L’aboutissement de 50 ans de lutte. De 10 ans d’occupation de la zone. De manifestations mémorables rassemblant des dizaines de milliers de personnes – paysans, urbains, occupants, jeunes et moins jeunes, émeutiers ou pas – dans les rues de Nantes ou les sentiers de Notre-Dame-des-Landes. L’aboutissement d’années de combats, de rires et de pleurs. De batailles rangées dans le bocage et de journées de reconstructions dans la boue. De rencontres et de nuits de fête. De dizaines de comités locaux et de longs débats.

Cet abandon il y a deux ans, c’était la première concession arrachée par une lutte depuis très longtemps. Et depuis, il faut bien reconnaître qu’il est terriblement difficile de faire reculer le pouvoir autoritaire qui gouverne la France.

Cet abandon, c’est aussi un message : ce ne sont pas toujours les multinationales et leurs flics qui l’emportent à la fin. Dans la région nantaise, c’est la troisième victoire d’une lutte de territoire, après le retrait de deux projets de centrales nucléaires au Pellerin et au Carnet, dans les années 70 et 90. C’est donc un territoire en lutte, fort de réseaux tissés au fil des années, qui a fait reculer les aménageurs.

Et maintenant ? En deux ans, le mouvement s’est déchiré. Des rivalités et des conflits inextricables ont éclaté sur la ZAD. Certains occupants sont partis. D’autres sont restés. D’autres enfin, ont été délogés par une nouvelle vague d’expulsion. Car dès le printemps 2018, Macron se venge. Des milliers de gendarmes, des drones des hélicoptères et des bulldozers sont envoyés sur la zone. Plus de 13 000 grenades sont tirées en quelques jours. La main d’un jeune homme est arrachée. Pour la première fois depuis des décennies en France métropolitaine, des blindés militaires sont envoyés contre des opposants. Ils seront réutilisés plus tard pendant les Gilets Jaunes.

Cette vague d’expulsion destructrice laisse des traces indélébiles. Des dizaines de maisons détruites, des centaines de blessés, des peines de prison. Des rancœurs entre celles et ceux qui ont négocié plutôt que de voir leur travail anéanti sous les roues des blindés, et celles et ceux qui ne voulaient faire aucune concession. La zone autonome, incontrôlable, jadis inaccessible à la police, n’existe plus. L’aéroport est abandonné, son monde mortifère règne encore. Mais il reste dans le bocage, un espace qui cultive, qui nourrit les luttes, qui accueille, qui expérimente.

Hier, pour l’anniversaire de l’abandon de l’aéroport, des habitants et habitantes organisaient un « lever de charpente sur une ferme détruite pendant l’opération césar ».

Retour en 40 images sur une lutte qui a façonné l’histoire de Nantes et ses alentours.

« Ce que la ZAD a permis de construire » : https://zad.nadir.org/spip.php?article6694