Madame ou Monsieur le Maire,

Nous nous adressons à vous en tant que composante française du mouvement mondial Boycott, Désinvestissement, Sanctions contre Israël (BDS) jusqu’à ce que celui-ci respecte les droits fondamentaux du peuple palestinien. La campagne BDS France est composée de 50 associations nationales (liste ci-après) et de plusieurs dizaines de groupes locaux.

Nous écrivons pour nous présenter et pour dénoncer les pressions ignobles et mensongères qu’essaie d’exercer sur vous l’ainsi nommé « Conseil Représentatif des Juifs de France » (CRIF).

Contrairement à ce que prétend le CRIF, qui ne représente qu’une minorité de la population juive française, l’appel au boycott n’est pas illégal : il relève de la liberté d’expression. De nombreux boycotts de divers pays ont été appelés ou décidés sans problème par des mouvements citoyens, par des élus, par des personnalités ou par notre gouvernement lui-même (ainsi récemment contre la Russie).

Le tribunal de la 17ème Chambre correctionnelle de Paris, spécialisée dans les affaires de droit de la presse, diffamation publique, liberté d’expression, a rendu un jugement important le 8 juillet 2011 : « Dès lors que l’appel au boycott des produits israéliens est formulé par un citoyen pour des motifs politiques et qu’il s’inscrit dans le cadre d’un débat politique relatif au conflit israélo-palestinien, débat qui porte sur un sujet d’intérêt général de portée internationale, l’infraction de provocation à la discrimination fondée sur l’appartenance à une nation n’est pas constituée. »

La majorité des tribunaux ont rendu des jugements dans le même sens et ont prononcé la relaxe des militants BDS poursuivis, ou ont refusé d’instruire des plaintes pour appel à BDS.

BDS est un mouvement citoyen, non-violent et antiraciste lancé en 2005 par plus de 170 associations de la société civile palestinienne et qui vise à mettre fin à la politique coloniale et d’apartheid qu’Israël impose au peuple palestinien. Il s’inspire du boycott qui avait contribué à mettre fin à l’apartheid en Afrique du Sud. Contrairement à ce que prétend le CRIF, il n’exerce pas d’ « entrave à l’exercice normal d’une activité économique quelconque » et ne s’adresse qu’à la conscience de chacun.

L’Etat d’Israël, qui viole constamment le droit international, a été condamné par de nombreuses résolutions internationales, mais il bénéficie néanmoins d’une large impunité lui permettant de continuer sa politique de dépossession, de persécutions et de provocations à l’encontre du peuple palestinien.

BDS permet à toutes celles et ceux qui sont indignés par l’occupation et la colonisation de faire entendre leur voix pacifiquement. Il ne vise pas des individus en tant que tels, mais une politique d’Etat et ses responsables.

L’accusation d’antisémitisme est particulièrement odieuse : de nombreux Juifs en France et dans le monde entier (même en Israël) sont engagés dans le mouvement BDS. En revanche le CRIF, dont le discours et les « recommandations » tendent à donner de tous les Juifs l’image d’une population colonisatrice et au-dessus des lois, alimente l’antisémitisme.

Nous vous appelons à ne pas vous laisser intimider par ce « Conseil Représentatif », qui harcèle ses interlocuteurs et fait pression sur les instances les plus hautes de notre pays pour protéger une politique largement condamnée par l’opinion publique internationale.

Les crimes d’Israël et l’oppression du peuple palestinien ont un retentissement international et des répercussions ici même, dans l’opinion publique et dans les conceptions du « vivre ensemble ». C’est pourquoi ils ne peuvent laisser indifférent un-e Maire attaché-e à la justice, à l’antiracisme et à l’égalité des droits.

Nous nous permettons par ailleurs de vous rappeler que conformément à la position constante de l’Europe concernant l’illégalité des annexions effectuées par Israël depuis 1967 et de la colonisation, le gouvernement français a rappelé aux entrepreneurs et aux investisseurs que les activités économiques et financières dans les colonies israéliennes « entraînent des risques juridiques et économiques liés au fait que les colonies israéliennes, selon le droit international, sont construites sur des terres occupées et ne sont pas reconnues comme faisant partie du territoire d’Israël » et des « risques réputationnels ». Cette mise en garde exprimée par différents gouvernements européens montre la limite des relations normales que l’on peut entretenir avec un pays qui mène une telle politique.

Dans l’attente de votre réponse et dans l’espoir de vous rencontrer, veuillez accepter, Madame ou Monsieur le Maire, nos respectueuses salutations.

La Campagne BDS France

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