« Salut à tous et à toutes,

Je suis dans le bloc B, dans la section des nouveaux arrivants de la prison des Vallette à Turin.

Dans cette section il est possible d’aller à la salle de sport deux matins par semaines, au cinéma un matin par semaine et une activité de théâtre ou d’art un après midi par semaine. Il y a aussi un cours d’italien qui a lieu au même moment que la salle de sport ou que l’activité d’art ou théâtre. D’habitude tous veulent aller à ces activités parce qu’elles durent 30 minutes de plus que la promenade.

Nous sommes enfermés 22 heures par jour, les 2 heures restantes sont pour la promenade. Aucune possibilité de faire la « socialité » (être à plusieurs détenus qui le veulent dans une même cellule pendant 2 heures par jour), entre détenus on ne peut se parler qu’à travers les barreaux ou pendant la douche. Presque tous les matelas sont pourris, nous recevons menaces et chantages continus de la part des gardiens et très peu ou pas d’informations de ce qu’est la prison et de nos droits. Pour savoir quelque chose on se passe les infos entre détenus ou il faut attendre que les bourreaux soient de l’humeur juste. C’est carrément une section punitive, contraints d’entendre leurs réponses dégradantes et apathiques !

Avec le hurlement de Rompre l’isolement ! (appel écrit par l’anarchiste Alfredo Cospito prisonniers en section de haute sécurité et qui subit une censure féroce, en italien ici : https://www.autistici.org/cna/2017/05/05/l-anarchico-alfredo-cospito-al-terzo-giorno-di-sciopero-della-fame-grinda-rompere-lisolamento/ ), les grèves de la faim dans les prisons en Palestine et l’appel « Pour un mois de juin dangereux » (https://www.nantes.indymedia.org/other_medias/37748), j’ai décidé de mener une grève de la faim de 24 heures. De samedi 27 Mai à l’heure où les lumières s’éteignent jusqu’à dimanche 28 à la même heure, vers 21h. Je le fais non seulement pour raconter ce qu’est la section des nouveaux arrivants, c’est à dire une réclusion punitive de fait, non seulement pour saluer les rebelles, les révolutionnaires et ceux et celles qui luttent pour la libération totale, tous et toutes les prisonnièr-es qui ne baissent pas la tête et tous ceux et toutes celles qui refusent leurs contrôles judiciaires comme les compagnonnes de Madrid et de Barcelone, Codo a Codo (coude à coude) ; mais aussi pour justement pour donner force et détermination aux compagnons et aux compagnonnes qui ont décidé d’appeler à «pour un mois de juin dangereux ».

Pendant qu’en Italie les chefs d’état du G7 et toutes les merdes comme eux mangeront caviar et langouste, moi et un autre compagnon de galère nous ne mangerons pas. Nous ne retenons pas opportuns prévenir l’administration pénitentiaire de notre choix, parce que nous n’obtiendrons rien d’elle, vu leur politique de punition mise en place contre les nouveaux arrivants. C’est important que cette protestation, même si symbolique, montre que la communication soit précise et que se créent des rapports de complicité, et pour cela je ne serais pas seul, ni dedans ni dehors.

J’ai fait ce choix, même si un peu en retard et sans me coordonner avec d’autres compagnons enfermés dans cette prison des Vallette vu les temps longs de communication via postale, parce que je crois qu’il soit juste de soutenir les choix d’autres compagnons avec lesquels je me trouves très d’accord et pour raconter la merde que l’on doit subir ici ! Après avoir lu l’appel d’Alfredo « rompre l’isolement », pour sa grève de la faim , après avoir appris la grève de la faim des prisonniers palestinien et après l’appel pour le mois de juin j’ai pris cette décision.

D’autres compagnons de section sont d’accord pour protester en particulier contre l’isolement que nous vivons ici en nous niant la socialité ; nous avons décidé de protester le dimanche parce que c’est le jour où les menaces et les chantages sont les plus fréquents : nous devons trouver milles moyens pour gagner quelques minutes en dehors de la cellule, après la douche, après la promenade, on entend les fréquentes demandes à rester quelques secondes discuter avec un autre détenu. Ils pensent nous faire rester tranquilles en nous donnant les gâteaux. Les raisons de la protestation sont nombreux, par exemple dans mon cas et vu que je ne parles quasiment jamais aux gardiens, il a été difficiles de comprendre le fonctionnement de la prison, je perdais donc de temps en temps quelques avantages. D’autres sont dans une situation bien pire que la mienne. En cellule j’ai de tout, d’autres beaucoup moins et sont en cellule lisses.

Ce dimanche nous ne mangerons pas, nous ne prendrons rien de leur bouffe de merde, ni les gâteaux, ni le lapin. Il peuvent se les garder leurs gâteaux de merde. Cette situation place les détenus travailleurs de la section, qui ont la cellule ouverte toute la journée, dans le rôle de gardiens dans une réelle jungle de pouvoirs, jour après jour.

Avec le compagnon de section qui veut mener cette grève de la faim avec moi, nous avons décidé de la communiquer à travers un papier accroché sur l’extérieur de la prote blindée, de manière à ce que les bourreaux et ceux qui le veulent puissent la lire. Quand le chariot passera je fermerais la porte blindée et je le communiquerai au détenu qui sert la nourriture.

Si il y avait plus de conscience politique, on pourrait chercher à conquérir la « socialité » ou d’avoir les cellules ouvertes, comme après le bordel de 2008 lorsque les détenus ont réussi à se faire apporter la nourriture le dimanche (le dimanche pas de nourriture cuisinée, ndt).

A tous ceux qui ont cru et lutté, à tous ceux qui croient et luttent, à tous ceux qui croîront et lutteront, pour la libération totale. Pour l’anarchie, Un salut rebel.

Anonima Toxina, 26 Mai 2017. »