Sur le site du journal Ouest-France (http://www.france-ouest.com/ofinfosgene.asp?idDOC=139555&idCLA=3636) un article ecrit par François Chretien parle des actions et de la repression qui eu lieu ce samedi à Cannes. Ça vaut son pesant de cacahuètes. Petit décorticage.

Le titres de l’article tout d’abord

« La manif cannoise vire au western »

. La manif, on sent dès le début que les intermittents et précaires n’ont pas le droit à une manifestation, un défilé, mais une manif. Manif c’est un défilé court sans bruit, ce que ce journaliste semble souhaité… Sous couvert de faire référence au cinéma, il essaye dès le début de nous dire nous insuffler les vision manichéénnes des westerns : cow boys contre indiens, bien conter mal. A la fin les gentils (souvent habillé de bleus) gagnent…. Mais le titre prendra toute sa signification plus loin, j’y reviendrais.

Dès le début de l’article le journaliste donne la parole à un comédien.

« CANNES (de notre envoyé spécial). « Allez, dernier jour à Cannes ! Après, on rentre à Nantes. Demain, d’autres prendront le relais, s’encourage le comédien de théâtre Didier Royant… »

Le comédien s’encourage, comme si il était désespéré ou au mieux dans un mouvement qui s’essouffle. Tiens ça rappelle d’autre grand moment du journalisme… notamment pendant les mouvement des retraites.

« Il nous faudrait des choux-fleurs, pour être entendus, parole de Brestois … » Des choux, ou des grosses légumes du cinoche. Le réalisateur Michael Moore est la seule célébrité à délaisser le Bunker du Festival pour quelques pas sous les banderoles : « Je suis fier, en tant qu’Américain, d’être ici à vos côtés », lance l’auteur de Bowling for Columbine, en anglais ».]

Le journaliste est alors très fier de son jeu de mots, qui ne lui parait sans doute pas dédaigneux pour le réalisateur auquel il fait référence (d’autant que ce dédain est redoublé avec le mot cinoche. Si pour parler se son journal nous disions torchon, le journaliste se rendrait vite compte de la boulette qu’il vient de faire). Jeu de mot d’autant mieux trouvé que l’embonpoint de Mickael Moore n’est un secret pour personne. La philosophie sociale implicite du journaliste ici transparaît clairement : mépris pour les personnes qui luttent, dédain pour ceux qui les soutiennent… La suite nous montrera comment il pense que doit être régie le monde, de manière musclé et ordonné…

« Mais l’incontournable José Bové assure la traduction… »

Le mais en début de phrase redouble le sens. On sent que le journaliste est au dessus des gens, qu’il les observe comme des souris dans un laboratoire. Il observe aussi ce José Bové devenu incontournable (pour qui d’ailleurs ? Pour les medias avides de personnification ? ).

« Le cortège se faufile entre la plage et les grands hôtels, au milieu de la foule de badauds. »

c’est vrai qu’ un cortège de 1500 personnes ne se voit pas et doit se faufiler pour ne pas gener. Et on verra que c’est bien ce qu’en attend un journaliste, que les mouvements sociaux soient des épiphénomènes pour que le quotidien reprenne la place qu’il n’aurait jamais du quitter, que tout rendre dans l’ordre.

« Ces artistes qui gagnent tant, là-bas, au Palais, ils n’ont qu’à leur en donner un peu », commente une spectatrice cannoise. Son mari désapprouve : « C’est quand même la pagaille ! » Et ça ne va pas s’arranger…

Pagaille, denomination que le journaliste approuve et valide par son « Et ça ne va pas s’arranger », signifie clairement que ces intermittents et leur mouvement est un désordre, une pagaille, que le journaliste, érigé en gardien de l’ordre social, en policier, dénonce, et surtout qu’il faut corriger au plus vite. Et les personnes qu’on interroge ne sont pas des acteurs de la vie sociale ou autrement dit des citoyens, mais des spectateurs de qui on attend une attitude passive.

Devant le Bunker, plusieurs centaines d’intermittents refusent d’évacuer la Croisette, malgré les injonctions de la CGT, qui a promis de la jouer « réglo » avec l’administration du Festival. « Du moins jusqu’à dimanche et, espère-t-elle, de nouvelles annonces gouvernementales… » Côté police, ça grésille dans les talkies-walkies. Le sit-in improvisé, sous une photo géante de l’acteur Sean Penn, compromet la monté des marches. Avant 18 h, la police évacue les manifestants, sans problème.

Là François Chretien commence à nous faire frissonné, la pression monte, puisque MALGRE les injonctions de la CGT des personnes organisent un sit-in. Ainsi le journaliste réduit de nouveau les personnes a un rôle passif qu’il ne devrait pas quitter. Après la spectatrice, il s’étonne que les participants à cette manifestation ne soit pas des moutons, et puissent prendre des initiatives de leur plein gré. Heureusement la police veille et évacue sans problème. Le journaliste s’en félicite, comme si un mouvement social doit disparaître, s’invisibiliser, ne pas exister socialement.

« La « sévérité » s’est exprimée un peu plus tard, loin de la haie de cameras, dans un petit cinema de la rue d’Antibes. Cinquante personnes viennent de l’occuper, interrompant les projections très privées du « Marché du film », réservées aux acheteurs internationaux. Plusieurs policiers entrent en civil. L’un d’eux, passablement énervé, frappe un manifestant. Accrochages. Les CRS se ruent à l’intérieur, matraques au poing. Au bout de 5 minutes, les occupants, bras en l’air, sautent en dehors de l’établissement comme à la sortie d’un saloon . L’un d’eux, un militant marseillais d’ACC (Agir Contre le Chômage) a le nez fracturé. Quatre autres sont blessés, légers, cinq, interpellés et placés en garde à vue. »

Le journaliste continue sur son ton méprisant et paternaliste. Pour parler du matraquage en bon et due forme, on parle de sévérité, comme un père qui gronde son enfant parce qu’il a fait un sit-in… Ce n’est plus de la repression policière mais une sévérité, que l’on imagine juste. Les personnes ne sont d’ailleurs plus des intermittents. Tiens ça nous étonne. Il y a eu un glissement en quelques lignes des intermittents vers d’autres personnes (un complot ? Des agitateurs ? Des trotskistes ? Qui sont-ils ? On n’en sera rien.). Mais comme ce sont plus des intermittents on s’imagine que c’est moins grave qu’il se fassent casser la figure, puisqu’ils profitent du mouvement des intermittents. Après le matraquage et plusieurs blessés les manifestants sortent comme d’un saloon. Et oui ça y est on est sur une autre planète, c’est le far west, ou il y a eu une bagarre dans un saloon. Le journaliste arrive a nous faire croire que nous sommes dans un film. Et le sang c’est du ketchup ? Pour finir sur le ton dédaigneux et l’ignorance des sujets que le journaliste traite, il nous parle d’un militant d’ACC (agir contre le chômage). Il faudrait peut être lui dire que ACC n’existe pas, mais AC!, Agir ensemble contre le Chômage. Il aurait pu au moins prendre le temps de se renseigner. Sans doute que Ouest France ne lui demande pas de connaître les sujets qu’il traite ?

« Le sous-préfet de Grasse explique qu’il s’agissait surtout de voler au secours de spectateurs britanniques. En tout cas, l’habituel jeu de provocation entre manifestants et force de l’ordre vient de tourner au western… »

Et on arrive a la conclusion. Les spectateurs étaient pris en otage, et il fallait voler a leur secours. Le journaliste relaie donc des informations fausses, et clairement destiné a mentir aux citoyens, puisque les spectateurs pouvaient sortir. De plus cette manifestation étaient pacifiques comme de multiples témoignages écrits, audio ou télévisuels l’ont relayé, mais François Chretien vérifie-t-il ses sources ? Et de l’habituel ( que l’on nous explique habituel de quoi ?) jeu de provocation entre manifestants et forces de l’ordre, nous attendons toujours qu’on nous le montre.

L’article au final, nous a plutôt fait les louanges de l’ordre public et du ton dédaigneux qu’arrive à user un journaliste sous couvert de nous informer. Nous n’avons rien appris, sinon à devoir accepter les choses comme elles sont et à nous la fermer. C’est sans doute cela le rôle du journalisme dans une démocratie.