En tant que communistes révolutionnaires, nous devons nous opposer à toute intervention militaire fait par le centre à la périphérie. Les révolutionnaires dotés de principes non seulement s’engagent dans le défaitisme révolutionnaire mais s’opposent aussi à toutes les guerres non progressistes et soutiennent toutes les guerres progressistes. Le bloc impérialiste fonctionne comme un cartel unique d’États aux vues similaires et mutuellement bénéfiques qui se nourrissent continuellement des veines ouvertes du Sud global.

Un mouvement internationaliste véritable ne peut pas exister tant qu’il y a une division des intérêts entre les travailleurs du centre et ceux de la périphérie ; nous sommes tous des camarades dans la lutte mondiale de l’humanité qui travaille à son destin. Une attaque contre toute population, même si elle est supposée « arriéré » ou « éloignée du système mondial », ne devrait pas passer inaperçue ou rester impunie. Ce qui sera sans aucun doute occulté dans la couverture médiatique de ces attaques et des « interventions » subséquentes, c’est le coût humain pour les Irakiens et les Iraniens, et les revers pour leur politique interne, leur cohésion et leur progrès vers un quelconque niveau de changement sociétal. Les secousses et les cicatrices historiques des premières invasions américaines de 1991 et 2003 – qui sont en partie à l’origine des tensions qui ont mené aux événements d’aujourd’hui – ne se sont pas encore atténuées, et les répliques de la prochaine invasion se poursuivront pendant des décennies en Irak et en Iran.

Soleimani ne doit cependant pas être considéré comme un martyr pour le peuple iranien, ni, rétrospectivement, comme un héros. Il a été responsable de multiples opérations au Kurdistan iranien qui ont massacré d’innombrables militants gauchistes kurdes et Fedayins rouges combattants pour la libération. Il a également contribué au développement d’une ingérence iranienne naissante au Proche-Orient chiite. Il y a rarement dans l’histoire d’individus parfaits ou de héros bien nets. Soleimani n’est pas une exception, et ne devrait pas l’être. Dans l’histoire plus large de ce conflit, il ne sera guère plus qu’une note de bas de page, comparé à la souffrance des masses, rien de plus qu’une fragile justification pour la guerre. Les crimes individuels de Soleimani ne justifient pas l’assassinat des États-Unis, bien que sa mort ne doive pas être pleurée ; les résultats de sa mort, cependant, se répercuteront pendant des décennies en Irak et en Iran, aux dépens des masses qui n’avaient aucun intérêt dans les jeux géopolitiques des puissances hégémoniques régionales et mondiales.

« Le socialiste d’un autre pays ne peut pas dénoncer le gouvernement et la bourgeoisie d’un pays en guerre avec « sa » propre nation, et ce non seulement parce qu’il ne connaît pas la langue, l’histoire, les spécificités de ce pays, etc. mais aussi parce que cette dénonciation fait partie des intrigues impérialistes et n’est pas un devoir internationaliste.

N’est pas internationaliste celui qui prête serment et ne jure que par l’internationalisme. Est internationaliste celui qui, de manière réellement internationaliste, combat sa propre bourgeoisie, ses propres sociaux-chauvins, ses propres kautskystes.

Dans chaque pays, le militant socialiste doit avant tout souligner dans toute sa propagande la nécessité de se méfier non seulement de chaque formule politique de son propre gouvernement mais aussi de chaque formule politique de ses propres sociaux-chauvins, qui en réalité servent ce gouvernement. » Vladimir Ilitch Lénine

Par Eric Camacho et Ahmed Nada.

Texte initialement publié en anglais sur la page Cosmonaut.