de la CNAF à No Pasaran
L¹heure du bilan
DEUXIÈME PARTIE : LE SCALP ET LA SCÈNE ALTERNATIVE
Réflexion sur la question contre-culturelle
Interview de Loran des Bérurier Noir
Interview de Marsu, ancien de Bondage
Interview de Julien et Rico des Reds Warriors
TROISIÈME PARTIE : LES THÈMES DU SCALP
À propos d¹antifascisme
« J¹y suis, j¹y reste » : les luttes de l¹immigration
Police partout, justice nulle part !
ANNEXES
La percée du Front national : 1981-1989
L¹extrême droite radicale des années 1980
Autocollants du Scalp
Fanzines de la CNAF
Tracts du Scalp

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Le réseau No Pasaran est issu du mouvement antifasciste radical. Son analyse de la montée de l’extrême droite et des idéologies xénophobes, sécuritaires et autoritaires, et son expérience de lutte antifasciste l’ont amené à élargir son champ d’intervention.
Le réseau No Pasaran combat toutes les formes de domination : capitalisme, racisme, patriarcat, aliénation, apartheid social, répression… Il lie étroitement sa réflexion – sur le système dominant
et sur l’élaboration d’alternatives – et ses revendications aux pratiques militantes rupturistes qu’il développe. S’il agit ici et maintenant, de manière radicale et contribue à élaborer des espaces
de contre-pouvoir, il se place aussi dans une perspective révolutionnaire.
Ni organisation partidaire, ni structure figée, le réseau No Pasaran se compose de groupes et collectifs fédérés entre eux à travers l’hexagone. Il fonctionne sur un mode libertaire.
Partie prenante de la lutte internationale contre le capitalisme et toutes les formes d’autorités, il développe échanges et actions avec des groupes de nombreux pays. Il s’inscrit dans un large mouvement
d’émancipation politique, économique, social et culturel pour lequel résister c’est créer.

No Pasaran,
21 ter, rue Voltaire, 75011 Paris
Tél : 06 11 29 02 15
Fax : 01 43 72 15 77
http://nopasaran.samizdat.net

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La sympathie, ça n’engage à rien

– T’es pas en train de me dire que vous continuez.
– Si.
– Tout le monde s’en fout.
– Peut-être. Ou non. On sait pas.
– Les gens veulent être tranquille et peinard. Ils s’agacent quand ça va mal, ça dure deux jours. Et le reste du temps ils râlent. Et puis c’est tout.
– Les gens, c’est toi, c’est moi aussi.
– Ouais, ça c’est le discours officiel.
– Non. Moi je suis pas l’abbé Pierre. Le problème c’est que le droit s’applique à tout le monde. Après si des personnes veulent subir sans
réagir, c’est pas mon problème.
– Alors pourquoi militer si t’en as rien à foutre ?
– Parce qu’on est plein à en avoir « quelque chose à foutre ». Tout simplement. Après faut qu’on s’organise et…
– Attends ça fait des années que vous dites ça, rien ne s’est fait…
– Le mouvement des sans-papiers, des chômeurs, des lycéens & étudiants, les luttes syndicales, les rassemblements altermondialistes… Plus, y’a tellement d’alternatives autogérées, collectives qu’on est incapable de les recenser.
– Les premiers n’ont rien gagné, le reste c’est des bricoles.
– Mouvement des chômeurs : + 50 euros pour le RMI. Des sans-papiers sont régularisés…
– C’est ce que je dis : rien.
– Ces petites victoires sont importantes pour celles et ceux qui les font, ou qui vivent dans des conditions précaires. On part de ce qui existe. Cela nous permet de nous organiser. Des résistances au sein
de son entreprise, d’une administration, dans la rue ou un squat c’est déjà une victoire en soi. De « l’irréversible », comme dit l’autre. Un mouvement social créé des communautés humaines, des
coexistences politiques.
– Oui, sauf que ça se fait bouffer au fil du temps par le capitalisme. Je dis pas que vous avez totalement tort, mais que ça ne sert à rien. Ce sont des piqûres d’épingle. Les gens sont égoïstes,
ou si tu préfères nous sommes tous égoïstes.
– Oui, je le pense aussi, plus ou moins. Il faut dégager un égoïsme de classe, dans ce cas-là. Mais je ne pense pas que l’égoïsme soit permanent. Je ne sais pas si on voit les mêmes choses : choisir ce que l’on voit c’est déjà de la politique, c’est se poser comme sujet. Certains préfèrent admirer l’abyme en disant qu’ils ont de la chance, d’autres partent de ce qui existe en « positif ». C’est un choix. Qui peut permettre de justifier sa propre inaction.
– C’est ça, traite moi de con. Je fais aussi des trucs, tocard…
– Des piqûres d’épingle ?
– Ouais, si tu veux… si je pue des pieds je peux faire un tour.
– Comme tu veux. A plus.

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