Le social au cœur

Contrairement à la mobilisation de 2009 qui se situait d’abord sur le terrain démocratique, ce sont bien les questions sociales qui sont au centre de la vague actuelle, et Téhéran n’est pas l’épicentre de la contestation.
Autre différence majeure, la mobilisation actuelle se situe en extériorité totale aux « débats » qui opposent les différentes factions du pouvoir. C’est bien l’ensemble du régime qui est dans la ligne de mire de la contestation.

Ces manifestations expriment d’abord un ras-le-bol profond face à la dégradation continue des conditions de vie, la vie chère, la corruption du régime et de ses dignitaires qui se sont enrichis considérablement.
Face à la machine répressive de la mollahrchie et aux Gardiens de la révolution, la mobilisation s’est radicalisée et touche désormais les institutions et les symboles de la République islamique.

Les slogans hostiles au Guide et au Président de la république sont repris en masse et cela dans l’ensemble des villes où la population se mobilise.
Les manifestantEs n’hésitent pas à s’en prendre aux portraits du Président de la république Rohani, du Guide Khamenei ou de Khomeiny, aux bâtiments publics et aux véhicules des forces de sécurité dès que cela est possible.

Répression massive

Le pouvoir a vite compris que cette mobilisation était particulièrement dangereuse. Certes, par sa politique de redistribution clientéliste de la rente pétrolière, la mollahrchie a toujours « acheté » le soutien de certains secteurs de la population.
Mais l’inflation galopante, les pénuries, le chômage de masse, la misère et l’absence d’espoir frappent les classes moyennes et populaires, y compris une partie de la base sociale du régime théocratique.
La « géographie » de la mobilisation indique d’ailleurs un détachement de ces secteurs des classes populaires, ce qui explique les manifestations dans les petites villes de province notamment.

Le pouvoir tente d’éteindre l’incendie en réprimant massivement les manifestations et en bridant les canaux de communication, notamment les réseaux sociaux qui jouent un rôle important dans la propagation de la contestation.
Les forces de sécurité et notamment les Gardiens de la révolution multiplient les provocations et infiltrent les manifestants afin de faciliter la répression. Déjà plusieurs dizaines de morts sont à déplorer et les arrestations se multiplient à Téhéran et en province.

Tout en accusant les « ennemis extérieurs du pays » d’être responsables de la situation et en disant que les manifestants sont manipulés, le pouvoir feint d’entendre la légitimité du débat posé par la rue et promet des « espaces de dialogue » pour que s’expriment les revendications populaires. Rohani a annoncé que « la critique était un droit de la population ». Cela constitue clairement un signe de faiblesse de la part du pouvoir, et personne en Iran ne peut croire à de telles promesses.

Solidarité !

La jeunesse iranienne, les femmes, les travailleurEs sont soumis depuis 1979 à un régime théocratique réactionnaire qui réprime, torture et élimine physiquement et systématiquement ses opposantEs.

La contestation populaire actuelle entre en résonance avec le combat acharné des militantEs syndicaux iraniens qui luttent pour le droit de s’organiser et pour les droits élémentaires des travailleurEs.
Soixante-sept organisations syndicales et réseaux syndicaux internationaux se mobilisent dans le cadre d’une campagne pour la libération de Reza Shahabi, dirigeant du Syndicat Vahed (Syndicat des travailleurs de la compagnie de bus de Téhéran et de sa banlieue), dont la vie est en danger.

Il est primordial que la gauche radicale et internationaliste s’engage dans le soutien à la vague de contestation sociale actuelle en Iran. Il faut amplifier la solidarité pour faire reculer la mollarchie et soutenir ceux qui luttent en Iran pour la satisfaction des revendications sociales et démocratiques et pour le renversement de la République Islamique.

Babak Kia

https://www.europe-solidaire.org/spip.php?article42815