Les trois piliers de l’offensive d’aujourd’hui sont un libéralisme forcené qui liquide tous les droits sociaux dont nous tous avons besoin pour vivre dans la dignité, un racisme forcené qui divise nos forces, désigne des coupables potentiels pour les attaques terroristes en Europe, sur le mode de la fable le loup et l’agneau « si ce n’est toi c’est donc ton frère » sans jamais prendre en compte qu’à l’échelle mondiale, ce sont justement les musulmans et les états où ils vivent qui sont les victimes principales de ce terrorisme. Et un sionisme forcené, sionisme d’État lui aussi, qui permet au plus haut niveau de nos gouvernements d’adopter une vision du monde profondément inégalitaire et injuste, ultra libérale et raciste justement, en désignant de plus tous les opposants à Israël comme des antisémites. Donc en se servant des juifs utilisés comme fer de lance de cette offensive. Et il est vraisemblable qu’au moment utile ils seront présentés comme les principaux responsables et serviront de bouc émissaire.

L’intrication de ces trois piliers se voit par exemple chez Trump et son entourage : néocons ultra libéral, on se souvient des attaques haineuses contre l’Obama Care et toute forme de sécurité sociale, raciste islamophobe négrophobe antisémite, et sioniste.

Renforcer l’axe de la résistance, c’est reconnaître que tous et chacun nous sommes à la fois contre le libéralisme sauvage qui détruit nos sociétés, contre le racisme et contre le sionisme qui continue de détruire la Palestine, et d’installer un régime d’Apartheid entre la mer et le Jourdain. Et c’est renforcer nos alliances quelques soient par ailleurs les débats internes et bienveillants que nous pouvons conduire entre nous. Je prendrai l’exemple ici de la véritable chasse aux sorcières qui est menée contre Houria Boutelja porte-parole du PIR et contre le PIR. Il faut défendre les intellectuels et les médias attaqués parce qu’ils perçoivent et critiquent l’islamophobie et l’ultra libéralisme, il faut défendre le CCIF quand ses dirigeants sont définis comme des soutiens du terrorisme, et il faut défendre le PIR et Houria Bouteldja en particulier, quand la diabolisation va jusqu’à la désigner comme antisémite, homophobe et raciste, anti féministe, par une lecture perverse, quand il y a lecture d’ailleurs, et vicieuse de ses textes.

Nos alliances ne signifient pas que nous sommes d’accord avec tout ce que nous disons les uns et les autres, dans toute alliance, et même dans le mariage, les différences comptent autant que les ressemblances. Nos alliances, nos liens signifient que nous sommes solidaires contre chaque parcelle attaquée de notre camp anti raciste antisioniste et anti libéral. Nous avons nous aussi trois piliers en commun : la fin du néoconservatisme, la lutte pour l’égalité et contre le racisme, la lutte contre le régime sioniste d’Israël aussi parce qu’il ce qu’il veut nous imposer comme modèle de société et de gouvernance, la politique de la force et du fait accompli.

Nous devons nous unir dans cette lutte, parce tous, nous sommes assignés, et manipulés par cette offensive, les arabes musulmans, danger intérieur terroriste, les juifs blanchis et soutien inconditionnel du sionisme, et les autres, qui croient pouvoir se payer le luxe d’échapper sans efforts à l’assignation de dominant, protecteur de l’héritage colonial et détenteur de privilège. Juifs musulmans ou issus du groupe dominant nous voulons tous sortir de ces assignations seul moyen d’établir l’égalité. Nous voulons tous nous décoloniser, comme on dit dans le camp anticolonialiste israélien, décoloniser c’est aussi décoloniser le colon. Le PIR est sans doute le mouvement qui a rendu visible la condition raciale et alimenté la réflexion décoloniale en France c’est sans doute la raison des attaques contre lui. Cet aspect-là doit être tu à tout prix. Mais je dirai qu’il est trop tard, le bien est fait, et nombre d’entre nous éveillés, réveillés à ces questions, continuent par eux-mêmes, à leur façon cette réflexion et ce chemin qui croise celui du racisme, de la colonialité du monde, et du libéralisme destructeur, et ils débattent avec le PIR dans le respect et l’amitié.

Renforcer l’axe de la résistance que nous constituons c’est conjuguer ensemble nos points communs : faire apparaître les revendications décoloniales incluant la lutte contre le régime sioniste et BDS dans les manifestations contre la casse sociale. De même rendre visibles nos revendications sociales dans les événements antiracistes. Refuser de reproduire entre nous les hiérarchies et dominations qui nous sont imposées par l’offensive.

Je voudrais préciser ce que j’entends par le pilier sioniste de l’offensive, et je citerai pour cela l’extrait d’un texte publié par Pascal Boniface récemment sur son blog :

« Lorsque M. Gozlan évoque le lien qui m’unirait à T. Ramadan, à savoir la mise en cause obsessionnelle d’Israël bien au-delà des choix politiques de l’État hébreu, elle trahit sa propre défense obsessionnelle d’Israël. Car c’est bien là le fond du problème, mal assumé, qui ne peut que la mettre mal à l’aise par rapport à un juif universaliste comme Edgar Morin. En effet, ceux qui sont jetés en pâture à l’opinion publique sont en réalité davantage visés pour avoir dénoncé l’occupation israélienne que d’avoir débattu avec T. Ramadan… »

Pascal Boniface vise très juste en effet, ce qui se cache mais se conjugue étroitement avec l’islamophobie c’est l’indéfectible soutien à Israël. Un philosionisme (qui a très peu à voir avec du p?ilosémitisme et sans doute beaucoup plus avec de l’antisémitisme.

Si l’on considère l’histoire récente, c’est en même temps que le début de la deuxième Intifada que Bush rapatrie les juifs dans un « occident judéo-chrétien » défini comme l’axe du bien en lutte contre un axe du mal constitué par l’Islam. Le rôle d’Israël et donc son soutien est intrinsèquement lié à l’offensive sur l’Islam. La casse sociale organisée en Europe et en France tout particulièrement, se sert du racisme islamophobe comme élément de diversion et de division, articulé au soutien politique d’Israël dans un Moyen Orient perçu comme un nouvelle zone à coloniser, dominer, contrôler par tous les moyens.

Avec la reconnaissance étatsunienne de l’annexion de Jérusalem, nous sommes dans une situation qui ressemble au moment de la déclaration Balfour, dit un Palestinien interviewé dans la rue à Jérusalem dans Libération. Il n’a pas tort sur deux plans, celui de la liquidation unilatérale encore une fois du droit du peuple palestinien. Mais aussi celui de l’antisémitisme sous-jacent à cette déclaration.

La position française exprimée par Macron et Valls avant lui qui transforme les juifs, tous les juifs en sionistes nous met dehors à pas de velours. Comme en 1917 au moment de la déclaration Balfour, on constate que les principaux artisans britanniques et soutiens du foyer juif en Palestine, détestaient les juifs, étaient antisémites et voyaient une Europe chrétienne blanche vidée de ces éléments étrangers. Ils l’ont écrit, et mis en œuvre dans leur politique de refus de l’immigration juive russe et polonaise en Grande Bretagne. L’histoire leur donna sinistrement raison avec la 2e guerre mondiale et la catastrophe du génocide qui vide l’Europe de ses juifs.

Non seulement l’UE, et la France, n’ont aucune intention de ne serait-ce qu’imposer une limite à Israël dans sa conquête de la Palestine, mais il y a une décision claire de nos gouvernements d’empêcher tout ce qui pourrait gêner Israël, or la seule chose qui le gêne depuis le tournant du millénaire c’est la Campagne de Boycott le Désinvestissement et les Sanctions (BDS). D’où la volonté de plus en plus générale de le criminaliser et si possible l’interdire. La formule proposée par Israël : antisionisme = antisémitisme est introduite en France d’abord par le rapport Rufin commandé par Sarkozy en 2004, puis la circulaire Alliot Marie, 2010 puis par Valls et Macron si antisionisme = antisémitisme, alors BDS est antisémite et on doit l’interdire. Car BDS lutte clairement contre la nature sioniste du régime israélien depuis sa naissance. Celle qui permet l’expulsion, la destruction, la discrimination entre ses citoyens de nationalité juive ou arabe, qui atteint aujourd’hui et même les dépasse les dimensions de l’Apartheid. Ce que l’on cherche à mettre au pas en même temps, n’en doutons pas, c’est notre propre expression, notre liberté d’opinion et d’action de citoyens libres. Là aussi qu’elles que soient les différences entre nous, si nous sommes d’accord qu’il faut absolument dire stop à Israël dans sa destruction de la Palestine, et qu’il faut défendre notre liberté de citoyen de dire non avec l’outil citoyen et pacifique du BDS, le seul qui soit parvenu à inquiéter ce régime, nous devons absolument lutter ensemble contre l’assimilation scandaleuse de ces deux notions antisémitisme et antisionisme et pour le développement de la Campagne BDS.

Si la confusion antisionisme antisémitisme a d’abord servi contre les musulmans et les arabes, comme carburant de l’islamophobie, le sionisme lui est en train de tuer le judaïsme. Le judaïsme c’est la loi contre la jungle, c’est les dix commandements, c’est la loi du talion si mal interprétée par l’ignorance européenne comme un principe primitif de vengeance, alors que la loi du talion c’est la notion avant-gardiste de la proportionnalité des peines. Le sionisme impose la loi du plus fort, et le régime israélien s’est mis hors la loi toutes catégories du droit international, humanitaire, des traités signés…Il participe de l’imposition d’un racisme généralisé, et de la déréglementation généralise que nous subissons au niveau du droit international, si tout est permis pour Israël alors tout est permis tout court, nous le voyons tous les jours.

Nous ne devons rien céder au racisme antijuif, ne rien céder à l’antisémitisme, et ne rien céder à l’imposture qui consiste à confondre antisionisme et antisémitisme. Car cette imposture est l’un des fondements de l’offensive islamophobe.

Je voudrais rappeler pour conclure les mots d’une autre « Sorcière » palestino-américaine, Linda Sarsour. Cette avocate pour les musulmans américains, la réforme de la justice pénale et les droits civils, ancienne directrice exécutive de l’Arab American Association de NY, co-présidente en janvier dernier de la marche nationale des femmes est diabolisée aux États-Unis pour son soutien au BDS. Invitée à intervenir n dans un colloque organisé par Jewish Voice for Peace le 29 novembre dernier – Colloque très menacé lui aussi d’annulation suite aux pressions de la gauche à l’extrême droite en raison de sa présence- elle a déclaré :

L’intersectionnalité ce n’est pas juste que les blancs et les noirs doivent s’organiser ensemble, ou que les juifs et les musulmans doivent s’organiser ensemble. C’est que nous devons tous nous organiser aux intersections de l’oppression et considérer l’oppression comme connectée.

L’antisémitisme est une branche du grand arbre du racisme a-t-elle ajouté. Vous ne pouvez juste vous intéresser à une seule branche, vous devez vous intéresser à toutes les branches ensemble pour pouvoir appréhender la racine du problème…

Sur l’antisémitisme :

Sans relation à leurs sentiments vis-à-vis d’Israël, juifs comme non juifs doivent s’engager à défaire l’antisémitisme. La menace existentielle réside à la Maison Blanche, et si ce que vous lisez toute la journée dans les média est que Linda Sarsour et le Ministre Louis Farrakhan sont la menace existentielle pour la communauté juive, alors quelque chose de vraiment grave va se produire et nous allons rater la cible , passer à côté de la question.

Sur le moment politique :

… ne parlons pas du mouvement des droits civiques d’il y a 50 ans, parce qu’il y a un mouvement des droits civils qui se produit maintenant Nous vivons sous le fascisme et nous avons besoin de tout le monde sur le pont…

Ce dont elle parle nous concerne, nous ressemble et nous devrions l’écouter.