Après un parcours du combattant et la bienveillance d’agents de la RATP, à 14h00, enfin arrivés à Montparnasse, là où la manifestation devait démarrer une demi-heure plus tard, pour se rendre sur La Place d’Italie, que nous n’avons finalement jamais pu atteindre…

Rangers à nos pieds, genouillères, coudières, gants coqués, casque du GIGN sur la tête, chasuble sur le tronc, le tout permettant d’accéder rapidement à l’équipement d’urgence, afin de pouvoir prodiguer les premiers soins rapidement, si nécessaire.

Le tout, indiquant par des signes distinctifs, que nous sommes Secouristes.

Mon équipière a sur elle tout le ravitaillement nécessaire pour me réapprovisionner et me seconder.

Notre Objectif : Rejoindre rapidement la tête de Cortège, afin de porter secours aux manifestants qui sont en première ligne.

Ce jour-là, nous sommes une petite équipe (cinq au total), déterminée à porter secours à chacun.

Quelques centaines de mètres à peine de la sortie « 1 » de la Gare Montparnasse, entre l’UGC Montparnasse et l’Eglise Notre-Dame-Des-Champs, nous apercevons au loin les premiers jets de gaz lacrymogènes.

Quelques secondes plus tard, nous voyons des Elites Syndicalistes s’enfuir du Cortège avec leurs véhicules avant de recevoir le nuage de gaz …

« No Comment » comme dirait Euronews ^^

Par ailleurs, les personnes engagées dans la lutte, affichant distinctement leur appartenance à tel ou tel Syndicat (la base), ne comprennent pas et sont sidérées de voir leurs « Responsables » quitter la manifestation … Les huées ne se font pas attendre, l’un d’eux (de la base syndicale) s’exprime ainsi « Ah ! Elle est belle la convergence des luttes ! Honte à vous ! Hou ! Hou ! »

Je recommande immédiatement à notre équipe de mettre nos protections – lunettes balistiques, masques, casques – quand soudain, un « Street Médic » nous attrape par l’épaule et nous demande en renfort !

Les Manifestants hurlent « MEDIC ! MEDIC ! ».

Nous arrivons sur place et portons secours à notre première victime du jour, la plus grave, un Photographe vient de se prendre un tir direct de LBD dans l’oeil. Nous lui prodiguons les premiers soins, une citoyenne part immédiatement chercher les Pompiers de Paris positionnés à quelques rues de là.

L’oeil de la victime gonfle rapidement et disparait sous sa peau tuméfiée.

Il perd du sang, au niveau du nez, de l’arcade et de l’oeil gauche en question.

Nous stoppons les hémorragies. Bandage intégrale de la tête.

De ses lunettes de vues, il ne reste plus qu’une branche accrochée à son oreille droite.

Rien ne justifiait se tir.

Quatre Pompiers de Paris arrivent finalement et l’emmènent.

À partir de cet instant, nous resterons en mode « ROBOCOP », c’est-à-dire entièrement équipés de la tête au pied.

Les manifestants de devant, aspergés de gaz lacrymogène, refluent vers nous, je crie « En colonne ! » et toute notre équipe devient le prolongement d’un feu tricolore, en milieu de voirie – Chacun tenant la personne devant lui par l’épaule et/ou par le sac, ce qui évite d’être séparés pendant un mouvement de foule – ainsi nous neutralisons l’effet des gaz, en administrant à chaque individu le traitement adéquat.

Des individus, vomissent, pleurent, sont blessés … ils ne peuvent même pas demander de l’aide tellement le Gaz est puissant, seul les regards rouges irrités et le « langage des signes » permettent de nous solliciter : Nous sommes là, et je tiens bon ce feu tricolore, en m’accrochant à sa signalétique, pendant que l’équipe de secouristes tient bon aussi, afin de ne pas briser la chaîne !

Les manifestants sont totalement démunis, aucune protection, ils cherchent le moindre secouriste, afin qu’il leur vienne en aide, une sensation terrible.

La manifestation n’avait pas encore commencé que la BAC faisait monter la température.

Nous nous permettrons quelques pauses de deux minutes par heure, afin de nous hydrater et de grignoter une barre céréalière.

Entre temps, pas de répit.

Toujours notre objectif de rejoindre la tête du Cortège, nous sommes stoppés par une Compagnie de CRS qui a eu pour ordre, je cite : « de diviser la manifestation en plusieurs tranches ».

Nous arrivons cependant à communiquer avec un Gradé de manière constructive et lui expliquons que la plupart des « Street Medic » sont à l’arrière et que nous souhaitons nous étaler le long du Cortège Parisien, afin de couvrir toute la « Manif ».

Nous lui précisons, que nous portons secours à tous, sans distinction, et que même si nous ne le souhaitons pas, à un moment ou un autre, nous pourrions être amenés à porter secours à un membre de sa Section.

Il acquiesce et nous laisse passer deux par deux, les manifestants, quant à eux restent cantonnés à faire du sur-place, confinés.

Nous progressons donc parmi les Forces de l’Ordre qui procèdent à des interpellations, nous observons la scène en cas de blessés éventuels, quand soudain, un membre de la BAC, nous interpelle : « Comment avez-vous réussi à pénétrer le dispositif ?!! » Réponse unanime : « Voyez avec votre Chef là-bas ! »

Comme vous pouvez le voir, nous venons porter secours, à ce propos, y’ a-t-il des blessés parmi les interpellés ? »

Réponse : #circulezyarienavoir ^^

Nous restons, malgré tout quelques minutes – effleurés par la matraque nous indiquant la marche à suivre, – les interpellés ne présentent pas de blessures apparentes, d’autant plus, que la Gendarmerie présente juste derrière la BAC, veille objectivement, au respect de la loi.

Nous poursuivons.

Le Cortège fut divisé en plusieurs parties par les Forces de l’Ordre.

Les premiers qui se sont rendus à la Place d’Italie se sont retrouvés pris au piège.

La majorité des manifestants qui se trouvaient à l’arrière sont empêchés de les rejoindre, suite à plusieurs nasses policières divisant le parcours, à coup de gaz lacrymogènes et de grenades de désencerclement.

Notre équipe parvient au niveau de l’hôpital Pitié-Salpêtrière de Paris et nous resterons là pendant plusieurs heures.

Des manifestants se sont réfugiés dans l’enceinte de l’établissement hospitalier pour fuir les gaz lacrymogènes et les grenades de désencerclement.

De suite, nous avons pu observer, l’intervention de Voltigeurs, de La BAC et des CRS, qui ont généreusement distribué des coups de matraque et de gaz lacrymogène (gel), afin d’expulser les manifestants qui souhaitaient se réfugier dans cet établissement public.

Nous avons mis en sécurité, sur un parking, les blessés afin de leur apporter assistance, avant d’être expulsés par les CRS, après plusieurs sommations, mais cette fois-ci « sans violence » peut-être grâce à notre présence.

Un des membres de l’équipe a reçu un fragment de grenade de désencerclement sur la tête.

Heureusement, son équipement de protection à amorti le choc.

De manière objective, sur la journée du 1 er Mai 2019, à Paris, seule la Gendarmerie Nationale fut digne.

Le « BB » s’est formé, après les violences policières et le refus de laisser circuler le Cortège.

Cortège qui regroupait des personnes de tous horizons et de tous âges. Certaines étant présentes pour la première fois ont été extrêmement choquées par la violence injustifiable de certains policiers.

Notre équipement nous a permis d’être au coeur des affrontements et d’ainsi porter secours rapidement aux blessés.

Est-ce normal, en 2019, pour des Secouristes Français, pour une manifestation se déroulant en

France, d’être équipés comme en zone de guerre ?

Merci à toute l’équipe d’avoir tenu bon malgré les difficultés qui se sont présentées.

Bonus : nous avons eu le plaisir de croiser des journalistes « Le Média » ainsi que « RT France ».

Un Citoyen apolitique, Secouriste.