Ce 14 avril 2018, les grands médias bourgeois (qui expriment et matérialisent les intérêts de classe de nos exploiteurs et oppresseurs, toutes fractions confondues malgré les divergences conjoncturelles les différenciant) nous ont annoncé à grands coups de propagande guerrière qu’une coalition de trois parmi les plus importantes puissances au monde (les USA, la Grande Bretagne et la France) ont procédé à des frappes aériennes nocturnes sur diverses cibles « stratégiques » en Syrie, en représailles à une attaque chimique qui aurait été perpétrée par le régime baasiste, soutenu militairement, économiquement, politiquement, diplomatiquement par la Russie et l’Iran. Il est plutôt « cocasse » et « outrancier » que ces gangsters capitalistes mettent en avant la défense de « populations civiles » victimes de la logique morbide qui dirige ce monde, surtout lorsqu’on sait pertinemment bien que par exemple les USA possèdent le plus puissant complexe militaro-industriel de la planète, ainsi que les plus gigantesques réserves d’armes de destruction massive. Les USA ont ces dernières années non seulement contaminé des régions entières de l’ex-Yougoslavie et de l’Irak avec l’utilisation à grande échelle de munitions à « l’uranium appauvri », entrainant une augmentation drastique du nombre de cancers pour les populations locales, mais ils ont ainsi tout autant sacrifié leurs propres soldats exposés aux effets dévastateurs de tels armements.
Une fois de plus, à cette occasion, le spectre d’une troisième guerre mondiale a été brandi devant les yeux ébahis de milliards de prolétaires, en mettant en avant la possibilité d’un embrasement militaire USA versus Russie. Il semble évident à tout esprit sain et quelque peu critique que la version officielle devant servir de justification à ces frappes aériennes ne tient pas la route et n’a aucun sens. Ni les capitalistes étatsuniens, britanniques et français, et certainement pas non plus les capitalistes russes, syriens ou iraniens, en ont quelque chose à foutre fondamentalement du sort des prolétaires écrasés sous les déluges de bombes, de missiles, de mitrailles, de gaz et autres joyeusetés produites par l’Eden capitaliste. La raison fondamentale de toute cette mise en scène, c’est la préparation idéologique, psychologique des masses de prolétaires atomisés dans leur condition de citoyens à la réalité future et inévitable de la guerre généralisée.
Plutôt donc que de réécrire pour la énième fois un texte spécifique sur cette question prégnante, nous avons décidé dans l’urgence de publier un bulletin reprenant les passages essentiels de deux textes diffusés il y a quelques années déjà mais qui n’ont rien perdu de leur « actualité ». Commençons donc par le texte « Menaces de frappes aériennes en Syrie ! Troisième guerre mondiale ? Une seule guerre, la guerre de classe ! », publié en septembre 2013 après une première importante attaque chimique en Syrie :
Plus de 110.000 morts, deux millions de réfugiés dans les pays voisins, plus de trois millions de déplacés à l’intérieur du pays, 130.000 arrestations et disparitions, des tonnes de bombes, de missiles, d’obus, de bombes à fragmentation… C’est cela la réalité de la guerre en Syrie depuis 2 ans et demi ! [depuis lors, aujourd’hui en 2018, ces chiffres morbides ont évidemment explosés !]
Et comme si cette matérialisation de la guerre permanente du capitalisme contre le prolétariat ne suffisait pas, les grands média bourgeois nous annoncent ce 21 août [2013] « l’horreur suprême » : des gaz toxiques ont été utilisés dans un quartier périphérique de Damas, faisant plus de 1.300 morts et 3.600 blessés.
Toutes les accusations sont lancées contre le régime syrien qui n’en serait pas à son premier massacre, et qui a déjà prouvé ce dont il est capable en termes de répression. D’autres voix s’élèvent pour accuser des groupes de « rebelles », plus précisément des djihadistes soutenus militairement par l’Arabie Saoudite et le Qatar.
Nous, communistes, ne voulons en aucune façon entrer dans cette polémique, et encore moins cautionner les élucubrations « conspirationnistes » et autres « théories du complot », très à la mode jusque dans certains milieux « militants » et « ultragauchistes ». Car fondamentalement, que ce soit l’État capitaliste en Syrie, représenté par le régime baasiste, ou que ce soit l’une ou l’autre des fractions combattantes de « l’opposition » bourgeoise, avec l’appui de puissances régionales ou internationales, c’est finalement le terrorisme d’État, l’État terroriste des capitalistes, qui est responsable de ce gazage antihumain et anti-prolétarien, comme il est responsable de toute cette guerre, comme de toute guerre…
Mais aujourd’hui, alors que le capitalisme traverse sa pire crise de valorisation depuis la fin de la seconde boucherie mondiale, sa seule alternative, une fois encore, c’est la destruction massive de forces productives excédentaires (de marchandises, de travail mort, mais aussi de marchandises forces de travail, donc de travail vivant, donc de prolétaires !)… La seule solution viable pour le capitalisme (afin de relancer ultérieurement un nouveau cycle de valorisation), c’est donc la guerre généralisée, […] Son seul problème (qui est de taille !), c’est comment mobiliser mondialement le prolétariat pour que celui-ci se laisse embrigader dans une quelconque campagne idéologique afin de justifier les futurs massacres.
Les actuels roulements de tambours guerriers qui résonnent en vue d’une intervention militaire de certaines puissances occidentales en Syrie participent de cette campagne idéologique. D’autant plus que la Syrie est au cœur d’une région qui est l’enjeu géostratégique des appétits voraces des capitalistes. Deux grandes constellations d’États se partagent déjà le terrain et participent à la redistribution des cartes dans la région : d’un côté, la Russie, la Chine et l’Iran qui soutiennent le régime en place (mais jusqu’à quel point ce soutien ne menacera pas l’ensemble de leurs intérêts ?), et de l’autre côté, les USA, la France, la Grande Bretagne et leurs alliés régionaux la Turquie, l’Arabie Saoudite et le Qatar…
Les menaces d’intervention militaire renforcent cette polarisation et confortent également dans leur analyse l’opinion publique, la propagande bourgeoise, les « spécialistes » de la question, et jusqu’à des groupes et organisations qui se revendiquent de la révolution sociale, de la lutte anticapitaliste, de l’insurrection prolétarienne, de la lutte pour le communisme et/ou l’anarchie, qui ne cessent de répéter ad nauseam […] que les événements en Syrie ne seraient qu’une guerre par procuration (entre ces diverses puissances étatiques), ou à tout le moins une guerre civile entre deux camps bourgeois (avec le soutien de ces mêmes puissances étatiques) : le régime baasiste contre « l’opposition démocratique » (qui dans certains cas est réduite à sa plus simple expression djihadiste)…
Or, cette version et cette compréhension de l’histoire, et donc des faits qui se déroulent devant nos yeux, même si elle recouvre une partie de la réalité sur le terrain, élimine purement et simplement l’autre aspect de cette matière sociale en mouvement, qui pour nous communistes est fondamental : c’est la lutte de classe qui fut le déclencheur essentiel de tout ce qui se passe aujourd’hui. En mars 2011, un important mouvement de lutte, un soulèvement de nature prolétarienne, s’est déclenché contre la misère, contre l’augmentation des prix, contre le chômage, contre les mesures d’austérité drastiques imposées durant la précédente décennie en Syrie, contre la répression… Les prolétaires ont tenté dès le début de dépasser la spontanéité du mouvement, diverses structurations de lutte se sont mises en place dont des centaines de comités de coordination (Tansiqyat) qui essayent de répondre dans la pratique aux besoins de la lutte, de son organisation sur le terrain, de sa coordination, de sa centralisation, de son renforcement, de son extension et de son auto-défense, bien qu’ils développent des niveaux de radicalité très contradictoires quant aux perspectives de la lutte. Très rapidement également le mouvement de notre classe riposta à la terreur étatique par l’action directe, poussant au défaitisme dans les appareils centraux de la répression…
Par manque de développement de ses perspectives, par manque de direction révolutionnaire, et sous l’effet de la direction donnée par différentes fractions bourgeoises qui essayent de réaliser leurs propres intérêts en se servant de la lutte prolétarienne, cette lutte de classe, cette guerre de classe, s’est partiellement transformée en lutte inter-bourgeoise, en guerre civile interne, et en guerre par procuration. Cela n’enlève rien à l’importance de la nature fondamentalement prolétarienne du mouvement. Partout et toujours dans l’histoire où les deux classes antagonistes se sont affrontées, des fractions bourgeoises se sont soit provisoirement coalisées contre un même ennemi, soit ont continué à s’opposer pour qu’émerge conséquemment un seul et puissant pôle contre-révolutionnaire capable d’abattre la classe historiquement déterminée à en finir avec ce cauchemar séculaire qu’est le capitalisme et son rapport social (Commune de Paris, Russie, Allemagne, Espagne…). Partout et toujours dans cette même histoire, des « puissances étrangères » sont intervenues soit pour réprimer directement le mouvement de notre classe (opérations de gendarmerie internationale), soit pour soutenir un camp bourgeois contre un autre (« Guerre civile en Russie » de 1918 à 1921 durant laquelle diverses armées occidentales ont militairement soutenus les « blancs » contre les « rouges »), soit encore pour se faire la guerre par procuration (Espagne 1936-39)… Et il en sera ainsi dans tous les futurs conflits qui embraseront le monde de la valeur jusqu’à son abolition violente par la force de la révolution sociale.
Pour en revenir à la Syrie, rappelons ce que nous écrivions […] dans un autre texte : « il est indéniable que les bombardements des villes et les massacres, la terrible répression étatique et la militarisation de celle-ci, s’imposent comme une force lancinante qui tente d’embrigader les prolétaires en lutte (…) à travers la constitution de deux fractions bourgeoises qui s’opposent pour la conquête du pouvoir et la gestion de l’antagonisme social. Toutes les puissances étatiques internationales et régionales (…) poussent à la militarisation de l’affrontement de classe, et ainsi à lui faire perdre sa dynamique de subversion de ce monde de misère, bref à dépouiller le prolétariat de son autonomie de classe… Le troisième camp en Syrie (c’est-à-dire le prolétariat opposé aux deux pôles de la contre-révolution) court à sa perte et à son embrigadement si l’isolement dans lequel il est plongé n’est pas brisé, si le contenu puissamment universel de sa lutte (comme de toute lutte de notre classe) n’est pas mis en avant, s’il ne trouve pas rapidement un écho à ses luttes, si de nouveaux foyers insurrectionnels ne se développent pas ailleurs afin de ne plus donner un seul instant de répit aux bourgeois voraces… »
Tout mouvement de lutte et de subversion des rapports sociaux dans l’histoire possède sa propre dynamique, qui si elle ne se développe pas, si elle ne s’étend pas, dépérit pour finalement disparaître. Certes, […], la dynamique du mouvement de lutte de notre classe en Syrie s’est essoufflée, […], sous les coups de boutoir simultanés des bombardements, des tueries, des massacres, des emprisonnements, sous l’action également des diverses politiques réformistes qui utilisent les prolétaires comme chair à canon dans leur guerre entre fractions bourgeoises, et sans compter l’influence des tendances djihadistes qui transforment la guerre de classe en guerre sectaire et communautariste, malgré la forte résistance du prolétariat.
Cette résistance du prolétariat aux diverses fractions djihadistes qui essaient de confisquer notre lutte et d’imposer le retour à l’ordre (entre autre à travers l’ordre moral et religieux) dans les « zones libérées » s’est […] exprimée […] à travers une série d’actions que la presse bourgeoise s’est évidemment bien tenue d’ignorer. […]

A tous les prolétaires combattifs en Syrie !
Nous tenons enfin à mettre en garde les prolétaires en lutte en Syrie qui, exsangues de subir les incessants bombardements et massacres orchestrés par le régime en place, développent encore des illusions sur une intervention de « la communauté internationale » (qui n’est rien d’autre qu’une bande de gangsters capitalistes), qui en appellent à des frappes aériennes ou à l’imposition d’une « zone d’exclusion aérienne »… Il n’y a rien à attendre d’une quelconque puissance étatique qui toutes ont toujours combattu et réprimé les révoltes prolétariennes dans l’histoire. Que ce soit en Indochine et en Algérie durant les années ’50 ou au Vietnam plus tard, les armées française et américaine n’ont laissé sur les champs de bataille que des monceaux de cadavres… Que ce soit en Irak, en Somalie, en Yougoslavie, en Afghanistan ou encore très récemment en Lybie, que ce soit sous prétexte de « guerre contre la terreur » ou d’« action humanitaire », les enjeux impérialistes n’ont signifié qu’une réorganisation de l’exploitation et le remplacement d’un dictateur par un autre ou par une brochette de tortionnaires plus présentables et plus « respectables »… Non, il n’y a rien à attendre pour le développement de nos luttes en choisissant un « moindre mal » contre un « pire »… [Et cela est tout autant valable pour les prolétaires du Rojava qui s’imaginent que les organisations national-social-libérationnistes qui les encadrent et les transforment en chair à canon puissent assumer dans la confrontation actuelle un autre rôle que celui de mercenaires sur le terrain des grandes puissances capitalistes.]

A tous les prolétaires combattifs en Syrie !
Au début, vous vous êtes révoltés contre la misère et la répression qu’une fraction particulière (le régime baasiste) de la classe dirigeante vous imposait. Mais un trop grand nombre d’entre vous se sont fait les auxiliaires d’une autre fraction bourgeoise de gestionnaires du capitalisme en participant à la guerre, dans le camp du front unitaire du nationalisme et du sectarisme. On vous dit, nos ennemis aimeraient vous faire croire que cette guerre « contre Assad » ne ressemble à aucune autre. Tous les représentants et toutes les tendances du front unitaire « anti-Assad » vous chuchotent à l’oreille qu’il faut remettre à plus tard, pour une raison tactique, l’attaque contre la classe possédante capitaliste, les rapports sociaux existants et l’état des choses actuel, jusqu’à ce que le « diabolique » Assad soit vaincu. En acceptant cela, vous ne vous rangez pas dans le camp du prolétariat, mais contre lui. Vos alliés ne sont dès lors plus les prolétaires, les exploités, mais la bourgeoisie. Adhérer au front unitaire, c’est se battre pour quelqu’un d’autre, c’est être une expression extrême de la rivalité sectaire et nationaliste.
La perspective d’une attaque contre la misère capitaliste et les effusions de sang dans cette guerre, qui n’a jamais été aussi impérieuse, dépend de la capacité de rendre apparente la frontière qui sépare l’action et les besoins de la classe prolétarienne d’un côté, et le camp de la bourgeoisie, celui de sa dictature démocratique de l’autre. Ne pas relever cette frontière signifie sous-estimer le rôle historique du prolétariat, et plus particulièrement faillir dans le fait d’assumer le rôle important et fondamental de son avant-garde dans la lutte. Le capitalisme, c’est la guerre, et la guerre, c’est le capitalisme. A la guerre comme dans la paix, il y a toujours le profit capitaliste, les exploiteurs et les exploités.
Refusez tout front unitaire en faveur d’une fraction bourgeoise ou d’une autre ! Arrêtez cette guerre d’un appareil militaire bourgeois contre un autre, retournez vos armes contre vos « propres » officiers, contre les requins politiques, contre les conseillers militaires étrangers et les patrons capitalistes de votre « propre » camp. Soyez l’avant-garde et montrez aux « prolétaires en uniforme » dans les rangs des forces d’Assad que la seule unité, c’est celle des exploités au-delà des frontières artificielles du capitalisme. Étendez cette méthode de notre action de classe derrière le front des soldats « ennemis » afin qu’ils se joignent à vous pour exécuter les bouchers impérialistes bourgeois qui sont les seuls à tirer profit de ce massacre.
?
Nous n’avions pas eu le temps de parachever la diffusion internationale de ce texte et d’en discuter en profondeur les tenants et les aboutissants, qu’un nouveau foyer de tensions entre puissances impérialistes se développait, en Europe cette fois. Au printemps 2014, nous avons publié deux textes autour de la question des événements en Ukraine dont celui-ci : « Préparatifs guerriers entre l’Ukraine et la Russie. Show ou réalité ? », qui aborde et développe les mêmes thématiques, et met en avant les perspectives pour notre classe ainsi que pour ses minorités les plus déterminées en termes d’organisation du défaitisme révolutionnaire :
[…] A nouveau, les bruits de bottes résonnent bruyamment en Europe, les canons s’affutent, les bombardiers regorgent de dragées meurtrières, les missiles dardent leurs pointes nucléaires sur leurs futurs objectifs : après les guerres qui ont localement et conjoncturellement embrasé la Yougoslavie, la Géorgie, la Tchétchénie, le Daghestan, l’Ossétie, etc. durant ce dernier quart de siècle, voici maintenant que s’intensifie la maturation des conditions du déclenchement en Ukraine d’une nouvelle guerre, d’une ampleur plus considérable encore, avec des répercussions internationales inimaginables.
Depuis quatre mois, d’importants troubles secouent ce pays. Ces troubles ont émergé du sol fertile des profondes contradictions qui déterminent toute société de classe ainsi que leurs expressions concrètes : salaires de misère, restructuration, licenciements, privatisations, diminution des aides sociales qui constituaient un reliquat de « l’ère socialiste », etc. Bien sûr, ces mouvements sociaux (comme toutes les luttes qui se développent aujourd’hui) portent encore le sceau du manque de rupture avec les gestionnaires du rapport social, ainsi qu’avec leurs futurs remplaçants. Leur expression politique et leur conscience semblent être si faibles et fausses… Mais les révolutionnaires ne peuvent pas juste balayer d’un revers de main le contenu des événements, de manière dédaigneuse et condescendante. […]
Malgré la nature bourgeoise de diverses expressions et matérialisations émanant des mouvements sociaux, ce que la classe des capitalistes craint le plus aujourd’hui, c’est une extension des troubles aux métropoles des superpuissances mondiales. Que se passerait-il si de pareils événements devaient éclater dans la Fédération de Russie, en Grande-Bretagne, aux USA, en Chine ? A tout le moins, les capitalistes préféreraient éviter ce genre de « catastrophe » pour la pérennité de leur dictature sociale et ils tentent ainsi de canaliser préventivement toute cette bouillonnante énergie, tout ce maelström social dans les ornières de la guerre. […]

Une fois encore les capitalistes se préparent à nous envoyer au massacre
Cette année 2014, la bourgeoisie commémore le déclenchement de la première guerre mondiale, tout en prétendant que nous vivons maintenant dans un monde de paix et d’harmonie. Mais […] comme en 1914 des mécanismes politico-militaires sont en train de se mettre en route, et qui peuvent très bien échapper à la mainmise des apprentis sorciers qui dirigent le monde. […]
Au-delà du développement de l’hystérie nationaliste, chauvine et patriotique dans les deux camps en présence, ainsi que des circonstances particulières qui alimentent les actuels préparatifs de guerre […], nous devons mettre en avant un point fondamental : la rapidité avec laquelle toute cette affaire a pris de l’ampleur. En effet, quelques jours, quelques semaines seulement ont suffi à révéler toutes les contradictions accumulées depuis la fin du « monde bipolaire » (l’URSS contre les USA, l’est contre l’ouest, le « communisme » contre le « capitalisme » selon la propagande des deux camps), soit depuis un quart de siècle. Toutes contradictions qui provenaient de la non-résolution de la crise historique inhérente au capitalisme (considéré en tant que ce qu’il est fondamentalement, c’est-à-dire un rapport social mondial) et que celui-ci porte dans ses flancs ; crise qui résulta du nouveau cycle de valorisation qui s’est développé sur les ruines du précédent conflit mondial. L’ordre capitaliste ayant horreur du vide, dont la faillite d’un des deux blocs impérialistes fut une expression, tout commence à « rentrer dans l’ordre » avec la re-bipolarisation du monde, tant nécessaire à la compétition entre les différentes fractions du capital mais également à la mise en place des conditions objectives d’une nouvelle guerre. Nous pouvons donc affirmer que l’histoire s’accélère ! […]
Nous nous devons également de rappeler ici l’essence fondamentale de la guerre. Depuis que le mode de production capitaliste existe et donc domine la planète entière, toutes les guerres sont bourgeoises, capitalistes, toutes les guerres, au-delà des idéologies pour lesquelles le capital dit les faire, sont des guerres contre le prolétariat, sont des guerres contre-révolutionnaires.
La cause des guerres bourgeoises est toujours, au-delà des rivalités inter-impérialistes, la dévalorisation, la chute du taux de profit entraînant une surproduction généralisée de marchandises et donc aussi une surpopulation. Pour la bourgeoisie, hier comme aujourd’hui, le but principal (même si selon sa propre conscience il s’agit surtout de détruire l’ennemi) est toujours le même : la destruction massive d’êtres humains que le capitalisme a transformés en marchandises aujourd’hui excédentaires.
La bourgeoisie doit, pour faire ses guerres, liquider le prolétariat en tant que classe c’est-à-dire en tant que force agissante, pour le dissoudre dans le peuple, pour alors embrigader ces citoyens parmi d’autres citoyens derrière n’importe quel drapeau cachant la face hideuse du capitalisme : le drapeau de l’antifascisme ou du fascisme, au nom du progrès ou de la réaction, au nom de la « démocratie » ou d’un « ordre nouveau », de la conquête d’un espace vital ou de la libération nationale, de la défense de l’occident civilisé ou de l’anticolonialisme,… C’est toujours au nom de la paix, de la liberté, de la démocratie, du socialisme,… que s’amoncellent les cadavres, que civils comme militaires sont mutilés à coups de bombes à fragmentation, qu’ils sont concentrés dans des camps pour crever.

Action communiste contre la guerre et la paix capitalistes
Qu’importe finalement l’issue de la crise actuelle […] car que cela se transforme en guerre locale, en guerre régionale ou encore en guerre généralisée, ou bien que cela n’en reste qu’à la guerre permanente que le capitalisme impose quotidiennement à l’ensemble de l’humanité, notre réponse est toujours, et invariablement, la même depuis des siècles. L’internationalisme est la réponse prolétarienne aux attaques bourgeoises et signifie rompre la paix sociale, la paix du capital, développer nos luttes là où l’on se trouve, contre nos exploiteurs directs partout dans le monde. C’est en répondant coup pour coup aux dégradations de nos conditions de vie que nous préparons notre solution à la crise bourgeoise : la révolution sociale mondiale. C’est l’unique moyen de lutter contre la solution bourgeoise qu’est la guerre généralisée.
Et nous tenons ici à critiquer les positions pacifistes et liquidatrices de certaines expressions militantes se revendiquant formellement de la lutte anticapitaliste et qui […] avancent l’argument éculé, mille fois utilisé par la social-démocratie, mille fois dénoncé par les révolutionnaires, selon lequel « la guerre capitaliste est un terrain particulièrement hostile à l’émergence du prolétariat comme classe pour soi ». Bien sûr, nous ne nous réjouissons pas des préparatifs d’une nouvelle orgie guerrière, mais face à cette nécessité capitaliste inéluctable, voire inévitable, nous refusons de sombrer dans de puériles pleurnicheries. Historiquement, les sociaux-démocrates ont toujours adoré et prôné le « progrès linéaire » du mouvement social, sans accrocs, sans ruptures, qui nous mènerait pacifiquement au « grand soir » du nouvel Eden prolétaire. Mais la réalité de l’enfer capitaliste nous montre d’autres voies et nous appelons les prolétaires en lutte non pas à capituler et à s’enferrer dans des illusions paralysantes mais au contraire à rebondir sur les nouvelles conditions matérielles produites par la guerre et ainsi à assumer leurs responsabilités devant l’histoire et l’humanité…
Car le déclenchement de la guerre impérialiste même généralisée ne signifie pas nécessairement l’écrasement définitif du prolétariat. En effet, historiquement, si la guerre signifie dans un premier temps un relatif écrasement, elle peut ensuite dialectiquement déterminer une reprise des luttes d’autant plus forte qu’elle a mis à nu les contradictions et la brutalité immanente au système capitaliste. Pour les prolétaires révolutionnaires, la lutte contre la guerre signifie directement le défaitisme révolutionnaire.
Le défaitisme révolutionnaire tourne le dos à tout pacifisme même déguisé et radicalisé, c’est-à-dire qui ne donne aucune consigne concrète et précise en vue d’encourager et d’agir violemment pour la défaite de « son » camp, « sa » nation, « son » armée, « sa » bourgeoisie.
[…] Tant que la dénonciation de la guerre capitaliste ne se limite qu’à revendiquer un retour à la période antérieure, à la paix (qui ne peut être que la paix sociale tant nécessaire au processus d’extraction de plus-value provenant de la mise au travail forcé des esclaves modernes que nous sommes), tant que les liens dialectiques entre la guerre et la paix capitalistes ne sont pas dévoilés dans toute leur évidence, tous ces manifestants pacifistes ne sont condamnés qu’à assister passivement à l’imposition d’une paix sociale encore plus terroriste, la paix des cimetières…
Au contraire de toutes ces pleurnicheries pacifistes, le défaitisme révolutionnaire signifie avant tout qu’aucun sacrifice n’est accepté au nom de l’intérêt de la nation, ce qui signifie l’organisation de luttes sociales par rapport aux conditions de vie et de travail de la classe ouvrière, même lorsqu’une guerre est déclenchée et que « notre » bourgeoisie appelle à l’unité nationale. A un niveau plus avancé, cela signifie l’organisation du sabotage de l’économie, de la production, des convois d’armements,… de tout le consensus nationaliste, parallèlement à l’organisation de l’évidente propagande défaitiste qui doit ébranler toute la société jusqu’aux fondements mêmes des certitudes ancrées chez les « idiots utiles » qui marchent encore au pas…
# Le défaitisme révolutionnaire signifie l’organisation de toute action visant à saper le moral des troupes ainsi que d’empêcher l’envoi de prolétaires à la boucherie…
# Le défaitisme révolutionnaire signifie l’organisation de la désertion la plus massive possible et la cessation des hostilités entre les prolétaires sous l’uniforme des deux côtés du front de guerre, ce qui signifie la transformation de la guerre entre prolétaires en une guerre entre les classes, c’est-à-dire la guerre de classe, la guerre dans les centres des superpuissances guerrières…
# Le défaitisme révolutionnaire signifie l’encouragement à la fraternisation, à la mutinerie, au retournement des fusils contre les organisateurs de la guerre carnassière, c’est-à-dire « notre » bourgeoisie et ses laquais…
# Le défaitisme révolutionnaire signifie l’action la plus décidée et la plus offensive en vue de transformer la guerre impérialiste en guerre révolutionnaire pour l’abolition de cette société de classe, de misère et de guerre, pour le communisme.
Evidemment, le défaitisme révolutionnaire ne peut se concevoir dans un seul camp. Les directives de sabotage sont fonction de la nature internationale du prolétariat et s’adressent donc à notre classe dans le monde entier. Le défaitisme révolutionnaire signifie la lutte à outrance contre « sa » bourgeoisie dans tous les camps, dans tous les pays.
Si le prolétariat désire se débarrasser définitivement de la boucherie qui l’extermine, la seule et unique solution est la généralisation en actes du défaitisme révolutionnaire. Le développement de la lutte a ses exigences : elle doit briser la cohésion sociale non seulement des unités de l’armée, mais aussi de l’ensemble de la société. Pour cela, il faut en finir une bonne fois pour toute avec le nationalisme en réaffirmant haut et fort que les prolétaires n’ont aucun intérêt dans cette guerre, ni dans ce monde agonisant. Nous ne revendiquons qu’une seule guerre, celle qui nous oppose à nos exploiteurs, qu’ils soient ukrainiens, russes, américains, allemands, anglais, français, tchèques ou autres.

# Plus que jamais, nous réaffirmons notre soutien aux prolétaires en lutte partout dans le monde…
# Nous appelons les prolétaires à dénoncer toute intervention militaire et à s’y opposer fermement par l’action directe, par le sabotage, par la grève généralisée et insurrectionnelle…
# D’où que proviennent les avions et les navires de guerre, les missiles et les gaz toxiques, il y a toujours derrière des hommes et des femmes – des esclaves salariés – qui doivent les acheminer vers leur destination, remplir les réservoirs de kérosène… Seuls les prolétaires en lutte peuvent et doivent empêcher la machine guerrière de tuer, la machine de production de fonctionner…
# Développons de nouveaux foyers de lutte, renforçons ceux déjà existant, appliquons la grève aux armées, aux usines, aux mines, aux bureaux, aux écoles… partout où nous subissons l’exploitation de ce monde de mort et de misère…
# Contre notre propre bourgeoisie exploiteuse, contre notre propre État belliciste, aux USA, en Russie, en Ukraine, en France, en Grande Bretagne, dans les autres pays de l’Union Européenne, en Chine, en Iran, en Turquie, en Syrie, etc., organisons et développons le défaitisme révolutionnaire.
# Etre patriote, c’est être assassin ! A bas tous les Etats !
# Solidarité de classe avec les défaitistes révolutionnaires de tous les camps !
# Retournons nos armes contre « nos » généraux, contre « notre propre » bourgeoisie !
# Reprenons le drapeau de la révolution communiste mondiale !

Guerre de Classe # avril 2018