IL Y A DES LIEUX DE VIE, IL Y A DES BRAISES ET DES FOYERS

« C’est une bien curieuse guerre, que celle où nous sommes engagés, et qui veut que des mondes et des langages soient produits, que des lieux soient ouverts et offerts, que des foyers soient établis au milieu du désastre. »
Et la guerre est à peine commencée, texte anonyme

Nous nous rendons compte à notre époque de la difficulté qu’il y a à se réapproprier sa propre existence. Toute notre vie on nous impose une cadence, une temporalité : étudier, travailler, vaquer à ses loisirs, se marier, faire des enfants et surtout garder en tête que l’avenir est inquiétant et incertain, qu’il est dangereux de vivre dans le présent et qu’il faut assurer ses arrières.

On n’habite plus rien depuis longtemps, on hante...

Nous ressaisir d’un temps qui nous appartienne passe par s’attarder sur les lieux que nous traversons au quotidien, par la réappropriation de ces espaces dont nous avons acté depuis longtemps qu’ils nous sont étrangers et que nous n’avons pas de prise sur eux. La ville, le quartier, la rue, l’entreprise, le lycée… l’université. Nos facs sont des espaces que nous hantons, nous passons des salles de cours aux halls impersonnels, de la BU aux espaces marchands du CROUS, nous ne nous rencontrons pas, nous n’avons pas d’espace qui soit propre à nous, étudiant-e-s, libéré des contraintes de l’administration.
Ce que nous proposons c’est un lieu de vie, un Foyer au sens fort du terme : un lieu en commun, chaleureux, un lieu où on s’attarde, où on discute, un lieu où couvent les braises en attendant qu’on les rallume. Ce que nous proposons c’est un lieu a disposition de tout-e-s celles et ceux qui veulent s’en emparer, où il n’y aurait pas besoin d’être une association pour organiser un débat, une lecture, une projection, un concours de pierre-feuille-ciseaux, une pièce de théâtre, une bataille de coussins ou un atelier de bricolage. Ce que nous proposons c’est aussi tout simplement un espace pour se détendre, se poser entre ami-e-s, manger, lire un livre ou boire un café.

Nos existences ne sont pas neutres

Cependant si cet espace doit pouvoir appartenir à chacun-e, il n’est pas question d’en faire un lieu neutre, apolitique, simple lieu de consommation de la tranquillité ou du divertissement. Tout simplement parce que nos existences ne sont pas neutres, pas plus que le monde dans lequel nous vivons. Chaque jour des gens meurent aux frontières, dans nos rues, au travail, dans les prisons, dans les catastrophes climatiques, sous les coups de la police. Ne pas prendre parti c’est prendre le parti de l’oppresseur.
Par conséquent ce Foyer doit pouvoir être une base d’appui, un point de départ et d’ancrage pour s’ouvrir sur la ville, aller à la rencontre des populations précaires et tisser des solidarités. Il doit également pouvoir être un endroit où se développe une solidarité concrète face aux oppressions, à travers des pratiques d’échanges et de gratuité, des permanences de collectifs féministes / antiracistes / LBGT+ ou des ateliers d’éducation populaire.

Prendre la ville