Sous l’oeil, pales, de l’hélico, les travaux de débroussaillage, sur la désormais, route sans chicanes, continuent d’élaguer, déroncer, aplanir toute cette nature rebelle qui n’avait fait que croître et embellir en cinq années d’occupation. La redevenue route départementale 281 balafre le territoire, de la lutte, tel un coup de bistouri après une opération de chirurgie esthétique, ratée.

L’unité des habitants s’en trouve questionnée comme si le plus important était de choisir son camp, être normalisable, normalisé, hors normes, voire autre. Tout va trop vite malgré les nombreux espaces d’expression : AG des habitants, du mouvement, des usages, les commissions diverses, le Zadnew, la radio, les chantiers collectifs etc. Même le grand rassemblement, dit de la victoire, du 10 février « Enracinons l’avenir » semble un horizon lointain dont les préparatifs et la logistique, gigantesques, absorbent les journées sous des trombes d’eau, et que les nuits réunionnent à tout va. Je suis totalement admirative et estomaquée par la qualité et la quantité de travail fournie pour l’élaboration des propositions : comment imaginer et construire un avenir en commun sur la ZAD.

Qu’illes soient habitants, paysans, citoyens, pour ou contre, c’est toute une intelligence collective qui se déploie durant des heures et des heures. Débattre , argumenter, rassurer, écouter, reprendre en vu d’un accord, d’autres modalités, de suspensions de séance, de nouvelles dates etc.

Justement, la date fatidique du 31 mars est dans toutes les têtes et le mot expulsion plane au-dessus des assemblées. Le gouvernement joue serré et ses menaces soulèvent des suspicions qui minent l’entente et la confiance. D’un même projet, vivre sur la ZAD, émerge de possibles « statuts administratifs  » pour les uns, inimaginables pour d’autres. Pour le mouvement, paysans, organisations et citoyens c’est avant tout le moment de reprendre la main pour une gestion concertée de leur territoire. Ce bocage arraché, de haute lutte, 50 ans, au béton et au monde capitaliste toujours plus vorace et fécond en projets inutiles, pour y expérimenter un avenir vivant. Cela ne se fera pas sans les actuels habitants, du bocage, qui souhaitent s’enraciner, quel que soit leur projet de vie. C’est un défi incommensurable que l’ensemble des forces réactionnaires veulent étrangler dans l’oeuf avec la menace : état de droit-expulsion -normalisation. Plus que jamais la ZAD est une zone à défendre. No pasaran !

Joe

PS : Photos – le fameux phare de la Rolandière construite par le mouvement en lieu et place de la tour de contrôle. Un rêve de gosses ! Disent certains.

Une belle utopie, en acte !