Depuis plus d’une semaine maintenant, les urgentistes dénoncent le manque de moyens dans les hôpitaux. Un mouvement très suivi, puisque l’Association des médecins urgentistes hospitaliers de France a recensé 75 % de grévistes en moyenne. Il faut dire que la situation aux Urgences est catastrophique : des heures passées dans des salles d’attente bondées, des malades sur des brancards dans les couloirs pendant des jours, faute de lits… Cet état de crise, c’est l’ordinaire, le quotidien. Et panique, s’il s’agit de faire face à la moindre épidémie de grippe !

Mais l’ordinaire, le quotidien, ce sont aussi les suppressions de postes et les fermetures de lits. Ils ne connaissent pas de cesse. Rien que pour les hôpitaux de Paris, 1 800 postes et 800 lits vont passer à la trappe. Selon les urgentistes, la gériatrie est la plus touchée par ces mesures d’économies. Le manque de lits s’y fait cruellement sentir. Une nouvelle canicule cet été, et le drame de l’été 2003 ne serait pas davantage évité, puisqu’il n’y a aucun moyen supplémentaire ! Pour ceux qui sont aux commandes de l’Etat, la rentabilité des hôpitaux passe sans états d’âme avant notre santé.
Cette politique criminelle n’empêche pas le gouvernement de poursuivre son discours culpabilisateur au sujet de la soi-disant « journée de solidarité » où les salariés devraient travailler gratuitement pour « aider » les personnes âgées. Thierry Breton, le nouveau ministre de l’Economie, appelle les syndicats à « penser à leurs aînés » plutôt que de dire « Touche pas à mon jour férié ». Quant à Douste-Blazy, le ministre de la Santé, il annonce d’ores et déjà que les 2 milliards d’euros ponctionnés ainsi sur les salariés ne suffiront pas à l’avenir, en raison de l’augmentation de l’espérance de vie, et donc du nombre de personnes âgées. Ils ne font rien pour les vieux, mais s’y connaissent en revanche, pour faire les poches des salariés en toute occasion.
Du moins le croient-ils. Car c’est loin d’être gagné pour eux. La contestation monte, contre ce « jour de corvée » digne du moyen âge… Et il y a un précédent fâcheux pour Chirac et Raffarin : le lundi de Pâques qui devait être travaillé dans le Gard ne l’a guère été. Les écoles, collèges et lycées sont restés déserts et vu le nombre de ceux qui ont boudé la journée, la désorganisation des activités économiques a été complète. L’escroquerie de Raffarin a tourné à la farce. Et ce lundi de Pâques a sonné comme une répétition générale du lundi de Pentecôte.

L’envie est largement répandue de continuer sur cette lancée. La FCPE, fédération des parents d’élèves, appelle à ne pas envoyer les enfants à l’école et plusieurs syndicats ont déposé des préavis de grève. Toutes les confédérations devraient en faire autant, car il n’y a aucune raison de faire cadeau au patronat et au gouvernement d’un jour de travail gratuit. Ils en volent déjà trop, comme le montrent ces quelque 57 milliards d’euros de bénéfices affichés cette année par les entreprises cotées au CAC 40.

Les travailleurs ne sont pas égoïstes. Mais depuis la fameuse « vignette des vieux », on connaît trop cette façon des gouvernements de nous escroquer. Si nous sommes en grève le lundi de Pentecôte, Chirac et Raffarin n’auront que la monnaie de leur pièce. Et nous, le plaisir de les remettre à leur place. Un plaisir à ne pas bouder… Un avertissement aussi que nous ne laisserons pas faire non plus pour ce qui nous préoccupe au premier chef : les salaires, les licenciements, les conditions de travail. Dans diverses entreprises, ces dernières semaines, ont éclaté des grèves pour les salaires. Les techniciens de Radio France eux aussi s’y sont mis. Cette petite musique de la grève est assez entraînante… Dans ce contexte, le lundi de Pentecôte pourrait bien être l’ouverture d’une drôle de symphonie, pour public et privé, tous ensemble.