Le plan Borloo, présenté très médiatiquement en septembre, a été discuté plus discrètement cet automne au Parlement (il s’appelle maintenant « loi de cohésion sociale », en vigueur dès janvier 2005).

Ce plan, présenté comme un virage interventionniste, humaniste et social du gouvernement, ne fait que poursuivre la destruction généralisée et accélérée des acquis et garanties sociales opérée par le gouvernement actuel depuis 2 ans (services publics, retraites, assurance maladie, chômeurs et travailleurs précaires, intermittents, etc…).

L’échec de la droite aux élections de mars 2004 a sans doute incité le gouvernement à changer de méthode de « communication » : Borloo-le-beau-parleur a donc remplacé Fillon-le-glacial, et la guerre contre les pauvres qui s’était déjà intensifiée il y a plus d’un an (Recalculs Unédic, réforme de l’ASS, création du RMA) est maintenant présentée comme une guerre humanitaire. Borloo est donc chargé de nous faire avaler maintenant que si l’on fait la guerre aux chômeurs, précaires et autres travailleurs pauvres, c’est pour leur bien.

Mais le but du gouvernement et du patronat reste le même : renforcer la pression sur les chômeurs et précaires et saper le code du travail pour mieux renforcer la pression sur l’ensemble des salariés et donc renforcer partout l’exploitation.
Jacques Chirac avait annoncé la couleur lors de son allocution du 14 juillet :
– « On ne peut pas se contenter, comme on l’a fait trop longtemps, d’une politique de guichet. Vous venez chercher un chèque pour vous aider à survivre ».
– « On ne peut pas accepter qu’un chômeur refuse éternellement (?) un emploi, c’est évident ».

Le plan Borloo, qui s’appuie donc maintenant sur cette « loi de cohésion sociale » fraîchement votée, est un plan de bataille complet pour contraindre les salariés au chômage à accepter très rapidement n’importe quel l’emploi dans n’importe quelle condition.

Voici les principales armes utilisées :

– Création de maisons de l’emploi (300 dans les 5 prochaines années), sortes de super-anpe regroupant des services de l’anpe, des assédic, de l’afpa, des associations d’insertion, des boites d’interim, des chambres patronales et des cabinets privés de placement. Tout ce beau monde participera au nouveau « service public de l’emploi » et pourra consulter les données du nouveau dossier unique du demandeur d’emploi. Ces maisons seront également chargées de recenser les besoins locaux de main d’ouvre et de pousser par le chantage (voir plus bas) les salariés au chômage à satisfaire coûte que coûte ces besoins.
– Nouvelles sanctions pour les chômeurs : il sera maintenant possible de réduire les allocations d’une personne au chômage si elle ne cède pas au chantage qui lui est fait. Comme l’a dit un député UMP : « avant c’était tout ou rien, donc on l’appliquait très peu. ». Autrement dit, le chantage à la réduction des revenus est plus facilement applicable, plus efficace et
surtout moins voyant que le chantage à la suppression pure et simple de tout revenu. C’est ce que Borloo a le culot d’appeler des « sanctions justes et graduées ».
– Ce chantage s’appuie lui-même sur de nouveaux critères : refuser la mobilité géographique malgré les « aides » proposées, refuser de changer de métier malgré les « formations » proposées, c’est s’exposer à être pris à la
gorge.
– Les « contrats aidés » (héritiers des CES et autres contrats de ce genre) sont désormais au nombre de 4 :
Pour le secteur non marchand : le contrat d’avenir ; le contrat d’ accompagnement dans l’emploi.
Pour le secteur marchand : le contrat initiative emploi ; le sinistre RMA

Le point commun de ces contrats : être des sous-contrats de travail, fournir aux employeurs du travail gratuit, constituer des instruments de tutorat et de chantage contre les chômeurs et précaires.

Il faudrait plusieurs pages pour décrire en détail les autres aspects de la « loi de cohésion sociale ». En deux mots: Cette loi reprend et renforce les logiques suivies par tous les gouvernements qui se sont succédé depuis plus de 20 ans :

– attaques contre le droit du travail : assouplissement des règles de licenciement et de reclassement, des règles relatives au travail de nuit.
– subventions aux employeurs : appelées « activation des dépenses passives » (les 4 contrats « aidés », incitations à l’embauche d’apprentis, abaissement du coût du travail dans le secteur de la restauration .)
– suivi renforcé des 16-25 ans : création d’un « contrat d’insertion dans la vie sociale », « baromètre » des métiers qui recrutent pour pousser les jeunes vers telle formation, développement du « contrat jeune sans charge
en entreprise », facilité d’accès aux stages de découverte de l’entreprise pour les 14-16 ans.
– recours au tiers secteur : associations d’insertion, associations intermédiaires, etc.
– développement d’emplois précaires : dans le secteur des « services à la personne, aux particuliers » avec
importantes réductions d’impôts pour les particuliers employeurs de « personnel de maison »

Si ce plan puis cette loi n’ont rencontré qu’une faible opposition, voire le silence, c’est que les acteurs politiques (une partie de la gauche plurielle
de l’ancien gouvernement) ou syndicaux qui appliquent ou acceptent depuis si longtemps ces logiques-là n’ont évidemment rien à dire aujourd’hui, sur le fond. Ils se contentent donc soit d’applaudir, soit de critiquer modérément tel petit détail, soit de parler d’ « écran de fumée sans financement ».

– Pourtant cette loi ne fera que renforcer la précarité, l’insécurité sociale sous couvert de les combattre.
– Pourtant cette loi ne fait qu’obéir aux souhaits du patronat formulés il y a 5 ans dans le « projet de Refondation sociale du Medef » (projet exécuté à la lettre et au pas de charge par l’actuel gouvernement depuis 2002). Borloo peut continuer à jouer son personnage autant qu’il veut à la télévision, il n’en reste pas moins un vulgaire ministre à la botte du patronat.
– Pourtant cette loi comporte des mesures de contrainte et de contrôle social qui sont dans la droite ligne de tout l’arsenal sécuritaire renforcé depuis quelques années, qui vise avant tout à mater les populations les plus précaires (Loi Vaillant : LSQ, Loi Sarkozy : LSI, Lois Perben : I et II.), et auquel le gouvernement
prévoit aujourd’hui d’ajouter le fichage des pauvres et l’obligation pour les travailleurs sociaux et les enseignants de participer à ce fichage.

A tout cela, nous devons opposer notre propre « plan », le seul qui soit humainement et socialement viable, et qui nécessite la lutte solidaire de tous les salariés, travailleurs précaires et chômeurs :

– Pour un système unifié d’indemnisation de toutes les formes de chômage garantissant à tous un revenu à hauteur du SMIC (en vue de la revalorisation
des salaires) et financé par la taxation des profits.
– Contre les licenciements et pour la défense du code du travail.
– Pour l’abrogation des lois sécuritaires et l’abandon des logiques de contrôle social.

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