Distinguer l’activisme pacifiste de la pacification du mouvement.

Pourquoi penser et affirmer que le « pacifisme » affirmé du rassemblement quotidien de « Nuit Debout » sur la Place de la République est justement ce qui pourrait lui nuire, alors même qu’on est un militant pacifiste ?

Parce qu’ une grande partie des gens dits “pacifiques” sur cette place, ne sont pas des « militants pacifistes ». La plupart n’en ont rien à secouer du combat antimilitariste et ne font rien contre les guerres, l’impérialisme et le colonialisme. D’ailleurs, ils disent qu’il faut combattre « DAESH » comme si l’EI était un monstre extraterrestre qui ne prenait pas ses racines dans les affaires industrielles des fabricants d’armes et profiteurs de guerres occidentaux, dont il faut rappeler que la France est un des plus grand fournisseurs. L’ennemi venu d’ailleurs est donc aussi l’ennemi engendré ici. Un militant pacifiste pour la Paix est légitime dans ses actions quand celles-ci visent à détruire des biens matériels qui sont le symbole des violences les plus meurtrières du capitalisme, celles de la guerre. Détruire un fusil, ancienne image icône des résistants à la guerre est un acte pacifiste. Détruire des distributeurs de banques, des vitrines d’agences immobilières ou arracher des pubs JC Décaux qui par ailleurs ne se gêne pas pour accueillir les campagnes de recrutement de l’armée et de la police, ce sont là des actes pacifistes aussi, gestes d’autodéfense et qui vont dans le sens de la Paix sociale et mondiale. Les rassemblements dits « pacifiques », se distinguent du pacifisme, dans la mesure où ils sont la pacification et la voie vers l’anéantissement d’un mouvement qui a face à lui une réalité sociale des plus dures en plein état d’urgence, conséquence directe, des bombardements impérialistes de l’armée française ailleurs.

Tant qu’on est tous assis sur une place à discuter d’un film sur la violence patronale ou policière, à voter des utopies imaginaires (qui parfois se contredisent) ou bien dire des conneries dignes des bisounours (voire même placées à droite) du genre « ce mouvement est apolitique » , alors rien ne changera et le mouvement ne sera jamais à même d’avoir les moyens efficaces contre ce qu’il combat ; la violence du monde du travail et des entreprises, et la violence du monde tout court qui a pris modèle dessus. Grèves, blocages et sabotages sont autant d’éléments tangibles qu’il faut prendre en compte pour lutter. Un mouvement social de confrontation avec le Pouvoir doit être prêt à se battre contre la violence dirigée par l’Etat. Il faut être prêt, bien que pacifistes, à contrer cette violence par le sabotage économique généralisé. Et pour cela il faut être prêt à perturber l’ordre public et à faire face aux forces de l’ordre et à l’entreprise. Cependant, et revenant sur les propos des « nuit deboutistes pacifiques », cette pacification ressemble plutôt à une demande de passivité, à un repassage des plis, un nivellement du cardiogramme de la lutte servant plus à attirer l’attention de la classe moyenne pacifiée, à l’installer dans un confort qui la déresponsabilise, un peu comme dans un fauteuil face à une télévision. Cette même classe ira certainement voter aux prochaines élections, fera toujours la distinction entre les casseurs et les manifestants, et évitera toujours l’affrontement avec le pouvoir et ses violences étatiques, acquiesçant à ses actions par mutisme ou par sa place de spectateur. Ils se disent pacifiques, mais ils trouvent nécessaire ces gens qui se promènent armes à la main et qu’on nomme flics, gendarmes, soldats, etc. et qui sont les piliers de la répression et les boucliers du capitalisme, de l’Etat et ses institutions. « Tout le monde déteste la police », certes, mais certains plus que d’autres.

Il est urgent de penser la violence, notamment quand elle vient d’un seul coté et qu’elle oblige à l’auto-défense. Il va falloir répondre à celle-ci par des actions politiques directes, pacifistes ou pas, et refuser la pacification du mouvement par des rassemblements « pacifiques » où tout le monde se retrouve de façon légale, respectant les autorisations de la Préfecture de Police, n’aboutissant qu’à un vide idéologique incapable de décisions et inefficace face à la violence policière.

Voilà la différence entre pacifistes et pacifiques. Les premiers sont prêts à se battre contre la guerre et l’état de guerre, les seconds, on ne sait pas trop sur quoi compter. C’est un joli mot que « pacifique » et sa famille de dérivés, assez beau pour ne pas se cacher derrière et laisser faire, alors ne soyons pas plus chrétiens que le pape (qui bénit les armées), ni plus pacifiant qu’un pacifiste. Même Casimir aurait été casseur !