Ce congrès, dont le principal organisateur et le président est M. Yvon Dallaire, psychologue québécois, se voudrait, selon certain-es, un geste d’«harmonisation des rapports entre les hommes et les femmes». «Le mouvement féministe devait avoir lieu», peut-on lire sur le site de Paroles d’hommes, comme si le féminisme n’avait plus de raison d’être, ce qu’affirment d’ailleurs les masculinistes de toutes tendances. Ce congrès «se veut une réflexion à voix haute sur les nouvelles préoccupations des hommes. Loin de nous l’idée d’entretenir un combat entre les sexes; nous voulons plutôt un débat de société sur les nouvelles relations hommes-femmes».

Yvon Dallaire fait partie de la «seconde vague des masculinistes», ceux qui se veulent plus conciliants parce qu’ils ont compris qu’envelopper leurs propos et leurs intentions dans de la ouate leur assurerait une meilleure audience auprès des médias, des subventionnaires et de l’opinion publique. C’est peut-être avec ces discours lénifiants que les organisateurs du congrès Paroles d’hommes ont pu attirer des personnalités publiques québécoises à titre de membres honoraires.

Aragon avait tort

La phrase en exergue du Bulletin Paroles d’hommes #3 donne-t-elle le ton et l’orientation de l’événement? «La femme n’est pas, comme dit le poète, l’avenir de l’homme, mais elle n’a aucun avenir sans l’homme. Claude (femme) de Milleville, Le couple, une espèce en voie d’apparition, Éd. Solar, 2004, p.65». Les femmes hétérosexuelles qui vivent seules ainsi que les femmes lesbiennes apprécieront sûrement… J’aimerais bien connaître le contexte de cette phrase: la dénommée de Milleville a-t-elle voulu dire que « la » femme n’a pas d’avenir si « l »‘homme résiste au changement, ou bien, que l’avenir des femmes vivant seules serait un échec personnel et social? Les masculinistes aiment bien citer des propos de femmes, surtout de femmes antiféministes comme Élisabeth Badinter devenue une vraie icône masculiniste et dont une phrase figure comme slogan sur le site de Paroles d’hommes.

Le discours d’un homme «fier de l’être»

Le principal organisateur de ce congrès est-il aussi bien disposé qu’il le laisse entendre à l’égard de l’évolution des femmes, une évolution qui a eu lieu et devra se poursuivre grâce au féminisme? À la lumière de certaines lectures, la question me semble légitime. Dans un article de la revue Service social (Vol.50, 2003, p. 145 à 173) intitulé «Le discours des défenseurs des droits des hommes sur la violence conjugale: Une analyse critique», Normand Brodeur a analysé trois ouvrages masculinistes, dont «Homme et fier de l’être», de M. Yvon Dallaire. La position de M. Dallaire sur la violence faite aux femmes en milieu conjugal, par exemple, laisse pour le moins perplexe. Pour lui, la violence masculine serait un mode «d’affirmation» et «d’expression», découlerait d’un besoin «naturel» masculin d’organiser son environnement et le monde. Voici des extraits de l’analyse de Normand Brodeur.

«Ces auteurs estiment que le divorce, motivé de plus en plus par des raisons égoïstes (voir, par exemple, Dallaire, 2001, p. 141), a un impact psychologique plus lourd pour les hommes que pour les femmes qui, dans la majorité des cas, en sont les instigatrices». Bref, si le divorce découle de l’égoïsme et que les femmes en sont le plus souvent les instigatrices, faut-il conclure que les femmes sont des égoïstes quand elles quittent les hommes? Ou bien, serait-il envisageable que les femmes demandent plus souvent le divorce parce que les hommes leur en fournissent plus souvent de bonnes raisons?»(…)

Je n’ai rien contre le fait que les masculinistes tiennent des congrès. Mais quand ils prétendent le faire pour « redonner » la parole aux hommes, je trouve qu’ils ne manquent pas de culot!

Lire l’article au complet ainsi que d’autres articles: «Quand donc les hommes ont-ils renoncé à la parole?»
http://sisyphe.org/article.php3?id_article=1743

Féminisme/Condition masculine
http://sisyphe.org/rubrique.php3?id_rubrique=42

Sisyphe
http://sisyphe.org