Le site d’information Helsingin uutiset a écrit que la police d’Helsinki « confirme qu’une agression a bien été enregistrée sur la place de la gare le 10 septembre, en lien avec un décès ». Bien qu’un rapport et des témoignages aient été produits dans ce sens dès le lendemain de l’agression, la police n’a pas immédiatement établi de lien de cause à effet entre les deux… Dans le tabloïd Ilta-Sanomat, le père de la victime a dit que son fils « a été projeté contre le sol, sa tête a heurté la chaussée et il a perdu connaissance. Il a été emmené à l’hopital Töölö. Le mardi, avec l’accord du médecin, il est rentré à la maison. Il ne se souvenait de rien, mais ses amis m’ont raconté. Vendredi, il a fait une hémorragie cérébrale : il a tout juste eu le temps d’appeler les secours avant de perdre connaissance. Il est mort à l’hôpital à 10 heures. »

Une violence revendiquée

Toujours selon son père, Jimi Joonas s’est rendu au rassemblement du SVL et a dit aux néonazis ce qu’il pensait des idées d’extrême droite, et c’est la raison pour laquelle il a été frappé. Le SVL prétend lui qu’il se serait « comporté de façon agressive », mais peut de temps après l’agression, ils ont publié sur leur site une photo de la victime au sol avec des taches de sang, légendée « une rapide restauration de la discipline »… Le SVL a en effet largement communiqué dessus en ligne, en particulier sur Twitter. Ainsi, un de ses militants, Eppu Torniainen, twittait le 11 septembre : « Vous avez envie de nous cracher dessus et de nous menacer ? Faites-le ailleurs », ce à quoi un autre membre du SVL a répondu : « le gars semble avoir été surpris ; on n’a pas eu la patience d’écouter ses gamineries ». Le site antisémite Magneettimedia, proche du SVL, tout comme le site raciste pro-Poutine MV-lehti, a publié en une : « Vidéo : une tête brûlée opposée au « racisme » se ridiculise à Helsinki ». Dans l’article, l’agression est elle-même décrite comme un « acte de discipline ». Les tweets du SVL ont été retweetés par plusieurs de ses membres finlandais, suédois et norvégiens, ainsi que par quelques autres militants d’extrême droite. La webradio du SVL, Radio 204 (ce nombre faisant référence à la date de naissance d’Adolf Hitler, le 20 avril), a également relayé l’information.

Le SVL avait déjà auparavant agressé des passants lors de ses rassemblements dans des lieux publics, comme à Myyrmäki, à Vantaa dans la banlieue d’Helsinki, et à Jyväskylä. Le groupe cherche d’ailleurs à apparaitre comme un groupe paramilitaire, de façon à faire venir à lui des jeunes attirés par la violence. Pour preuve, voici une rapide présentation de quelques militants du SVL présents ce jour-là :

• le bonhead néonazi Otto Rutanen, l’un des chefs du SVL, et leader du groupe d’Helsinki et déjà condamné entre autres pour agression ;
• Arttu Pylkkänen, a été reconnu coupable d’agression au gaz lors de la Pride Parade d’Helsinki en 2010.
• Jesse Eppu Torniainen et Tomi Tiihonen, deux des membres les plus violents du SVL, condamnés à plusieurs reprises pour des agressions.

Qu’est-ce que le Mouvement de la Résistance Finlandaise (SVL) ?

Suomen Vastarintaliike (SVL, « Mouvement de la Résistance Finlandaise ») est la section finlandaise du Nordiska Motståndsrörelsen (NMR, mouvement de résistance nordique), mouvement néonazi dirigé jusqu’à récemment par le suédois Klas Lund, un ancien skin d’extrême droite, aujourd’hui remplacé par Emil Hagberg, assisté de Simon Lindberg.
LE SVL est fondé en 2008 lorsque Henrik Holappa[1] a pris contact avec Magnus Söderman, l’un des leaders du Mouvement de Résistance Suédoise (MRS) qui voulait une division en Finlande, comme cela sera fait quelque temps plus tard en Norvège et au Danemark. Ces différentes divisions ont donné naissance au NMR, connu comme le plus violent de tous les groupes fascistes des pays nordiques. À l’origine, le projet est de mettre en place une dictature pan-nordique, une sorte d’Union de Kalmar (qui regroupait au XVe siècle les royaumes danois, suèdois et norvégien) à la sauce Troisième Reich : dans les faits, le NMR est surtout connu pour ses actions terroristes et sa culture machiste, basée sur «l’honneur» et la pureté du sang. Mais depuis un an, le mouvement met de l’eau dans son vin : mettant un peu de côté ses théories raciales, il ouvre désormais ses rangs aux Européens qui ne seraient pas de « sang nordique ».

De même, alors que ses leaders considéraient il y a encore deux ans les parlementaires comme des « traîtres » et appelaient à une révolution national-socialiste, le NMR a monté en Suède son propre parti, et a pris part à Saint-Pétersbourg, en mars 2015, au pro-Poutine “Forum international russe conservateur”, aux côtés des Grecs d’Aube dorée et du NPD allemand, qui eux aussi jouent la carte électoraliste. D’ailleurs, l’un des leaders de MRS, Stefan Jacobsson, est l’actuel secrétaire général de l’Alliance For Peace and Freedom (APF, Alliance pour la Paix et la Liberté), qui regroupe depuis 2015 différents mouvements nationalistes européens. Il succède ainsi à Roberto Fiore, le chef du mouvement néofasciste italien Terzo Polo (Troisième Voie), un copain de Jean-Marie Le Pen dont nous avions déjà parlé ici.

En Finlande, l’une des premières actions des militants du SVL a été l’attaque contre la Pride Parade à Helsinki avec des grenades de gaz lacrymogènes en 2010. Certains des attaquants ont été depuis reconnus coupables d’au moins 88 agressions, la plus jeune de leur victime étant un nourrisson de sept mois.

Le SVL est organisé sur un modèle sectaire qui se veut exigeant et strict : par exemple, les membres doivent payer une amende à la direction suédoise s’ils ne participent pas au collage d’autocollants autour de leurs villes deux fois par semaine ! Malgré cette “discipline” affichée et bien qu’ils prétendent sécuriser leurs données, des bulletins d’adhésion et des forums internes du SVL ont déjà fuité sur internet à plusieurs reprises. Par ailleurs, un membre-clé de l’organisation est un indicateur de police, et a continué à militer au sein de SVL même après avoir balancé d’autres nazis début 2013…

Comme le NMR en Suède, le SVL a coopéré un temps avec un mouvement institutionnel : l’association néofasciste Suomen Sisu, qui a deux députés au parlement finlandais sur la liste du Perussuomalaiset (PS, les Vrais Finlandais). Le plus célèbre membre de Suomen Sisu est Halla-aho Jussi, l’inventeur de la théorie complotiste de l’Eurabia. Actuellement au Parlement européen en tant que membre des Vrais Finlandais, Jussi fait partie du groupe des Conservateurs et Réformistes européens, auquel appartiennent entre autres le Parti conservateur anglais, Droit et Justice (Pologne), le Parti populaire danois ou encore le parti turc AKP d’Erdo?an. Cependant, le Suomen Sisu a depuis pris ses distances avec le SVL, après l’agression de passants lors d’une manifestation du mouvement à Jyväskylä en août 2015, qualifiant le SVL de « stupide et marginal ».

Malgré des indics à sa tête et une hostilité officielle des partis néofascistes de son pays, le SVL n’en reste pas moins le principale représentant d’une structure néonazie nordique qui continue à exister sur la scène internationale.

Traduction et adaptation : la Horde

[le site antifasciste BXL zone antifasciste avait proposé dès ce week-end une première traduction]

Source : Varis

Note:

  1. Henrik Holappa était à l’époque lié à l’organisation américaine terroriste et néonazie The Order. Il a depuis quitté le SVL, regrettant d’avoir participé à un mouvement néonazi !