Les milliardaires s’enrichissent tandis que les plus démunis s’appauvrissent. Car à l’autre bout de l’échelle, d’après la Banque mondiale, près de la moitié de la population mondiale essaie de survivre avec 5,50 dollars par jour (ou moins).

La France ne fait pas exception, avec 41 milliardaires, soit quatre fois plus qu’après la crise financière de 2008. « Les milliardaires français ne se sont jamais aussi bien portés, écrit Oxfam. En 2018, leur fortune a augmenté plus vite que les autres milliardaires dans le monde ». Oxfam révèle également que les 7 premiers milliardaires français possèdent plus que les 30 % les plus pauvres.

  •   Le milliardaire Bernard Arnault symbolise l’enrichissement des ultra-riches

Le patron de LVMH, Bernard Arnault, « symbolise à lui seul l’enrichissement des ultra-riches en France », note l’association, en illustrant : « Si quelqu’un avait pu économiser l’équivalent de 8.000 euros par jour depuis la prise de la Bastille, il n’arriverait aujourd’hui qu’à 1 % de la fortune de Bernard Arnault ».

Pourquoi de telles inégalités ? Le rapport d’Oxfam pointe un « modèle économique défaillant [qui] a mis un pouvoir et des richesses considérables entre les mains d’une élite fortunée ». L’ONG insiste particulièrement sur le sexisme de notre système politique et économique, qui maintient dans la pauvreté un très grand nombre de femmes. « Ménage, cuisine, gestion du budget, soin des proches, collecte de bois et d’eau dans les pays du Sud, la valeur monétaire du travail de soin non rémunéré assuré par les femmes âgées de 15 ans ou plus représente au moins 10.800 milliards de dollars chaque année, soit trois fois la valeur du secteur du numérique à l’échelle mondiale », peut-on lire. En France, les femmes consacrent en moyenne 3 h 26 par jour aux tâches domestiques contre 2 h pour les hommes.

Aux racines de ces injustices, le rapport pointe d’importantes défaillances dans les systèmes de redistribution. Car les fortunes des milliardaires – qui proviennent pour un tiers d’héritages – « s’alimentent par elles-mêmes » : il s’agit de choisir les bons placements et d’éviter de payer trop d’impôts. « Les très grandes fortunes se déroberaient à leurs responsabilités fiscales à hauteur de 30 %, rapporte Oxfam. Entre 2011 et 2017, les salaires moyens dans les pays du G7 ont augmenté de 3 %, alors que les dividendes des riches actionnaires ont bondi de 31 %. »

  •                 L’inégalité met le système social français en danger

En France, le modèle social est aussi « en danger », selon l’ONG, « car notre fiscalité repose de manière croissante sur des impôts régressifs comme la TVA et la CSG, des impôts qui pèsent proportionnellement plus sur les citoyen.ne.s les plus pauvres ». A l »inverse, l’impôt sur les sociétés est en baisse de 23 % depuis 20 ans.

Oxfam dénonce clairement les mesures fiscales prises par le gouvernement de M. Macron : « L’instauration de la flat tax et la suppression de l’ISF [impôt de solidarité sur la fortune] ont accentué cette tendance en diminuant de nouveau la participation des plus riches à notre système de redistribution ». D’après un rapport du Sénat, le top 100 des contribuables qui payaient l’ISF a gagné en moyenne 1,7 millions d’euros chacun grâce à ces mesures, sans impact visible sur l’investissement, qui était pourtant la justification de la réforme.

L’ONG en tacle au passage le projet de réforme des retraites, qui « pourrait pénaliser les carrières hachées qui concernent le plus souvent des femmes ». « Les grand.e.s gagnant.e.s de notre système actuel de retraite sont les plus riches puisqu’ils profitent en moyenne plus longtemps de leur retraite par répartition, avec une espérance de vie de treize ans supérieure à celle des plus pauvres, indique le rapport. Au lieu de les mettre plus à contribution, le projet de réforme actuel prévoit de baisser leurs cotisations au-delà de 10.000 euros de rémunération par mois. »

Pour Pauline Leclère porte-parole d’Oxfam France, « les inégalités indécentes sont au cœur de fractures et de conflits sociaux partout dans le monde car personne n’est dupe : la crise des inégalités traduit la complicité plus que l’impuissance des États à agir pour la combattre. Les inégalités ne sont pas une fatalité, elles sont le résultat de politiques sociales et fiscales qui réduisent la participation des plus riches – entreprises et particuliers – à l’effort de solidarité par l’impôt, et fragilisent le financement des services publics. Transports, éducation, santé, système de retraites…. sont sacrifiés alors qu’ils sont décisifs pour lutter contre la pauvreté. »

Pour lutter contre les inégalités, Oxfam recommande de :
 Reconnaître le travail de soin peu ou non rémunéré effectué principalement par les filles et les femmes comme une forme de travail ou de production apportant une vraie valeur.
 Rétablir une fiscalité plus équitable sur les plus aisé.e.s n, supprimer les niches fiscales qui bénéficient disproportionnément aux grandes entreprises sans bénéfice pour l’économie et lutter efficacement contre l’évasion fiscale.