Rue de Strasbourg. Après un début de manifestation plutôt calme, des affrontements éclatent entre les policiers présents en nombre et le cortège anti-FN. Les grenades de gaz lacrymogène fusent, l’air devient rapidement irrespirable pour les personnes qui ne sont pas équipées des protections adéquates.

Une partie des manifestant-es est obligée de se replier vers la préfecture, avant de repartir pour tenter de rejoindre l’avant du cortège. Mais l’avancée du groupe est interrompue par une charge de la BAC, casquée et masquée, qui se rue sans raison sur un manifestant et le plaque violemment au sol. Les personnes autour sont repoussées à coup de matraques et par l’envoi d’une volée de grenades assourdissantes. Forcément, elles reculent. Pour voir apparaître soudain un rayon vert qui les cible.

C’est un pointeur laser, équipé sur un LBD. Le rayon balaye la foule, désignant successivement chaque personne marquée comme une victime potentielle. On était habitué-es à voir les policiers viser à hauteur de visage ; là, l’effet psychologique est décuplé. Le tumblr Le vrai visage du flashball rappelle à propos de ces armes :

« Leur utilisation est officiellement très encadrée, mais tou·tes les manifestant·es savent qu’il n’en est rien. Chacun·e a déjà pu ressentir la terreur quand un flic s’amuse à nous viser en plein visage. Ou l’angoisse de voir un ami perdre un œil comme tant d’autres déjà. Contrairement à la propagande du ministère de l’Intérieur, ces actes de terreur policière ne sont pas isolés. Aujourd’hui, le flashball fait régner la peur de la mutilation partout : sur le parvis des grands stades, dans les rues de nos centre-villes ou entre les immeubles des cités. »

Pour les Nantais-es, ce ne serait pas la première fois que cette innovation visant à renforcer la peur de la mutilation est employée. Pour les manifestant-es venues d’autres villes, c’était une découverte dont on peut craindre qu’elle s’étende, tant les gouvernements successifs répugnent à encadrer l’usage de ces armes — sans parler de les interdire, malgré les préconisations de différentes associations et instances. L’Assemblée Nationale vient d’ailleurs de voter une loi qui assouplit les règles de légitime défense pour les policiers, et durcit les sanctions pour outrage [1].

Malgré cela, les personnes bloquées par la BAC ont finalement pu rejoindre le reste de la manifestation devant le château des ducs de Bretagne, via un passage par les petites rues du centre-ville, où les slogans anti-FN ont été repris par les passant-es. Les prises de parole des syndicats et groupes organisateurs ont fini sous les lacrymos, avant que la manif reprenne, certain-es participant-es étant déterminé-es à rendre coup pour coup aux policiers. Comme le rappelait une banderole : « 1 flic sur 2 vote pour le FN. L’autre le couvre. »

 

Notes

[1] Cf Légitime défense, outrage : que contient la dernière loi sécuritaire du quinquennat ?.