La chaîne franco-allemande, Arte, a diffusé le 22 mars 2005 des documentaires au cours d’une soirée consacrée à des mouvements des droits des pères. C’est peut-être la première fois qu’une chaîne de télévision ose poser un regard objectif sur le mouvement dit « masculiniste » qui s’est développé rapidement dans le monde en réaction au féminisme et aux avancées qu’il a permises aux femmes. Les médias, en général, se montrent plutôt complaisant à l’égard du discours des pères soi-disant lésés par des tribunaux qui auraient un préjugé favorable aux femmes.

Le premier documentaire présenté sur Arte, le 22 mars, s’intitule « Drames de la séparation. Quand le père devient l’ennemi ». Il s’agit d’un documentaire de Claudia Dejà (Allemagne, 2004, 52mn).

«En Allemagne comme en France, le législateur estime nécessaire et positif que les enfants d’un couple divorcé gardent le contact avec les deux parents. Ce principe est-il applicable dans tous les cas, sans tenir compte de ce qui a motivé le divorce?

Le système de la garde alternée, qui existe en France depuis 2002, part du principe que les relations de l’enfant avec son père et avec sa mère ont la même importance, et que ni l’une ni l’autre ne doivent être privilégiées. En Allemagne, depuis 1998 et la réforme du droit de l’enfant, l’autorité parentale conjointe et la garde partagée sont également la règle. Ces dispositions, louables en elles-mêmes, se révèlent pourtant très problématiques dans les cas pas si rares où les relations entre les parents sont totalement détériorées et violentes. La garde est ainsi parfois confiée à des pères qui ont brutalisé leur femme et la terrorisent encore, qui sont violents, alcooliques, qui ne se sont jamais occupés de leurs enfants ou même qui leur font peur. De part et d’autre du Rhin, des femmes témoignent de ces situations dramatiques où les enfants sont obligés de voir leur père contre leur gré et où les rapports d’experts et les tribunaux parlent des violences subies comme de simples ‘querelles familiales’».

« In nomine patris – Ce que veulent les mouvements de pères », un
documentaire de Myriam Tonelotto et Marc Hansmann (Allemagne, 2004, 52mn) était également à l’affiche.

«Après avoir prospéré aux États-Unis, en Australie et au Canada, les mouvements de défense des droits des pères s’imposent aussi en Europe. Les auteurs du film sont allés interroger leurs dirigeants et ont demandé à des juristes, sociologues, psychiatres et hommes politiques d’analyser leur discours et leur action.

En septembre 2004, un homme déguisé en Batman escalade la façade de Buckingham Palace, d’où il déploie une banderole disant: « Les superpapas de Fathers-4-Justice luttent pour voir leurs enfants. » La photo fait connaître dans le monde entier une lutte menée au nom de pères divorcés.

Pourtant, ils ne représentent qu’une extrême mais très bruyante minorité. Se présentant en victimes de leurs ex-femmes, ils laissent entendre que l’égalité entre les deux sexes est non seulement acquise mais que le courant s’est inversé. Au nom de leurs droits de pères, leur combat s’en prend aux droits des femmes – droit au divorce, à l’avortement, à la mobilité géographique et professionnelle, à la protection contre les violences conjugales… Leur leitmotiv: ‘Le féminisme est allé trop loin, place au masculinisme’».

L’hebdomadaire de référence en matière de critique télévision, Télérama, a salué la subtilité du film « In nomine patris » et invité ses lecteurs à regarder «ce petit film bien étayé et stimulant». Les deux documentaires de cette soirée ont suscité une critique dans Télé Obs. Les réalisateurs Myriam Tonelotto et Marc Hansmann ont répondu à cette critique qu’on peut lire ici: «La rhétorique de l’inversion». Arte a publié sur son site plusieurs articles bien documentés en rapport avec cette soirée. On en trouvera les titres et leurs liens sur cette page.

Par ailleurs, ceux et celles qui s’interrogent sur la signification et les objectifs de l’idéologie masculiniste trouveront dans l’article «Les hommes vont mal. Ah bon?», de Virginie Poyetton, du « Courrier », à Genève, des éléments de réponse à leurs questions. «Depuis que les femmes s’émancipent, les hommes vont mal, écrit la journaliste. Du moins, c’est ce qu’affirment certains groupes d’hommes s’exprimant dans des congrès ou sur de florissants sites Internet. Sans importance? Leur discours est néanmoins à la mode et abondamment relayé par les médias. L’argumentaire se veut simple, cohérent, concret: le féminisme a forcé les hommes à changer et depuis ils se sentent dépossédés de leur identité et de leurs droits. La liste des injustices dont ils souffrent est longue: discrimination positive au travail en faveur des femmes, préjugés favorables aux mères en cas de divorce, fausses allégations de violence ou d’inceste, pensions alimentaires disproportionnées, hausse du décrochage scolaire des garçons, augmentation des prescriptions d’antidépresseurs. « Un discours de dominants », résume Anne-Marie Devreux, sociologue française, chargée de recherche au CNRS. Les arguments utilisés sont majoritairement reliés à l’émotionnel et l’identitaire. Probablement parce que les inégalités matérielles entre femmes et hommes sont toujours favorables à ces derniers».

On peut également se documenter sur le même sujet dans les nombreux articles des rubriques Féminisme et condition masculine et Famille, droit et bien-être des enfants. Enfin, le site québécois antipatriarcat.org présente la plate-forme politique d’une coalition anti-masculiniste en formation.

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